On ne parle des centenaires que pour s'étonner de leur vitalité : Beyerdynamic ne fait pas exception, qui nous propose en ce début d'année une édition anniversaire de son très classique DT-770 Pro sans pour autant se contenter, comme c'est trop souvent le cas, d'en changer l'habillage...
On vous l’annonçait le mois dernier : Beyerdynamic, pour ses 100 ans, sort une édition limitée de son légendaire (n’ayons pas peur du mot) casque le DT-770 Pro. Quelques différences sont à noter : principalement l’inclusion du système de haut-parleurs STELLAR.45, avec leur rendement plus élevé pour une impédance plutôt basse, mais aussi l’ajout d’un câble détachable, et quelques finitions un peu différentes. On note aussi, pour finir, que pour une édition limitée, le casque reste relativement abordable, à 199 euros (contre 139, ce qui fait une hausse de 43 % environ)
Étant donné qu’on a déjà testé le DR-770 Pro il y a un an, ce nouvel article va être l’occasion de comparer les différences réelles (s’il y en a) apportées par le système STELLAR.45. Passons donc immédiatement à sa présentation…
Spécifications DT-770 Pro X
Le DT-770 Pro X est un casque de type circum-auriculaire, fermé, avec un transducteur dynamique.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
impédance : 48 ohms
réponse en fréquence : 5 Hz — 40 kHz
Le casque est accompagné d’un câble de 3 m, lisse et droit avec, à une extrémité, une prise jack 3,5 mm TRS, plus son adaptateur vers jack 6,35 mm TRS, et à l’autre un mini-XLR 3 points. Car le câble est amovible : c’est une différence notable avec l’habituel D-770 Pro, et c’est plutôt une différence bienvenue — elle permet un remplacement possible du câble, potentiellement même des modifications puisque la connectique est totalement standard.
Le câble est épais, mais souple, facile à réenrouler, et les connectiques sont de plutôt bonne qualité, et même si elles ont l’air d’être serties dans la masse, elles sont en vérité complètement démontables, ce qui rendra possible de futures réparations, si besoin…
Pour le reste, on est principalement sur le même design à l’exception de quelques éléments précis : par exemple, les pièces plastiques aux extrémités de l’arceau et les charnières des écouteurs sont similaires à celles du DT-1770 Pro. C’est donc un casque robuste, avec des finitions bien réalisées, peu de métal, mais du plastique épais et les quelques pièces en aluminium sont très bien usinées.
Démontable ?
Tout à fait !
Alors attention, c’est un peu plus difficile à réaliser que le DT-770 Pro de base. Le début est exactement similaire, on retire d’abord le coussinet, puis…
Une fois retirée la mousse de protection, avec un tournevis plat ou une fine lame, on vient faire progressivement sauter l’anneau situé au pourtour du support de HP. Cela permet ainsi de libérer ce support qui, d’habitude, glisse dans la paume de la main lorsque l’on retourne l’écouteur…
D’habitude, mais là non.
Il faut donc, très prudemment, se saisir de la grille de protection du HP avec une pince adéquate, et tirer lentement mais sûrement. ATTENTION : l’aimant du HP est juste en face de votre outil, il peut attirer votre pince et risque de percer la fine membrane du transducteur. Prudence, donc !
Et voilà pourquoi : l’ensemble support/haut-parleur est maintenu en place par un connecteur latéral. Les soudures sont bien réalisées, le câblage, d’un diamètre correct, est propre et bien maintenu en place. Bref, on est sur une conception de qualité.
Confort
Bon,
On connaît le DT-770 sur ce point : pas trop lourd et avec un arceau bien rembourré, on est plutôt confortable… Les coussinets en velours sont un plus, on le sait, mais ils ont aussi la conséquence de pouvoir être un peu trop « chauffants » lors de longues sessions de travail ou dans des environnements déjà chauds. De plus, le casque serre un peu fort sur les côtés de la tête, rien d’insupportable, mais c’est notable quand même.
Isolation
Très bonne,
Le casque permet une très bonne réjection des sons externes, c’est la conséquence positive des deux points soulignés au-dessus : coussinet épais et serrage important.
