Succédant au vénérable K2661 à classer désormais parmi les synthés vintage, le K2700 prend enfin le relai du solide Forte au sommet de la gamme des workstations signées Kurzweil. Continuité de l’offre ou nouvelle donne ?

Porte-avions
Côté connectique, tout se passe à l’arrière et c’est plutôt pas mal. Les jacks sont en métal, tout est vissé, là encore c’est une construction haut de gamme. On trouve une sortie casque stéréo (jack 6,35 TRS), 2 paires de sorties stéréo symétriques (jack 6,35 TRS), une paire d’entrée audio (2 combo XLR/jack 6,35, permettant d’envoyer un signal externe vers les effets et l’audio USB, mais pas d’échantillonner), 4 prises pour pédales (2 interrupteurs, 2 continues assignables), 2 prises Midi DIN (entrée/sortie) et 2 prises USB (A pour le stockage et la mise à jour du système, B pour l’interface Midi et l’audionumérique 16–24 bits / 44 à 192 kHz). On regrette de n’avoir que 2 paires de sorties stéréo analogiques plutôt que 4 ou 5 comme Kurzweil a si bien su le faire par le passé. On ne peut même pas se rabattre sur l’interface audionumérique USB, limitée à la stéréo en entrée et sortie. Roland fait beaucoup mieux dans chacun de ces domaines, il faudrait que la concurrence s’y mette, dans ce niveau de gamme !
Air connu
Programmes « acoustiques »

- K2700_1audio 01 AP D901:00
- K2700_1audio 02 AP C702:18
- K2700_1audio 03 EPianos00:33
- K2700_1audio 04 Reed00:18
- K2700_1audio 05 CP8000:46
- K2700_1audio 06 D600:35
- K2700_1audio 07 B300:41
- K2700_1audio 08 Strings00:44
- K2700_1audio 09 Brass00:11
- K2700_1audio 10 Guitars00:21
- K2700_1audio 11 E Bass00:31
- K2700_1audio 12 Choirs00:20
- K2700_1audio 13 Drums01:50
Multi « synthétiques »

- K2700_1audio 14 White Elephant00:33
- K2700_1audio 15 Stringed Arp00:54
- K2700_1audio 16 Arp & Solo01:17
- K2700_1audio 17 Wave Seq01:03
- K2700_1audio 18 Bad Trip01:35
- K2700_1audio 19 Choiry Arp00:59
- K2700_1audio 20 Back in Time01:00
- K2700_1audio 21 Riff & Arp01:31
- K2700_1audio 22 JM Jarp00:59
VAST toujours
On peut aussi créer ses propres algorithmes de modules DSP, jusqu’à quatre par couche suivant la complexité des modules utilisés (en plus des modules Pitch et Ampli). Par exemple, un module Oscillateur peut occuper 1 ou 2 unités (suivant sa qualité) alors qu’un filtre 4 pôles résonant avec séparation en consomme 4. Chaque module DSP dispose de 1 ou 2 entrées et 1 ou 2 sorties. On peut donc connecter un module vers (ou depuis) 1 ou 2 autres modules. Cette connexion peut se faire avec n’importe quel module DSP de la chaîne, permettant ainsi des combinaisons en série et en parallèle. Tout cela, c’est pour une seule couche parmi 32 possibles (au prix de la polyphonie). Chaque couche offre un mode de jeu (mono/poly avec portamento/legato), une tessiture, une fenêtre de vélocité, un sens de lecture des échantillons, un délai, des paramètres de réponse aux contrôleurs physiques, des départs effets, un niveau de sortie, un panoramique, un crossfade…
Synthèse VA1
Le K2700 dispose de 25 types d’oscillateurs « KVA » : 11 modèles antialiasing et 14 modèles sans antialiasing, ces derniers étant moins pourvus mais jusqu’à 4 fois moins gourmands en ressources DSP. Les oscillateurs antialiasing occupent de 1 à 8 blocs DSP, voire 2 couches pour certains. Du coup, pour créer un synthé VA à 2 oscillateurs sans aliasing avec synchro et filtre, il faut utiliser 3 à 4 couches, donc consommer beaucoup de polyphonie. Kurzweil n’a toujours pas prévu de gabarits simplifiés de synthés-types, il faut tout se taper à la main, pas top. Certains blocs KVA sont des générateurs d’ondes Supersaw ou Triple Saw modulées ; d’autres sont des opérateurs FM (cf. ci-après) ; d’autres encore, sont des modules de synchro audio (Hard Sync) ; d’autres enfin, génèrent du morphing en temps réel entre une onde dent de scie et une onde sinus ; il s’agit bien là d’un morphing en douceur des harmoniques, pas d’un simple crossfade. Une section très puissante, puisqu’elle mélange différentes formes de synthèse (VA, FM, morphing et synchro).
