Ca y est, votre dernier tube de l'été du mois de mars est mixé, vous êtes satisfait du résultat, mais la confrontation avec la dernière grosse production à la mode est douloureuse : à côté du dernier Beyoncé, le son est faiblard, il y a moins d'aigus, de grave, de médium, de patate... Bref, c'est la déprime. Heureusement, des logiciels existent pour essayer de mettre votre production au niveau. Focus sur la dernière version d'un ténor du genre, j'ai nommé Ozone 5 d'iZotope.
Ozone, c’est un peu une institution et il reste le produit phare de l’éditeur iZotope qui a décidé de fêter le dixième anniversaire de son poulain en sortant une cinquième mouture. Au menu, quelques nouveautés parsemées dans les différents modules composant le plug-in, et une version « advanced », avec encore plus de paramètres, de fonctionnalités et des modules disponibles séparément dans le séquenceur.
Mais un plug-in de mastering, ça sert à qui ? à quoi ?
Home-mastering
Normalement, une fois le morceau de musique mixé par l’ingénieur du son, il est confié à un autre ingénieur, spécialisé dans le mastering, qui va travailler sur votre mix afin de le préparer au support sur lequel il sera diffusé (CD ou fichier numérique le plus souvent). Grâce à cette nouvelle paire d’oreilles toute fraîche, généralement bien équipée en enceintes et outboards/plug-ins, le morceau sera bonifié et ses principaux défauts gommés.
Mais à l’époque du home-studio, les musiciens et les ingénieurs du son travaillent de plus en plus chez eux et font de plus en plus de choses eux-mêmes. Alors pourquoi pas le mastering ? Évidemment, la phase d’apprentissage sera longue, l’art du mastering étant au moins aussi complexe que celui du mixage, mais les temps sont durs et le home-studiste aura peut-être la joie d’améliorer le rendu sonore de ses productions, sans pour autant rivaliser avec les professionnels, cela va de soit.
Ozone est peut-être une aubaine pour ce home-studiste désireux de s’attaquer au mastering, avec son prix relativement accessible (200€) et son côté « tout-en-un/couteau suisse/chez-casto-ya-tout-c’qui-faut ». Mais que se cache-t-il exactement dans cette boîte à tout faire ?
Des modules
Ozone, c’est en fait huit plug-ins en un. Il intègre deux égaliseurs paramétriques, une réverbe hybride, un exciteur d’harmoniques, un compresseur multibande, un élargisseur de stéréo, un maximizer et une série d’analyseurs graphiques en tout genre. Avant de rentrer dans le vif du sujet, on installe Ozone 5, on branche la clé iLok ou on autorise le logiciel via le net, et on lance son séquenceur préféré. L’interface du plug-in se divise en trois parties : en bas les 7 modules, sélectionnables, dosables et activables, à droite la partie « monitoring visuel » avec les vumètres et enfin la fenêtre principale occupant la partie supérieure gauche de l’interface. Cette dernière sera différente suivant le module sélectionné.
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On note aussi la présence d’un « préset manager » très bien fait. Il vous permettra de charger/sauver un préset global, ou par module, et de modifier par la suite certains paramètres via quelques faders horizontaux. C’est très intelligent et cela permet d’adapter rapidement le préset à son mix.
Nous allons donc faire le tour du logiciel module par module en commençant par l’égaliseur.
Post ou pré-égalisation
Cette nouvelle version d’Ozone propose en fait deux égaliseurs, qu’il sera possible de disposer, à l’instar des autres modules d’Ozone 5, où l’on veut dans la chaîne de traitements. Il est difficile de faire plus complet que ces égaliseurs, qui sont des modèles du genre. Ils possèdent 8 bandes avec, pour chacune, la possibilité de choisir le type de filtre (bell, shelve ou pass), avec deux formes (analog ou vintage, inspiré des Pultec) pour les shelves, et trois (resonant, brick wall et flat – Butterworth -) pour les low/hi pass. Nous avons accès aux réglages de gain, fréquence et largeur de bande (Q) en dessous de la courbe graphique. Il est aussi possible de cliquer directement sur cette dernière afin d’ajuster ces trois paramètres. On pourra aussi disposer d’une représentation spectrale du fichier audio traité, en superposition de la courbe graphique de l’égaliseur, moyennant un peu de CPU.
