Chers amis, maintenant que nous avons en avons étudié les principaux éléments constitutifs, il est temps de nous familiariser avec les principales formes de synthèse sonore. Eh oui, il en existe de plusieurs sortes !
Par exemple, dans l’article précédent, nous avons parlé de la modulation en anneau, qui implique la modulation d’une onde par une autre. Savez-vous que le principe même de modulation d’une onde par une autre est à la base de l’une des méthodes de synthèse les plus répandues, appelée synthèse par modulation de fréquence, ou plus couramment synthèse FM, popularisée par Yamaha avec son synthétiseur emblématique, le DX7 ? Mais ne nous précipitons pas. Car avant d’étudier la synthèse FM plus en détail dans un prochain article, il convient de parler de la forme de synthèse la plus répandue qui soit, j’ai nommé… la synthèse soustractive !
Description
De quoi s’agit-il exactement ? L’étude de la synthèse soustractive va nous permettre de récapituler un certain nombre d’éléments que nous avons évoqués dans les premiers articles de cette série. En effet, la synthèse soustractive est basée sur le principe suivant : un signal riche harmoniquement va être taillé dans ses fréquences, grâce à des filtres, afin de sculpter le son. C’est un principe proche de la synthèse soustractive des couleurs en retouche photo. On retrouve donc en synthèse soustractive le montage classique que nous vous avons présenté dans les articles précédents : oscillateur(s) —> filtres (animés ou non par une enveloppe) —> amplificateur (animé ou non par une enveloppe).
Comme nous l’avons vu dans l’article 4, les signaux sonores riches sont composés essentiellement des ondes suivantes : en dents de scie, triangulaire et carrée. Il n’y aurait pas grand intérêt à vouloir appliquer un filtre à une onde sinusoïdale seule. Cette dernière n’ayant aucune harmonique, elle ne serait pas affectée par le filtre tant que la fréquence de coupure de celui-ci ne serait pas égale à la fréquence nominale de l’onde. Par contre, une fois cette égalité atteinte, l’onde serait supprimée intégralement – et avec elle le son qu’elle représente. La synthèse soustractive avec une onde sinusoïdale seule reviendrait donc à créer un effet « on/off ». Dans les faits, on n’obtient pas forcément une coupure aussi nette, mais l’effet est tout de même approchant.
Principaux représentants
La synthèse soustractive – qui n’est pas la plus ancienne forme de synthèse, comme nous le verrons dans les prochains articles — fait une première apparition dans les années 30, avec notamment le Novachord fabriqué par Hanert, Williams et Hammond (le même que celui des fameux orgues).
Mais les deux plus fameux représentants de cette catégorie de synthétiseurs sont le Minimoog de chez… Moog et le MS-20 de chez Korg.
Le premier est apparu en 1970, et a rapidement rencontré le succès, notamment grâce au claviériste Keith Emerson. Étant le premier musicien à l’avoir utilisé sur scène, il a été également à l’origine de nombreuses techniques de jeu.
Ce clavier, monodique (voir articles 9 et 10), dispose notamment de 41 touches et de trois oscillateurs, un générateur de bruit et une entrée pour un signal externe. À noter que le troisième oscillateur ainsi que le générateur de bruits peuvent être routés vers les entrées CV des autres oscillateurs et des filtres. Pour information, CV signifie Control Voltage. Cela désigne un protocole de contrôle de paramètres un peu comme le MIDI, apparu plus tard (voir article 11). À la différence de celui-ci toutefois, le protocole CV n’est pas basé sur des valeurs numériques, non encore démocratisées au moment de son apparition, mais sur des variations de tension électrique. Avec cette possibilité de routage, le 3e VCO peut donc être utilisé comme un LFO afin de moduler des paramètres.
Enfin, il est à souligner que le filtre lui-même peut être amené à osciller, ajoutant encore une source sonore aux caractéristiques de ce synthétiseur. C’est d’ailleurs ce filtre 4 pôles (voir article 7) qui a fait la signature sonore de Moog, et que l’on retrouve sur leurs produits actuels (Moog Voyager, réinterprétation de 2002 du Minimoog d’origine, ou encore le Little Phatty, sorti en 2006 par exemple).
L’autre synthétiseur emblématique de la synthèse soustractive, le Korg MS-20, est apparu quant à lui en 1978. Contrairement au Minimoog, il adopte une architecture semi-modulaire. Cela signifie que certains câblages peuvent être effectués en façade par l’utilisateur afin de re-router des signaux sonores ou bien de modulation vers de nouvelles destinations.
L’appareil, monodique lui aussi, possède un clavier de 36 touches, 2 VCOs, un générateur de bruit, un LFO, 2 VCFs (une passe-haut 1 pôle et un passe-bas 2 pôles) et deux générateurs d’enveloppes. À noter que l’appareil dispose également d’un processeur de signal externe, qui lui permet en gros d’être « piloté » par le son d’un autre appareil, ou même une voix humaine.
Toutes ceci, additionné à sa modularité évoquée plus haut, en fait l’un des synthétiseurs aux possibilités créatives les plus étendues.
Dans le prochain article, nous étudierons la forme de synthèse sonore qui est un peu la « mère » de toutes les autres : la synthèse additive.