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Test écrit

Test du Korg Karma - Agitation Assurée

Générer des phrases rythmiques en temps réel en éliminant l’effet mécanique et répétitif des boucles samplées ou des motifs d’arrangeurs, tel est l’objectif du nouveau Karma de Korg. Schizophrène ?

Sous l’im­pul­sion des musiques qui bougent, les luthiers élec­tro­niques s’orientent aujour­d’hui vers des stations de travail bour­rées de commandes temps réel et dotées de séquen­ceurs de motifs. Si l’ex­pres­si­vité opti­male est recher­chée, l’in­ter­ac­tion homme – machine n’est pas trai­tée de manière satis­fai­sante, les synthé­ti­seurs se conten­tant de répé­ter bête­ment les motifs enre­gis­trés. Seuls les arran­geurs permet­taient une certaine inter­ac­ti­vité, en harmo­ni­sant en temps réel une orches­tra­tion complète suivant les notes jouées par le musi­ciens. Avec le Karma, Korg propose une alter­na­tive sous la forme d’une puis­sante station de travail déri­vée du Triton dotée d’un géné­ra­teur de motifs inter­ac­tif. On n’a pas fini de bouger ! 

Clas­sique outside

Korg Karma

Dans sa solide robe métal­lique bordeaux et noir, le KARMA est un clavier 61 touches sensible à la vélo­cité et à la pres­sion. La façade est large­ment couverte de commandes : pour le temps réel (joys­tick à 2 axes, 4 poten­tio­mètres de synthèse program­mables, 8 poten­tio­mètres dédiées aux fonc­tions KARMA et les switches corres­pon­dants), pour le mode de jeux (programmes, combi­nai­sons, séquences), pour l’édi­tion (par menus et touches logi­cielles), pour l’en­trée des données (pavé numé­rique) ou pour le choix des banques de sons (touches d’ac­cès direct). L’édi­tion se fait à la manière du Triton Rack, à partir de l’écran orange 240 × 64 points et des touches logi­cielles situées en-dessous : si la navi­ga­tion est claire, grâce à des onglets façon Excel, l’ac­cès aux pages de menu néces­site trois pres­sions de touches, moins pratique que des commandes directes de pages. On s’y retrouve toute­fois et l’er­go­no­mie est assez bonne en regard du nombre de para­mètres dispo­nibles.

Korg Karma

Très (trop !) dépouillé, le panneau arrière regroupe 2 paires stéréo de sorties analo­giques, un trio Midi, 3 entrées pédales et une alimen­ta­tion hélas externe avec un énorme bloc au milieu, héri­tée du Triton Rack. Côté options (voir ci-dessous*), il y a deux trappes : la première, située en haut à gauche de la façade avant, s’ouvre à la main, un peu comme un bon vieux lecteur K7 ; elle permet d’ac­cueillir deux cartes option­nelles 16 Mo d’ondes échan­tillon­nées. La seconde, située sous la machine, permet d’ajou­ter une carte de synthèse à modé­li­sa­tion. Donc pas de connec­tique numé­rique, grrr… Côté unité de sauve­garde ou mise à jour d’OS, un lecteur de disquettes est présent en façade, sous le joys­tick.

*Heart of noise

Inven­teur du concept Karma, Stephen Kay est un compo­si­teur et musi­cien profes­sion­nel. Il a travaillé sur des échan­tillons sympho­niques pour Fair­light III puis est devenu démons­tra­teur Korg. On lui doit de magni­fiques séquences de démons­tra­tion, notam­ment pour les 01/W, Trinity et arran­geurs de la série I. Pour créer ses séquences spec­ta­cu­laires, il a du déve­lop­per ses propres algo­rithmes, n’hé­si­tant pas à se lancer dans les arcanes du langage C. Abou­tis­se­ment de ses recherches, le concept Karma repré­sente sept ans de travail acharné. Le Korg Karma en est aujour­d’hui la première incar­na­tion commer­ciale (plus d’in­fos sur www.karma-lab.com). Stephen avoue lui même les diffi­cul­tés de décrire la fonc­tion Karma. C’est pour­tant ce que nous allons devoir faire… dur métier !