On pourra donc faire des cocktails avec les huit bandes de l’égaliseur et mélanger les formes et types des filtres, mais il faudra choisir entre deux modes de filtres globaux : analog ou digital. Ce dernier mode autorisera des corrections plus précises. La version « advanced » (quatre fois plus chère !) propose quant à elle différents types de filtres numériques : un à phase linéaire à la manière d’un égaliseur numérique, un à phase « minimum » dont la réponse aux transitoires se rapproche plus d’un modèle analogique, et un « mixte » permettant de faire varier, pour chaque bande, la phase. De minimum (-1) à maximum (+1, le plus audible), en passant par la phase linéaire (0) et tous les intermédiaires possibles. Le mode chirurgical pourra être désactivé, afin d’utiliser les filtres de type « analogiques », mais à phase linéaire.
Sachez que l’égaliseur pourra fonctionner en mode stéréo (mêmes réglages sur le canal gauche et le canal droit), en mode L/R (réglages différents sur les canaux gauche et droit) et en mode M/S. Ce dernier mode permettra d’effectuer des corrections différentes sur le canal Mid (tout ce qui est au centre du mix) et le canal Side (tout ce qui est sur les côtés). Les applications sont diverses et variées, on pourra ainsi appliquer un léger boost dans les hauts médiums sur ce qu’il y a au centre du mix seulement. La partie graphique affichera alors deux courbes de couleurs différentes, une pour chaque canal. On note aussi une fonction sympathique : le fait de cliquer et d’appuyer en même temps sur la touche alt du clavier permet de rechercher une fréquence en activant un filtre passe-bande à pente très raide. Cela n’affecte pas le réglage de votre EQ et demeure très pratique pour trouver cette maudite fréquence que vous avez envie d’atténuer ou d’augmenter.
On termine ce tour d’horizon de l’égaliseur avec une fonction très intéressante dénommée « matching EQ ». Cette fonction vous permettra de « capturer » la courbe de réponse d’un enregistrement afin de l’appliquer, plus ou moins, sur celui que vous êtes en train de mixer. On pourra utiliser cette fonction en prenant comme référence un disque de chevet, afin d’appliquer une égalisation sur notre mix. Deux curseurs « amount » et « smoothing » permettent respectivement de coller plus ou moins au morceau de référence et d’adoucir la courbe de l’égalisation appliquée. On pourra aussi utiliser cette fonction afin de garder une homogénéité entre les différents morceaux d’un album. L’utilisateur n’aura plus qu’à se fier à ses oreilles pour doser plus ou moins l’égalisation. Une fonctionnalité vraiment très intéressante qui complète une section EQ de très haute volée.
Une touche de réverbe
Lors du mastering, on peut avoir besoin d’une réverbe afin de donner une cohésion spatiale au morceau, car certaines pistes de votre mix peuvent avoir des réverbes différentes. Une réverbe courte et dosée sporadiquement peut ajouter de l’ampleur au mix, et cela peut même aider à mélanger les pistes et ajouter un « vernis » sonore. On peut noter deux familles de réverbes utilisées dans le mastering. Les réverbes reproduisant un espace acoustique réel, généralement à convolution et permettant de placer les différents musiciens dans une pièce virtuelle, ou encore les réverbes de type « studio » qui sont artificielles et qui utilisent des algorithmes. Elles pourront néanmoins être préférées aux premières pour des raisons artistiques.
La section réverbe d’Ozone 5 est hybride, utilisant la convolution et des algorithmes. Plusieurs modes permettent de contrôler les premières réflexions : « room » pour un petit espace et des premières réflexions fortes, « plate » qui tente de reproduire le comportement d’une EMT 140, « hall » qui reproduit un grand espace avec des réflexions plus sombres, « theatre » pour un espace moyen avec peu de premières réflexions, « cathedral » pour un grand espace avec des réflexions claires et fortes, et « arena » pour un espace encore plus étendu. On pourra régler le pré-délai, le niveau des premières réflexions (uniquement sur la version Advanced). Les queues de réverbes pourront aussi être paramétrées, Ozone utilisant des algos pour ces dernières, et l’on retrouve le temps de déclin (decay) global, pour les hautes fréquences et les basses fréquences. Il convient donc de choisir un mode de premières réflexions pour ensuite régler les queues avec les réglages précités. Parmi les paramètres globaux de la réverbe, on retrouve un wet/dry classique, un contrôle de la largeur et deux filtres permettant de couper les hautes et les basses fréquences. On pourra d’ailleurs apercevoir le résultat dans une fenêtre affichant le spectre sonore de l’effet. La version advanced propose en plus un paramètre « crossmix » permettant d’ajuster la propagation du signal entre les canaux gauche et droit. Ce module propose aussi un mode M/S permettant de mettre plus de réverbe sur les côtés du mix, et moins sur le canal central, afin d’éviter de trop flouter la voix et/ou l’instrument lead.
