Dis moi ce que tu lis.
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Nantho Valentine
4125
Rédacteur·trice
Membre depuis 22 ans
Sujet de la discussion Posté le 24/01/2003 à 18:34:57Dis moi ce que tu lis.
Will Zégal
75455
Will Zégal
Membre depuis 22 ans
5261 Posté le 29/09/2016 à 14:01:58
Je viens de terminer "faillir être flingué" de Celine Minard (que je découvrais pour l'occasion, mais dont je vais lire les autres oeuvres)
C'est super dur d'en parler. C'est un western, mais hors normes, sans qu'il semble pourtant rien avoir d'original, à part la façon merveilleuse dont c'est écrit.
On a les histoires de différents personnages, tous plus truculents les uns que les autres, qui s'emmêlent pour se retrouver dans une ville en constitution dans l'ouest américain à l'époque des pionniers.
J'ai du mal à en dire tellement plus. Mais je vous en recommande très, très fortement la lecture. Pour moi, ça a été une véritable découverte d'auteur et d'écriture, comme lorsque j'ai découvert Damasio ou Beauverger.
C'est super dur d'en parler. C'est un western, mais hors normes, sans qu'il semble pourtant rien avoir d'original, à part la façon merveilleuse dont c'est écrit.
On a les histoires de différents personnages, tous plus truculents les uns que les autres, qui s'emmêlent pour se retrouver dans une ville en constitution dans l'ouest américain à l'époque des pionniers.
J'ai du mal à en dire tellement plus. Mais je vous en recommande très, très fortement la lecture. Pour moi, ça a été une véritable découverte d'auteur et d'écriture, comme lorsque j'ai découvert Damasio ou Beauverger.
oryjen
17492
Drogué·e à l’AFéine
Membre depuis 20 ans
5262 Posté le 30/09/2016 à 10:38:54
Viens de finir SUKKWAN ISLAND de David Vann (USA).
La très étrange histoire d'un père à côté de la plaque et d'un fils qui n'en peut plus de ces situations tordues générées par un père faible et foireux.
Sur fond d'Alaska, une sorte de huis-clos en pleine nature hivernale.
Une écriture tendue et ramassée (au moins la traduction), qui échappe plaisamment à l'espèce de "style américain passe-partout" qui est plus ou moins enseigné dans les universités américaines depuis Faulkner et Dos Passos.
Vers la fin un détail que je tairai ici dévoile que cette terrible histoire est sans doute une tentative d'autobiographie romancée, en manière d'oubli, ou de pardon, ce qui soudainement confère à ce court roman un parfum troublant et une réelle portée.
C'est vite lu, je vous le recommande vivement.
La très étrange histoire d'un père à côté de la plaque et d'un fils qui n'en peut plus de ces situations tordues générées par un père faible et foireux.
Sur fond d'Alaska, une sorte de huis-clos en pleine nature hivernale.
Une écriture tendue et ramassée (au moins la traduction), qui échappe plaisamment à l'espèce de "style américain passe-partout" qui est plus ou moins enseigné dans les universités américaines depuis Faulkner et Dos Passos.
Vers la fin un détail que je tairai ici dévoile que cette terrible histoire est sans doute une tentative d'autobiographie romancée, en manière d'oubli, ou de pardon, ce qui soudainement confère à ce court roman un parfum troublant et une réelle portée.
C'est vite lu, je vous le recommande vivement.
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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.
Anonyme
17065
5263 Posté le 07/10/2016 à 11:27:56
Une petite ville dans la France de l'après-guerre."Les plaisirs de Corée" c'est le nom d'une petite bande de collégiens ou de lycéens. Ils ont leurs rites, leurs règles, leur mythologie, leur éthique, leur géographie locale.
Tout ça sera un peu bouleversé avec l'arrivée de Dora, une fille un peu plus âgée qu'eux.
On résume habituellement ce livre par la fascination de jeunes adolescents pour une affiche
coloniale représentant une femme noire aux seins nus portant sur sa tête une corbeille de fruits
du Congo, et par extension, l'exotisme, le lointain, l'aventure loin de cette petite ville de province. Ce n'est pas totalement faux mais pour ma part je trouve qu'un court passage du livre résume bien mieux l'idée:
"Nous étions partisans décidés du mystère, mais d'un mystère docile et sûr. Où il manquait nous en mettions, et là où il était nous ne l'apercevions pas. Il faut longtemps dans l'existence avant de bien situer les mystères. Encore changent-ils toujours de place.[...]Il faut toujours faire bien attention aux démons familiers qu'on lâche dans le monde en les chargeant de missions de confiance. Il faut bien s'assurer de leur docilité."
Je crois que cette citation suffit à donner une petite idée du style de l'auteur. Je ne connais pas les auteurs français actuels mais je crois que plus personne n'écrit ainsi. Il y a quelque chose de faussement léger, de réellement profond. C'est plein de poésie avec des formules dont lui seul a le secret:
"Il lui en resta quelque chose pour la vie, comme à ces gens qui demeurent boiteux d'avoir servi de route à la foudre."
Il y a aussi quelques zeugma:
"Mme Lamourette [...]une dame qui avait de l'âme et les cheveux frisés."
"Sylvio Marina, l'artisan-poète [...]entretenait dans ses vers une atmosphère de panique dans les esprits
et la grammaire."
