34 ans, c'est l'âge du HD-25, le petit casque increvable de Sennheiser, qui revient toujours sous différentes versions et éditions collectors. À quelques différences près, chaque variation reprend les grands traits du produit original : légèreté, solidité, flexibilité...
Ce mois-ci, nous ajoutons à nos tests, qui d’habitude suivent les sorties récentes, un passage en revue de six casques qui ont plus que fait leurs preuves : les indéboulonnables, les classiques, ceux que l’on trouve comme écoute de référence dans de nombreux studios, mais aussi dans d’autres domaines où la captation sonore joue un rôle phare (radio, cinéma, TV, régie…). Il s’agit également de six références qui font toujours partie des meilleures ventes chez leur constructeur respectif, et cela plusieurs décennies après leur première production. Chacun d’entre eux est connu pour quelque aspect particulier (confort, isolation, solidité, légèreté…). Certains tirent vers le « neutre » (si tant est que cette notion existe pour des transducteurs), d’autres sont franchement du côté de l’écoute « effet loupe ».
Certains de ces casques avaient fait l’objet d’un comparatif AF il y a maintenant… douze ans ! Maintenant que notre méthode de test s’est affinée et que nous avons sous la main notre propre testeur, il nous a paru intéressant d’établir ces six tests « de base », auxquels tous nos lecteurs pourront se référer.
Et cette fois-ci, nous nous penchons sur le HD-25–1-II Basic de Sennheiser
Présentation/déballage
Spécifications
Le HD-25 est un casque de type supra-aural, fermé, avec un transducteur dynamique. La taille du transducteur n’est pas fournie par le constructeur, mais nous l’avons mesurée à 33 mm.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
- impédance : 70 ohms, donc acceptable pour un téléphone mobile
- Réponse en fréquence : 16 Hz – 22 kHz
Le casque a un câble droit de 1,5 m, plutôt fin, très malléable, et qui laisse craindre quant à sa durée de vie. Le câble se termine par l’habituelle fiche jack TRS 3,5 mm, avec son adaptateur TRS 6,35 mm vissable.
Une des particularités mécaniques importantes du HD-25, c’est sa modularité : chaque élément (ou presque) peut être extrait et remplacé, parfois sans même besoin d’un tournevis. Par exemple : le câble arrive de façon un peu « hors-norme » sur l’oreillette droite, mais il est tout à fait possible d’inverser cela. Et d’ailleurs le câble est lui-même facilement remplaçable. De même qu’il est tout à fait possible de démonter un écouteur pour remplacer le transducteur, ou de tirer sur un écouteur (le long de sa glissière à crans, qui permet d’en régler la hauteur) pour le retirer en entier et le remplacer. Ainsi, vu le nombre de HD-25 de seconde main sur le marché, il est aujourd’hui possible de se fabriquer un HD-25 fonctionnel à partir de deux « en panne ».
Démontable ?
Totalement.
Pour démonter les écouteurs, il faut d’abord débrancher la fiche qui termine le câble.
Il est ensuite possible de détacher complètement l’écouteur du casque, simplement en tirant dessus.
Une fois l’écouteur détaché, il suffit de tirer sur la mousse d’isolation, et de retirer le petit disque de mousse interne pour révéler la pièce en plastique, avec ses évents répartis en cercles, qui cache le transducteur.
Un tournevis plat glissé dans une encoche permet de la détacher, révélant le transducteur. Le reste de la coque est rempli d’un feutre amortissant :
Comme on le voit bien sur la première photo ci-dessus, un point de colle se situe en haut de l’écouteur, vers les câbles de raccordement, mais cette colle cède très facilement sous la pression. On découvre alors la sortie de deux câbles qui permettent, lors d’un recâblage, de ne pas utiliser les fiches rouges et noires d’origines (voir première photo du démontage), mais de souder directement le câble dans l’écouteur (attention de bien respecter le même raccordement de la phase entre les transducteurs de droite et gauche).
