Fort de ses succès dans le monde des enregistreurs nomades avec la série des « H », le constructeur japonais Zoom a bien l’intention de rééditer ces performances dans le secteur des interfaces audionumériques qui tiennent dans la main.
Après avoir profité de l’avènement du Thunderbolt et de l’USB 3 pour proposer une gamme d’interfaces audionumériques aux formats rack et tiers de rack (les TAC et UAC), Zoom se penche donc sur des modèles à la croisée des chemins, situés entre leurs fameux H1/2/4/5/6 et leurs interfaces plus classiques. Le mot-clé de la U-44 que nous testons aujourd’hui est clairement « mobilité », et l’idée est de proposer une interface dotée de 4 entrées/sorties, avec des préamplis issus des H5 et H6, un port pour leurs micros interchangeables, une compatibilité Mac/Windows/iOS et un mode Stand Alone fonctionnant sur piles pour les préamplis/convertisseurs, tout ça dans le creux de la (grosse) main. De quoi intéresser pas mal de profils différents… Découvrons la bête ensemble.
Si l’interface se veut nomade, elle reste tout de même plus imposante que les enregistreurs de la série H, avec des dimensions de 198,8 mm (L) × 92,3 mm (l) × 42,7 mm (P). Elle tient certes dans la main, mais les plus petits gabarits auront du mal à la saisir fermement et de manière sécurisée. Côté poids c’est en revanche assez léger (310 g), la U-44 étant entièrement en plastique. D’une manière générale, la construction fait un peu plus « cheap » que notre H5, mais nous ne sommes pas dans le même ordre de prix (150 contre 300 €). Côté connectique et réglages, ça foisonne de partout, seul le côté droit étant épargné.
Des E/S 4×4
La face principale présente bon nombre d’entrées et de réglages. On retrouve ainsi les deux entrées au format combo XLR/Jack TRS pour niveaux ligne et micro, avec un switch permettant de basculer en niveau instrument haute impédance sur la première entrée afin d’y brancher votre guitare ou basse. Un autre switch active l’alimentation fantôme 48 V tandis que deux petits potards règleront les gains des entrées. Sur la partie droite, on retrouve étrangement les sorties. En effet, on a plutôt l’habitude de voir ce genre de connectique à l’avant (pour la prise casque) et à l’arrière (pour les sorties enceintes) que sur le dessus. Les câbles allant vers les enceintes seront donc toujours bien visibles en utilisation sédentaire, ce qui n’est pas forcément très esthétique… C’est là qu’on voit définitivement le caractère nomade de l’objet, l’utilisateur n’aura pas forcément des enceintes branchées dessus à demeure, et la U-44 ne passera peut-être pas le plus clair de son temps sur un bureau, mais plutôt dans un sac à dos ?
Juste à côté, on dispose aussi de deux paires de sorties RCA et d’un potard associé à la sortie casque permettant de passer progressivement des sorties 1–2 aux sorties 3–4. Une plutôt bonne idée !
Sur la partie inférieure, on a deux gros potards pour les niveaux de sortie vers les enceintes et le casque, deux boutons mute et un petit potard de mix entre le retour de STAN et le signal direct des entrées. Sur le côté droit, on retrouve toutes les E/S numériques, à savoir des S/PDIF aux formats optique et coaxial, et deux mini-switchs permettant de choisir entre les modes stand-alone et interface audionumérique, et le type d’alimentation (USB ou pile – environ 4 heures de fonctionnement en continu avec alimentation fantôme désactivée). À l’arrière, nous avons une E/S MIDI DIN 5 broches, une prise USB maître pour brancher à l’ordinateur ou à la tablette et un port micro USB pour l’alimentation externe (avec n’importe quel bloc secteur de téléphone, par exemple). Enfin, à l’avant, on observe le fameux connecteur permettant de brancher les micros/connecteurs des H5/H6 peuplant le catalogue de Zoom. On y retrouve deux entrées XLR/TRS, un micro M/S, un micro canon mono et un stéréo et deux XY. De quoi donner à l’interface pas mal de possibilités intéressantes.
Vous l’aurez compris, la U-44 est une interface très complète en regard de son prix et de sa taille. Le seul choix qui nous a semblé un peu étrange est celui de mettre les sorties enceintes au-dessus au lieu de les mettre derrière, à la place des prises MIDI qui auraient pu se retrouver sur le côté droit.
