C’est l’évènement logiciel de cet automne : la sortie de la tant attendue septième version de Kontakt, le roi des samplers… Hallelujah ? Allons voir ça !
Bien plus qu’un sampler virtuel, Kontakt est une plateforme. Et même LA plateforme la plus riche en matière d’instruments virtuels, au point que l’on peut parler d’un standard comme à l’époque où Akai régnait en maitre sur le monde du sampling avec sa série S. Il est de fait le sésame incontournable pour profiter des réalisations les plus abouties d’éditeurs majeurs : Spitfire, Output, Audiobro, Cinesamples, Heavyocity, Soundiron, 8dio, Audio Modeling, Big Fish Audio, Cinematique Instruments, Orange Tree Samples, Sample Logic, Impact Soundworks, ProjectSAM, Sonuscore, Vir2, Strezov, e-instrument, Prominy, Best Service, Zero-G, Soniccouture, Sonokinetic, Orchestral Tools, Embertone, Efimov… Et c’est sans parler de centaines de plus petits éditeurs au travail passionnant (Modwheel, Loopsdelacreme, etc.) ou de passionnés proposant leurs créations gratuitement !
Du coup, lorsqu’après quatre ans d’attente nous arrive une nouvelle version du leader, on est impatient de voir ce que Native nous a réservé, d’autant que la V6 accuse son âge, du point de vue ergonomique comme du point de vue de sa banque, lesquels étaient déjà hérités de la V5… Allez, on installe !
Un air de Komplete Kontrol…
L’installation passée, on se hâte donc d’aller chercher le nouveau Kontakt 7 pour voir si, comme Guitar Rig 6, il a fait l’objet d’une refonte graphique qu’on attend depuis une bonne dizaine d’années. L’ouverture de l’instrument annonce la couleur : on se retrouve face à un navigateur dont l’esthétique et l’ergonomie reprennent les canons de celle de Komplete Kontrol : en haut on dispose de filtres par famille organologique (vents, cordes, claviers, etc.) ou par nature (acoustique, analogique, numérique, etc.) et d’un moteur de recherche en fonction desquels s’afficheront en dessous à gauche la liste des banques concernées, représentées par des petites vignettes, et à droite la liste des présets disponibles. La fenêtre est redimensionnable : c’est une bonne chose, même si cela n’influe en rien sur la taille des polices utilisées.
Comme dans le logiciel Komplete Kontrol, on dispose aussi d’une préécoute des sons : une bonne chose même si l’on perd au passage l’organisation par arborescence, ce qui rend l’usage de certains instruments peu pratiques vu que tout est classé alphabétiquement et non par pertinence, avec l’obligation d’utiliser un menu déroulant pour filtrer… Bref, le nouveau système présente des avantages, mais en abandonnant toute arborescence par rapport à l’ancien, il faudra reprendre ses marques, sachant que l’essentiel, on l’attend dans le logiciel lui-même et non dans sa navigation.
On clique donc sur l’un des présets quand, tout à coup, soudain, sans prévenir…
Vous êtes bien sûr que c’est Kontakt 7 ?
…on se retrouve avec l’interface de Kontakt 6 : la même, avec les mêmes textes minuscules, les mêmes icônes, et la même impossibilité de redimensionner l’interface ! Un clic sur l’icône d’accès aux préférences du logiciel ruine tout espoir du côté des typos, tandis qu’un clic sur la clé à molette qui permet d’accéder à l’édition avancée finit de nous en convaincre : en dehors de la surcouche de navigation qui nous a été présentée en première intention, et qui n’apporte rien de plus que Komplete Kontrol, aucune refonte graphique n’a été effectuée.
Et même si l’éditeur annonce la compatibilité du logiciel avec les écrans Retina (Dix ans après le lancement de la technologie par Apple, il était temps), on n’en revient pas du non travail effectué en quatre ans !