Le câble d’origine se glisse dans une gouttière aisément accessible, cachée dans la tranche interne de l’arceau (qui se sépare en deux arcs, nous reviendrons là-dessus) :
Pour finir, le câble est protégé contre les chocs par un petit bloc de maintien, serré par deux vis Torx, mais malheureusement ce dispositif ne fonctionne pas correctement, soit par manque de force de serrage, soit parce qu’il n’applique pas la torsion nécessaire au câble. Il est donc possible d’en extraire le câble en tirant simplement dessus :
En revanche, c’est le seul point où la construction nous a paru manquer de sérieux. Pour le reste, et en prenant en compte le fait que le casque est entièrement fabriqué en plastique léger, il nous a impressionnés par sa robustesse, surtout due à une excellente capacité à se tordre sans céder et à reprendre sa forme originale sans déformation.
Confort
Le point le plus positif du HD-25, quant au confort de l’auditeur, c’est le grand nombre d’axes de pliage, qui fait qu’il s’adapte assez facilement à toutes les têtes.
Un point particulièrement intéressant : l’arceau séparable, avec ses deux mousses de confort, qui permet assez instinctivement de trouver le point où le casque se repose le plus confortablement possible sur le dessus de votre tête. Si vous êtes un musicien qui dodeline de la tête en jouant, l’arceau séparable stabilise très bien le casque sur votre tête.
On connaît aussi l’écouteur soulevable, qui permet de libérer une oreille, et qui en a fait un casque prisé des DJ, mais qui a aussi son intérêt lors d’enregistrements en studio si l’on souhaite, en plus du retour, pouvoir entendre le son des instruments tel qu’il se diffuse dans la salle de prise.
Seul défaut, en revanche (défaut typique des supra-auriculaires) : pour obtenir une isolation correcte, il faut un serrage assez élevé qui peut se montrer un peu fatigant. De plus, pour les porteurs de lunettes (dont je fais partie), un casque qui appuie ainsi sur le pavillon de l’oreille aura tendance à écraser celui-ci contre la branche de vos lunettes, causant soit une douleur, soit un déplacement assez gênant de vos lunettes par rapport à votre position de confort.
Isolation
L’isolation peut être très satisfaisante, mais cela en fonction de deux facteurs variables (typiques encore une fois des casques supra-auriculaires) : un serrage assez fort qui sera plus ou moins bien supporté, et la bonne adaptation de l’oreille de chacun (chaque oreille étant unique) à l’ergonomie d’ensemble du casque. Ainsi, lors des tests sur tête artificielle (avec des oreilles en caoutchouc d’une souplesse moyenne), nous avons eu du mal à obtenir une bonne isolation, et avons dû nous y reprendre à trois fois pour trouver le placement exact du casque.
Transport
Bon point : la robustesse du casque et sa légèreté. Toutefois, on notera qu’il se plie assez peu, que son câble est assez fragile et qu’il est livré sans housse de protection (présente avec le HD-25 Plus).
Benchmark
Voici donc le nouveau protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
On découvre un casque avec une belle linéarité entre 100 Hz et 4 kHz, puis deux creux (4 kHz et 6 kHz environ) et une bosse très marquée à 9 kHz. Des baisses importantes au-dessous de 90 Hz et au-dessus de 16 kHz sont aussi remarquables. Nous avons comparé avec d’autres graphes de RF trouvables sur le Net, qui sont généralement assez similaires, sauf en dessous de 90 Hz où l’on voit souvent des réponses plus linéaires que lors de notre test. D’ailleurs, lors de notre propre test, selon la disposition sur la tête artificielle, la réponse dans le grave changeait parfois drastiquement : voilà donc un point à connaître, et qui n’est certainement pas positif – le positionnement du casque, et son couplage avec l’oreille, change assez profondément le rendu sonore.
Distorsion :
La distorsion est, comme l’indique le constructeur, en moyenne en dessous de 0,3 %, et à part une remontée assez importante sous 100 Hz (corrélée avec la perte constatée sur la courbe de RF), rien de spécifique n’est à signaler. Résultats satisfaisants.
