Sortie il y a bientôt quatre ans, l'Apogee One nous avait enchantés à plus d'un titre. Élégante et compacte, elle s'était imposée comme l'un des meilleurs couteaux suisses audio qu'on puisse adjoindre à un MacBook pour faire du podcast ou de la musique en voyageant léger. Reste qu'en dépit d'indéniables qualités, la bellissima n'était pas sans défaut.
À l’heure où 'nomade’ rime de plus en plus souvent avec iPad, Apogee propose une mise à jour de son produit qui, sans ouvertement se présenter comme une V2, propose en plus de la compatibilité iOS quelques nouveautés qui valent le détour.
You won ? iOne !
La première nouveauté qui saute aux yeux, c’est évidemment le relooking de l’interface qui est moins trapue, plus longue que son aînée désormais rebaptisée One for Mac, avec des dimensions passant à 16 cm x 5,5 cm x 3,2 cm. En dépit de cette croissance, on reste donc dans de l’ultra nomade, l’interface ayant à peu près le gabarit d’une télécommande de télévision. Ce changement s’explique notamment par le fait que de nombreuses fonctionnalités sont apparues pour permettre l’utilisation de la belle avec les iDevices qui ne peuvent l’alimenter correctement par le seul biais de l’USB : on dispose ainsi d’une trappe au dos de l’engin pour accueillir deux piles LR6, et d’un connecteur pour une alimentation secteur (fournie). Apogee faisant bien les choses, en cas d’usage sur secteur, l’Apogee One en profitera pour charger la batterie de votre iPad ou iPhone.
Ces nouveautés du côté de l’alimentation s’accompagnent d’une petite réorganisation de l’interface, le micro ayant été déplacé au sommet de cette dernière, et l’encodeur multifonction occupant une place plus centrale. Comme pour mieux distinguer la présence du micro qui distingue cette One de nombreux concurrents, Apogee souligne d’ailleurs sa présence par un bandeau en alu du plus bel effet. Profitons de l’occasion pour évoquer la qualité de fabrication de l’engin qui s’est encore améliorée, en troquant le plastique d’antan pour du métal bien lourd sur l’essentiel de l’interface, avec du caoutchouc sur le dessous pour assurer une bonne stabilité : ça change de nombre de produits en plastique cheap qu’on voit dans le domaine.
Dernière petite précision : en plus des câbles qui vont bien (USB 2.0 , 30-pin et Lightning) et d’un guide d’utilisation clair et bien fait mais non traduit en français, Apogee fournit désormais la pince qui permet de monter la One sur un pied de micro : une délicate attention vu que cet accessoire était auparavant fourni en option uniquement au prix de 16 € HT. Il ne manque plus que le pied de table…
Il y a pas mal de nouveautés visibles donc, mais l’essentiel est ailleurs, car cette One for iPad & Mac progresse aussi sur pas mal de points fonctionnels.
One x 2
Tandis que la fréquence d’échantillonnage audio de la première version plafonnait à 48 kHz, cette nouvelle version gère à présent une résolution maximale de 24 bits en 96 kHz mais plus intéressant encore, elle permet enfin de gérer 2 entrées, ce qui offre beaucoup plus de possibilités qu’auparavant : on pourra ainsi enregistrer simultanément l’entrée instrument et l’entrée micro, ou l’entrée instrument et le micro interne, les deux micros ensemble. Bref, en dehors de la compatibilité iOS, c’est clairement là la plus grosse évolution de l’interface et celle qui pourrait motiver les possesseurs de la One for Mac à investir dans cette One for iPad & Mac.
Pour accompagner tout cela, Apogee s’est en outre fendu d’une version iOS du logiciel Maestro permettant de gérer au mieux les entrées/sorties de l’interface et les différentes combinaisons possibles. Précisons-le pour les iAddicts, tout cela est compatible avec tous les modèles d’iPad dont le Mini, les iPhone 4 et supérieur et les iPod Touch de 5e génération, pourvu que ces derniers soient sous iOS 5.1.1 au minimum.
Reste à voir la belle à l’usage, en la connectant à un iPad 2 sous iOS 7.0.2 et en lançant Cubasis.
L’iPad à son Apogee
Rien à dire du côté son : grand spécialiste des convertisseurs, Apogee connaît son affaire sur le terrain de l’audionumérique. Avec 62 dB de gain vérifié, les préamplis ne déméritent pas non plus, d’autant qu’ils s’avèrent silencieux.