Au début je me demandais ce que je lisais. Ça n'avait "pas de sens". Puis, petit à petit, la petite musique de Vialatte s'est mise en place, envoûtante. Le littérale et le figuré s'entrelacent et proposent une trame originale dans une langue exotique. Il est vraiment difficile de parler de ce livre puisque tout ce qui passe dans les mots renvoie à ce qui se passe de mots. Par bonheur le livre est assez long et on s'y replonge avec plaisir, jubilant à l'idée de la prochaine fulgurance qui suscitera un satori littéraire, du moins si on est sensible à ce style.
Une dernière citation très belle:
Le destin passe dans nos vies avec des semelles de feutre. Il se cache en ne se masquant pas. Ce qui empêche de l'identifier, ce sont ces gestes si quotidiens, cette absence de mystère et de cérémonie. On ne le reconnaît qu'une fois passé. Il faut donc excuser les enfants romanesques qui s'attendent à le voir venir entouré de foudres et d'éclairs, de ne pas sentir quand il arrive, quand sa main saisit leur poignet sous leur pèlerine de collégien, d'un geste qui laissera des traces."
Je voudrais vous le présenter mieux que ça mais je ne saurai pas le faire. Je ne peux que vous encourager à vous en munir pour quelques soirées d'Automne ou d'Hiver.
[ Dernière édition du message le 07/10/2016 à 11:28:12 ]
Anonyme
17065
5264 Posté le 10/10/2016 à 09:58:08
Raoul Cérusier, parisien, trentenaire, marié, deux enfants, arrive au guichet d'une administration.
Il doit joindre deux photos d'identité à son dossier. La guichetière lui fait remarquer que les photos
ne correspondent pas à son visage. Un peu surpris ils demandent l'arbitrage des autres membres du personnel.
Non, décidément, le monsieur qui est là devant n'est pas celui figurant sur les photos. Il en aura la confirmation
quelques minutes plus tard à la faveur d'un reflet dans un miroir.
Le livre est paru en 1941, on peut donc situer l'histoire dans cette période-là.
Si ça ne m'a pas autant bluffé que "Les tiroirs de l'inconnu" ou "La Jument Verte",
c'est essentiellement à cause du style qui m'a semblé moins marqué.
Par la suite j'ai appris que le récit est d'abord paru sous la forme d'un feuilleton, ceci expliquant
peut-être cela. Mais l'auteur ne se moque pas du lecteur et j'ai pris un grand plaisir à lire ce qui se présente comme une comédie mais qui va en fait bien plus loin que ça, posant des questions sur l'influence de l'apparence sur la perception, l'objectivité, l'altérité, que ce soit dans notre for intérieur mais aussi dans les rapports aux autres et tout particulièrement le couple.
Spoiler - Cliquer ici pour lire la suite
Raoul Cérusier a un physique banal, sans aucun charme. Moralement il est plutôt conservateur et catholique, avec une haute idée de la morale. Or son nouveau visage est bien plus séduisant et attire le regard des femmes. Sous la fausse identité de Roland Colbert il va entre autre décider d'habiter l'immeuble dans lequel il réside déjà avec toute sa famille, et essayer de séduire sa femme, elle aussi dotée d'une haute moralité et de valeurs traditionnelles.
Une petite citation pour finir:
Je retrouvais une idée qui m’avait hanté lorsque j’étais enfant : le monde feignait d’exister et, si je pouvais me retourner assez vite, je ne retrouverais derrière moi que le néant.
[ Dernière édition du message le 10/10/2016 à 09:59:27 ]
sqoqo
7050
Je poste, donc je suis
Membre depuis 17 ans
5265 Posté le 10/10/2016 à 10:44:46
Merci pour ces impressions sur Vialatte.
Je l'avais lu il y a longtemps et j'avais aimé aussi.
Me laissant une impression de fine douceur mélancolique..un peu comme ( dans un autre style ) André Dhôtel
Je l'avais lu il y a longtemps et j'avais aimé aussi.
Me laissant une impression de fine douceur mélancolique..un peu comme ( dans un autre style ) André Dhôtel
Will Zégal
75455
Will Zégal
Membre depuis 22 ans
5266 Posté le 10/10/2016 à 11:30:32
Citation :
Il y a aussi quelques zeugma
Anonyme
65640
5267 Posté le 10/10/2016 à 11:39:43
Kumo, t'as déjà lu Uranus ?
Perso j'avais absolument pas aimé ses autres bouquins, mais celui là est quand même foutrement lol, en plus d'être un superbe et intéressant reportage sur l'immédiat après WW II.
Perso j'avais absolument pas aimé ses autres bouquins, mais celui là est quand même foutrement lol, en plus d'être un superbe et intéressant reportage sur l'immédiat après WW II.
Anonyme
17065
5268 Posté le 10/10/2016 à 11:40:52
Citation :
Kumo, t'as déjà lu Uranus ?
Non mais il est dans ma pile.
Anonyme
65640
5269 Posté le 10/10/2016 à 11:48:30
Profite en aussi pour mater l'adaptation du livre en film, ultra fidèle au texte original, et doté d'un casting hors normes (Marielle, Noiret, Depardieu, Luchini, Galabru Prévost, Blanc et plein d'autres)
Will Zégal
75455
Will Zégal
Membre depuis 22 ans
5270 Posté le 11/10/2016 à 14:23:54
C'est le moment de lire ou relire "l'abolition" de Robert Badinter. Passionnant et émouvant.
http://www.jesuites.com/cyberboutik/etudes/e3936/e3936rh6.jpg
http://www.jesuites.com/cyberboutik/etudes/e3936/e3936rh6.jpg
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