Apparu sur le marché il y a un peu plus de deux ans maintenant, Studio One nous avait étonnés par la maturité dont faisait preuve sa première version : stable, mais surtout très bien pensé sur le plan ergonomique, le logiciel n'avait déjà pas grand-chose à envier aux dinosaures de la séquence. Or, il a encore fait du chemin depuis : amélioré significativement dans sa mise à jour 1.5, il nous revient aujourd'hui dans une version 2 tout bonnement étonnante. Voyons ce qu'il en est.
On ne change pas une formule qui gagne et passée l’installation du logiciel et des nombreux plug-ins et banques de sons qui l’accompagnent, on se retrouve en terrain familier. Sa philosophie n’a en effet pas changé, avec cette distinction faite entre le Morceau (titre unique à enregistrer/éditer/mixer) et le Projet qui peut comporter un ou plusieurs Morceaux et qui se voit dédié au mastering.
Suivant cette logique, Le logiciel s’organise toujours en 3 parties : Accueil (pour créer ou ouvrir un Morceau ou un Projet, accéder aux options de configuration du logiciel, récupérer des mises à jour ou encore des news concernant le soft), Morceau (pour l’enregistrement, l’editing et le mixage d’un titre) et enfin Projet (pour le mastering et l’export du ou des morceaux, soit sur CD soit en fichier). Bien évidemment, c’est dans la partie 'Morceau’ que vous passerez l’essentiel de votre temps et c’est également cette dernière qui s’avère la plus touffue en termes de fonctionnalités.
Son interface n’a pas changé dans sa répartition, avec son navigateur à la Live sur la droite (qui permet de parcourir vos fichiers audio/MIDI, vos plug-ins (y compris les applis ReWire comme Reason) et tous leurs presets (soit par catégories, vendeurs ou encore via un moteur de recherche), son inspecteur de piste sur la gauche, sa fenêtre d’arrangement au centre et sa fenêtre d’édition occupant le bas de l’interface et qui, selon les cas, pourra afficher un éditeur audio, un piano roll ou encore la table de mixage. Notez que chacun de ces éléments est escamotable et qu’on peut aussi désolidariser les éditeurs et la table de mixage de la fenêtre principale. Ce sera pratique par exemple pour afficher en permanence cette dernière sur un second moniteur… L’interface Project n’a pas non plus subi de remaniement et se compose toujours, en plus de stacks d’insert d’effets (pre ou post fader), d’une partie accueillant les formes d’ondes de vos différents morceaux, et de larges visualiseurs, qu’ils soient dévolus au spectre, au niveau global ou encore à la répartition stéréo.
Bref, les nouveautés ne sautent pas aux yeux bien qu’elles soient relativement nombreuses dès qu’on rentre un peu plus dans le logiciel.
Le groove en un clic
Alors quoi ? Rien de neuf ? Bien au contraire, beaucoup de choses et non des moindres, à commencer par une fonctionnalité importante : une vraie gestion des pistes composites qui manquait jusqu’ici. En version 1.6.5, lorsque vous faisiez une prise en boucle, le soft enregistrait tous vos essais et vous permettait ensuite de générer une nouvelle piste pour chaque. Si cette fonction existe toujours (via ‘extraire les prises sur les pistes’), elle est complétée par une extraction des prises sur des couches, sorte de sous-entités de la piste, et grâce auxquelles il est bien plus simple de travailler. Chaque couche est écoutable en solo et vous avez la possibilité, via un simple clic sur une zone sélectionnée, de la faire ‘remonter’ pour composer peu à peu la prise parfaite à partir de vos différentes prises. Notez que le logiciel s’occupe de faire automatiquement le crossfade pour éviter les artefacts audio lors de la juxtaposition d’éléments issus de prises différentes. Notez aussi que cette fonction peut être utilisée avec les pistes groupées (ce qui sera notamment intéressant pour faire du comping de pistes de batterie). La chose n’a certes rien d’innovante dans l’absolu car c’est une fonction qu’on retrouve chez la grosse majorité des concurrents, mais comme elle est bien réalisée, elle est plus que bienvenue.
Toujours au rayon audio, on notera l’arrivée de pas mal de fonctions avancées concernant le calage et la quantisation. S’il était déjà possible de quantiser un clip audio en version 1.6.5 en le divisant au cutter à l’endroit des transitoires en autant de sous-clips que nécessaire, l’opération est autrement plus simple avec cette seconde version puisque Studio One est désormais capable de détecter les transitoires. Utile pour faire de l’extraction de groove comme de la quantisation, la chose est simplissime à mettre en œuvre et peut même s’effectuer en arrière-plan, sans qu’on s’en rende compte et sans qu’on ait, comme dans certains séquenceurs, à lancer ou à paramétrer au préalable une détection des transitoires.