D’une manière générale, il faut faire attention à ne pas surdoser le traitement, et faire régulièrement des comparaisons avec le son « dry », car il est très facile de pourrir un mix et le rendre trop flou. Si on dose bien l’effet et que l’on choisit le mode adéquat, on pourra gonfler le son tout en gardant une bonne précision. Un très bon module, même si l’on regrette l’absence de réglage de niveau pour les queues de réverbe, on ne peut contrôler que le decay.
La bande des multibandes
L’exciter est le premier module faisant partie du gang des multibandes, le module de compression et l’élargisseur de stéréo étant les deux autres. Dans Ozone 5, l’utilisateur aura le choix d’utiliser les mêmes bandes pour ces trois modules, ou un découpage en bandes qui n’a rien à voir. Le but du traitement multibande est de découper le signal en plusieurs bandes de fréquences, généralement 3 ou 4, basses, (bas et hauts) médiums et aiguës, afin de les traiter différemment. L’utilisateur devra donc choisir les champs d’action des différentes bandes de fréquences, par défaut la première agira entre 20 et 120 Hz (le bas et le sub de la basse de la grosse caisse généralement, la deuxième entre 120 et 2000 Hz (les fréquences fondamentales des autres instruments et la chaleur du mix), la troisième entre 2k et 10kHz (les harmoniques des instruments, les cymbales, les sibilantes des voix) et enfin la dernière entre 10k et 20kHz (ce que l’on appelle « l’air »). Évidemment, chaque mix est différent et on pourra modifier ces fréquences, en mettant chaque bande en solo et en écoutant, ou en utilisant la fonction learn du logiciel, qui permet de positionner automatiquement les filtres de crossover. Il sera possible, à l’instar de l’égaliseur, d’utiliser des filtres à phase linéaire (pour un son plus transparent) ou des filtres plus typés « analogiques » (pour un son plus coloré). À noter la présence d’un crossover hybride permettant de combiner le « meilleur des deux mondes », une distorsion de phase faible et une certaine « chaleur » sonore.
Ça nous excite
L’exciteur d’harmoniques permet de créer des fréquences harmoniques, afin d’ajouter de la brillance au mix pour les hautes fréquences, mais aussi de la présence ou du corps sur les autres bandes. Cela reste donc différent d’un égaliseur qui ne fait qu’amplifier les harmoniques déjà existantes. Certains exciters, comme celui équipant Ozone 5, utilisent la distorsion (à petite dose !) afin de créer ces fameuses harmoniques embellissant le mix. Ozone propose donc différents modes, 4 communs aux deux versions et deux uniquement pour la plus onéreuse. Le premier mode « retro » simule les caractéristiques des circuits à transistors en créant des harmoniques impaires qui décroissent lentement. Le mode « tape » simule, comme son nom l’indique, la saturation d’un magnéto à bande et un son un peu plus brillant. Le troisième mode « tube » met plus en valeur les transitoires et la dynamique du signal. Le mode « warm » est quant à lui l’opposé du mode « retro », car il crée des harmoniques paires qui décroissent rapidement. Les deux derniers modes, exclusifs à la version advanced, sont dénommés « triode » et « dual triode ». Le premier simule un circuit utilise une lampe 12AX7 et n’utilise qu’une moitié de la lampe pour un effet plus subtil que le second mode qui offre plus d’overdrive et un son plus chaud. D’une manière générale, les modes générant des fréquences harmoniques de type impair auront un son un peu plus agressif que ceux générant des harmoniques paires, apportant une couleur plus douce et musicale.
