Aujourd'hui, je vous propose de nous pencher sur la question du placement du micro chant en fonction du troisième axe de travail, à savoir l'axe y de la profondeur. Travailler selon cet axe se traduit tout bonnement par la gestion de l'éloignement plus ou moins prononcé du micro par rapport à votre interprète. Derrière ce concept relativement simple se cachent des enjeux beaucoup plus complexes qu'il n'y paraît à première vue…
Profondeur de chant
Pour commencer, clarifions deux notions d’importances : l’effet de proximité et le « problème du son aéré ».
L’effet de proximité est un phénomène de renforcement du bas et du bas-médium rencontré sur les micros à gradient de pression plus ils sont placés près de la source sonore. Pour mieux vous le représenter, pensez au son caractéristique des voix parlées à la radio avec leur bas du spectre survitaminé. Ce phénomène touche plus particulièrement les micros cardioïdes à large membrane, mais il affecte également à plus ou moins grande échelle les cardioïdes à petite membrane, les micros bidirectionnels, mais pas les omnidirectionnels. Cet effet n’est ni une bonne ou une mauvaise chose en lui-même. Il peut par exemple être avantageusement utilisé afin de donner un peu plus de corps à une voix un tantinet maigrelette. Attention cependant à ne pas en abuser sous peine de nuire au naturel de la prise.
Voyons maintenant la question du son aéré. Vous avez certainement déjà entendu parler d’une captation sonore difficilement exploitable car manquant « d’air »… Je ne vais pas m’étendre ici sur le pourquoi du comment de ce « manque d’air ». En revanche, je vais vous donner la seule véritable solution à ce problème : il suffit littéralement d’ajouter « physiquement » de l’air entre la source sonore et le micro en les éloignant l’un de l’autre. C’est on ne peut plus simple, diablement efficace et somme toute assez intuitif comme solution, n’est-ce pas ?
À présent, considérons l’ensemble des avantages et inconvénients du placement selon la proximité à la source. Rapprocher le micro du chanteur entraîne les choses suivantes :
- Diminution de l’impact sonore de l’acoustique de la pièce ;
- Diminution de la sensation de naturel (3D) ;
- Augmentation de l’effet de proximité ;
- Diminution de la sensation de son aéré ;
- Captation plus détaillée des sons faibles ;
- Captation plus prononcée des plosives, sifflantes et autres bruits de bouche ;
- Augmentation du risque de saturation lors des passages les plus forts ;
- Impact sonore des mouvements du chanteur lors de l’interprétation plus important (voix détimbrée).
À l’inverse, éloigner le micro de l’interprète induit les effets suivants :
- Meilleur rendu 3D ;
- Son plus aéré ;
- Diminution de l’effet de proximité ;
- Moins de plosives, sifflantes et autres bruits de bouche ;
- Captation plus respectueuse de la dynamique ;
- Impact sonore des mouvements du chanteur moins important ;
- Sons faibles moins détaillés ;
- Augmentation de l’impact sonore de l’acoustique de la pièce ;
- Risque de perte en définition si trop éloigné.
Partant de ces constats, à quelle distance devriez-vous placer votre micro ? Eh bien une fois de plus, il n’y a pas de réponse toute faite et cela dépendra des critères déjà évoqués à maintes reprises, à savoir la voix de votre chanteur, le chant pratiqué sur le titre en cours de production, le lieu de captation et bien sûr l’orientation que vous souhaitez donner à cette voix au sein du morceau. Notez que cela dépend également de l’ensemble des choix que vous avez déjà faits jusqu’à présent, c’est-à-dire le micro utilisé et son placement selon les deux axes précédemment vus. Je vous invite donc à analyser très précisément la situation à ce stade lors de vos prises de chant de façon à prendre une décision cohérente avec tout cela.
Permettez-moi de finir avec un petit conseil de base concernant la recherche de cette distance idéale : à moins de vouloir délibérément obtenir un « effet spécial », je vous déconseille vivement de placer votre micro à moins de quinze centimètres de votre interprète, car entre les bruits de bouche, le souffle, les plosives, les sifflantes et l’effet de proximité, ce type de captation est tout simplement un enfer à mixer…
Sur ce, rendez-vous la semaine prochaine pour discuter de l’orientation de la capsule !