Pour quantiser un clip audio, il suffit ainsi de le sélectionner et de presser Q, la quantisation étant par ailleurs paramétrable, de même que la façon dont elle s’applique : soit en en mode Time Stretching, soit en mode Slicing (façon REX, les segments seront donc plus ou moins espacés plutôt que d’être étirés)…. Vous avez peur qu’avec une quantisation trop stricte, le résultat soit trop robotique ? Pressez ainsi Alt + Q plutôt que Q, ce qui quantisera à seulement 50 %. C’est d’ailleurs sur ce genre de détail que Studio One fait la différence : évidemment, tous les séquenceurs permettent d’appliquer une quantisation plus ou moins stricte, mais tous n’ont pas pensé à prédéfinir une judicieuse quantisation à 50 % et à la rendre accessible via un raccourci clavier. Tous n’ont pas non plus pensé à vous montrer via une couleur différente quels segments du fichier audio étaient affectés par la quantisation pour que vous puissiez vérifier la pertinence du calage et intervenir au besoin, à la mano. Mine de rien, ce genre de bonnes idées est assez déterminant en terme de productivité : on gagne un clic par-ci, par-là, de sorte qu’à la fin, on fait les choses avec une plus grande rapidité, et donc une plus grande efficacité.
L’extraction de groove est aussi simple à mettre en œuvre : un simple drag & drop d’un clip MIDI ou audio dans la fenêtre de quantisation suffit pour créer un nouveau preset de groove qu’on pourra utiliser ensuite comme référence de calage, tandis qu’un autre drag & drop du groove vers le séquenceur créera un fichier MIDI automatiquement : libre à vous ensuite de l’assigner à un instrument virtuel…
Bref, là encore, PreSonus comble un manque de la version initiale de Studio One et le fait avec une redoutable pertinence. Mais il y a mieux encore dans cette nouvelle version : un mieux qui s’appelle Melodyne.
Avec des vrais morceaux de Melodyne à l’intérieur
Melodyne, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, est un logiciel qui, dans sa version de base, permet d’éditer le placement et la hauteur de n’importe quelle note dans un fichier audio monophonique, avec une simplicité et une efficacité qui laissent la concurrence loin derrière. Or, le problème de Melodyne jusqu’ici tenait essentiellement à son intégration au sein des séquenceurs. Pour l’utiliser, il fallait le mettre en Insert de la piste à traiter, passer par une phase de reconnaissance des évènements audio et travailler ensuite au sein de la fenêtre du logiciel avec une ergonomie et surtout une gestion des raccourcis clavier très perfectible.
Pour cette seconde version de Studio One, Presonus frappe un grand coup avec une parfaite intégration du logiciel de Celemony. Oubliez l’insertion de plug-in, la phase de reconnaissance et les soucis de raccourcis, désormais un simple clic droit sur un conteneur audio suffit à basculer vers Melodyne qui occupera alors la partie basse du logiciel. Un gros plus face à la concurrence qui lorsqu’elle propose ce genre de fonctionnalité, le fait avec des algos qui sont très nettement inférieurs à ceux de Celemony sur le plan qualitatif.
Et ce plus de se transformer en atout déterminant lorsqu’on possède une licence de Melodyne Editor et de sa fameuse technologie Direct Note Access qui permet de faire tout ce que fait Melodyne Essential en gérant la polyphonie. La puissance que la chose confère tant sur le plan de l’editing (recaler un arpège de guitare à la ramasse, corriger une fausse note dans un accord de piano), le sampling (isoler un instrument au sein d’un mix) ou l’arrangement (transformer un accord majeur en mineur) et le fait que l’outil soit utilisable plus simplement que dans les autres séquenceurs change la vie. Certes, vous ne disposez pas avec Studio One de ces fonctions propres au Melodyne Editor et il ne s’agirait pas d’attribuer à Presonus les lauriers de Celemony mais l’excellente intégration de Melodyne au séquenceur n’en demeure pas moins un énorme avantage sur tous les produits concurrents, si pro soient-ils.