Côté paramètres, l’utilisateur aura accès, pour chaque bande, à la quantité d’harmoniques créées (amount), au mix entre le son traité et le son « sec », et au délai. Ce dernier paramètre permettra par exemple d’offseter (pardon pour l’anglicisme) la bande de fréquence grave afin de rendre le son plus serré et préserver les transitoires. On pourra ainsi dans certains cas augmenter le gain de cette bande afin d’avoir plus de graves, sans pour autant rendre le mix mou. Comme les autres modules, l’exciter a un mode M/S afin d’appliquer des réglages différents sur le canal central et les côtés du mix. Un analyseur de spectre permet de montrer, outre le spectre du signal entrant, les fréquences affectées par le traitement.
Ce module est très intéressant et permettra de rajouter de la brillance, du corps ou de la chaleur à votre mix. On fera quand même attention à ne pas trop en mettre, car trop d’exciter peut se révéler très fatigant à la longue. Gardez votre disque de chevet à côté, histoire de « remettre ses oreilles à zéro » de temps en temps, on perd vite ses repères !
Limit, comp, exp, gate
Autre gros morceau d’Ozone, la partie traitement dynamique, toujours multibande. En mastering, la compression pourra être utilisée afin de lisser les « pics » et les « creux » de votre signal en réduisant la dynamique. Cela permettra de rendre le son de votre mix un peu plus « plein », de lisser les différences de niveau entre certains passages et de pouvoir augmenter, par la même occasion, le volume « ressenti » de votre morceau.
Le module de dynamique d’Ozone peut fonctionner en multibande (jusqu’à 4 bandes), ou pas, et n’est en fait pas qu’un simple compresseur. Il peut aussi être utilisé en tant que limiter et expander/gate. On pourra même utiliser les trois fonctions simultanément : il suffira de choisir un seuil différent pour chacune. Du côté des réglages, cela reste classique, avec pour chaque bande, les temps d’attaque, de relâchement, le knee (version Advanced uniquement !) et le ratio, à la fois pour le limiteur, le compresseur et l’expandeur. À droite nous retrouvons la fameuse courbe de dynamique qui permet d’avoir un coup d’oeil rapide sur le traitement que l’on applique, et à gauche se situent d’autres visualisations intéressantes : la classique réduction de gain, et surtout un histogramme qui prend en compte l’historique du niveau du morceau. Avec cet outil, il devient aisé de placer le seuil, c’est assez pratique. Côté visualisations, on a aussi, en haut de l’interface, une sorte de traceuse qui décrit la réduction de gain en fonction du temps. Nous avons trouvé cela utile pour régler les temps d’attaque et de relâchement. On dispose aussi d’une compensation automatique de gain, qui calcule les niveaux RMS de ce qui rentre et de ce qui sort du compresseur, et qui règle le gain de sortie afin de compenser la perte de niveau dûe à la compression. Cela peut être pratique pour faire de rapides comparaisons A/B entre le son traité et le son « sec ».
Au niveau de l’interface graphique, il sera possible d’afficher les paramètres des quatre bandes à la fois, ce qui commence à faire beaucoup de chiffres simultanément à l’écran ! On pourra aussi avoir une interface un peu plus claire en affichant les paramètres d’une seule bande, et même lier les paramètres de toutes les bandes, même si on ne s’en est pas vraiment servi dans la pratique… Rajoutez à (tout) cela, le traitement mid/side à l’instar des autres modules (il n’y a pas de raison). Ainsi, si deux instruments se trouvent dans la même bande de fréquences, mais ne sont pas placés au même endroit dans la « scène sonore » (panoramique différente), on pourra utiliser le mode M/S pour appliquer un traitement différent. On pensait l’affaire classée, mais finalement, on peut s’en sortir ! Plus concrètement, on pourra compresser la voix principale (qui se trouve généralement au centre), sans pour autant altérer la dynamique des instruments (qui se trouvent, généralement, sur les côtés).
D’une manière générale, le compresseur multibande est assez utile pour traiter une voix. On pourra l’utiliser en tant que de-esser en ne compressant que les fréquences entre 3 et 10 kHz (à essayer, il existe des présets), on pourra aussi compresser les pops sous 120 Hz (ceux qui sont quand même passés à travers le filtre anti-pop), rajouter de la présence entre 4 et 8 kHz, ou encore de l’air au-dessus de 10 kHz en combinant le compresseur et l’expandeur.
