Dans la famille AKG, je demande la petite gamme : nous testons donc cette fois-ci un des produits les plus abordables de la marque, en espérant y retrouver une grande part (si ce n'est tout) ce que l'on aime dans la marque autrichienne.
Ce casque fait donc partie de la gamme très abordable du constructeur, présentée en 2016, lors du NAMM, et qui avait reçu des réponses plutôt intéressées à l’époque… Tout en créant la surprise, car l’on n’attendait pas la marque de Vienne sur ce segment du marché.
Quelques années sont passées, et il nous a semblé juste de revenir sur ce modèle dans notre série de tests de casques de petite et moyenne gamme. Chose faite donc…
Spécifications
Le K92 est un casque de type circumauriculaire, fermé, avec un transducteur dynamique. La taille du transducteur est de 40 mm.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
- impédance : 32 ohms
- réponse en fréquence : 16 Hz — 22 kHz
Le câble fait 3 mètres de long, avec une terminaison jack 3,5 mm TRS, avec son adaptateur 6,35 mm. Il n’est pas détachable, et il est recouvert d’une gaine assez fine et molle, sensible donc aux torsions. Prudence donc lors des rangements…
De façon générale, on a connu des constructions beaucoup plus robustes chez AKG, à l’extérieur (épaisseur des plastiques) comme à l’intérieur (câblage et soudures). On est donc clairement sur un casque un peu cheap, et dont il faudra prendre soin si l’on veut qu’il dure.
Démontable ?
Oui, jusqu’à un certain point.
On commence par ôter les coussinets :
C’est déjà assez différent des gammes supérieures, qui emploient un ingénieux système de languettes, permettant de retirer les mousses par un simple tour de quelques degrés — solution qui facilite nettement plus le changement que ce système, plus commun, de revers insérable. En revanche, on notera qu’AKG a eu la bonne idée d’intégrer une encoche dans le support plastique, permettant de remettre le coussinet en insérant le revers dans celle-ci, puis en faisant tourner lentement (on appellera cela, le « système Beyerdynamic », puisqu’il est typique des casques DT-XXX).
On découvre ainsi quatre petites vis (cruciformes) que l’on retire pour dégager le support du HP :
On découvre alors un montage correct, avec des soudures un peu « pâteuses », mais du câble pas trop fin. En revanche, on pointera du doigt un système anti-traction réalisé grâce à un « nœud de câble » (en plus d’une pièce plastique visée qui vient enserrer le câble à son arrivée dans l’écouteur). On aurait pu faire mieux !
Et le transducteur est collé, donc pas moyen d’aller l’inspecter.
Le bandeau est fixé par des vis lui aussi, il est donc facile de le remplacer :
Confort
Excellent.
Comme souvent avec les casques AKG, c’est un point sur lequel il n’y a rien à redire : légèreté, bonne adaptation à la forme du crâne, serrage jamais excessif, même neuf. Les coussinets, en faux cuir sur mousse, bénéficient d’une texture pas trop molle, qui est assez agréable à porter.
Correcte.
Ça fait le boulot, mais sans l’efficacité d’un ATH-M50 par exemple (pas la même gamme, me direz-vous). En revanche, le casque sert moins, et tient moins chaud aux oreilles… Entre confort et isolation, c’est souvent une histoire de compromis.
Transport
Moyen.
Pas de sac de protection, pas de mallette (dans cette gamme, ce n’est pas étonnant), et le casque ne se plie absolument pas, comme souvent les AKG. Mais en plus, contrairement au K712, la construction est moins robuste, donc il faudra se montrer prudent.
Benchmark
Voici notre protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
On remarque :
- assez linéaire de 20 Hz à 1 kHz
- un creux important et large, de 1 kHz à 4 kHz, particulièrement accentué à 1,3 kHz et surtout à 3 kHz
- des aigus à peine plus accentués que le grave et le bas médium
- une baisse à partir de 17 kHz
On remarque aussi des transducteurs appariés à 1 dB à part dans le médium, où les résultats sont nettement moins précis.