Un exemple tout bête qui vous donnera une idée de la puissance du truc : vous avez une boucle audio de saxophone que vous aimeriez bien doubler ou remplacer par un synthé quelconque? Trois étapes suffisent : d’abord, vous passez votre boucle de sax en mode Melodyne via un simple clic droit. Ensuite, vous choisissez depuis le navigateur de preset le son qui vous intéresse et le glissez dans la fenêtre d’arrangement, ce qui aura pour effet d’automatiquement créer une nouvelle piste MIDI pour le synthé et le preset choisi. Enfin, cliquez-glissez votre boucle de sax sur la piste MIDI du synthé : vous récupèrerez ainsi les notes MIDI détectées par Melodyne. That’s it !
Inutile de vous dire que pour faire des remixes ou du Drum Replacement, la chose est plus qu’intéressante, dans la limite, évidemment, des possibilités actuelles de Melodyne : j’ai ainsi eu des problèmes de repérage sur une boucle de batterie stéréo avec une énorme ambiance compressée (Melodyne, basculant automatiquement en mode percussif mono, peinait à reconnaître les notes quand je l’ai passé en mode polyphonique, signe qu’il manque sans doute un mode ‘Polyphonique percussif’ pour ce type de tâches) et sur un riff de guitare électrique saturée (les algos de Celemony ont détecté des notes sur des harmoniques qui n’avaient rien d’essentiel, de sorte que j’ai dû faire un peu d’éditing pour retrouver une partie propre). Et tant qu’on en est aux doléances, disons clairement à PreSonus et Celemony qu’on apprécierait grandement de bénéficier des Groove de quantisation extraits par Studio One à l’intérieur de Melodyne, histoire de se passer de l’Elastic Audio qui a vite fait de glitcher dès qu’on lui en demande un peu trop…
Orienté Objet
En fouillant un peu sur la façon dont Melodyne a été intégré à Studio One, on s’aperçoit vite d’une autre nouveauté de taille : le plug-in de Celemony est placé, non pas en Insert de piste, mais en Insert du segment audio qu’on édite. En d’autres termes, Studio One gère désormais les effets au niveau des événements audio de manière non destructive, tout comme dans Samplitude (en un peu moins poussé toutefois). Imaginez que vous ayez à rajouter un flanger sur une voix lead à l’endroit des refrains uniquement : avec un séquenceur classique, il vous faudra soit deux pistes différentes pour cette voix, avec leurs inserts respectifs, soit une piste sur laquelle vous ferez une automation de l’effet. Grâce à l’approche orientée objet, vous vous contentez d’insérer votre flanger sur la portion de voix du refrain, sans avoir à toucher au reste de votre piste initiale. Une logique extrêmement puissante et qui permet de gagner bien du temps lorsqu’on l’intègre à sa façon de travailler, tout en évitant d’encombrer inutilement la table de mixage principale.
La chose est plus d’autant plus intéressante qu’elle permet d’intervenir à l’échelle du slice. Lorsqu’après une détection des transitoires, vous divisez une boucle audio en slices, chaque tranche est alors considérée comme un événement audio… avec ses propres effets en Insert, donc ! Du coup, il est tout à fait possible d’ajouter une réverbe sur la caisse claire – et sur cette dernière seulement – d’une boucle de batterie stéréo…
Trois choses à propos de ces Event FX : la première, c’est qu’il n’est pas possible de faire des automations les concernant (ou alors je n’ai pas trouvé comment faire). La seconde, c’est qu’on ne dispose que d’inserts mais pas d’envoi comme c’est le cas dans Samplitude (dommage, notamment pour mon exemple de slices que j’aurais bien voulu envoyer dans une réverbe unique plutôt que de mettre un insert sur chaque slice). Et la troisième, c’est qu’il faudra les utiliser avec parcimonie, sous peine de voir la jauge de consommation CPU grimper en flèche…
Sauf que, comme dirait Actarus en sautant dans la tête de Goldorak tout en troquant son costume de babacool orange pour une tenue digne d’une meneuse de revue au Lido :
TRANS-FOR-MA-TION !
PreSonus a en effet pensé à la consommation CPU/RAM en mitonnant une fonction ‘Freeze’ sobrement baptisée Transform et qui s’avère relativement puissante. D’abord parce qu’elle est très simple à mettre en œuvre : un clic suffit pour transformer un clip MIDI pilotant un instrument virtuel en un clip audio, ou pour effectuer un rendu d’une piste blindée d’effets, et évidemment, un clic suffit pour dégeler tout cela.
