Le SM57 est l'un des micros les plus vendus et les plus utilisés de par le monde. En live, en répétitions ou en studio d'enregistrement, ce micro dynamique s'est imposé au fil des années comme une, sinon comme LA valeur sure. Pourquoi ? Penchons-nous sur le sujet....
Pourquoi, mais pourquoi donc Audiofanzine vous sort aujourd’hui un test du micro SM57 ? Question compréhensible, certes, mais pas si pertinente que cela… Car si au moment de l’écriture de cet article, pas moins de 193 avis ont déjà été postés sur le site à propos de ce micro (avec de surcroit plus de 149 forums dédiés), aucun papier approfondi avec photos, comparatifs audio et consorts n’a été publié sur le sujet. Et comme le SM57 est l’un des microphones les plus réputés de par le monde, il était grand temps de remédier à cela. En avant donc pour un test en profondeur du plus célèbre des dynamiques !
Qui que quoi où ?
Shure est une compagnie américaine qui débuta dans les années 1920 en développant des pièces de radios, de phonographes puis, progressivement, de microphones. En 1953 naquit le Unidyne III Microphone que l’on peut, par sa forme comme par ses caractéristiques techniques, considérer comme l’ancêtre du SM57. Et c’est justement quelques années plus tard, en 1965 que le SM57 fut conçu et pris progressivement la place du Unidyne.
Le SM57 est un microphone dynamique (il ne nécessite aucune alimentation extérieure) et sa directivité est cardioïde. Au vu de sa courbe de réponse, il est plus évident que le SM57 n’est définitivement pas un micro que l’on pourrait qualifier de droit ou de neutre. Sa réponse en fréquence va de 40 Hz à 15 kHz et pourrait vous paraître assez restreinte, mais elle se situe justement parfaitement dans la plage de fréquences audibles par le commun des mortels. De plus, en se basant sur cette courbe purement théorique, le SM57 semble axer toutes ses compétences pour la captation de voix, de la façon la plus intelligible possible. Un léger creux vers les 300–400 Hz (fréquences un peu boueuses, souvent gênantes pour la voix), une belle montée à partir de 3 kHz (pour apporter un peu de clarté) avant une chute assez drastique vers les 8 kHz (au revoir la dureté) puis un nouveau pic vers 9 kHz (bienvenus aux aigus !). Petite anecdote pour étayer ces propos : depuis Lyndon B. Johnson, tous les présidents des États-Unis d’Amérique ont utilisé ce microphone lors de discours présidentiels ! De quoi vous rassurer sur les prouesses du SM57.
Mais trêve de théorie, place à la pratique.
La Batterie
La grosse caisse
Attaquons ces tests bille en tête, non pas, comme vous pourriez vous y attendre, en installant le SM57 sur une caisse claire, mais en le positionnant directement devant la grosse caisse, au niveau de l’évent. Et là, grosse surprise : le 57 ne sonne pas du tout aussi petit que pensé. Certes, vous ne retrouverez pas un gros bas médium bien gras ni la rondeur d’un beau 47 fet, mais l’on récupère un son bien percutant, avec cette impression d’avoir un kick déjà traité, gonflé par une bonne dose d’attaque (que vous pourrez même accentuer en plaçant le micro un peu plus à l’intérieur). Le son du 57 complémente de façon très naturelle l’overhead (Coles 4038) et redonne à la batterie un peu plus de mordant, de précision. Bien évidemment, cette configuration ne sera pas forcément la plus adéquate pour une formation Jazz ni pour offrir un gros kick HipHop ou Soul, mais pourrait se révéler parfait pour du Rock, Punk Rock ou tout autre style réclamant de l’impact, du percutant. Écoutez comme il se tient face à un Re20 placé en entrée d’évent, puis à l’intérieur de la grosse caisse.