Distorsion :
La distorsion mesurée est inférieure à 0,2 % de 100 Hz (environ) à 1,2 kHz. Elle dépasse rarement 0,5 %, et n’est qu’à 2 % à 20 Hz. Tout cela est plutôt encourageant, mais on remarque en revanche une présence égale des harmoniques paire et impaire (2de et 3e harmonique) sur tout le spectre, là où l’on s’attend généralement à un recul plus important des harmoniques impaires.
Écoute
Richard Hawley — Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. Sur la guitare, du détail dans les attaques, mais assez peu de richesse harmonique. La voix également a ce même traitement : articulée, avec les attaques et les plosives qui ressortent, sans exagération non plus, mais il lui manque un peu de corps. Les notes les plus graves ressortent plus en avant que le haut médium, ce qui donne une impression de déséquilibre. L’image stéréo manque un peu de précision également, car le bas médium est trop présent sur l’ensemble des instruments et crée un effet un peu « bouillie » par endroit.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Pas de problème pour suivre la basse jusque dans l’extrême grave, et la batterie ne manque pas de présence non plus, ni de détail, même si c’est plutôt dans l’aigu (shaker) que dans le médium que l’on trouve les éléments les plus proéminents. La voix, parfois un peu nasale, et avec un effet de proximité un peu fort sur les parties calmes, se trouve plutôt bien rendue malgré cela, même s’il lui manque un peu de présence dans le haut médium, encore une fois.
Massive Attack — Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. La résonance sub du kick sur le premier couplet est rendue de façon un peu épaisse, et si la voix est plutôt bien restituée, on sent qu’il manque quelque chose dans le haut médium pour lui donner un peu plus de présence, d’assise. Pour ce qui est des petits détails, shaker, percussions aiguës, craquements du disque samplé, souffle sur certaines notes chantées, tout cela reste bien perceptible. On regrette juste cette coloration, en particulier sur la voix, apportée par le creux important dans le haut médium.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. C’est le moins bon rendu du test : cette coloration jusqu’ici plutôt vocale se retrouve évidemment sur un ensemble de cuivre, pour lequel le médium et le haut médium doivent être rendus avec clarté. À la place, on a beaucoup de cymbales, des sax et des trompettes nasales, et des graves baveux qui nuisent à l’écoute du bas du spectre. On passe…
Edgar Varèse — Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0 h 30 et 1 h 15 min. L’impression générale se confirme, et si les détails ne sont pas absents, et les résonances de la salle bien suivies, et les dynamiques bien rendues… On regrette quand même de ne pas retrouver la richesse et la diversité des timbres qui fait tout l’intérêt de cet enregistrement, et l’on trouve que la présence accentuée des bas médiums rend certains ffff un peu « balourds », lents, pas percutants (c’est un comble !)
Conclusion
En chapeau, l’on se demandait si le K92 nous réservait les mêmes plaisirs que les casques « références » ou haut de gamme de la marque, et la réponse est plutôt : non.
On peut aborder la conclusion sous deux angles : celui de la construction, celui du son. Dans les deux cas, sans rien proposer de catastrophique (sinon, la note serait sous 5, mais ce ne serait pas justifié ici) ni de réellement honteux, AKG semble ne proposer rien de plus qu’un casque « pure bas de gamme » avec la seule apparence d’un AKG : construction légère, câble long, fin et souple comme un spaghetti trop cuit, haut-parleurs moyennement bien appairés, sonorité colorée et à la fois nasale et lourde dans le grave. Le seul point vraiment absolument positif : à ce prix-là, nous n’avons pour l’instant jamais vu de casque aussi léger et confortable.
On se dit donc que, dans un cas où l’on cherche pas cher et pas fatigant (pour étoffer un parc de casque pour une grosse session d’enregistrement, pour des projets pédagogiques, pour des projets temporaires…), ce que le K92 offre de plus que les autres dans cette gamme, c’est l’assurance d’un bon niveau de confort. Le problème reste toutefois que sur les autres plans, il ne nous semble pas faire spécialement mieux que bien des concurrents, mais qu’il le fait… pour pratiquement le double du prix. À méditer.