Il est bien sûr difficile de parler de toutes les configurations live car chaque système modulaire et chaque setup est différent, monter cela peut prendre du temps et beaucoup de réflexion. Dans cette nouvelle série sous forme d’épisodes et d’interviews, laissons la parole à différents artistes et musicien(ne)s pour nous parler de leurs expériences avec leurs systèmes en live ! Ce premier épisode est orienté musiques techno et ambient, nous impliquerons de nouveaux styles musicaux au fur et à mesure de la série.
Clark Cable – Bonjour Indecent Gesture, Cléry et Strikeforce, avant de parler de vos setups live, quel est votre style musical actuel ?
Indecent Gesture : Bonjour, je joue plutôt techno, assez dure et rapide 135–140 BPM.
Cléry : Hello, je dirais que les envies du moment oscillent entre techno, ambient et musique concrète !
Strikeforce : Principalement techno, mais j’essaye également d’alimenter d’autres projets fourre-tout, ambient et expérimentaux. Si j’avais plus de temps, j’aimerais aussi goûter à la musique concrète et relier tous ces univers.
Clark Cable – Jouez-vous avec un système Eurorack autonome ou utilisez-vous d’autres machines et effets pour le compléter ?
Indecent Gesture : Je joue avec deux cases Eurorack 6U et une TB3 synchronisée en MIDI pour les sons plus acides.
Cléry : J’utilise effectivement d’autres machines et traitements en plus du système Eurorack ! Quand je joue en club j’utilise un 12U avec un Octatrack, un Sherman, une Big Sky et une Timeline. En revanche pour les phases de jeu avec Vernacular Orchestra ou lorsque je joue avec des instrumentistes, j’utilise un système 6U accompagné généralement d’un Pod60 et une Big Sky.
Strikeforce : Depuis que ma route a croisé celle des synthétiseurs modulaires j’ai beaucoup de mal à revenir en arrière, mais je ne m’interdis rien, et je n’hésite pas à compléter mon setup avec ce qui est nécessaire, clavier maître, contrôleurs, boîte à rythme supplémentaire…
Clark Cable – De quelle façon répartissez-vous les différentes voix sur votre système Eurorack ?
Indecent Gesture : J’utilise un module sampleur qui gère quasiment toutes les pistes de drums (Assimil8or), deux autres sampleurs pour rajouter des sons, des bruits ou des voix (Bitbox et STS), trois oscillateurs pour la partie synthé (Braids, Pico Voice et Manis Iteritas). Le tout rentre dans une table de mixage au format modulaire (Performance Mixer) dans laquelle j’ai deux voies pour les envois et retours d’effets. J’utilise aussi deux séquenceurs, un Metron pour les rythmiques (Gate) et un Toolbox pour les synthés (CV/Gate).
Cléry : Pour le système avec Vernacular ou le spectacle de danse contemporaine (180#2, Compagnie les Sept Marches), j’utilise pour la partie synthèse une voix complète par module, deux voix numériques et un oscillateur analogique qui me sert principalement pour de la modulation, je l’utilise avec d’autres signaux dans différents utilitaires pour les router et les mixer afin de les redistribuer dans le reste du système ! Toutes les voix sont envoyées dans un module de mixage stéréo pour être traitées en effets puis re-samplées par le Morphagene. D’après moi la manière de séquencer rentre en compte pour cette répartition afin d’amener une certaine unité dans la relation entre les différentes voix.
Strikeforce : En ce moment j’essaye d’assembler un système qui me permette de proposer une prestation hybride entre un set de DJ et une improvisation live, avec des sampleurs pour la partie DJ, que je blinde de séquences et de morceaux réalisés dans mon studio, et une section rythmique et mélodique que je séquence et manipule en direct. J’ai prévu des phases en amont, mais je déroule mon set comme un DJ en essayant d’être attentif à la foule : si ça prend je fais durer, si les gens regardent leur montre je passe à autre chose. Mon but est de constamment garder l’attention des gens.
Clark Cable – Comment procédez-vous pour tenir toute une prestation avec le même système ?