Modélisation KB3
On peut aussi paramétrer le Leakage, c’est-à-dire l’effet de repisse du signal entre les roues adjacentes, encore appelée « Bleed ». Cela permet de salir le son de façon bien plus réaliste qu’avec des samples, puisque l’effet ne varie pas linéairement par rapport au suivi clavier. Là encore, différents modèles d’orgues sont reproduits, suivant les composants originellement utilisés. Enfin, on peut vernir le signal avec un vibrato, un chorus et un EQ. Reste alors à envoyer le tout dans le processeur d’effets, comme une chaîne vibrato > chorus > distorsion > Leslie > cabinet avec plus de 40 paramètres éditables ! Côté performance live, le mode KB3 tire pleinement partie de la section de commandes temps réel de la partie gauche du panneau : dosage du volume des 9 tirettes harmoniques avec les curseurs, modulations avec les 9 boutons situés juste au-dessous : vitesse de rotation des haut-parleurs, vibrato (lent, rapide, chorus), percussion (marche, volume, déclin, harmonique). Des CC Midi permettent de piloter ces paramètres, en plus de la pédale d’expression, du niveau de clic et du Leakage. Un moteur superbement réussi à notre goût. Limite à signaler, en mode multitimbral, un seul canal KB3 est possible, donc un seul clavier d’orgue modélisé à la fois.
FM 6 opérateurs
La page menu suivante est cette fois dédiée à la couche FM complète : accordage, feedback, synchro des opérateurs aux notes du clavier, enveloppe de pitch, modulation d’amplitude, modulation par la molette, action du LFO sur la FM, action de la pression sur le LFO, etc. La dernière page du menu FM s’attache aux réglages de la modulation d’amplitude globale et du panoramique. Le moteur FM du K2700 est indéniablement très puissant. Non seulement il peut reproduire les sons du DX7, mais il peut directement les importer en Sysex. Par ailleurs, le fait de pouvoir injecter le multisample de la couche en cours ou d’une autre couche VAST en lieu et place de l’opérateur classique ouvre des possibilités inédites, pour ceux qui aiment bidouiller. L’édition est plutôt bien pensée, variable suivant les pages, sans pour autant atteindre l’ergonomie d’un EssenceFM de Kodamo qui reste un modèle du genre encore inégalé.
Modulations à destination
Les ASR sont des enveloppes à 3 temps (de 0 à 30 secondes) avec bouclage, permettant de moduler des destinations sans monopoliser les enveloppes principales. Quant aux FUN, ce sont des combinaisons mathématiques de deux signaux qui en créent un troisième. On en a 52 sous la main : addition, soustraction, moyennes, comparaison, valeurs absolues, quantification, fonctions trigonométriques, fonctions booléennes… Les LFO, ASR et FUN sont regroupés sur la même page du menu, mais ne bénéficient toujours pas d’édition graphique. Enfin, les 3 enveloppes possèdent 7 segments de temps (0 à 60 secondes) et niveaux modulables, avec suivi de clavier et nombreuses possibilités de bouclage entre les différents segments. Un paramètre « Impact » permet de booster le niveau des vingt premières millisecondes de l’enveloppe de volume afin d’ajouter du punch sur les transitoires, idéal pour mettre en valeur les attaques…
Effets 32 bus
Pour les effets, le K2700 reprend les spécifications du Forte. Il est donc excellent dans ce domaine. On a 32 effets simultanés, quel que soit le mode de jeu. Les algorithmes sont équivalents à ceux du KSP8, un très recherché et rarissime rack d’effets de la marque, si bien que le manuel utilisateur nous renvoie gentiment au mode d’emploi de ce dernier, sur le site Kurzweil, pour une description complète. Chaque programme offre jusqu’à 8 chaînes d’effets d’insertion et 2 chaînes d’effets auxiliaires, avec départs bus réglables. Les effets d’insertion s’appliquent soit à tout le programme, soit à certaines couches au choix (routage vers l’une des 8 chaînes d’insertion). Chaque chaîne d’effets auxiliaire peut être appliquée avant ou après les effets d’insertion, ce qui offre une énorme souplesse de routage. Une chaîne peut contenir jusqu’à 16 boîtes d’effets distinctes et 30 destinations de modulation à choisir parmi tous les paramètres d’effets. Parmi les sources, on trouve 2 LFO, 2 ASR et 4 FUN spécifiques aux effets, impressionnant ! L’éditeur permet d’ajouter/supprimer des blocs d’effets à n’importe quel endroit de la chaîne, la seule limite étant la puissance totale (32 unités FX), donc la complexité de chaque effet (1 à 8 unités, les plus fréquents consommant 1 à 3 unités).