Là où ça devient intéressant, c’est que la chose peut se faire au niveau du clip ou au niveau de la piste, et qu’elle est indépendante de ce que vous faites en termes d’arrangement. Si sur une piste, vous disposez d’un Clip A puis d’un Clip B, le fait de geler la piste ne bloque en rien ces éléments : vous pouvez placer B avant A, couper l’un et le mettre au milieu de l’autre et lorsque vous dégèlerez tout ça, vous retrouverez toutes les modifs que vous aviez faites avec les éléments quand ils étaient gelés. On est donc très loin du bounce à peine amélioré qui nous est proposé dans nombre de séquenceurs…
Voici une bonne idée qui permet de travailler plus vite, mais elle n’est pas la seule, comme nous allons le voir. PreSonus semble en effet extrêmement soucieux de faire de Studio One un logiciel efficace en termes de productivité et de workflow.
Vite et bien
Entre autres nouveautés de ce côté, on évoquera les pistes Dossiers qui permettent bien sûr de rationaliser l’organisation du projet, mais aussi et surtout de gérer le groupement des pistes à l’intérieur du dossier ou leur affectation à un bus d’un clic unique. Un bonheur pour se mitonner un bus batterie, un bus cordes et un bus cuivres par exemple, sans avoir à passer des plombes à faire les routings piste par piste.
On saluera également l’apparition de la Track List qui permet d’avoir une vue d’ensemble de toutes vos pistes, avec des critères permettant de filtrer l’affichage de la fenêtre d’arrangement par type. Au gré de ces derniers, vous pouvez ainsi ne visualiser que les pistes audio, ou encore les pistes d’automation, les instruments, etc. Et vous pouvez même vous faire vos propres presets pour accommoder les vues à votre convenance. L’intérêt de la chose ne saute pas aux yeux sur un petit projet, mais sur un gros bébé de 32 pistes ou plus, il devient difficile de s’en passer tant cette fonction évite de passer son temps à scroller ou à jouer avec le zoom de la fenêtre d’arrangement.
Elle est également intéressante au niveau de l’édition d’une séquence car vous pouvez désormais, à partir du même piano roll, agir sur plusieurs pistes MIDI en même temps. Vous reconnaitrez les notes de chaque partie à ce qu’elles reprennent la couleur de leur piste, et pourrez ainsi mener les éditions et saisie d’une multitude de pistes simultanément en vous basant sur leurs couleurs ou en filtrant les affichages grâce à la Track List. L’intérêt sautera aux yeux de ceux qui écrivent de la musique orchestrale ou utilisent des instruments virtuels comportant de nombreuses articulations : on peut ainsi écrire un quatuor à cordes sans avoir à faire d’incessants aller-retours entre 4 piano rolls…
Seul reproche et qui vaut d’ailleurs pour tout le logiciel : le nom des pistes dans le track list est écrit avec des polices de caractères minuscules, parfois ton sur ton (gris sur gris foncé) et rebutera peut-être les utilisateurs qui ne disposent pas d’un grand écran de bonne qualité ou souffrent d’un déficit visuel. En dépit d’une excellente ergonomie et de fonctions bien pensées, PreSonus a donc encore une belle marge de progression à faire en termes d’accessibilité, ce qui, reconnaissons-le d’ailleurs, est souvent le cas aussi de la concurrence. On attend donc un peu plus de possibilités dans la personnalisation de l’interface, que ce soit au niveau de la taille de certains affichages ou des couleurs utilisées…
Finissons enfin les nouveautés du côté de la partie Mastering et qui se résument pour l’essentiel à la prise en charge du format d’image DDP, à l’édition des PQ et à un système d’analyse du Loudness qui propose quantité d’infos intéressantes pour réaliser votre mastering : plage dynamique, niveau de crête et niveau RMS pour chacun des canaux droit et gauche, etc. A n’en pas douter, même si elle ne retiendra pas l’attention de tout le monde, cette partie est bien plus qu’un bonus dans le produit. Pourquoi ? Parce qu’elle est réellement imbriquée avec le reste du soft : si au moment du mastering d’un titre, vous vous rendez compte d’un problème dans l’équilibre spectral qu’une EQ discrète ne parvient pas à résoudre, c’est probablement parce que le problème vient du mixage. Là où Studio One est intéressant, c’est qu’en un clic, vous pouvez basculer dans la partie arrangement et mixage du morceau, en sachant que chaque modification que vous porterez alors sera automatiquement répercutée sur le rendu du morceau dans la partie mastering.
