La miniaturisation tellement à la mode durant les années 2000 est maintenant devenue un standard et les produits offrant des performances étonnantes en regard de leur taille sont monnaie courante.
On se souvient de l’étonnant Baby Bomb, ampli de puissance très efficace de chez Mooer ne dépassant pas l’encombrement d’une de leur pédale démontrant que dans la vie, il n’y a pas que la taille qui compte. L’Amp1 de BluGuitar nous propose 100 watts avec le préampli et l’ampli de puissance dans un même boîtier argenté conçu par Thomas Blug, guitariste allemand très connu en son pays mais beaucoup moins dans le reste du monde malgré une activité musicale de plusieurs décennies. Cet Amp1 prend le relais de la version précédente et affiche la mention « Mercury Edition ». Une appellation fort aguicheuse que nous détaillerons dans ces lignes. Faisons tout d’abord le tour de l’engin pour en comprendre sa philosophie.
Une pléthore de réglages
L’appareil essaie de flatter le conservatisme à peine avoué du guitariste en affichant un vrai look d’ampli. Il est toujours rassurant d’avoir des potards à manipuler et la présentation est assez intuitive. Trois footswitches s’offrent à nous ; celui de gauche gère la bascule entre les deux canaux, celui du milieu le boost de gain (et pas de volume) et celui de droite l’activation de la réverbe. Au-dessus, nous avons le potard de volume du son clean qui sera l’unique réglage de ce canal. Suivent ensuite le gain et le master du second canal qui gère les saturations, puis l’égalisation trois bandes avec basses, mediums et aigus. Le réglage de taux de réverbe ferme la marche avec un gros potard de Master général le surplombant. On remarque une petite chose lumineuse en plein centre de la façade avec la mention « nanotube 100 » gravée sur le boîtier. Déjà employée avec le précédent Amp1, cette mini lampe est censée offrir les mêmes prestations que les grosses lampes de grand-père, ce que nous vérifierons dans quelques instants.
La tranche supérieure de l’ampli dispose de plusieurs connexions. L’entrée guitare bien entendu suivi d’une boucle d’effets pouvant être assignée en série ou en parallèle des canaux du préampli en fonction des effets utilisés, plutôt malin pour les spatialisations. La prise « Rec Out » servira à brancher un casque ou une carte d’acquisition audio pour bénéficier d’un simulateur de baffle et permettant même à l’Amp1 de fonctionner en silence sans connecter de baffle grâce à sa charge interne ou « auto load ». Cette caractéristique transforme cet ampli surpuissant en préampli de studio silencieux très efficace comme vous le constaterez dans les exemples audio. Deux prises pour haut-parleur en huit et seize Ohms permettent le branchement au baffle, attention à bien utiliser un câble HP sous peine d’endommager votre matériel. Une prise pour footswitch externe ou MIDI précède l’interrupteur de mise en marche. Cette prise assigne les contrôles à un pédalier de la même marque disponible séparément (le Remote1) ou à n’importe quel contrôleur MIDI moyennant l’achat d’un adaptateur MIDI1 au tarif beaucoup trop élevé de 50 euros. Le Remote1 affiche quant à lui un tarif approximatif de 300 euros, lui aussi irréaliste et surtout superflu car les switches intégrés à l’Amp1 peuvent assumer deux tâches en mode direct ou en mode preset. Le mode Direct contrôle les canaux, le boost et la réverbe de façon normale alors que le mode Preset nous permet d’assigner une fonction de rappel de n’importe quel paramètre du pédalier et ainsi lui donner un petit côté multi-effets.
La tranche gauche présente plusieurs petits réglages de volume et de tonalité pour tous les canaux sauf le clean qui ne dispose que d’un Tone. Les réglages pour le canal vintage sont par contre absents. On trouve aussi un réglage du taux de boost ainsi que des mini-switches pour mettre la boucle d’effets en série ou en parallèle et pour activer le noise gate. Ce noise gate peut fonctionner en modes Soft, Metal ou être tout simplement désactivé.
Le packaging du produit est bien fait avec une mention spéciale pour la notice, très bien réalisée et pleine de conseils qui vont même au-delà de l’Amp1 pour parler de son, de prise de son, de tonalité, de la place des instruments dans le mix, etc. Une petit trousse noire permet de ranger soigneusement l’ampli après lui avoir copieusement écrasé la tête avec de grosses Doc Martens bien sales durant la répète.
Il est aussi à noter que rien ne sépare cosmétiquement cette Mercury Edition de la précédente version. Le site internet de BluGuitar ne mentionne que des modifications sonores que nous constaterons ou non lors de ce test.
Tu vas te prendre une baffle
Prenons une Charvel San Dimas japonaise équipée de deux micros humbuckers Seymour Duncan TB4 et SH1N ainsi qu’un baffle 2×12 équipé d’un haut-parleur Celestion Vintage 30 repiqué par un Shure SM57. Le canal clair est un régal avec une excellente restitution des micros. Le son est brillant et assez compressé, idéal pour de beaux riffs funky des années 70/80.