- 01a Sm57 Kick00:18
- 01b Sm57 Kick + OH00:18
- 01c Sm57 Kick OH Solo00:18
- 01d Re20 Kick00:19
- 01e Re20 Kick00:17
Snare et Toms
Le SM57 et les caisses claires sont depuis des décennies un couple qui fonctionne à merveille et l’on comprend de suite pourquoi. La dynamique de l’instrument est très bien restituée. Comme avec la grosse caisse, le 57 encaisse sans broncher les grosses pressions acoustiques en restituant un son propre et clair. La plage fréquentielle du micro est parfaite pour tout ce qui est percussif. Rien ne semble gêner : le bas ne bave pas, les aigus ne vrillent pas. Le micro apporte au contraire un médium bien tranchant, très efficace, et si vous pensez manquer tout de même d’un peu de bas, vous avez la possibilité de le booster facilement à l’égalisation, le micro acceptant ce genre de traitement très naturellement.
Même ressentis sur la prise de toms, avec toutefois un certain manque de profondeur, principalement (et assez logiquement) sur le tom grave. La définition du micro n’est pas non plus des plus mémorables, mais ce n’est pas un réel problème : une fois de plus, le 57 s’avère être un bel appui à l’overhead. Les fréquences qu’il met en valeur s’intègrent très bien à celles du Coles, micro plus ample et bien plus doux et le résultat cumulé des deux pistes procure un son général très probant. Comparé sur le tom grave avec un Sennheiser 421, dynamique souvent utilisé sur ce genre de futs, le 57 est plus médium, moins précis, plus resserré, mais n’a aucunement à rougir et joue très bien son rôle de micro d’appoint.
Autre remarque générale : La diaphonie — ou repisse — des autres futs et cymbales captée par le microphone. Elle fait partie des artefacts très importants et assez difficiles à contrôler lors de prises de batterie. Avec le SM57, cette repisse est très facilement gérable, de par sa couleur (sans ajout de vilaines fréquences) comme de par son volume assez moindre. L’ajout d’un simple gate pourrait même l’atténuer si jamais vous aimez les batteries très « tight » et bien nerveuses.
- 02a Sm57 Sn00:19
- 02b Sm57 Sn + OH00:19
- 02c Sm57 Sn OH Solo00:19
- 03a Sm57 Tom Hi00:17
- 03b Sm57 Tom Hi + OH00:17
- 03c Sm57 Tom Hi OH Solo00:17
- 04a Sm57 Tom Lo00:17
- 04b Sm57 Tom Lo + OH00:17
- 04c Sm57 Tom Lo OH Solo00:17
- 04d Md421 Tom Lo00:19
HH, OH et Room
Fi des futs ! Passons à des choses plus originales.
Si un placement sur un charley peut surprendre pour un dynamique, on se rend vite compte que le résultat est finalement plus que convenable. Le son bien teigneux qui en ressort explique pourquoi de nombreux ingénieurs de rock ou de punk rock l’utilisent ainsi. Comme pour les toms, la définition n’est pas ultime, mais votre charley, bien nerveux, passera instantanément dans votre mix, sans aucun aigu intempestif et la diaphonie induite ne viendra pas trop polluer le son de la caisse claire.
En overhead, nous retrouvons bien l’équilibre de l’instrument même si la sonorité est alors très très médium. La comparaison entre les micros est un peu dure et assez peu flatteuse. Le Coles paraît bien plus lourd, bien plus corpulent face au tranchant du 57. À dire vrai, les deux micros sont en quelque sorte deux frères ennemis : deux exacts opposés qui se complémentent idéalement. Même si le 57 s’en sort à peu près, on ne l’imagine surtout dans cette position que pour les projets assez violents ou nerveux pour lesquels la définition n’est pas l’élément majeur.