On s’attendait en effet à un remaniement similaire à celui fait sur Guitar Rig, à de nouvelles polices et un petit menu pour déterminer la taille en pourcentages, mais rien ! Qu’est-ce qui justifie donc le passage en V7 ? Renseignements pris auprès de l’éditeur, du point de vue du moteur, les nouveautés se résument à l’intégration d’Elastique en V3, l’algo de pitch shifting et time stretching réalisé par la compagnie zplane et licencié par Native Instruments, et l’intégration de deux nouveaux effets : Psyche delay et Ring Modulator. Et c’est tout.
Là, vous sentez la panique du testeur qui se demande de quoi il va bien pouvoir parler pour finir son test. Heureusement, le logiciel est flanqué d’une nouvelle banque de sons ! Ouf !
Notre banque nous doit des comptes…
C’est qu’elle est prometteuse en outre cette banque puisqu’elle fait le double de la taille de celle de Kontakt 6 : presque 40 Go ! C’est la promesse de quantité de nouvelles choses à aller débusquer en plus des nouveaux instruments proposés dans la nouvelle Komplete.
Évidemment, il y a beaucoup de monde, sachant que ce qui nous est proposé repose sur une refonte de l’ancien, des ajouts et des disparitions. Exit ainsi les patches extraits de la Vienna pour ce qui est des instruments orchestraux, sachant que c’est Orchestral Tools qui prend la relève… Si certaines choses ne semblent pas avoir changé (guitares, par exemple), on voit aussi arriver quantité de nouveaux patches de synthé ainsi que des instruments du monde…Tiens ! Un violon Fiddle ! J’adore ! Et pourquoi ne pas commencer par ça ?
Un double clic et son se retrouve face à une jolie interface qui présente tout un tas d’instruments… mais pas le violon en question ! Occupant les trois quarts de la fenêtre non redimensionnable donc, cette image n’a d’autre but que d’être esthétique de toute façon : rien n’est interactif et les contrôles rudimentaires de l’instrument se situent au bas de l’écran, tandis que dans le coin supérieur droit, on accède au panneau d’effets et au panneau de configuration. Et il vaut quoi ce violon fiddle ? Pas grand-chose hélas si vous souhaitez produire une partie de violon qui tienne la route, vu qu’on ne dispose que d’un unique niveau de vélocité et d’un effet bend sur la vélocité fort tandis qu’il n’y aucun round robin ni aucune articulation…
Bon, on est mal tombé. On va donc ouvrir d’autres instruments et l’on s’aperçoit que tous les instruments sont bâtis sur ce même modèle : un grand visuel qui change par « groupe » instrumental (synthé, « band » qui rassemble en gros les instruments jazz/rock/pop, percussions, orchestral, etc.), avec au-dessus l’assignation à la molette de modulation, en dessous des contrôles susceptibles de varier suivant le patch, et l’accès à la section d’effets comme à la configuration dans le coin supérieur droit.
Du côté des effets, on dispose de l’arsenal de base (EQ, Tape, Delay, Chorus, Phaser, Cabinet, Convolution, Limiter, mais pas de distorsion), mais c’est finalement dans la configuration qu’on trouvera les choses les plus intéressantes : de quoi gérer l’accordage et la transposition comme les plages du pitch bend, de vélocité ou la tessiture, mais surtout de quoi faire intervenir des variations aléatoires sur le volume, la vélocité, le panoramique ou le pitch… De la sorte, n’importe quel sample est susceptible de devenir intéressant, pour peu qu’on sorte de la volonté d’obtenir quelque chose de réaliste… À noter que sur les Drums, on dispose en général d’un lecteurs de patterns MIDI…
Bref, on est face à un mini Play Series à un seul moteur et sans modulation, sachant que si les visuels génériques sont plutôt jolis à défaut d’être à propos (afficher un rhodes quand on clique sur un patch de rhodes ne semble pas aller de soi ici…), on dénombre quantité de problèmes de contraste compromettant la lisibilité des interfaces :
Bon, bon… mais les sons là-dedans ?
