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Pédago
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En bande organisée

Aborder l'enregistrement sur bande magnétique

Voici un petit guide pas banalisé pour aborder sereinement quelques aspects techniques de l'enregistrement sur bande magnétique. Après le tour historique du dernier article, on se penche cette fois-ci sur les éléments pratiques.

Aborder l'enregistrement sur bande magnétique : En bande organisée

Cette semaine, on se penche donc sur les aspects tech­niques qui entoure l’en­re­gis­tre­ment sur bande magné­tique. On va se concen­trer parti­cu­liè­re­ment sur les aspects qu’il est néces­saire de connaître en tant qu’uti­li­sa­teur. Donc, certes, je ne vais pas vous apprendre à cali­brer un magnéto de A à Z, en revanche nous allons ensemble faire le tour des formats de bande que vous trou­ve­rez commu­né­ment, des tailles de bobine, des vitesses d’en­re­gis­tre­ment… De plus, nous allons abor­der le bon entre­tien de votre appa­reil à bande, et essayer de réflé­chir à son usage à l’époque du tout-numé­rique.

Hey Ho ! Let’s go…

Normes et formats

Il existe diverses normes et formats concer­nant la bande et les magné­to­phones. Nous allons ici présen­ter celles qui concernent en premier lieu l’uti­li­sa­teur :

Les vitesses

On dénote les vitesses d’en­re­gis­tre­ment/lecture en pouce par seconde (inch per second, abrégé en IPS). On peut trou­ver des magné­to­phones où les vitesses sont notées selon le Système inter­na­tio­nal, c’est-à-dire en centi­mètres par seconde, mais on obtient moins de nombres entiers.

Revox PR99 vitessesLes vitesses prin­ci­pales sont :

  • Pour les appa­reils du commerce – 3,75 IPS et 7,5 IPS
  • Pour certains appa­reils du commerce, et certains magné­to­phones pros ou semi-pro – 7,5 IPS et 15 IPS
  • Pour les appa­reils pros – 15 IPS et 30 IPS

Plus la vitesse est élevée, plus le magné­to­phone gagne en préci­sion, en fidé­lité et en réponse dyna­mique, pour une raison maté­rielle simple : en une seconde, le même signal (la même densité de flux magné­tique) sera enre­gis­tré sur une plus grande surface de bande.

Certains magné­to­phones béné­fi­cient en plus de l’ajout d’une fonc­tion varis­peed (vitesse variable), qui permet de faire varier la vitesse de défi­le­ment. Cela a plusieurs inté­rêts : le premier est de pouvoir adap­ter la lecture d’une bande d’un magnéto à l’autre, en cas de léger déré­glage de la vitesse sur un des deux appa­reils. Le varis­peed permet aussi d’adap­ter légè­re­ment la vitesse de défi­le­ment de la bande dispo­nible selon la longueur du morceau enre­gis­tré. Enfin, il peut servir à créer des effets sonores inté­res­sants sur les pistes enre­gis­trées.

Les largeurs de bande

Bobines format AEGLa largeur de la bande, elle aussi, s’ex­prime prin­ci­pa­le­ment en pouces. Elle déter­mine le nombre de pistes que l’on peut enre­gis­trer au maxi­mum sur le support.

  • ¼ de pouce : norme pro – 1 piste mono (pleine bande) ou 2 pistes stéréo (master) ; norme domes­tique et semi-pro – 4 pistes. C’est la taille de bande la plus répan­due.
  • ½ pouce : norme pro – 2 ou 4 pistes ; norme semi-pro – jusqu’à 8 pistes.
  • 1 pouce : norme pro – 8 ou 16 pistes.
  • 2 pouces : norme pro – 16 ou 24 pistes.

Les tailles et types de bobines

Il existe deux formats prin­ci­paux pour l’au­dio : la grande bobine de 10 pouces et demi (envi­ron 26 cm), et la plus petite de 7 pouces (envi­ron 18 cm). Une taille plus petite existe (13 cm) mais elle est moins pratique, tout simple­ment à cause du peu de longueur de bande qu’elle peut accueillir.

Les bobines accueille deux types d’axe diffé­rents : NAB ou trident. Toutes les bobines 7 pouces sont au format trident, les 10 pouces peuvent avoir l’un ou l’autre.