On termine avec quelques options pour les heureux acquéreurs de la version « Advanced » : un mode « true enveloppe » qui agit comme le mode RMS et qui produit, selon l’éditeur, moins d’artéfacts et d’aliasing. On note aussi la présence d’une fonction « look ahead », qui permet de lisser le traitement (changements de gain moins brusques), en augmentant le tampon et en permettant au traitement de « voir un peu plus loin ». On pourra aussi activer un filtre permettant au module de dynamique de ne se déclencher que sur une certaine plage de fréquence. Le mode Hi Pass est un passe-haut qui permet aux basses fréquences de ne pas déclencher le traitement, un mode tilt qui ressemble au mode « thrust » des compresseurs API et qui préserve les basses fréquences en appliquant un coupe bas et en augmentant légèrement les hautes fréquences. On pourra doser le traitement plus ou moins avec le paramètre « amount ».
Voilà pour ce qui est du module de dynamique, qui vous l’aurez compris est très complet, et le traitement nous semble très transparent, ce qui, pour un plug-in destiné au mastering est plutôt un avantage. Il n’y a vraiment pas grand-chose à redire… Il faudra juste faire attention à ne pas se mélanger les pinceaux lors des réglages de paramètres : on pense régler le seuil de la première bande et on est en réalité en train de modifier la bande supérieure… C’est du vécu !
To the maximum
Après le traitement multibande de la dynamique vient le maximizer. Ici, le but est beaucoup plus simple : le loudness maximizer permet d’augmenter le niveau global de votre morceau et de sonner plus fort. C’est le traitement qui est souvent pointé du doigt lorsque la « guerre du loudness » est évoquée : à force de vouloir sonner plus fort que son voisin, les productions musicales sont hypercompressées (on se rappelle d’un certain album de Metallica), l’écoute devient rapidement fatigante et la musique se transforme en bouillie indigeste. Mais s’il est bien utilisé, un maximizer peut être utile et ajouter du corps au morceau mixé. Le principe du traitement est simple : il limite les crêtes les plus fortes afin de pouvoir remonter le niveau du morceau sans jamais dépasser le seuil de saturation prohibé en numérique. Évidemment, plus on baisse le seuil du traitement, plus on limite les crêtes, et plus vous sonnerez fort, mais plus le traitement s’entendra. Les maximizer ont donc des algorithmes qui permettent de limiter les crêtes en créant le moins d’artéfacts sonores possible.
Ce module n’étant pas multibande, il reste assez simple à utiliser. On règlera le seuil (le plus important) et aussi le paramètre « margin » (marge en français) qui représente le signal maximum en sortie de traitement. On le laissera généralement à –0,3dB, histoire de laisser justement « de la marge ». L’utilisateur devra aussi choisir entre cinq modes, dont les classiques « soft » et « hard ». Le premier est plus doux, mais peut dépasser la valeur fixée avec le paramètre « margin », le second étant moins transparent et plus typé analogique (dans le style brickwall), mais le niveau ne dépassera jamais la valeur de « margin ». Enfin, les trois modes IRC, qui sont « intelligents » et qui permettent d’avoir un traitement plus transparent que les modes classiques. Ils utilisent la psycho-acoustique et réagissent rapidement sur les transitoires (pour éviter le pompage) et plus lentement sur les sons plus constants pour éviter la distorsion. Celui qui génère le moins de distorsion est le troisième, mais en contrepartie il consommera plus de ressources processeur. À noter que les modes IRC n’ont pas de réglage de relâchement, mais un paramètre dénommé « character » permettant de rendre le traitement plus ou moins agressif.
Autre petite fonction intéressante : la détection intersample. Le limiteur peut examiner les niveaux maximums du signal numérique, mais aussi du signal analogique après conversion. En effet, il arrive parfois qu’un signal numérique ne dépasse pas le seuil 0, mais qu’une fois converti en analogique, il le dépasse de quelques dixièmes de décibels. Cette fonction, qui consomme pas mal de ressources elle aussi, peut-être utile sur les mixes très compressés.