Histoire d’étayer ces propos, voici les mesures réalisées avec notre rack Audio Precision :
Et pour se pencher sur l’audio en pratique, voici une prise réalisée avec le micro interne à partir d’une guitare acoustique Takamine :
On notera sur cette prise réalisée à la 12ème case de l’instrument que le micro est clairement moins agressif dans l’aigu qu’il ne l’était sur la première version. Et on gagne pas mal de bas, ce qui, là encore, est plutôt une bonne nouvelle.
De son côté, l’appli gratuite Maestro s’avère excellente dans la mesure où elle est très simple à utiliser sur Mac comme sous iOS et permet de régler tous les paramètres de l’interface sans avoir à manipuler cette dernière : sources (avec toutes les combinaisons possibles donc), gain sur les entrées, volumes et pan pour le mixage, le tout accompagné de vumètres pour monitorer confortablement les niveaux.
Bref, en dehors de l’impossibilité de passer cette appli en mode portrait sur l’iPad, je ne vois vraiment pas quoi lui reprocher.
Mentionnons-le tout de même : au cours des mon test, j’ai eu le droit à deux décrochages de l’interface qui ne répondait plus sous Cubasis (tout s’est bien passé sous Garageband). Je ne crois pas utile toutefois de se formaliser de la chose vu que la précédente One s’était avérée très stable et que la chose est très probablement imputable à l’iOS 7 qui équipe mon iPad et qui, en dépit des fonctionnalités intéressantes qu’il amène, est loin d’être exemplaire en termes de bugs, d’optimisation et de stabilité (pour info, le passage de mon iPad 2 sous iOS 7 a grandement affecté l’autonomie de ce dernier : on pèsera donc bien le pour et le contre avant de faire cette mise à jour, en attendant qu’Apple nous propose enfin une version correcte du logiciel).
Mais ce n’est pas Two
Vous l’aurez compris, cette révision de la One, qui nous avait déjà séduits, se révèle plutôt enthousiasmante, qu’on soit ou non sensible à la compatibilité iOS. Toutefois, si sur son segment du tout-en-un réellement nomade, l’interface d’Apogee a de beaux atouts à faire valoir, il n’en demeure pas moins que cette nouvelle formule garde certains des défauts agaçants de sa grande sœur. Toujours incompatible avec les PC ou les tablettes Android au mépris des tendances du marché, la One n’est toujours pas pourvue de connectique MIDI. La chose n’a rien de bien gênant sur Mac puisqu’on dispose d’autres ports USB pour connecter un clavier de contrôle, mais sur iDevice, elle vous obligera à de multiples branchements/débranchements à chaque fois que vous voudrez passer de l’interface au clavier et vice-et-versa, puisque la One mobilise le connecteur principal sans proposer de prise USB de rechange.
Si l’on se réjouit par ailleurs de la possibilité d’enregistrer deux entrées en même temps, on en vient du coup à souhaiter que deux micros soient embarqués pour pouvoir enregistrer en stéréo, voire pour disposer de plusieurs configurations comme sur les enregistreurs portables Zoom par exemple. Sans même aller jusque-là, le choix d’un micro omnidirectionnel demeure discutable : certes, il permettra d’obtenir un son plus naturel qu’un cardioïde, mais il rend l’interface sensible au bruit ambiant. On n’osera ainsi l’utiliser que dans un environnement silencieux, ce qui n’est pas très compatible avec l’exigence nomade et certains usages (interview dans une brasserie à l’heure de pointe par exemple, musique en public), et nous renvoie à la nécessité d’utiliser un micro déporté.
Reste enfin à parler du prix qui est cent euros plus cher que celui de la version précédente : une hausse justifiée si l’on considère les nombreuses avancées de cette nouvelle mouture par rapport à la précédente, mais qui expose du coup la One à plus de concurrents, à commencer par le Zoom H6 qui, sur le papier, semble être un couteau encore plus suisse. En fonction de l’intérêt qu’on portera au micro embarqué et du jugement qu’on portera sur ses limites, on considèrera aussi le cas de la Roland UA-22 Duo-Capture EX, moins jolie, dépourvue de micro, travaillant en 48 kHz et plus encombrante certes, mais plus de deux fois moins chère et disposant du MIDI, de sorties physiques séparées pour les moniteurs et le casque tout en tournant sous iOS, OSX et Windows. Bref, si Apogee a indéniablement réussi son coup, cette One a encore une marge de progrès avant de s’imposer comme l’incontournable interface du musicien en balade.