Écoute
Richard Hawley – Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. Premier élément plutôt négatif : l’image stéréo plutôt subtile dans ce morceau (guitare acoustique légèrement à droite du centre, réverbe s’épanouissant un peu plus sur la gauche) n’est pas très bien rendue. Tout se trouve un peu « écrasé » : aussi bien l’image stéréo, donc, que la plage de fréquence du morceau manquant aussi bien de grave que d’aigu (le creux à 6 kHz se fait sentir) même si la bosse à 9 kHz rend à l’ensemble de la lisibilité en soulignant les attaques et les sifflantes. Résultat, entre autres : la voix baryton a trop de « corps », de coffre et pas assez d’articulation. La contrebasse, assez en avant, manque de précision dans l’attaque. Pour l’instant, avis mitigé.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Sur un morceau très minimal comme celui-ci, le casque s’en tire mieux : bonne séparation de l’attaque du clavier (basse) et de la grosse caisse, la voix plutôt nasale, à la plage de fréquence plus restreinte, passe mieux et la caisse claire ne manque ni d’attaque ni d’assise. Ce n’est pas très subtil, la petite attaque piquée au début de chaque note grave est assez étouffée, mais on retrouve mieux les particularités que l’on attend sur ce morceau.
Massive Attack – Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. Là, au point de vue des détails, on n’y est pas : la basse dégueule un peu et bouffe tout, le piano a trop de bas-médium, mais en revanche la résonance « sub » qui suit le coup de grosse caisse (placé sur la levée avant le 4ème temps de chaque mesure durant le premier couplet) est inintelligible. Tout ce qui est dans le médium est bien traité, et la bosse à 9 kHz met toutes les attaques et articulations vocales en avant (sans trop de sibilance pour autant, c’est bien), mais l’on reste sur une impression plutôt généralement brouillonne.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Étonnement, c’est sur ce morceau que, pour l’instant, le HD-25 s’en tire le mieux. Oui les cymbales sont un peu trop présentes, mais l’image stéréo très large est bien rendue, et si les cuivres les plus graves disparaissent un peu, l’ensemble est assez convaincant et la richesse harmonique est plutôt bien rendue. Encore une fois : bon casque dans les médiums.
Edgar Varèse – Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 min. Ce n’est pas mal, même si on a entendu plus fin : l’image stéréo est cette fois-ci plutôt bien respectée, les timbres des instruments sont plutôt fidèles (surtout dans les médiums, encore une fois), et si le grave est un peu brouillon, le casque a surtout la qualité de très bien rendre les énormes écarts dynamiques de cette interprétation.
Conclusion
Du point de vue mécanique, il n’y a pas grand-chose à redire : solidité, légèreté, simplicité et modularité. Que demander de plus ? Avec ça, un look très simple et agréable, car passe-partout sans pour autant manquer de style, grâce à des lignes assez pures, et un design généralement fonctionnel. Du point de vue sonore, en revanche, on trouvera à redire : le problème principal, à notre avis, provient de ce double creux dans le haut médium, lieu où se trouvent beaucoup d’informations qui contribuent à la lisibilité d’un mix, surtout lorsque celui-ci est « touffu ». Pour régler des cues en DJing, pour faire de la prise en studio ou sur plateau, il est certain que son combo « bosse dans l’aigu » et « médium plat » fera très bien l’affaire, car ils font primer une lisibilité générale du programme, tout en soulignant bien toutes les attaques. De plus, si les basses manquent de subtilité, elles restent tout à fait présentes, avec du punch. Pour du mix, le casque nous a paru beaucoup plus difficilement utilisable en tant que tel (une bonne égalisation améliorerait certainement le résultat). Pour de l’écoute de loisir, en revanche, et surtout de l’écoute en environnement bruyant, le casque nous a paru plutôt très bon, puisqu’il accorde légèreté, confort relatif, isolation suffisante et sonorité efficace. C’est d’ailleurs ce dernier terme qui nous paraît le mieux définir le HD-25 : il fait vraiment bien le boulot, même s’il le fait sans grande subtilité.