Korg Karma

Au cœur du Karma réside un puis­sant géné­ra­teur d’évé­ne­ments Midi mélan­geant des séquences ryth­miques, des arpèges et des messages de Control Change. Envi­ron 1100 motifs sont stockés en Rom. Chacun dispose de 400 para­mètres déter­mi­nés par le construc­teur dont 16 sont direc­te­ment acces­sibles et contrô­lables en temps réel, avec les poten­tio­mètres de la façade et les contrô­leurs Midi. Pour chacun, on déter­mine la source de modu­la­tion et les valeurs extrêmes. Parmi les motifs, on trouve des riffs techno abso­lu­ment spec­ta­cu­laires, des envo­lées lyriques orches­trales, des arpèges plus ou moins chao­tiques, des riffs de guitare ou encore des patterns de batte­rie.

Le Karma analyse les notes produites par l’uti­li­sa­teur et les traduit en modu­la­tions des para­mètres du géné­ra­teur d’al­go­rithmes ryth­miques. Mi-arran­geur, mi-séquen­ceur, la machine produit des résul­tats surpre­nants, spec­ta­cu­laires, si bien que l’on s’ar­rête souvent de jouer pour l’écou­ter. Et c’est là le revers de la médaille, car c’est plus le Karma qui brille que le musi­cien qui joue. De plus, le fait que seule­ment 4% des para­mètres soient connus et acces­sibles est un peu frus­trant. Cette fonc­tion géniale d’al­go­rithmes ryth­miques doit donc être utili­sée avec parci­mo­nie, en toute connais­sance de cause. En mode programme, un motif Karma est dispo­nible alors qu’en mode combi­nai­sons ou séquences, quatre peuvent être utili­sés simul­ta­né­ment. Le délire ! Vive­ment un logi­ciel qui ouvre les portes du Karma, là ça sera jouis­sif…

Triton inside

Bonne nouvelle, le Karma reprend entiè­re­ment les sections synthèse, effets et séquen­ceur du Triton, avec qui il est d’ailleurs entiè­re­ment compa­tible. Sous le capot, il s’agit d’un Triton sans section échan­tillon­nage auquel est venu s’ajou­ter un géné­ra­teur de motifs inter­ac­tifs. A la base, nous sommes donc en présence d’un lecteur d’échan­tillons poly­pho­nique 62 voix avec la Rom 32 Mo du Triton, codée sur 16 bits linéaires à 48 kHz, compre­nant plus de 400 multié­chan­tillons et 400 percus­sions de très haute qualité.

Korg Karma

Tous les claviers sont très réus­sis : un grand piano assez doux, un bon CP70, d’ex­cel­lents Fender, Wurlit­zer, Clavi­net et Hammond. Les guitares, basses et cuivres passent égale­ment très bien. C’est aussi le cas des cordes solos, mais moins des ensembles de cordes, trop éthé­rés à notre goût. Les kits de batte­rie reprennent tout ce qu’il est possible de reprendre ou presque, avec une belle patate d’en­semble et une grande variété de styles. Les sons synthé­tiques sont très complets, capables de punch ou de rondeur, toujours en très large bande. Mais le clou du spec­tacle, ce sont les motifs spéci­fiques KARMA qu’au­cune autre machine n’est capable de repro­duire (voir ci-dessous**).

**Cartes au trésor

La collec­tion de cartes PCM 16 Mo propose aujour­d’hui sept titres : Piano/Clas­sic Keyboards (31 multié­chan­tillons de grand piano stéréo, Fender, Wurlit­zer et Clavi­net à multiples niveaux de vélo­cité très bien exécu­tés), Studio Essen­tials (38 instru­ments acous­tiques, parmi lesquels une énorme section de cuivres et de magni­fiques chœurs Gospel), Future Loop Construc­tion (275 boucles de percus­sions), Dance Extreme (ondes synthé­tiques et percus­sions orien­tées à la techno), Vintage Archives (158 multié­chan­tillons et 56 percus­sions de vieux coucous célèbres dont un best of Korg) et Orches­tral (2 cartes 16 Mo offrant 193 multié­chan­tillons stéréo d’or­chestres clas­siques tirés des CD-Rom Peter Sled­lac­zek Advan­ced Orches­tra). Déci­dé­ment, notre ami Peter se vend partout !