Arpégiateur 16 zones
Le mode Step Sequencer permet quant à lui de programmer, sur 48 pas, un décalage de note, un décalage de vélocité, une durée et une signature temporelle. Un complément idéal aux arpèges classiques ! En mode multitimbral, chaque programme peut jouer son propre arpège, si bien qu’on peut faire tourner 16 arpèges en même temps, avec des sons différents sur des zones indépendantes. Bref, un morceau de choix dont la concurrence pourrait bien s’inspirer…
Séquenceur à CC
Multi 16 zones
Chaque canal possède son propre arpégiateur, qui peut commander les programmes internes ou des modules externes via Midi. Chaque canal offre aussi un motif rythmique indépendant, baptisé riff. Un riff est importé à partir des pistes du séquenceur. On peut ainsi choisir quelles pistes doivent jouer, les synchroniser au tempo, les déclencher, les transposer (ou non), voire les décaler dans le temps, avec ou sans vélocité. Tout cela se fait dans une zone de tessiture à définir. Cela s’ajoute au séquenceur de CC pour les automations de paramètres, dont nous avons déjà parlé. Le mode Multi du K2700 est très souvent spectaculaire, avec des sons massifs ou des rythmiques multitimbrales complexes.
Séquenceur 16 pistes
L’éditeur graphique permet de visualiser les évènements sous forme de piano-roll ou table de mixage, ce qui n’est pas aussi développé que ce qu’on trouve à la concurrence, en particulier sur le Kronos de Korg ou le Fantom de Roland. Le K2700 est beaucoup plus réactif que le Forte quand on change de Song, on sent que le processeur est plus musclé pour charger les données. Le mode Song offre jusqu’à 4.096 emplacements utilisateur en plus des 1.256 chargés de démos/riffs d’usine, on se demande bien quand on viendra à bout de cette mémoire gigantesque…
Conclusion
C’est sur le plan de la synthèse pure que le K2700 brille, sans pour autant innover : modularité extrême, oscillateurs antialiasing, interactions multiples, algorithmes FM, modélisation d’orgues vintage, tout cela servi par une section effets somptueuse. Tout est mis en œuvre pour faire bouger le son, avec des arpégiateurs et séquenceurs multitimbraux puissants. On regrette alors que le K2700 se contente d’importer des samples avec une édition limitée, là où ses prédécesseurs vintage offraient l’échantillonnage et des traitements complets. Mais qui édite encore des samples sur une workstation matérielle ? Sur le plan de l’audio, le K2700 a un peu régressé dans le nombre de sorties analogiques, mais offre une interface audionumérique USB, hélas seulement stéréo. Il y a donc des domaines où des progrès sont encore attendus, reste à connaitre la volonté de Kurzweil en la matière, d’autant que la machine n’existe qu’en version 88 touches. Bref, le K2700 est fait pour les amoureux de grands et classieux synthés, au panneau de commandes généreux, aux possibilités de modulations infinies et aux sons polyvalents faciles à mixer.