Mêmes observations pour la piste « front » à un mètre du kit de batterie et en « room ». Le rendu n’est pas très large et le micro n’est définitivement pas fait pour se tourner vers une belle prise « bigger than life », mais davantage vers une sonorité plus « lofi ». La caisse claire et les cymbales y sont dures, agressives. Cependant, ce défaut peut vite devenir un atout en se servant du 57 comme « trash room » et en lui appliquant une grosse compression voire une distorsion. Cette couleur « cradingue » n’en sera qu’amplifiée et votre batterie n’en deviendra que plus colorée, incisive et percutante…
- 05a Sm57 HH00:17
- 05b Sm57 HH + OH00:17
- 05c Sm57 HH OH Solo00:17
- 06a Sm57 position OH00:17
- 06b Coles OH00:17
- Drums Front Sm5700:20
- Drums Front U8700:20
- Drums Room Sm5700:20
- Drums Room U8700:20
La Basse
Sur une prise d’ampli Basse, le SM57 montre une fois de plus sa parfaite gestion des grosses pressions acoustiques. Le son est clair et limpide. Comme précédemment sur les prises de proximité, la couleur générale se tient très bien et aucune fréquence ne vient interférer sur la qualité de la prise. Face au grand classique RE20, le son du Shure se fait moins ample, moins emphatique. Les basses fréquences sont moins présentes, cependant le SM57 ramène toujours ce beau tranchant parfait pour faire ressortir le médiator et/ou la distorsion de la prise fuzz. Pour 1/6 e du prix, le 57 tient donc assez honorablement la barre et la prise de basse pourrait très bien convenir lors d’un mix… sous couvert, bien entendu que vous ne recherchiez pas une grosse basse « sub » à la Massive Attack…
- Bass Sm5700:27
- Bass Re2000:27
- Bass Sm57 Fuzz00:27
- Bass Re20 Fuzz00:27
- Bass Sm57 B00:23
- Bass Re20 B00:23
- Bass Sm57 B Fuzz00:26
- Bass Re20 B Fuzz00:26
Les Guitares
La guitare électrique
S’il est un domaine où le SM57 est roi, il s’agit sans équivoque de celui des guitares électriques. Vous retrouvez instantanément LE son que tout le monde a entendu et connait par cœur depuis des décennies. Que cela soit sur la guitare Surf, la Fuzz, le Palm Mute ou le son clean, le 57 vous restitue un son équilibré, tranchant et parfait pour s’insérer dans un mix. Face au U87, le son est un peu plus étriqué, mais le médiator ressort bien et aucun bas ne viendra gêner lors du mixage. Ce n’est définitivement pas pour rien que ce micro est apprécié par tant de guitaristes, en live, comme en studio.
Depuis plusieurs années, afin d’obtenir un son de guitare plus plein et plus moderne, il est devenu coutume de lui adjoindre un Royer R121. De la même façon qu’avec le Coles sur la batterie, le SM57 se marrie très bien avec le Royer. Le ruban apportant un côté soyeux, gras et ample, le 57 développant lui un son plus ciselé et percutant.
La guitare acoustique
Si le SM57 s’en tire très bien sur les instruments puissants, il lui faut avouer avoir un peu plus de mal sur les instruments plus calmes. Sur une guitare acoustique, le Shure peut sembler étriqué, manquer de coffre, voire donner l’impression d’entendre une piste filtrée. Sur un jeu au doigt, il ne brille pas vraiment non plus par un son très naturel et on lui préférera un micro plus chaleureux. Avec une guitare acoustique rythmique, il intensifie le jeu du médiator et le côté « gling-gling » de l’instrument. Ce son assez médium accentue surtout le côté rythmique de votre guitare, bien moins son côté mélodique. Ceci pourra être bénéfique sur certaines productions fournies (pour lesquelles la guitare peut devenir presque un instrument percussif) ; il le sera par contre beaucoup moins sur des morceaux plus épurés ou l’harmonie prédomine souvent.
- Gtr Elec Sm57 Surf00:20
- Gtr Elec U87 Surf00:20
- Gtr Elec Sm57 Arpege00:27
- Gtr Elec U87 Arpege00:27
- Gtr Elec Sm57 PalmMute00:24
- Gtr Elec U87 PalmMute00:24
- Gtr Elec Sm57 Fuzz00:25
- Gtr Elec U87 Fuzz00:25
- Gtr Ac Sm5700:13
- Gtr Ac U8700:13
- Gtr Ac Arpege Sm5700:14
- Gtr Ac Arpege U8700:14
Les Clochettes et la Voix
Pour les voix, nous retombons à peu de choses près sur les mêmes remarques. Face à un Neumann U87, la comparaison n’est de prime abord pas très flatteuse, mais confrontée au prix d’achat, les différences se font bien moins énormes… Et si le rendu est forcément plus médium, la couleur sonore n’en est pas moins intéressante. Que cela soit sur du chanté ou du parlé, le timbre du chanteur est bien respecté, la prise de son n’est pas trop dure et ne bave pas. On sent que la captation est solide et la gamme de fréquences captée s’intrique parfaitement avec l’ajout d’effets postérieurs (reverb, delay & co). Pour information, de nombreux chanteurs ont utilisé ce micro pour leurs prises de voix définitives : Beth Gibbon, Jon Spencer, Lemmy de Motorhead, Jimmy Cliff, etc.