Korg Karma

Mais le Karma peut égale­ment accueillir la géniale exten­sion MOSS du Z1. Il s’agit d’une carte poly­pho­nique et multi­tim­brale 6 voix capable de produire des sons géné­rés par modé­li­sa­tion acous­tique : 13 types de modèles possibles dont 9 doubles (orgues, pianos élec­triques, cordes frot­tées, cordes pincées, cuivres, anches, modé­li­sa­tions analo­giques), un sub-oscil­la­teur, un géné­ra­teur de bruit, deux filtres multi­modes réso­nants, 4 LFO, 5 enve­loppes, une puis­sante modu­la­tion matri­cielle et 128 empla­ce­ments supplé­men­taires en mémoire. On peut mélan­ger à volonté les canaux clas­siques aux canaux MOSS en combi­nai­sons ou en séquences. Deux restric­tions cepen­dant : il est néces­saire de spéci­fier une réserve de voix pour chaque canal ; tous les sons MOSS empruntent le même bus d’ef­fets et la même sortie audio. Nous avons beau­coup appré­cié le grain supplé­men­taire et la présence de la modé­li­sa­tion, un excellent complé­ment aux motifs Karma. De plus, la carte MOSS est une véri­table béné­dic­tion pour les passion­nés de synthèse.

Triton inside II

Le Karma offre une mémoire utili­sa­teur très confor­table de 640 programmes (128 programmes MOSS addi­tion­nels lorsque l’op­tion est instal­lée), 64 kits de percus­sions et 768 combi­nai­sons. S’y ajoutent 256 programmes et 9 kits GM2, passons… L’ar­chi­tec­ture sonore d’un programme repose sur une ou deux couches de multié­chan­tillons ou l’un des kits de percus­sions. La tona­lité de chaque oscil­la­teur peut être modu­lée par une enve­loppe, les LFO et une source de modu­la­tion matri­cielle. En effet, le Karma permet de relier une quaran­taine de sources à une tren­taine de desti­na­tions – par exemple, le numéro de note Midi au pano­ra­mique de la section ampli – en plus des 25 liai­sons figées.  Les temps et les niveaux des enve­loppes sont eux aussi modu­lables.

Korg Karma

Chaque oscil­la­teur est ensuite envoyé dans un filtre multi­mode réso­nant hélas limité à deux modes, à savoir passe-bas 4 pôles ou passe-haut 2 pôles + passe-bas 2 pôles en série. La fréquence de coupure et la réso­nance peuvent être modu­lées via une deuxième enve­loppe ou la matrice. Le signal passe ensuite dans la section ampli­fi­ca­tion, avec contrôle du volume et du pano­ra­mique par la matrice et une troi­sième enve­loppe. Côté sources de modu­la­tions, il existe 2 LFO synchro­ni­sables très complets offrant 21 formes d’onde, la synchro au tempo, un fondu, un offset et un délai.

Triton inside III

Korg Karma

Avant de sortir prendre l’air, le son attaque une section effets dotée de cinq multief­fets d’in­ser­tion, deux effets maîtres et un EQ global stéréo 3 bandes. Les inser­tions, assi­gnables à n’im­porte quelle sortie audio, sont placées sur des bus indé­pen­dants qu’il est possible de connec­ter en série ou en paral­lèle. Parmi les 102 algo­rithmes d’in­ser­tion variés d’ex­cel­lente qualité mono ou stéréo en entrée et mono ou stéréo en sortie, on en trouve 89 à allo­ca­tion simple et 13 à allo­ca­tion double, sachant que le DSP auto­rise un maxi­mum de 5 unités d’al­lo­ca­tion. Les deux effets maîtres, mono en entrée et stéréo en sortie, reprennent les 89 algo­rithmes à allo­ca­tion simple. Chaque algo­rithme d’ef­fet comprend 10 à 20 para­mètres, dont certains sont modu­lables via la matrice ou l’hor­loge Midi. Fran­che­ment, l’une des plus belles sections effets du marché, la concur­rence n’a qu’à bien se tenir.