La position milieu de la guitare enclenchant les deux micros en simultané fait des miracles et on entend déjà l’influence du Nanotube quand on monte le volume du canal clean tout en baissant le Master : ça crunche légèrement.
Autre constatation : c’est fort, très fort. La mention 100 watts n’est pas usurpée, loin de là ! Il sera toujours étonnant d’entendre le rendement d’un appareil aussi petit. Pour autant, il est tout à fait possible de doser précisément le volume final, le potard de master étant très progressif avec une course assez étendue pour ne pas devoir le régler avec une pince à épiler.
Boost de gain réglé à la moitié et mis en service, le son clean gagne en corps et prend de l’épaisseur pour ne réellement cruncher qu’une fois le boost à fond. Mon Dieu, ces minuscules potards de tranche ne sont vraiment ni lisibles, ni accessibles… C’est une vraie épreuve de les régler tellement ils sont serrés et petits.
- cleansansetavecboost00:37
- vintagesansetavecboost01:08
- classicsansetavecboost01:10
- modernsansetavecboost01:11
Canal overdrive réglé sur Vintage, on prend une vraie baffe. Quel crunch, quelle dynamique ! Même constat avec le Classic, c’est un vrai bonheur. La saturation peut se révéler généreuse mais toujours à l’écoute des variations d’attaque et de volume. Profitons-en pour mettre la réverbe en service et mouiller un peu le son. La prestation est honnête sans atteindre des sommets, l’unique réglage agissant à la fois sur le mix de l’effet et sur son déclin. Il ne faudra pas dépasser la moitié sous peine d’avoir un signal totalement noyé dans une mer de réverbération incontrôlable. Une fois le boost enclenché en mode vintage, l’univers Marshall débarque. JCM800 addicts, ce réglage est pour vous ! Tout le hard rock des années 70 est ici et on se prend à jouer le riff de Carry On My Wayward Son de Kansas.
Le boost enclenché sur le mode Classic fait apparaître un léger souffle tout à fait normal à partir de ce taux de saturation qui nous donne l’occasion d’essayer le noise gate et là… C’est la déception. Mini-switch sur Soft, l’effet est trop long à se fermer et laisse passer le souffle beaucoup trop longtemps. Sur Metal il coupe carrément le son quand on baisse un peu le volume. Chose absolument stupide : dans la chaîne d’effets interne, le noise gate est placé après la réverbe, ce qui a pour conséquence de couper la queue de l’effet, même en mode Soft… Ce choix est anti-musical et mange toute la dynamique de la réverbe et du jeu alors qu’il aurait été si simple de proposer un petit potard identique aux autres et gérant le seuil. La section d’égalisation est en revanche très efficace et permet de belles variations sans devenir caricaturale.
- testreverb00:46
- testeq01:21
- testdynamique3canaux01:06
- testnoisegate00:45
Le mode Modern est celui qui offre le plus de gain. La coloration Mesa Boogie est claire, les basses sont rondes et le grain très droit. Les modes Vintage et Classic sont très britanniques, celui-ci est très américain. Le Rectifier a manifestement été le modèle lors de la conception de ce mode Modern qui est le moins convaincant du lot. Même boosté on ne trouve pas de réelle hargne typique du métal actuel mais plutôt une saturation honnête et importante certes, mais trop froide et informe.
À nouveau, le noise gate réglé sur Metal mange toute la dynamique et il est impossible de baisser le volume de la guitare ne serait-ce qu’un peu sous peine de se voir castré tel le caniche sur la table d’opération le jour de ses 10 mois.
La prise directe délivre une simulation tout à fait convenable, proche d’une prise micro traditionnelle. Le rendu est suffisamment satisfaisant pour réaliser de bonnes maquettes sans toutefois être au niveau pour enregistrer un album dans les règles de l’art.
- direct00:45
- mix03:21
Ayant testé la première version du Amp1, votre humble serviteur a constaté une très légère différence au niveau des saturations, un poil plus ouvertes mais ne justifiant pas forcément la mise en avant de la mention « Mercury Edition » et surtout pas un nouvel achat pour les anciens possesseurs.
Y a un Blug ou pas ?
Ce produit est pertinent pour ceux qui en ont assez de se briser le dos pour aller répéter ou les guitaristes souhaitant disposer de beaux sons clairs et crunchs avec une puissance phénoménale de 100 watts sous le pied. La Nanotube est toujours aussi convaincante dans ce domaine et apporte une vie quasiment équivalente aux bonnes vieilles lampes. En revanche, le métalleux risque d’être déçu par le son hi-gain ainsi que par le noise gate qui, en plus d’être mal placé dans le chaînage interne, oblitère toute expressivité pourtant bien présente dans ce style de musique. Le tarif de 699 Euros ne le place pas dans les pédaliers abordables, ce qui oriente bien entendu l’opinion vers un peu plus de sévérité. Un bon élément, mais qui présente quelques points à revoir.