K7 audio
Comme dans toute grosse collection, on trouve ici du bon et du moins bon et du carrément dispensable. Parmi les bonnes choses, on notera quantité de patches de synthés et surtout quelques beaux claviers électriques : un Rhodes avec pas mal de dynamique et un bien joli son quand il tord sur les grosses vélocités…
Du côté de l’orchestral, disons qu’Orchestra Tools n’a pas forcé son talent sur les cordes qui ne sont pas forcément mieux que les vieilles Vienna, mais que les bois s’en sortent très bien, avec la possibilité de faire la transition entre les deux couches de vélocité grâce à la molette de modulation. Le legato repose quant à lui sur un fondu avec la possibilité de régler l’attaque et le relâchement…
Les cuivres sont corrects même si la vélocité haute est un peu trop violente en regard de la basse et que du coup, on se retrouve vite en mode Chevauchée des Valkyries. Les guitares semblent les mêmes qu’autrefois, mais dans une nouvelle interface, idem pour les pianos, les basses, les batteries. On dispose aussi de beaucoup beaucoup de chose en termes de synthé…
À parcourir tout cela, on se rend compte d’ailleurs qu’il y a du remplissage : des kits de drums qui sont déclinés par dizaines avec phaser, avec chorus, avec distorsion. Tout cela est sans grand intérêt donc, à part pour ceux qui ne savent pas insérer un effet dans leur STAN ou dans Kontakt…
Bref, voici des exemples qui valent ce qu’ils valent, sachant que les magiciens de la démo de Native Instruments trouveront sans conteste le moyen de faire sonner tout cela bien mieux que moi :
Avant d’en finir avec la banque, précisons qu’en dépit de son doublement de taille, Native n’a toujours pas trouvé l’occasion d’y glisser un banjo. Précisons-le : je ne suis pas un obsédé du banjo, mais c’est une façon comme une autre de noter qu’en dépit de 40 Go de son, la banque de Kontakt n’est toujours pas à même de produire un équivalent pour chacun des 127 instruments de la norme General MIDI… Par ailleurs, notons que la collaboration avec Orchestra Tools ne nous donne pas pour autant accès à un violon solo, ni à un alto et un violoncelle ou une contrebasse qui ne sont disponibles qu’en sections…
Avouons-le toutefois : la banque de sons de base de Kontakt n’a jamais été un enjeu, surtout qu’on trouve gratuitement sur le web des choses de bien meilleure tenue que ce qui nous est proposé. Non, l’enjeu se trouve dans le moteur de sampling et de scripting comme dans l’interface utilisateur, trois domaines où il faut bien admettre que cette version 7 n’apporte pas grand-chose…
Perte de Kontakt
Dieu qu’il est dur de conclure et surtout de noter cette septième version qui s’est tant fait attendre et qui du coup, déçoit par son manque d’ambition (pas de refonte graphique) et de finition (interfaces utilisateurs des nouveaux instruments posant des problèmes de lisibilité) comme par le peu d’évolution de son moteur. Pourquoi ? Parce que si l’on considère les apports réels de cette mise à jour, elle ne vaut sans doute pas plus que deux étoiles sur cinq.
Mais si l’on considère Kontakt dans l’absolu, il ne fait aucun doute que c’est une plateforme sans équivalent en termes de rayonnement sur le marché, d’où sa bonne note qui juge du produit dans son ensemble et non de la seule mise à jour : si vous travaillez avec des instruments virtuels autres que des synthés, c’est un must have qui vous donnera accès à des trésors, qu’ils soient payants ou gratuits. Impossible de s’en passer notamment lorsqu’on fait de la musique orchestrale ou acoustique, les plus grands éditeurs du genre n’ayant toujours pas réussi à s’affranchir de la plateforme de Native Instruments.
La question d’acheter Kontakt seul n’est toutefois pas très pertinente si l’on considère que pour 200 euros de plus, on accède à la Komplete 14 qui propose quantité d’excellentes choses, tant sur les banques que les effets, mais aussi sur les synthés, et qui vous donne surtout accès à un autre écosystème exceptionnel : Reaktor.
Et comme il ne fait aucun doute qu’au fil des mises à jour, certaines banques de Native comme d’éditeurs de tierce partie refuseront de tourner sous Kontakt 6 qui ne sera de toute façon plus maintenu. Il faudra donc y passer…