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Sujet La finalité de l'art.

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Sujet de la discussion La finalité de l'art.
En partant du postulat suivant:

« L’art s’accomplit et s’achève isolément. En ce sens, il ne tends vers aucun but mais trouve sa plénitude en lui-même, dans l’instant qui surgit et qu’il approfondit jusqu’à son fondement éternel. »

Kuki Shuzo conférence « Le temps en Orient »

On peut se demander si la finalité de l’art est d’être présenté/exposé au public ?
Dans nos sociétés occidentales surmédiatisées c’est tellement évident qu’on ne se pose plus la question. Avant l’art lui-même existe déjà le projet de sa diffusion et/ou de sa médiatisation.
Qu’est-ce qui motive donc notre création ?
L’art ou l’envie de le rendre publique ?
Dans le premier cas, une fois l’œuvre crée trouvant, selon l’argument de Kuki Shuzo, « sa plénitude en lui/elle-même », est-il nécessaire de la diffuser ?
Dans le second cas ne masque-t-elle une intention autre que l’art lui-même ?

Pour résumer, faire de l’art chez soi et pour soi n’est-il pas suffisant ?
A-t-on besoin de la reconnaissance de nos amis, parents, de notre conjoint(e), du grand ou du petit public, des spécialistes, des médias pour
« valider » nos œuvres (et donc un peu du sens de notre vie) en tant qu’objet artistique ?
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Citation : Or, je suis de ceux qui pensent que l'oeuvre n'appartient jamais à l'artiste.



A qui apparteint-il alors?


Citation : Celui qui a quelques expériences de la création sait que c'est l'oeuvre qui décide de son destin jusqu'à sa naissance. L'artiste n'est qu'un moyen pour l'oeuvre. Mais une fois née, l'oeuvre n'a plus de pouvoir.



Quel pouvoir avait-elle avant que l'artiste ne lui donne forme?




Citation : L'artiste peut décider de la garder pour lui ou la faire connaître. C'est sa seule revanche. C'est là qu'il se prend pour dieu.



Je ne sais pas si Dieu existe, mais un humain n'aura jamais selon moi d'autre pouvoir ce celui d'un humain...attribuer un pouvoir de vie et de mort à un dieu ou à Dieu est valable dans le cas où cela a été vérifié, or il semblerait qu'on n'en sache pas grand chose exceptée les spéculations religieuses d'ici et d'ailleur.

Excepté pour le cas d'un concert, d'une commande ou d'un contrat avec une maison de disque et donc dans tous les cas ayant une finalité d'être exposée au public, il me semble que le droit le plus fondamental d'un artiste est de décider ce qu'il va faire de son oeuvre, tout simplement car hormis les situations décrites deux lignes plus haut, il n'a de comptes à rendre à personne.
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Citation :
Si ce sont de gros tas de cailloux en forme d'oeuf, j'en déduis que cette île est l'île de Pâques. Ce n'est pas de l'art, c'est de l'archéologie



j'aime pas trop qu'on se moque des mes tas de caillous en forme d'oeufs. :oops2: c'est dur à faire, ça arrête pas de se casser la gueule.


Citation : A qui apparteint-il alors?


à une partie de soi que le "je" n'englobe peut être pas?

Quand je dis "je" fais de la musique, ça me parait un abus de langage.
Par exemple pendant que je parle, je m'aperçois soudainement que mon orteil droit se tortille tout seul comme un con. Est ce "je" qui décide de ça?
Je considère l'art comme des orteils droits qui se tortillent de leur propre chef.
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Citation : A qui apparteint-il alors?



L'oeuvre n'appartient à personne en particulier, sauf si on se place du point de vue juridique, mais ce n'est pas le débat. Du reste, il existe un moment où, même de ce point de vue là, l'oeuvre finit par tomber dans le domaine public.

