Le pub de la Corona...

(...) Alain Forest, militant à la LDH, fin connaisseur de la politique locale, confirme : « Raoult, c’est un symbole assez pratique de Paris contre Marseille. Ici, une bonne partie du personnel politique, de droite comme de gauche, le suit ! Sans compter que les médias, La Provence en premier lieu, en ont fait des tonnes sur le sujet. Au final, plus personne ne croit en rien, à part en celui qui leur dit que demain tout ira bien. »

De ce point de vue, Marseille n’a pas grand-chose de particulier, pour Slim Hadiji, médecin généraliste dans les quartiers nord. « L’appréhension de l’épidémie va de l’hystérie au déni. Une femme qui demande à son fils de se doucher dès qu’il met un pied dehors, un autre qui vient se faire tester tous les deux jours au cas où, un troisième qui n’y croit pas, abreuvé aux vidéos sur les réseaux sociaux. »
Le dimanche suivant les dernières annonces gouvernementales, son ami Yazid Attalah, président de l’association Santé et environnement pour tous, menait dans un garage du marché aux puces du 15e arrondissement une action de prévention auprès d’une douzaine de femmes précarisées, souvent d’origine étrangère, vivant dans une grande promiscuité. « Ces personnes veulent bien faire, et deviendront nos meilleurs VRP, mais on doit faire passer simplement les messages : qu’est-ce que ce virus, que veut dire distanciation sociale, à quoi cela sert de se laver les mains », énumère le militant.

« L’urgence ici, c’est la prévention, le dépistage, l’éviction des personnes contaminées. Les gens s’en foutent des restos, il n’y en a pas », poursuit Yazid Attalah, sur le parking de la maison régionale de santé de Malpassé. D’un geste, il balaye le panorama des quartiers nord, 13 et 14e arrondissements, les plus peuplés de Marseille. Dans chaque tour, des centaines d’habitants. À gauche, deux grands collèges se font face. Plus bas, le lycée Diderot aux allures d’université. « Le moindre club de foot, tu as 500 licenciés. » Yazid Attalah, échographiste, a grandi dans le coin.

Avec Slim Hadiji, fondateur de la maison de santé de Malpassé, il a participé très activement pendant le confinement au collectif NordCovid. Un groupe hétéroclite et bénévole, composé de médecins de ville ou hospitaliers, de militants associatifs des quartiers populaires, de salariés de laboratoires ou encore d’étudiants.

Au printemps, NordCovid, appuyé par l’ONG Médecins sans frontières, a monté dans la hâte des tentes de dépistage dans les quartiers populaires de la ville, tout en gérant l’aval et l’amont, la prévention en santé, la distribution alimentaire, ou encore l’isolement des personnes contaminées. « Les quartiers nord prenaient le bus pour aller se faire tester à la Timone, ce n’était pas possible », raconte Annie Levy-Mozziconacci, médecin hospitalo-universitaire à l’hôpital Nord, également membre du collectif. (...)