Dans les articles précédents, nous avons vu comment fonctionnent les cadences, et comment notamment le Ve degré d’une gamme allait vers le Ier degré (oui, je sais, je le répète à quasiment tous les articles). Or, au-delà du fonctionnement des cadences, les accords ont une tendance naturelle à se diriger — ou non — vers d’autres accords. En connaissant les attirances particulières de chaque type d’accords, on peut très rapidement — et simplement — construire une harmonisation qui tient la route.
Comme nous l’avons vu dans l’article 9, on différencie, au sein d’une même tonalité, les accords stables et ceux qui ne le sont pas. Les accords stables n’appellent pas de résolution particulière, ou bien peuvent tendre vers de nombreux autres accords. Les accords « instables » à l’inverse appellent souvent une résolution en particulier, comme dans notre exemple préféré de la cadence parfaite, où le 5e degré de la tonalité appelle de toutes ses forces une résolution sur la tonique. Les Anglo-saxons appellent ce phénomène d’interattractivité des accords en harmonie musicale le « chord-leading ».
Voici un tableau qui récapitule ce fonctionnement.
On peut également souligner que les mouvements d’un accord vers l’autre n’ont pas tous le même impact. On pourrait ainsi classer par ordre d’impact décroissant les mouvements suivants :
- quarte juste ascendante, quinte juste descendante
- quarte juste descendante, quinte juste ascendante
- seconde ascendante
- tierce descendante
- seconde descendante
- tierce ascendante
C’est ce qui fait d’ailleurs la force de la progression VI-II-V-I que nous avons vue dans l’article 7, qui n’est composée que des mouvements les plus forts entre les accords : quintes justes descendantes et quarte juste ascendante (parfois transformée elle-même en quinte juste descendante). Nous verrons d’ailleurs dans un prochain article que le premier degré de la gamme n’est pas le seul à pouvoir bénéficier d’un renforcement par sa dominante… Et dans un autre article, nous étudierons plus en détail les raisons qui poussent les accords à s’attirer entre eux. Toutefois, pour conclure celui-ci, nous pouvons déjà évoquer le cas de la note sensible.
Le rôle de la sensible
Il est important de souligner ici que la sensible, donc le septième degré d’une gamme majeure ou des gammes mineures harmonique et mélodique, présente une très forte tendance à vouloir résoudre sur la tonique située un demi-ton au-dessus d’elle (le septième degré d’une gamme mineure naturelle, situé un ton entier en dessous de la tonique supérieure, n’est pas considéré comme une sensible, on l’appellera alors la sous-tonique). Ainsi, comme par hasard, on se rend compte que l’accord de dominante contient, en plus du Ve degré qui tend vers la tonique inférieure, le VIIe degré qui tend vers la tonique supérieure. On a donc un double mouvement vers la tonique !
Et pour finir, l’on peut constater que lorsque l’on emploie un accord de septième de dominante, la septième mineure que l’on ajoute à la triade (accord de trois notes) basée sur la dominante crée à la fois un triton (voir article 9 de la série) avec la deuxième note de l’accord, et une attirance vers la troisième note de l’accord de tonique.