Côté visualisations, on retrouve la traceuse du module de dynamique, l’histogramme et la réduction de gain. Précision aussi la présence d’une petite fonction sympa : « gain when bypassed », qui permet d’aligner les niveaux entre les sons traités et les non-traités, toujours pratique pour faire des A/B.
On termine les fonctions uniquement disponibles sur la version Advanced : « stereo link » qui permet de désolidariser les canaux gauche et droit et de les limiter indépendamment. Attention, cela peut métamorphoser votre morceau ! Le fader « transient recovery » permet de régler avec précision les transitoires avant la limitation afin de préserver certains sons, comme des percussions par exemple. Cela permet en fait d’accentuer les transitoires.
Si le module de dithering apparait sur la page du maximizer, il reste totalement indépendant, et permettra de convertir votre mix 24 bit en 16 bit si vous voulez qu’il atterrisse sur un CD. Nous n’allons pas nous étendre sur ce module, car le sujet est beaucoup trop vaste. Pour les lecteurs intéressés, sachez qu’iZotope fournit, en plus d’un guide généraliste sur le mastering très utile, un guide sur le dithering qui intéressera les AFiens désireux de creuser un peu le sujet.
On termine avec le dernier module, permettant de gérer l’image stéréo du mix.
Enlarge your stereo
Ce module fait partie de la bande des multibandes, et offre donc la possibilité d’élargir la stéréo différemment suivant la bande de fréquences. Le principe d’un élargisseur de stéréo est simple : il accentue les différences entre les canaux droit et gauche, en soustrayant les informations du canal droit au canal gauche et vice versa. Ainsi, les signaux présents dans les deux canaux (donc au milieu de l’espace stéréo) sont diminués. On commence donc à apercevoir l’utilité d’un traitement multibande : le fait de diminuer les signaux centraux peut créer un mix « creux » dans les moyennes fréquences ou pire dans les basses fréquences. Vous l’aurez compris, il vaut mieux utiliser l’élargisseur de stéréo dans les hauts médiums et les aigus, et Ozone 5 permettra de le faire, en dosant un peu plus l’effet sur ces bandes de fréquences.
Plusieurs visualiseurs vous permettrons de garder un oeil sur le traitement de ce module : la phase-mètre permet de voir le degré de corrélation entre les canaux gauche et droit. Quand ces derniers sont similaires, il monte jusqu’à + 1, quand ils diffèrent complètement (hors phase), il descend jusqu’à – 1. Il convient de garder la phase-mètre entre 0 et + 1, afin d’éviter les problèmes de phase et de compatibilité mono. On pourra d’ailleurs vérifier rapidement cela encliquant sur le bouton « mono ». Un vectorscope permettra aussi d’avoir une représentation visuelle du champ stéréo de votre mix.
Mais une des parties les plus intéressantes de cet élargisseur de stéréo, est la possibilité de rajouter un délai entre les canaux gauche et droit, sur chaque bande de fréquences. Dans la champ stéréo, si un objet sonore est situé à gauche, cela veut dire qu’il va atteindre notre oreille gauche avant celle de droite. Donc si on retarde le canal gauche par rapport au droit, on va remettre cet objet sonore au centre du champ. Dans un mix classique, on se demande bien à quoi cela peut servir, car si un objet est mal placé, autant retourner à la phase de mixage. Mais si votre enregistrement a été fait avec seulement un micro stéréo (ou deux micros en XY, AB, etc.), et que l’image penche trop d’un côté, il est alors possible de redresser tout ça. Les valeurs de délai restent généralement faibles (moins de 30 ms), et le traitement n’est ainsi pas entendu comme un « écho ». Alors avec un traitement multibandes, vous commencez à imaginer les possibilités offertes… On peut replacer la basse uniquement, etc.
Terminons avec un paramètre de la version « Advanced », le stereoizer. Cela permet d’élargir la stéréo en utilisant la synthèse. L’effet est compatible mono, et on pourra ajuster le délai ajouté afin de donner une plus grande impression de largeur stéréo sur des fichiers à la base mono ou ayant un champ stéréo très étroit. L’éditeur ne donne pas plus de renseignements sur le traitement, à tester suivant les sources !