Different formats de bobines

À gauche des bobines à axe trident, à droite et au centre, des axes NAB. À gauche, on voit bien les trois tailles prin­ci­pales de bobines.

Il existe aussi un format AEG, plus rare, que l’on trouve encore sur de vieilles bandes Agfa et BASF. Dans un genre simi­laire, on peut égale­ment ache­ter la bande sous forme de pancakes, c’est-à-dire une bande enrou­lée autour d’un moyeu sur lequel peut venir se visser deux flasques (c’est le terme précis) de façon à former une bobine NAB clas­sique.

Bobine pancake

Entre­te­nir son appa­reil

L’en­tre­tien d’un appa­reil à bande passe par quatre procé­dures, qui corres­pondent à quatre niveaux d’exi­gence. Je vous les expose dans l’ordre du plus quoti­dien au plus occa­sion­nel, du plus néces­saire, au plus option­nel :

  • Entre­tien régu­lier : il concerne la propreté géné­rale de votre équi­pe­ment. Vous ne cuisi­ne­riez pas avec les couteaux recou­verts de crasse, vous n’au­riez pas envie de conduire une voiture remplie de sale­tés, pourquoi donc travailler la musique avec des appa­reils couverts de pous­sière ? Il s’agit donc d’une étape qui n’a rien de spéci­fique aux appa­reils à bande mais qu’il est toujours impor­tant de rappe­ler. Il est crucial de procé­der régu­liè­re­ment (je dirais à peu près au moins une fois par semaine, comme le ménage que l’on fait chez soi) au dépous­sié­rage de l’ap­pa­reil, de sa face avant jusqu’aux câbles qui se trouvent à l’ar­rière. 
  • Entre­tien de la propreté des parties en contact, et entre­tien de la bande : le passage de la bande sur les têtes de lecture, et les diffé­rents guides qui servent à main­te­nir son chemin recti­ligne, va géné­rer le dépôt léger (si l’ap­pa­reil est en bon état) d’une couche d’oxyde ayant tendance à se déta­cher de la bande. Quelques passages de bande n’au­ront pas beau­coup d’im­pact, mais un usage régu­lier de l’ap­pa­reil va amener tout ce que l’on nomme le « chemin de bande » à se salir. Il est donc néces­saire régu­liè­re­ment de nettoyer ce chemin de bande à l’aide d’al­cool (le plus pur possible, on conseille souvent d’uti­li­ser de l’al­cool isopro­pyl) sur des cotons-tiges. Pour procé­der à ce nettoyage, il va être néces­saire de reti­rer la bande de l’ap­pa­reil. En vérité, entre chaque utili­sa­tion une bande devrait toujours être rembo­bi­née, reti­rée de l’ap­pa­reil, et rangée dans sa boîte, à la verti­cale. On conseille de conser­ver les bandes dans un lieu à la tempé­ra­ture ambiante stable et à l’hu­mi­dité faible (pas à la cave…). 
  • Déma­gné­ti­sa­tion : la déma­gné­ti­sa­tion du chemin de bande est un sujet contro­versé dans le monde des utili­sa­teurs de magné­to­phones et de lecteurs cassette. L’idée étant que le passage de la bande, surtout à vitesse rapide, peut occa­sion­ner une magné­ti­sa­tion des pièces en métal (à voir selon le métal, bien entendu) contre lequel passe la bande. Cela aurait, en retour, des consé­quences néga­tives sur la lecture et l’en­re­gis­tre­ment des signaux audio. Le consen­sus le plus raison­nable reste de dire que : sur les appa­reils non profes­sion­nels, la déma­gné­ti­sa­tion n’est pas néces­saire ; sur les appa­reils profes­sion­nels une déma­gné­ti­sa­tion occa­sion­nelle ne peut pas faire de mal, et elle est pratiquée par la plupart des personnes utili­sant des magné­to­phones pour des usages où la préci­sion est abso­lu­ment néces­saire (par exemple, dans l’ar­chi­vage de master histo­rique) ; avant la première utili­sa­tion ou la cali­bra­tion d’un appa­reil une déma­gné­ti­sa­tion « de sécu­rité » est haute­ment recom­man­dée.
    À ce sujet, la plupart des manuels de main­te­nance de magné­to­phones recom­mandent de procé­der à une déma­gné­ti­sa­tion avant toute autre procé­dure d’ali­gne­ment ou de cali­bra­tion. Mais gardez bien en tête que le travail du tech­ni­cien va consis­ter à prendre des mesures. Il s’agit donc clai­re­ment d’un geste néces­saire pour s’as­su­rer de la vali­dité de ces mesures (et pour prolon­ger la durée de vie de bandes-tests qui coûtent cher). 