Quand je dis que l'oeuvre n'appartient à personne, cela ne signifie pas qu'elle n'ait pas de créateur. Mais pourquoi l'oeuvre appartiendrait-elle à son créateur ? Il n'y a pas de créateur sans oeuvre et pas d'oeuvre sans créateur. Pourquoi le créateur prévaudrait-il sur l'oeuvre ? Simplement parce qu'il prend le pouvoir sur elle à un moment où elle n'a plus ce pouvoir.

Citation : Quel pouvoir avait-elle avant que l'artiste ne lui donne forme?



Le pouvoir d'obliger l'artiste à la produire telle qu'elle est vraiment et non tel que l'artiste voudrait qu'elle soit (si tant est qu'il ait ce vouloir).

Citation : il me semble que le droit le plus fondamental d'un artiste est de décider ce qu'il va faire de son oeuvre



Le droit, c'est fait pour légaliser un pouvoir. Le pouvoir de l'artiste sur son oeuvre c'est d'en faire ce que bon lui semble (la vendre, la détruire...). Il peut même la vendre sur commande (donc avant qu'elle soit là) mais, sauf à faire une reproduction (et encore, comment contrôler les "défauts" de la reproduction ?) il ne sait pas exactement quelle forme aura son oeuvre. C'est ça le pouvoir de l'oeuvre sur l'artiste : il ne sait pas comment elle sera vraiment avant même qu'elle soit.
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Citation : Quand je dis que l'oeuvre n'appartient à personne, cela ne signifie pas qu'elle n'ait pas de créateur. Mais pourquoi l'oeuvre appartiendrait-elle à son créateur ? Il n'y a pas de créateur sans oeuvre et pas d'oeuvre sans créateur. Pourquoi le créateur prévaudrait-il sur l'oeuvre ? Simplement parce qu'il prend le pouvoir sur elle à un moment où elle n'a plus ce pouvoir.



Nickel comme développement/idée ça, plutôt d'accord.


Citation : Le pouvoir d'obliger l'artiste à la produire telle qu'elle est vraiment et non tel que l'artiste voudrait qu'elle soit (si tant est qu'il ait ce vouloir).



Voilà une fois de plus le coeur du débat: l'oeuvre telle qu'elle est. Kuki Shozu et autres eux vont juste la marche d'après qui considère que l'oeuvre se suffit à elle-même telle qu'elle est.
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Citation : La finalité de l'art



Si je prends le sujet au pied de la lettre, je dois personnifier l'art, car je ne vois de finalité que dans un événement qui part d'un être vivant, conscient ou volontaire dans son acte.
A partir de là, si je sépare l'art de son auteur, l'art n'a pas de finalité, seul comme ça.
L'art en tant que résultat aura la finalité que l'homme lui accordera (je pense que nous sommes d'accord pour dire que l'art reste à ce jour une notion humaine). Si l'homme ne découvre pas l'art, celui-ci demeurera inconnu et sa finalité sera néant, ou le qualité d'être secrète et méconnue.

Comment réduire l'art à si peu de choses ? L'art atteint le corps, l'esprit, la masse, l'individu, s'accorde aux normes et s'en déchire...

L'homme essaie parfois de diriger son art pour lui donner une finalité voulue, mais le résultat n'est pas toujours celui escompté.

Pour moi, l'art se traduit dans l'expression d'une personne. Si l'intention est de faire vivre la chose, alors le public, ou bien le rien, ou l'interprète lui-même, va apprécier l'art.
Dans ce sens, l'art se crée à partir de la pratique, donc est lié à l'interprète. L'art et l'interprète sont indissociables AMHA.

Dire que l'art appartient à lui-même ou aux autres, c'est jeter l'interprète à la poubelle et lui dire "t'as fais du bon boulot gamin, prends tes sous-sous, le monde t'en est reconnaissant"... :(((

L'interprétation classique ou jazz est la plus probante pour appuyer cette affirmation, car c'est un monde où la reprise est plus que fréquente : on va pouvoir détester l'interprétation d'un mec et en préférer une autre, pourtant c'est le même morceau, le même compositeur...