Tout cela nous amène d’ailleurs aux nouveautés à relever parmi les effets et instruments virtuels du logiciel.En termes de Workflow, c’est très bien vu, même si cette section pourrait être plus complète encore : A quand la gestion de morceaux de références, toujours galère à gérer avec les éditeurs audio ou les séquenceurs du marché, si pro soient-ils (et ce n’est pourtant pas la mer à boire que de prévoir un player de fichiers Flac ou WAV avec possibilité de mettre des repères et de boucler des portions…) ? A quand la gestion d’un aperçu ‘Save for the web’ comme le propose Sonnox avec son Fraunhofer Pro-Codec ? A quand peut-être aussi l’intégration de plug-ins de restauration audio, puisqu’on parle de mastering… Sans aller jusqu’à intégrer un Izotope RX, on ne cracherait pas sur un spectrogramme avec les fonctions d’édition qui vont bien… Poursuivons en évoquant quelque chose qui sera peut-être un détail pour vous, mais qui pour d’autres voudra dire beaucoup : l’intégration de SoundCloud depuis la version 1.5 du soft. Véritable Youtube de l’audio, SoundCloud est sans doute aujourd’hui LA solution d’hébergement de fichiers audio la plus performante du web. Certains l’utilisent comme un bête ersatz de MySpace mais l’outil est bien plus intéressant que cela dans la mesure où il permet le partage public ou privé, avec ou sans téléchargement possible, de fichiers audio dans des résolutions et dans formats divers et variés. Bref, un outil bien utile pour les musiciens et qui a déjà été intégré dans quantité d’applications mobiles sous iOS ou Androïd. Quoi de plus naturel donc que de retrouver SoundCloud dans son séquenceur, histoire de gagner encore un peu plus de temps ? Et le mieux, c’est que PreSonus a bien fait les choses : il ne s’agit pas d’un bête relais vers votre navigateur Internet comme le propose Steinberg dans la version 6.5 de Cubase pour mettre vos mixdown en ligne, mais d’une intégration complète au navigateur de fichier et qui marche dans les deux sens : une fois que vous avez autorisé Studio One à accéder à votre espace SoundCloud, vous pouvez certes faire vos mixdown dans le cloud, mais les fichiers hébergés sur ce dernier sont également accessibles dans le navigateur de fichiers du logiciel, à la rubrique serveur. Ca veut dire que vous pouvez les pré-écouter d’un clic, mais surtout que vous pouvez les glisser dans la fenêtre d’arrangement comme n’importe quel fichier local. Le téléchargement se lancera automatiquement et vous récupèrerez votre fichier prêt pour bosser. C’est beau la modernité !
Il plug dans mon cœur comme il plug sur la ville
Du côté des plug-ins d’effets, PreSonus a eu à cœur de combler l’un des principaux manques de Studio One en ajoutant un processeur à convolution à l’arsenal du logiciel. Livré avec une bibliothèque de 1,11 Go de réponses impulsionnelles, OpenAir vient ainsi compléter de fort belle manière les réverbes algorithmiques déjà présentes (MixVerb et RoomVerb), en offrant des simulations d’espaces réalistes : un plug-in qui ne gère pas hélas la True Stereo, mais qui se révèle simple à utiliser et qui, excellente idée de PreSonus, se voit accompagné du plug-in IR-Maker. Comme son nom l’indique, ce dernier simplifie la création de vos propres réponses impulsionnelles : vous installez votre micro dans la pièce par rapport à vos enceintes et le plug envoie la sweep qui va bien pour recueillir ensuite le signal capté par le micro et générer l’Impulse. La chose est d’autant plus la bienvenue qu’elle n’affecte pas seulement OpenAir.
En effet, PreSonus a profité de l’occasion pour améliorer son simulateur d’ampli guitare nommé Ampire, qui passe ainsi en version XT. Quoi de neuf dans ce dernier ? Enormément de choses : un nouveau look, de nouvelles modélisations d’ampli mais aussi et surtout une section d’effets intégrée et un tout nouvel étage de sortie, permettant désormais bien plus de latitude grâce à la gestion du positionnement des micros et à la simulation de baffle qui repose désormais sur des réponses impulsionnelles. Autant le dire, avec 8 pédales d’effets seulement (Wah, Tube Driver, EQ, Modulation, Pan, Tremolo, Delay et Reverb) au chaînage quasi-fixe (vous pouvez déterminer sur 6 pédales si l’effet intervient avant ou après l’ampli), Ampire XT n’a pas les épaules pour rivaliser avec la polyvalence et les possibilités d’un Guitar Rig. Mais il est autrement plus simple à utiliser du coup, et offre surtout un son bien meilleur et bien plus configurable que le précédent Ampire grâce à la gestion du positionnement des microphones et la convolution utilisée pour la simulation de HP. La bonne idée de PreSonus, c’est aussi de proposer, en marge des classiques Combos, 2×12 et 4×12, un ‘IR Cabinet’ qui vous permet de charger 3 réponses impulsionnelles de votre choix : des fichiers que vous aurez récupérés sur le net ou encore que vous aurez bricolés vous-même grâce à l’IR-Maker, à partir de votre propre Cabinet.