Transport
Moyen,
Le DT-770, quelle que soit l’édition, est un gros casque, absolument impossible à plier, plutôt léger, mais assez massif, et qui donc n’est probablement pas un bon candidat si vous cherchez un casque pour un travail « sur la route ». On notera toutefois qu’il est accompagné d’un sac de protection en toile, mais cela ne change pas fondamentalement la remarque faite précédemment.
Benchmark DT-770 Pro X
Voici donc notre protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
On remarque :
- Une linéarité entre 20 et 50 Hz (donc on s’attend à un grave en avant)
- Un léger creux suivi d’une accentuation à 100 Hz et des poussières
- Un creux marqué à 250 Hz
- Une linéarité entre 400 Hz et 2 kHz, en retrait toutefois par rapport au grave (Δ 6 dB entre 20 Hz et 1 kHz)
- Un creux à 3 kHz
- Une accentuation générale des aigus, en particulier à 8 et 11 kHz
On remarque également que les transducteurs sont très bien appariés (comme toujours).
Distorsion :
La distorsion mesurée est plutôt basse, avec une partie entièrement sous 0,1 % entre 100 Hz et 3 kHz, mais une montée qui atteint toutefois 5 % à 20 Hz. La deuxième et troisième harmoniques sont à peu près également présentes sur l’ensemble du spectre. On remarquera toutefois que la mesure est dans l’ensemble un peu moins bonne que celle que nous avions faite sur le modèle classique à 250 ohms.
Écoute DT-770 Pro X
Richard Hawley — Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. On retrouve la signature bien connue du DT-770 : des aigus en avant, très cristallins, un médium assez précis, mais un peu plus en retrait, et un grave bien suivi, clairement présent et assez précis. On remarque tout de suite que la basse est très soulignée, plus que dans tous nos souvenirs du DT-770 Pro. L’aigu est très présent, comme toujours : on perçoit chaque plosive, chaque souffle ajouté sur la voix quand elle se fait plus douce. De même le suivi des longueurs de réverbe est très facile. L’image stéréo est précise.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. C’est la première fois depuis longtemps qu’un casque me surprend vraiment sur le grave : précis ? clair ? Oui, plutôt, mais surtout tout présent et ce jusqu’au plus grave, avec peu de différence d’amplitude selon les notes du clavier-basse (la note la plus basse a une fondamentale à 28 Hz !). En revanche, à la première écoute (car l’oreille s’habitue à tout) on est frappé par la prééminence des aigus et hauts médiums qui rendent la batterie (en particulier la caisse claire) fine, aigrelette, manquant un peu d’assise. Déformée donc, mais facile à suivre : après tout, il s’agit d’un casque réputé pour la prise et le monitoring en direct.
Massive Attack — Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. On continue dans la ligné des remarques précédentes : grave maousse, mais assez précis pour rester appréciable et ne pas masquer trop le reste, un aigu très aéré (presque trop de sibilance sur les S dans la deuxième stance du premier couplet), un médium précis, mais en retrait (ici on perçoit bien combien le piano reste assez discret, et peu coloré, là où d’autres casques lui donnent une prééminence et une richesse harmonique remarquable).
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Que de cymbales ! Trop ! La ride prend tout l’espace au centre du mix et masque un peu le message. C’est un risque avec ce morceau (et généralement les enregistrements de jazz de cette période, où la batterie est souvent traitée avec un grand réalisme acoustique, et donc avec des cymbales très dynamiques, très amples). Ce défaut mis à part, le rendu des instruments grave est excellent, et on se surprend à vraiment bien isoler la contrebasse (entre autres) dans le maelstrom instrumental.
Edgar Varèse — Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 min. Si vous voulez de la précision dans les attaques, vous êtes bien tombé. Un peu de fatigue aussi, surtout après l’écoute précédente. Dans le grave aussi (immense grosse caisse d’orchestre) on est bien tombé. L’acoustique de la salle est également très bien rendue, avec des longueurs de réverbération changeante selon les nuances de jeu et le placement gauche-droite des instruments. Les énormes écarts dynamiques sont bien rendus. Pas grand-chose à redire d’un point de vue sonore, à part qu’on est quand même un peu content d’ôter le casque à la fin de l’écoute : la chaleur, le serrage, les aigus nous ont un peu usés.