D’un point de vue logiciel, rien à signaler sur Mac vu que l’interface n’a pas de driver, on branche, ça fonctionne, vive le mode Class Compliant ! Sous Windows, il faudra quand même installer un petit bout de driver.
Allez, on branche maintenant !
Nous avons réglé la mémoire tampon au minimum (32 échantillons) afin d’obtenir la meilleure latence : 2,93 ms en entrée et 2,59 ms en sortie (à 96 kHz). Ces résultats sont les mêmes que sur les dernières interfaces audionumériques USB d’entrée de gamme testées ici (tests à venir : Audient iD4, Focusrite Scarlett2 18i20, ainsi que les M-Audio M-Track 2X2 et PreSonus StudioLive AR12 USB déjà testées). Elles doivent toutes utiliser le même contrôleur, rien de bien surprenant à cela.
Afin de tester l’interface, nous avons fait des benchmarks avec notre APx515 d’Audio Precision, et nous allons pouvoir comparer les résultats à ceux obtenus avec les interfaces que nous avons précédemment testées.
Voici les résultats obtenus avec les niveaux ligne :
Le premier résultat est plutôt très bon, avec une déviation en niveau ligne de ±0,040 dB, c’est même le meilleur résultat que nous ayons obtenu dans le secteur des interfaces d’entrée de gamme.
Concernant la distorsion, ça se corse un peu, avec un ratio oscillant entre 0,01 et 0,02 %. Sachant que la M-Track 2X2 testée précédemment et coûtant 100 € n’excède jamais les 0,003 %, on peut dire que la U-44 est plutôt située dans la moyenne basse des interfaces d’entrée de gamme, au même niveau que les iOne de Presonus (0,015 %) et Scarlett Solo de Focusrite (entre 0,01 et 0,05 %). Pas top.
Passons maintenant aux préamplis. Tout d’abord, nous avons mesuré un gain maximum de 43 dB sur les entrées micro, ce qui reste très faible et moins bon que le gain observé sur les autres interfaces d’entrée de gamme que nous avons testées récemment, plutôt situé autour de 60 dB. Avec de faibles sources, il faudra donc pousser les préamplis dans leurs derniers retranchements, ce qui n’augure rien de bon, surtout avec des interfaces d’entrée de gamme.
Avec le gain réglé sur 34 dB, la déviation passe à ±1,552 dB, avec une grosse atténuation dans le bas du spectre. Le bon résultat des entrées ligne est totalement annihilé, et la déviation reste environ dix fois plus importante que celles des M-Track 2X2 (±0,139 dB) et Scarlett Solo (±0,129 dB). C’est vraiment un très mauvais résultat. La distorsion n’évolue heureusement pas, mais demeure assez importante. Avec ce réglage de gain, le rapport signal/bruit est de 83 dB, soit 10 dB de moins que la 2X2, et à peu près autant que les iOne de Presonus et Scarlett Solo de Focusrite. (respectivement 83 et 87 dB). Les préamplis sont donc assez bruyants, ce qui n’est pas étonnant vu leur gain très limité.
Mise à part la déviation au niveau ligne, les résultats sont très décevants et les performances audio sont plombées par des préamplis assez médiocres, offrant peu de gain, beaucoup de souffle et une grosse atténuation dans le bas du spectre.
Conclusion
Comme souvent, Zoom présente un produit original et assez unique sur le marché, rassemblant bon nombre d’E/S analogiques et numériques dans un boitier assez compact et donnant la possibilité de brancher les capsules des enregistreurs H5/H6, le tout pour un prix très attrayant (environ 160 €). Ce dernier peut faire pardonner le côté un peu « cheap » du boitier, mais difficile de passer outre les performances audio assez médiocres des préamplis, largement surpassés par la concurrence en entrée de gamme. Certes, certaines personnes se tourneront quand même vers ce produit qui pourra répondre à des attentes bien précises dans un secteur où les interfaces audio se ressemblent toutes plus ou moins, mais n’aurait-il pas été préférable de doter le produit de préamplis un peu plus au niveau, quitte à rajouter quelques dizaines d’euros sur la facture ?