Au nombre des regrets, on déplorera toujours l’absence d’un de-esser (même si le compresseur multibande peut certes faire le job) et plus encore d’un Transient Designer : difficile en effet de se passer de ce genre de joujou quand on a pris l’habitude de l’utiliser. Rien de bien grave toutefois et on peut compter sur PreSonus pour combler ces manques lors d’une prochaine mise à jour. On saluera en outre l’arrivée du Tone Generator (générateur de signal toujours utile pour les opérations de calibrage) et de Dual Pan, un utilitaire permettant de gérer vos panoramiques différemment de ce qui est prévu de base par le logiciel, avec un potar pour chaque canal, une balance et la possibilité de choisir la loi de panoramique gérant tout ça : une addition bienvenue, mais qui aurait pu tout aussi bien se loger dans la tranche de console en option, selon moi.
Certains seront peut-être déçus d’apprendre qu’aucun nouvel instrument virtuel n’a été ajouté au ROMpler Presence, au synthé Mojito, au sampler SampleOne et au DrumSampler Impact. Aucun ? Ce n’est pas tout à fait vrai puisque Studio One (dans sa version Pro uniquement) est désormais livré en bundle avec la Komplete Elements de Native Instruments : une excellente idée tant ce petit bundle embarquant les versions Player de Guitar Rig, Reaktor et Kontakt, et accompagné de 3Go de sons se révèle séduisant et polyvalent à l’usage…
Et puisqu’on parle de sons, il convient de s’arrêter sur une autre nouveauté du logiciel : le format Music Loops.
Tout un projet dans une boucle
En complément du format Audio Loops qui permet d’associer un tempo à une boucle audio encodée en lossless (en gros, une sorte de fichier Acidifié comme l’avait imaginé Sonic Foundry à l’époque de la sortie d’Acid), PreSonus propose désormais le format Music Loops qui va beaucoup plus loin. Il s’agit en effet d’un conteneur susceptible d’embarquer tout ce qui peut constituer une boucle : séquence, preset de son d’un instrument virtuel, effets et rendu audio de tout ce petit monde.
Quel intérêt ? Comme tous les MAOistes, il vous arrive de faire mumuse avec votre séquenceur pour, une heure plus tard, avoir tout juste accouché d’une base de compo, d’un riff ou d’un groove quelconque. Vous êtes encore très loin encore d’avoir un morceau abouti mais l’idée mérite qu’on la creuse et vous finirez probablement votre session de travail en sauvegardant votre projet sous un nom explicite, tel que ‘Sans titre 259’, ‘Pouet 18’, ‘PlacaPlaca02’ ou ‘Riffquituesamamienew’.
Nous sommes d’accord : il n’est pas forcément nécessaire dans ce cas de sauvegarder votre projet en entier. Avec Studio One, on se contentera de placer les locateurs de part et d’autre de la boucle intéressante et de l’exporter au format Music Loops. Elle rejoindra ainsi toutes les boucles disponibles dans le navigateur du logiciel. Boucle qu’il suffira de cliquer-glisser dans n’importe quel autre projet par la suite pour retrouver tous ses éléments constitutifs : séquence MIDI, réglage du VSTi utilisé et des effets… et même un rendu audio de la boucle dont nous verrons ensuite à quoi il peut bien servir. Bref, un Music Loop, c’est en quelque sorte un mini-projet en soi.
Au-delà de cet archivage pratique, le format est d’autant plus intéressant qu’il facilite l’échange avec d’autres utilisateurs du logiciel. Car depuis la dernière mise à jour de Studio One, il faut savoir que…
PreSonus fait dans le social !
En plus de vous permettre de gérer par drag & drop vos différentes ressources et votre compte SoundCloud, le navigateur de la partie droite du logiciel vous donne aussi accès aux serveurs PreSonus, sur lesquels vous pouvez récupérer toutes sortes de goodies partagées par la communauté des utilisateurs : Drum Maps pour telle ou telle batterie virtuelle, chaines d’effets, presets, boucles diverses et variées… Une bonne idée qui permet à Studio One de ne pas dépendre que de la force de développement de PreSonus pour évoluer. Ce recours au communautaire n’a rien de très nouveau (le succès de Reaper est en partie basé là-dessus) mais il est agréable de le voir bien intégré au soft, et bien pensé.
