Présentée rapidement au NAMM 2020, la PlexiRanger regroupe deux effets au sein du même châssis. Le but ? Recréer les sons de guitare emblématiques des années 60, 70 et 80. Promesse tenue ?
La marque Carl Martin s’est constituée une belle réputation dans le milieu des pédales « Boutique » grâce à quelques circuits hyper bien conçus qui sont devenus aujourd’hui de véritables standards. Nous l’avions vu avec le test de la Panama l’an dernier, quand il s’agit de concevoir une pédale de saturation, notre ingénieur danois préféré ne manque pas de créativité. Pour la PlexiRanger que j’ai (enfin) le plaisir d’avoir entre les pattes, Carl Martin est parti d’un constat assez simple : tous les sons de guitare électrique les plus beaux des années 60 et 70 ont été obtenus en utilisant un ou plusieurs amplis britanniques (on pense immédiatement aux deux marques influentes à l’époque, Marshall & Vox) en amont desquels les guitaristes comme Brian May, Ritchie Blackmore et Tony Iommi plaçaient un Treble Booster afin de gonfler leur son en fréquences et en saturation. Faisons un tour complet de cette pédale qui promet de recréer ces sons légendaires.
Plexi et Ranger sont sur un bateau…
Comme son nom l’indique, la PlexiRanger regroupe deux circuits au sein du même châssis : d’un côté le très célèbre circuit de la Plexi Tone, grande réussite de Carl Martin devenue une référence dans les pédales « amp in a box » de type Marshall Super Lead, et de l’autre un Treble Booster inspiré du Dallas Rangemaster. Les contrôles sont assez simples à comprendre bien que quelques subtilités se soient glissées dans l’équation. La partie Plexi possède des réglages de Gain, Tone et Level. Ces contrôles sont très bien calibrés et on peut les utiliser sur toute leur course, des réglages les plus bas aux réglages les plus extrêmes. La partie de droite dénommée Boost possède des potards labellisés Boost, Freq, Range et un switch à trois positions : le Lo-Cut. Le réglage Boost permet d’ajouter jusqu’à 15 dB de Clean Boost. Les potards Frequency et Range fonctionnent ensemble, le réglage Frequency permettant de choisir la fréquence à booster, entre 250 Hz et 5 kHz et le réglage Range déterminant la quantité de boost appliquée à ladite fréquence. Comme le réglage Boost, il permet d’augmenter la fréquence choisie de 15 dB maximum. Enfin, le switch Lo-Cut est un coupe-bas que l’on peut régler assez léger en positon 1, plus violent en position 2 et OFF en position 0. En termes de connectiques, on trouve un couple entrée/sortie, une fiche pour l’alimentation de la pédale (9 volts centre négatif, 100 mA) et une fiche Remote. Elle permet d’activer/désactiver la partie Boost à distance, si nécessaire. Maintenant que les présentations sont faites, je sors ma fidèle Telecaster de son étui et branche la PlexiRanger directement dans ma toute dernière acquisition, la petite tête Nano Vintage de chez Hughes & Kettner.
Un super Super Lead !
Bon, un point sur lequel Carl Martin n’a pas beaucoup insisté est le look de la pédale. La forme de cette dernière est assez pratique avec les connectiques situées sur le dessus, mais le visuel est austère, triste et sans fantaisie. C’est un aspect qui ne me dérange pas, le son étant bien sûr prépondérant, mais c’est quand même dommage. Une pédale d’effet est une belle toile blanche sur laquelle les fabricants peuvent un peu se lâcher (on pense à Catalinbread ou encore Beetronics qui ont fait de leurs décorations une véritable signature marketing) ; cela dit, la marque danoise n’a jamais fait dans l’extravagance, et on en a encore une fois la preuve avec la PlexiRanger. La première prise en main est rassurante, la pédale est lourde, solide et inspire une certaine robustesse. Les fiches jack situées sur le dessus sont très costaud. Les potentiomètres exercent une bonne résistance qui permettra un réglage en finesse, c’est un bon point. Les footswitches sont également de très bonne facture. Seul petit bémol sur les composants choisis, les LEDs, rouge pour la partie Plexi et verte pour la partie Boost ne sont pas très lumineuses, et en plein jour, on a du mal à les voir.
Sans surprise, le circuit Plexi est une énorme réussite. Carl Martin a tenu sa promesse : capturer les nuances, le grain et la saturation de ces amplis de légende. On peut regretter l’absence d’une égalisation à trois bandes, mais on s’en passe finalement très bien, le réglage de tonalité étant très efficace pour sculpter le son à loisir. J’ai été surpris par le gros headroom de la pédale, et pour cause : on l’alimente en 9 volts, mais un transfo interne monte la tension à 12 volts. C’est encore une fois très bien pensé de la part de l’ingénieur scandinave. La course du potard de Gain est très progressive, on peut aller d’un très léger crunch à un gros overdrive bien musclé, toujours avec ce grain typique. On reconnaît bien le savoir-faire de la marque qui m’avait mis une sacrée claque pendant le test de la Panama. Très belle surprise donc pour le côté Plexi de la pédale qui répondra à la moindre sollicitation dynamique du guitariste, que ce soit au toucher ou au potard de volume de la guitare, à la manière d’un Marshall Super Lead.