D’une façon générale, nous avons trouvé ce module efficace, et l’on pourra pousser les réglages sur les bandes de hautes fréquences, mais on poussera le fader avec parcimonie sur les basses. On pourra même appliquer un traitement négatif, histoire de garder le bas du spectre bien au centre. N’oublions pas non plus que tous les paramètres d’Ozone 5 sont automatisables. On pourra donc élargir le champ stéréo uniquement sur les refrains, et le rétrécir sur les couplets d’une chanson, effet garanti.
Meter Bridge
Cette partie n’intéressera que les utilisateurs étant prêts à dépenser 800€ pour la version Advanced. Le meter bridge propose tout un tas d’analyseurs graphiques qui vous permettront de garder un oeil sur ce qu’il se passe dans votre mix, et pourquoi pas le comparer avec un autre. Parfois les oreilles ont besoin d’un peu d’aide, que voulez-vous !
Parmi les analyseurs en question, Ozone 5 Advanced nous propose un spectrogramme 2D et 3D, qui permet de voir les informations spectrales en fonction du temps, un analyseur de spectre plus classique avec un mode M/S, un « loudness meter » conforme à différents standards et enfin un plug-in dénommé « Meter Tap » pouvant s’insérer n’importe où dans votre séquenceur et permettant ainsi de monitorer visuellement n’importe quoi dans votre session.
Nous avons trouvé cette dernière idée très bonne, bien que nous n’ayons pas pu utiliser le Meter Tap avec l’analyseur de spectre classique, mais uniquement avec le spectrogramme, dommage. Avec ce dernier, on peut assigner une couleur à chaque instrument monitoré et obtenir un retour visuel instructif. Le vectorscope permettra de voir les informations concernant l’image stéréo de votre mix, à l’instar de celui intégré au module « Stereo Imager », et enfin, peut-être le plus intéressant, le loudness meter qui permet de mesurer précisément le volume ressenti de votre mix. On pourra choisir entre une juxtaposition du niveau RMS et des peaks, le K-System de Bob Katz (K-20, K-14 et K-12, suivant l’application musique, broadcast ou cinéma) et enfin le BS.1770 utilisant un algorithme permettant de quantifier le niveau subjectif du signal et les « true peaks ». C’est important d’avoir un retour et une référence sur le niveau global d’un mix, cela peut servir à homogénéiser le volume des pistes d’un disque, par exemple. Le BS.1770 donne aussi une information sur la plage de dynamique du signal, un très bon point. Difficile de faire plus complet que le Meter Tap qui comblera sans problème les utilisateurs les plus exigeants.
En guise d’exemple audio, nous avons composé une petite séquence dans Cubase, nous avons placé Ozone 5 en insert sur le bus master et nous avons réglé chaque module. Voici l’exemple sans rien, avec tous les modules enclenchés, puis avec chaque module désactivé séparément. Comme Ozone 5 propose une version démo, nous conseillons de l’installer afin de l’essayer sur un de vos mix, rien de tel pour vraiment jauger un plug-in !
- Ozone Off00:16
- Ozone On00:16
- Ozone EQ Off00:16
- Ozone Img Off00:16
- Ozone Comp Off00:16
- Ozone Exciter Off00:16
- Ozone Reverb Off00:16
- Ozone Max Off00:16
Conclusion
Difficile de trouver de véritable défaut à ce couteau suisse du mastering qui ne coûte « que » 200€ dans sa version de base. Avec ses modules, tous très complets, vous aurez toutes les clés en main pour finaliser correctement votre mix. Les égaliseurs et le compresseur sont transparents et pourront être utilisés sur des pistes autres que la master. Les analyseurs graphiques, le dither, le maximizer, la réverbe, l’exciter, le stereo imager, tout est là et tout fonctionne très bien. On regrettera juste le prix peut-être un poil excessif de la version advanced, et certains traitements un peu trop processeurovores. On trouve chez la concurrence la Power Suite 5 de Wavearts et T-Racks d’IK Multimedia, mais il faut avouer que dans le domaine et pour le prix, Ozone 5 est assez imbattable. Il ne vous reste plus qu’à télécharger la version d’essai (qui fonctionne sans restriction pendant 10 jours), jeter un oeil sur le guide de mastering (en anglais) très bien fait et proposé gratuitement par iZotope, et mettre le plug en insert sur la piste master de votre projet. Bon courage à tous !