On pourrait craindre en effet que la chose ne soit pas très intéressante à cause de l’hétérogénéité des configurations d’utilisateurs. Mais PreSonus a trouvé quelques parades intéressantes : c’est précisément pour cette raison qu’une Music Loops intègre toujours un rendu audio de la boucle. De la sorte, même si vous ne disposez pas des effets et instruments qui ont été utilisés pour la créer, vous pouvez en profiter. Bref, c’est bien vu, et on espère franchement que la sauce va prendre avec la communauté d’utilisateurs, ce qui semble pas mal parti.
On espère aussi que l’excellent navigateur de presets/plug-ins/boucles sur lequel repose une grosse partie de l’ergonomie du logiciel se sophistiquera un peu. Sans aller jusqu’à gérer une notation comme on le voit chez Sony ou Steinberg, on aimerait bien avoir la possibilité de parcourir ce petit monde d’une façon un peu plus organisée, par catégorie ou tags, par genre ou type de son : pouvoir voir tous les sons de basse disponibles, par exemple, quel que soit l’instrument ou la collection de boucles dont ils proviennent. Sur les instruments virtuels, on voudrait aussi une préécoute à l’aide d’un fichier MIDI définissable (une note répétée à la noire sur 4 octaves par exemple), histoire de ne pas aller à la pêche aux moules et d’essayer un à un tous les presets, dont les noms ne sont pas toujours évocateurs (d’où les limites d’un système de moteur de recherche en vis-à-vis d’un système de tags ou de catégories). Enfin, on voudrait avoir accès à tous les presets de plug-ins tiers directement dans ce navigateur. A l’heure actuelle, on dispose de ceux des plugs PreSonus et c’est bien, mais pour faire une recherche dans la base de patches Kontakt par exemple, il faut ouvrir ce dernier. Il n’y a donc aucun moyen d’avoir une vue globale des sons ou patches dont on dispose dans son arsenal. La chose est sans doute difficile à réaliser mais elle n’en est pas moins cruciale pour simplifier la vie de l’utilisateur…
Ce que Studio One n’est pas
Les nouveautés sont donc nombreuses dans cette version 2 et font de Studio One une belle petite arme de production massive. Toutefois, en regard de la concurrence, force est de constater que le logiciel est loin d’être exhaustif du point de vue des fonctionnalités. Vu sa vocation généraliste, on ne sera guère étonné de n’y trouver ni Step Sequencer comme dans un Fruity Loops pensé pour l’electro et le hip hop, ni système d’arrangement en temps réel comme dans le Live d’Ableton ou le Mainstage livré avec Logic. On ne s’étonnera pas non plus d’y chercher vainement les fonctions phares qui font l’identité des grands noms de la séquence : pas d’éditeur logique, de macros ni de VSTexpression à la Cubase, pas d’Environnement à la Logic, pas de langage CAL comme chez Sonar, pas de scripts ou de skins comme dans Reaper, etc. On serait plus intrigué de voir que certaines fonctions courantes ont été mises de côté :
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Pas d’éditeur de partition
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Pas de gestion du multicanal
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Pas d’export/import au format OMF (même si on dispose de l’OpenTL et du Cubase Track Archive qui intéressera les Cubasiens)
Interrogé à ce sujet, le ‘Technology Evangelist’ Rodney Orpheus, en charge de faire connaître Studio One, a été très clair lors de notre rencontre dans les locaux de la SAE Paris : vu qu’une partie de l’équipe de développement du soft bossait anciennement sur le Nuendo de Steinberg, si Studio One avait dû gérer le surround, il le ferait depuis longtemps. De fait, il s’agit bien d’un séquenceur orienté Musique : pas broadcast, pas son à l’image. Juste musique. Et c’est ce qui explique l’absence du multicanal, absence qui devrait perdurer dans les futures versions du logiciel vu qu’il s’agit d’un parti pris.