Démagnétiseur TEAC

Un déma­gné­ti­seur TEAC

  • Véri­fi­ca­tion occa­sion­nelle du bon aligne­ment de l’ap­pa­reil : dans les studios profes­sion­nels pratiquant encore régu­liè­re­ment  l’en­re­gis­tre­ment sur bande (et non pas les simples « passages » sur bande des masters numé­riques), il est courant de garder toujours bran­ché au magné­to­phone assez de maté­riel pour pouvoir, à l’aide d’une bande-test, véri­fier la bonne mise en phase des diffé­rentes pistes avant chaque enre­gis­tre­ment, et leurs niveaux de sortie (au moins un oscil­lo­scope et un milli­vol­mètre AC). On rentre donc ici dans un niveau d’en­tre­tien parti­cu­liè­re­ment exigeant, et qui ne concerne pas l’uti­li­sa­tion occa­sion­nelle (pour quelques raisons que ce soit) d’un magné­to­phone, si celui-ci a déjà été aligné et cali­bré par un profes­sion­nel.

Pourquoi utili­ser de la bande aujour­d’hui ?

Souvent, le seul avan­tage sur le numé­rique qui demeure aujour­d’hui pour la bande, ce sont ses « défauts » : c’est-à-dire cela en quoi elle n’est pas aussi précise que le numé­rique, et qui procure une colo­ra­tion parti­cu­lière. Bien sûr, on peut repro­duire ces effets avec des plug-ins (on peut tout faire in the box aujour­d’hui, de toute façon). Mais la bande reste le moyen favori de nombreux produc­teurs pour obte­nir un « grain » spéci­fique. Ce grain peut prove­nir prin­ci­pa­le­ment de trois spéci­fi­ci­tés de la bande.

Telefunken-Aeg-M15A-aEn premier lieu, sa façon de satu­rer : si l’on rentre très fort dans la bande lors de l’en­re­gis­tre­ment (et en consi­dé­rant que les préam­plis d’en­trée et de sortie du magnéto ont une capa­cité dyna­mique suffi­sante pour ne pas satu­rer), alors on peut atteindre un niveau de satu­ra­tion de la bande elle-même, satu­ra­tion qui a un carac­tère très parti­cu­lier. Ce carac­tère est dû à la non-linéa­rité de la bande, et au fait qu’elle écrête le signal de manière progres­sive (soft clip­ping), ce qui occa­sionne peu d’har­mo­niques impaires, et offre une distor­sion plutôt douce.

La seconde, c’est le souffle et géné­ra­le­ment le bruit qui, certes, est presque indé­tec­table sur un enre­gis­treur profes­sion­nel correc­te­ment cali­bré, mais qui est présent sur de nombreux enre­gis­treurs domes­tiques, surtout si ceux-ci n’ont pas fait l’objet d’une révi­sion. On peut les utili­sés pour « salir » le son.

Le troi­sième, c’est le pleu­rage et le scin­tille­ment, c’est-à-dire les oscil­la­tions de la vitesse, qui créent un effet pouvant rappe­ler une sorte de chorus. Cet effet est surtout remarquable sur les sons haut-médiums et aigus. Certains plug-ins repro­duisent aujour­d’hui ce défaut, preuve de son utili­sa­tion possible comme effet recher­ché. Pour infor­ma­tion, le pleu­rage signi­fie une oscil­la­tion lente, le scin­tille­ment, une oscil­la­tion rapide.

Auteur de l'article Pr. Soudure de La Feuille

Venu à la musique par le bruit, j'y retournerai un jour. J'aime les beaux circuits bien propres, les musiques sales et moches. Technicien de jour, la nuit je dors.


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