Indecent Gesture : Je ne fais pas un style avec énormément de mélodies, du coup c’est plus facile, j’ai des séquences rythmiques et plus ou moins mélodiques prêtes, après j’improvise à partir de ça en mélangeant différentes séquences entre elles ou en les modifiant en direct. Le séquenceur rythmique Metron est génial pour cela, car il permet de modifier des séquences très facilement et de faire des breaks.
Cléry : Pour ma part cela se résume à essayer de trouver des chaînes audio entre sources et traitement qui me donnent une grande palette de sons sans que ce soient des processus trop complexes en théorie et en patch. J’utilise trois séquenceurs parfois quatre, avec des utilitaires qui me permettent de jongler entre eux ou de les mettre en relation. Je garde toujours une place pour la partie contrôle afin d’amener du mouvement et de l’évolution, avoir des accès directs de jeu me paraît indispensable en live.
Strikeforce : Tout dépend du temps et du style musical que tu dois jouer. Avec un setup 100% modulaire composé d’un 9U rempli de modules, j’estime pouvoir tenir entre 30 à 45 minutes (en fonction du style) avant que ça devienne trop répétitif. Je déteste les sets trop longs, je préfère qu’ils soient courts mais efficaces. Jouer et être spectateur sont deux choses très différentes, j’essaye de ne jamais perdre ça de vue. Concrètement je manipule plusieurs sections thématiques, une percussive, une pour la basse, une pour un lead, une pour les FX et une pour les échantillons, et je fais ma cuisine comme je le ferais pour un set de DJ, mais avec une profondeur supplémentaire.
Clark Cable – Avez-vous un petit conseil pour ceux qui préparent un live avec de l’Eurorack ?
Indecent Gesture : La grande flexibilité du modulaire fait que l’on peut aussi se perdre un peu au début. J’ai vraiment monté mon système dans l’optique live et j’ai mis un peu de temps à trouver un setup qui me convienne et surtout qui me permette d’improviser, car je n’aime pas du tout les live trop préparés. Au début j’avais une MPC Live en plus mais finalement je trouvais ça plus rigolo de tout faire dans le modulaire. Je crois qu’il faut prendre le temps de bien choisir ses modules, il y a pleins de vidéos YouTube pour se faire un avis avant d’acheter, ce qui est cool. On peut vraiment faire des choses très différentes avec l’Eurorack et surtout ça n’est pas si compliqué que ça en a l’air.
Cléry : En gros faire simple, les contraintes sont bénéfiques ! Même si la programmation fait partie du jeu je trouve que le direct pousse vraiment à faire ressortir ses qualités de musicien. Dans l’instant du concert avec mon expérience actuelle je trouve que c’est déjà beaucoup, il reste du travail pour arriver à des choses plus complexes et c’est bien aussi…
Strikeforce : Maîtriser ses modules sur le bout des doigts et ne jamais oublier qu’une fois sur scène la technique doit s’effacer devant la musique. La majorité des spectateurs se foutent du matos qu’on utilise, en plus de ne pas savoir comment ça marche, donc partir sur un set 100% modulaire doit avant tout être un choix artistique qui a du sens.
Merci Indecent Gesture, Cléry et Strikeforce d’avoir partagé avec nous ces expériences.
Vous pouvez découvrir tous ces artistes dans les liens ci-dessous :
Indecent Gesture :
- Projet Actuel : https://soundcloud.com/inthecutrecords
- Instagram : @indecent_gesture
Cléry :
- Projet Actuel : https://soundcloud.com/clery-vernacular
- Facebook : https://www.facebook.com/Clery.Vernacular/
Strikeforce :
- Projet Techno : www.modularstrikeforce.com
- Projet fourre-tout : http://onosendai.free.fr
- Projet Ambient : http://spaceprobe.free.fr
- Projet Drone : https://www.youtube.com/channel/UCYZ8E2V1xjdUuEIBumQy54A
Liens matériels :
- 4ms Company – Stereo Trigger Sampler
- 1010 Music – Bitbox
- Rossum Electro-Music – Assimil8or
- Mutable Instruments – Braids
- Erica Synths – Pico Voice
- Noise Engineering – Manis Iteritas
- WMD – Performance Mixer
- WMD – Metron
- 1010 Music – Toolbox
Cléry