Quant à l’éditeur de partition, Rodney nous a expliqué que la chose n’est pas inenvisageable, même si elle passerait sans doute par l’intégration d’un soft tiers comme cela a été fait avec Melodyne. Il s’agit de ne pas réinventer la roue et quand on sait ce qu’implique le développement d’un tel éditeur en termes de travail, on comprend que les gens de PreSonus préfèrent porter leurs efforts sur d’autres choses…
Pour le reste, tout est ouvert, l’équipe restant à l’écoute de sa communauté d’utilisateurs… Une chose est sûre en tous cas, la force de Studio One réside dans son ergonomie et sa simplicité : il faudra savoir intégrer les fonctions judicieusement sous peine de voir cet excellent logiciel se transformer en usine à gaz…
Conclusion
Je n’ai qu’un mot à dire : Bravo ! Avec cette deuxième version, Studio One enfonce le clou et risque de bousculer le petit marché des DAW traditionnelles qui manquait sérieusement d’animation. Certes, il ne fait pas grand-chose que ses concurrents ne font pas, mais il le fait bien souvent mieux parce qu’il le fait plus simplement, tout en étant d’une stabilité exemplaire (aucun plantage en deux mois d’utilisation). Or, cette simplicité a un énorme impact sur la créativité de l’utilisateur car le passage de l’idée à la réalisation de l’idée est beaucoup plus fluide, et on reste concentré sur ce qu’on doit faire plutôt que de penser à la façon dont on doit s’y prendre. Quand on veut faire de la musique, il n’est pas normal de devoir passer la moitié de son temps à faire du routing ou à se balader dans des menus aussi bavards qu’inutiles : les auteurs de Studio One l’ont bien compris et, à n’en pas douter, il va falloir que les autres éditeurs de séquenceurs le comprennent aussi sous peine de perdre de la clientèle. Et c’est sans parler de l’intégration de Melodyne qui est un énorme plus, à l’heure où la concurrence donne le change avec des algos qui ne sont pas toujours à la hauteur de leur prétention…
En vis-à-vis de ces choses essentielles, on apprécie également le fait que PreSonus ait à cœur de développer un séquenceur en phase avec son temps : excellente intégration de SoundCloud, partage de ressources entre utilisateurs, etc. Il y a certes encore bien des choses à faire, des manques à combler (l’OMF notamment, ou toute autre solution qui simplifierait le dialogue avec d’autres séquenceurs) et Studio One a encore une confortable marge de progrès, mais on va assurément dans la bonne direction.
Reste à parler du prix, relativement agressif, et décliné de 99 à 399 € selon les versions, histoire de s’adapter à tous les budgets en faisant l’impasse sur des fonctionnalités plus ou moins gênantes pour les uns ou pour les autres. Pour l’essentiel, sachez que la principale différence entre la version Artist et Producer tient, outre des banques de sons fournies ou non en bundle, dans le fait que la première ne supporte pas les plug-ins tiers ni le format MP3. La version Pro, quant à elle, amène beaucoup plus de choses comparé à ce qu’on gagne au niveau Producer : des plug-ins (Open Air, IR-Maker, Multiband Dynamics), la gestion des effets hardware externes via le plug Pipeline, l’intégration de Soundcloud, le support des vidéos Quicktime, des calculs sur 64 bits et surtout la partie Mastering du soft, ainsi qu’une version complète de Melodyne Essentials (livrée en version d’essai dans les versions Artist et Producer) et le bundle Komplete Elements.
Si l’on considère que ces deux derniers éléments valent à eux seuls 150 €, c’est assurément la version Pro qui représente le meilleur rapport qualité/prix du trio. Et personnellement, je ne suis pas certain de l’utilité d’avoir une gamme aussi décomposée : ne pas proposer la gestion du MP3, de Soundcloud et des plug-ins tiers me semble un tantinet mesquin pour un soft estampillé ‘Artist’. Du coup, il me semblerait plus intelligent de n’avoir que deux versions : la Producer et la Pro, pour disposer de deux produits qui se tiennent… Mon conseil en tout cas : achetez la version Pro. Vous gagnerez et du temps et de l’argent sur la longueur.
Et si vous hésitez avec d’autres séquenceurs généralistes, je vous encourage surtout à essayer la version de démonstration du logiciel téléchargeable sur le site de Presonus, et à comparer ses mérites avec les versions de démonstration des logiciels concurrents, quand elles sont disponibles, pour vous faire votre idée. Dans cette confrontation, les uns feront valoir leurs excellents bundles d’effets et d’instruments (Sonar, Samplitude), d’autres leur rapport qualité/prix stupéfiant (Reaper notamment), mais je ne suis pas trop inquiet sur la façon dont Studio One saura tirer son épingle du jeu dès que vous commencerez à quitter les spécifications techniques des yeux pour commencer à faire de la musique avec le soft.