Etant un fervant défenseur de l'interprète, plus que du compositeur parfois, je me demande si la (une ?) finalité de l'art n'est pas d'être réinterprété jusqu'à ce qu'il atteigne le sublime, et au-delà. :noidea:
46
Head Minerve>
Plein de bonnes choses dans to post, un post "avec des morceaux dedans".

Citation : Etant un fervant défenseur de l'interprète, plus que du compositeur parfois, je me demande si la (une ?) finalité de l'art n'est pas d'être réinterprété jusqu'à ce qu'il atteigne le sublime, et au-delà.



Le problème c'est justement que le sublime est difficile à objectiver et aller au-delà me semble carrément impossible à concevoir.

Citation : Dire que l'art appartient à lui-même ou aux autres, c'est jeter l'interprète à la poubelle et lui dire "t'as fais du bon boulot gamin, prends tes sous-sous, le monde t'en est reconnaissant"...



C'est un peu ce que je pense depuis qq mois, aussi ingrat que cela puisse être.
L'artiste est un médiateur et sa finalité est peut-être de se réaliser humainement par le biais de l'art, son devenir en tant qu'artiste dans une société ("Beau boulot mec, bravo!!. Tu es un grand artiste!!" )plutôt que d'être l'art lui-même.
C'est peut-être là une nuance qui me semble importante.

Le mécanicien fait fonctionner la voiture mais il n'est pas la voiture...cette dernière est le produit de ses connaissances et de son travail.

Suis en train de lire un livre sur la synchronicité (pas celui de Jung)et j'ai quelques idées à rattacher avec l'art.
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Citation : Le problème c'est justement que le sublime est difficile à objectiver et aller au-delà me semble carrément impossible à concevoir.


Je suis entièrement d'accord avec toi, kumo boy, d'autant plus que le mot "sublime" provient du latin "sub limes" qui signifie "au delà des limites".
J'attends tes développements sur la synchronicité, et quant à moi, je tenterais de rassembler un assortiment de citation d'Adorno tirées de sa Théorie esthétique. Elles n'auront sûrement rien à voir avec le débat en cours, mais permettront, je pense, d'ouvrir de nouvelles perspectives...
"C'est blazman legacy ici" (Apocryphe) / Live music / Soundcloud
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Citation : Suis en train de lire un livre sur la synchronicité (pas celui de Jung)et j'ai quelques idées à rattacher avec l'art.



curieux d'entendre ça.
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Citation : je tenterais de rassembler un assortiment de citation d'Adorno tirées de sa Théorie esthétique



La mise en page de ce bouquin est vraiment repoussante...j'veux bien que ce soit le manuscrit tel qu'il a été trouvé, mais quand même, pas un espace, pas une respiration, pas un sous-titre.
Pourquoi n'ont-ils pas adopté le sommaire qu'ils proposent à la fin de l'ouvrage?

Merci pour votre participation en tout cas.
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Citation :
L'oeuvre n'appartient à personne en particulier, sauf si on se place du point de vue juridique, mais ce n'est pas le débat. Du reste, il existe un moment où, même de ce point de vue là, l'oeuvre finit par tomber dans le domaine public.

Quand je dis que l'oeuvre n'appartient à personne, cela ne signifie pas qu'elle n'ait pas de créateur. Mais pourquoi l'oeuvre appartiendrait-elle à son créateur ? Il n'y a pas de créateur sans oeuvre et pas d'oeuvre sans créateur. Pourquoi le créateur prévaudrait-il sur l'oeuvre ? Simplement parce qu'il prend le pouvoir sur elle à un moment où elle n'a plus ce pouvoir.


Je suis d'accord ! Celui qui écrit de la musique et qui prétend "verrouiller" son interprétation ferait mieux de garder son manuscrit chez lui au fond d'un tiroir.