L’ha­bi­tude chez Korg veut que le regrou­pe­ment de programmes simples s’opère par huit au sein de combi­nai­sons. Le Karma ne déroge pas à la règle. Dans ce mode, il travaille sur 8 canaux Midi simul­ta­nés en émis­sion comme en récep­tion. Chaque canal comporte un canal Midi, un numéro de programme, une tessi­ture, une vélo­cité, une série de seize filtres Midi et des routages complets d’ef­fets. En mode combi­nai­sons, les séquences Karma deviennent multi­tim­brales sur quatre canaux. Là, ça devient inté­res­sant, puisqu’on dispose d’ar­ran­ge­ments très sophis­tiqués. 

Triton inside IV

En mode séquen­ceur, le Karma devient multi­tim­bral sur 16 canaux Midi et sur 4 canaux de motifs KARMA en récep­tion. Comme sur le Triton, le séquen­ceur est très puis­sant : program­ma­tion pas à pas ou temps réel avec une réso­lu­tion de 192bpqn, édition micro­sco­pique par liste dérou­lante avec confi­gu­ra­tion de filtrage de certains messages Midi, superbe ! Il existe égale­ment un éditeur de patterns au sein duquel on se fabrique jusqu’à 100 motifs origi­naux par séquence en plus des 150 en Rom. Une fonc­tion RPPR permet par ailleurs d’as­si­gner des patterns à tout le clavier et de les déclen­cher / stop­per en temps réel.

Korg Karma

Au total, la capa­cité mémoire offre 200.000 notes sur 200 séquences. Notre sourire à peine esquissé se fige là puisque, tradi­tion Korg oblige, cette mémoire est vola­tile, zut ! Pour les amateurs de SMF, la machine dispose d’un mode spécial de lecture directe des Midi­Files depuis une disquette, aux formats 0 et 1. Une fonc­tion juke-box et 20 Cue Lists permettent d’ailleurs d’en­chaî­ner jusqu’à 99 séquences avec ou sans répé­ti­tion. Bon…

Surprises comprises

Le Karma est une machine surpre­nante. A la puis­sance, à la musi­ca­lité (et aux défauts) du Triton s’ajoute la toute puis­sance mysté­rieuse du géné­ra­teur d’évé­ne­ments Midi. Impos­sible de rester insen­sible à son groove : le Karma donne envie de bouger, il se passe toujours quelque chose de plus ou moins inat­tendu. La machine est flat­teuse et on a souvent tendance à l’écou­ter jouer toute seule. C’est d’ailleurs un peu sa limite frus­trante, car même si les motifs dépendent de notre jeu, nous n’en contrô­lons qu’une partie restrein­te… bref, le Karma ne s’ef­face pas toujours devant l’uti­li­sa­teur. Il ne s’adresse pas à notre sens aux habi­tués des arran­geurs qui ont l’ha­bi­tude de manier leur monture au claque­ment de doigts. Il est plutôt réservé aux explo­ra­teurs, aux amateurs de l’ex­trême, avec ses fris­sons… mais aussi ses surprises.

  • L’innovation du concept Karma
  • L’interactivité des algorithmes
  • L’excellente qualité sonore
  • La musicalité et l’expressivité
  • Le moteur de synthèse du Triton
  • La magnifique section effets
  • La compatibilité MOSS
  • L’OS en mémoire Flash
  • Le cœur du Karma, inaccessible
  • La mémoire volatile du séquenceur
  • La connectique trop limitée
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