Enfin, pour finir ces tests audio, une petite prise de clochettes pour entendre la réactivité du micro sur les hautes fréquences. Sur cet exercice, le SM57 reprend bien la fondamentale de la note et l’on reconnaît instantanément l’instrument. Seul bémol : les harmoniques sont quasi inexistantes… là où le U87 les sublime. Comme pour les autres tests, en fonction du contexte, le 57 pourrait donc s’en sortir plus ou moins bien. La prise de son se suffit à elle-même, mais nous conforte tout de même dans l’idée qu’un micro dynamique n’est pas forcément le choix ultime face à des instruments fins et délicats, sauf si vous êtes à la recherche d’une couleur spécifique ou ne cherchez pas à remplir tout le spectre.
- Vx Sm5700:14
- Vx U8700:14
- Spoken Sm5700:08
- Spoken U8700:08
- Bells Sm5700:16
- Bells U8700:16
Les modifications
Comme souvent avec les micros présents depuis des décennies, des concepteurs ou des marques cherchent par quel(s) moyen(s) les améliorer. Le Sm57 ne déroge pas à la règle :
- Pour les fans du Sm57, mais en ayant assez de se contorsionner pour placer le micro devant la caisse claire, Granelli a sorti une version coudée du microphone : le Granelli Audio Labs G5790. Très bonne idée, astucieuse et amusante, mais attention : le prix du micro s’en trouve doublé…
- De nombreuses personnes vantent également les mérites d’un sm57 « transformerless ». Version sans le transformateur donc, qui permettrait de retrouver un bas medium plus imposant. Si l’intention est louable, la modification vous fera perdre une dizaine de dB. Le 57 n’étant déjà pas réputé pour être le micro le plus sensible au monde, il pourrait devenir alors beaucoup plus sensible aux interférences extérieures. N’y a-t-il pas un risque de voir alors pointer des soucis techniques qu’une simple égalisation aurait pu combler ? Si l’idée est louable, le jeu en vaut-il la chandelle pour un micro à seulement 100 euros ? ? Je vous avoue ne jamais avoir eu le temps ni le courage de le tenter… Ceux qui s’y sont essayés pourraient-ils en faire part dans les commentaires ?
- Enfin, il ne s’agit pas vraiment d’une modification, mais plutôt d’un accessoire : le Shure A2WS Black. Une bonnette anti-vent rappelant celle du SM7b, mais dédié au SM57. Elle ne vous permettra certainement pas de retrouver le son du SM58 ou du SM7b, mais vous pourrez enfin garder votre 57 à la main pour vos prises de voix sans crainte de mouvement d’air (pour le live) ou de plosives trop prédominantes. Accessoirement, vos sifflantes s’en trouveront légèrement amoindries. Pas indispensable, mais loin d’être inutile !
Conclusion
Le SM57 n’est pas un classique depuis des décennies pour rien. Ultra économique, robuste, léger, facile à placer, ce microphone déjà presque soixantenaire ne manque pas de qualités. S’il n’est sans doute pas le dynamique le plus incroyable du monde d’un point de vue technique, il est sans conteste l’un des plus polyvalents et l’un des plus utilisés. Sa gamme fréquentielle est parfaite pour un grand nombre de styles musicaux et rares sont les prises de son pour lesquelles il ne saura délivrer un son utilisable. Même quand il est pris en défaut, le 57 arrive toujours à tirer son épingle du jeu en apportant une couleur très personnelle (cf. les prises de guitares acoustiques ou en room de batteries). Ce n’est pas non plus un hasard s’il est souvent le premier microphone que les amateurs achètent ou que les ingénieurs confirmés glissent dans leur valise avant une prestation. IN-DIS-PEN-SA-BLE !