- Plexi, léger crunch Telecaster01:00
- Plexi, gain 12o’clock Telecaster01:52
- Plexi, Max gain, Les Paul Custom01:35
Range ta chambre, Master
Je ne l’ai pas encore mentionné, mais chaque circuit peut être utilisé de manière indépendante ce qui est un des (nombreux) points forts de la pédale. La partie Boost de la PlexiRanger nécessite un petit temps d’adaptation ; il faut en effet trouver un bon équilibre entre le clean boost et la partie Rangemaster. Mais c’est là toute la force de cette petite boîte vert kaki : son extrême polyvalence. Pour booster un ampli déjà saturé, on peut utiliser uniquement le clean boost qui envoie déjà la purée et transformera n’importe quel petit crunch en overdrive très musical, avec de belles harmoniques et un sustain agréable. Même chose pour la partie Rangemaster qui, grâce à l’étendue du potard Frequency (de 250 Hz à 5 kHz), permet de trouver LA fréquence parfaite pour bien ressortir du mix, quels que soient la guitare et l’ampli utilisés. En conjuguant les deux côtés de la pédale, on retrouve, comme promis par le constructeur, les sons de nos guitaristes préférés des années 60 et 70 en poussant même jusqu’aux années 80. Mais ce qui m’a le plus enthousiasmé est la polyvalence de la pédale. On peut obtenir une très large variété de sons sur le même niveau de saturation. Cette dernière peut venir du circuit Plexi, du clean boost ou du Rangemaster ! On a donc beaucoup d’options pour concocter des sons sur mesure. J’ai testé la pédale avec des micros simples, les fameux Grey Bottom très vintage installés sur ma Telecaster et des micros doubles, le couple EMG 81/85 qui équipe ma Les Paul Custom (Zakk Wylde style) et la pédale a très bien réagi dans les deux cas. Le grain de chaque instrument est respecté et on reconnaît bien leur personnalité, même dans les réglages de gain les plus élevés. Parce qu’effectivement, cette pédale en a sous le pied ! Si elle est capable de se montrer très sage, on peut rapidement l’énerver pour entrer sur le territoire du hard rock 70’s en se prenant pour Tony Iommi. Le coupe-bas est super pratique si on souhaite resserrer le son davantage et obtenir des basses précises qui ne bavent pas.
Le circuit Rangemaster est donc aussi une belle réussite qui peut se suffire à lui-même en embellissant n’importe quel son crunch. Le clean boost est bien calibré et les réglages Range et Frequency apportent une couleur très particulière au son qui m’a rappelé, sur certains réglages, le grain de ma Xotic EP Boost. Le jeu de paume est un régal et les harmoniques sortent toutes seules, surtout avec les micros EMG. Pari réussi donc pour la PlexiRanger qui nous renvoie à l’âge d’or du son de guitare rock et aux premiers balbutiements du Heavy Metal.
- Ranger + Boost into Crunch amp, Telecaster01:32
- Ranger into Crunchy Plexi, Les Paul Custom01:09
- Ranger into Big Crunchy Plexi, Les Paul Custom03:11
- Ranger, max Range, frequency Sweep, Telecaster01:47
Polyvalence, musicalité et rock’n’roll !
Voici le court descriptif que je choisirais si je devais résumer succinctement les caractéristiques de la PlexiRanger. Comme à son habitude, Carl Martin signe une pédale efficace et qui tient ses promesses. Si comme moi et Carl Martin, vous aimez les sons de guitare british des années 60 et 70, un seul conseil : jetez-vous sur cette pédale. Si certains produits de la marque nécessiteront de faire quelques économies, la PlexiRanger est proposée à un tarif qui, selon moi, est très raisonnable. Il vous faudra débourser 150 € en moyenne pour qu’elle trône sur votre Pedalboard. La pédale est conçue au Danemark et fabriquée en Chine ce qui permet à la firme scandinave d’appliquer ce tarif. Compte tenu des performances qu’elle offre, le rapport qualité/prix est excellent. Je l’ai également essayée avec mon fidèle Marshall Origin 5C et le constat a été le même. Que ce soit sur le son clair de l’ampli en utilisant les deux côtés de la pédale ou sur son joli crunch en n’enclenchant que la partie Boost, les résultats obtenus m’ont bluffé. J’ai pris le temps de tester la pédale dans un contexte de groupe, avec basse, batterie, guitare rythmique et chanteur, à fort volume et là aussi, la pédale a tenu sa promesse. Chaque ligne mélodique a trouvé sa place facilement, sortir du mix de manière musicale étant globalement la spécialité de la pédale. On oublie vite son look austère (voire raté…) tant le son est agréable à l’oreille, agréable à jouer et très dynamique. Bravo Carl Martin !