37 touches et 2 molettes dans 50 cm : c’est le pari tenté par IK Multimedia avec l’iRig Keys, un clavier de contrôle MIDI destiné aux utilisateurs d’iDevices… comme aux autres !
Autrefois uniquement développeur d’effets et d’instruments virtuels, IK Multimedia a sauté, il y a quelques années déjà, dans le train iOS pour proposer aux possesseurs d’iPhone et d’iPad certaines de ses applications phares (Sampletank, Amplitube) mais aussi une belle sélection de petits accessoires relativement bien foutus : du stand pour iPad à l’interface audio pour guitariste en passant par les micros et autres contrôleurs. C’est donc sans trop de surprise qu’on voit débarquer ce petit clavier de contrôle iRig Keys qui, s’il a bien été pensé pour être utilisé avec les iDevices, n’en demeure pas moins utilisable sur Mac ou PC.
Avec une longueur de 50,3 cm, une profondeur de 12 cm, une épaisseur de 4 cm et un poids de 660 g, l’objet qui nous occupe n’est certainement pas le plus petit clavier maitre du marché, ni le plus léger, surtout si on le compare au minuscule NanoKey de Korg (32 × 8,3 × 1,4 cm pour 286 g), ou à l’Akai LPK25 (34 × 9,6 × 2,8 cm pour 635 g) et à ses nombreuses copies (comme celle dont nous disposions pour le test : un Eagletone Tiny Key 25). Toutefois, dans la voie initiée par M-Audio et son Keystation Mini 32, il tente d’offrir un compromis taille/fonctionnalités/confort de jeu intéressant.
Faisant figure de géant dans le petit monde des mini claviers, l’iRig Keys alterne plastiques brillants (pour les touches du clavier et le bandeau de commandes) et mats (pour le reste du clavier) qui, s’ils font un peu cheap de prime abord, permettent à l’objet de garder un poids très raisonnable. Concentrées sur le bandeau, les sérigraphies noires sur fond blanc sont parfaitement lisibles tandis que le contour de chacun des 5 switchs est rétro-éclairé par LED rouges et qu’on dispose en sus de 6 LED de la même couleur pour voir le set actif (nous y reviendrons plus tard) et par quel connecteur l’appareil reçoit des données iOS ou USB.
Car oui, c’est la première particularité de l’iRig Keys, il ne se contente pas d’être un clavier MIDI USB compatible avec les iDevices par le truchement du Camera Connection Kit d’Apple, mais jouit bien d’une double connectique : USB pour l’utiliser avec votre PC ou votre Mac, et iOS pour l’utiliser avec iPhone, iPod Touch ou iPad.
Notez qu’un cordon de 50 cm est fourni pour chaque connecteur, même si les possesseurs des dernières générations d’iPad et d’iPhone devront, pour le coup, passer par un adaptateur Dock 32 pins > Lightning pour utiliser le clavier. Précisons enfin que, quel que soit le cordon que vous utilisiez, l’iRig Keys profite de la liaison pour s’alimenter en électricité.
Ça touche ou ça touche pas ?
La première originalité du contrôleur d’IK tient évidemment dans les trois octaves de son clavier, un format curieusement boudé par nombre de constructeurs alors qu’il permet de concilier une relative compacité tout en permettant d’entrevoir un début de jeu à deux mains. Je dis bien 'entrevoir’ car les pianistes se sentiront vite limités par ces 37 touches. Mais il n’en reste pas moins que cette tessiture permet de plaquer un accord à la main droite et sa basse à la main gauche, ou au contraire une rythmique à la main gauche tandis que la main droite peut s’occuper du lead. Sans qu’on puisse vraiment parler de confort avec une tessiture de deux octaves réellement exploitable, on peut toutefois faire nettement plus de choses qu’avec un modèle 25 touches et du coup, on passe beaucoup moins de temps à jouer avec les touches de transposition lors de la saisie d’une séquence.
Évidemment, pour satisfaire au critère d’ultra portabilité, IK a opté pour des mini touches qui permettent de rester dans des dimensions raisonnables. Qu’en dire? Que la chose demande assurément un temps d’adaptation et qu’elle agacera, du moins temporairement, les gros doigts : on a vite fait de saisir deux notes au lieu d’une au départ et puis, l’habitude venant, on finit par gagner en précision. Voyez d’ailleurs que la chose n’a pas l’air de gêner Jordan Rudess, le claviériste virtuose de Dream Theater, dans la vidéo ci-dessous :
Le toucher ? Là encore : on ne s’attendra pas à retrouver les sensations d’un clavier de piano, ni même celles d’un synthétiseur de 61 touches normales. Les touches sont molles, très légères mais elles offrent tout de même une course plus grande que celles du M-Audio Keystation Mini 32 et permettent de jouer avec la vélocité. Ne vous attendez tout de même pas à des miracles : côté nuances, on a vite fait de passer d’un Pianissimo à un Forte sans arriver à choper ce qu’il y a au milieu, comme sur tous les appareils à mini touches. Précisons aussi que le clavier, contrairement au récent XKey de CME, ne gère pas l’aftertouch.
En revanche, l’autre originalité de l’iRig Keys tient dans la présence de deux vraies molettes de modulation et de pitch bend sur la gauche du clavier. Oui, ça prend de la place et rallonge sensiblement la longueur de l’engin, mais c’est une singularité qu’aucun concurrent ne propose et auquel plus d’un claviériste sera sensible, d’autant que la sensation offerte par ces deux molettes est tout à fait satisfaisante et que leur taille permet une saisie autrement plus précise et agréable que les vulgaires touches ou les sticks proposés chez les concurrents.
Express Yourself
Si l’on s’en tenait là, cet iRig Keys serait déjà des plus intéressants avec son prix serré avoisinant les 77 €. Mais le fait est qu’IK Multimedia ne s’est pas arrêté en si bon chemin et a inclus pas mal de petites choses sympathiques à son clavier.
L’iRig Keys propose ainsi en face arrière un connecteur Jack pour brancher une pédale de sustain ou d’expression. Là encore, la chose est rare sur un clavier ultraportable et on l’appréciera d’autant plus qu’elle ouvre des perspectives pour contrôler autre chose que des synthés : on pourra ainsi piloter la wah d’un ampli de guitare virtuel par exemple…
Reste à présent à évoquer les différentes commandes logées dans le panneau supérieur, avec un encodeur qui, par défaut, gérera le volume mais pourra également servir à l’édition de données ou à piloter n’importe quel paramètre auquel vous l’assignerez, et 5 boutons : deux switchs pour incrémenter/décrémenter le contrôleur ‘program change’ (utile pour passer d’un preset à un autre dans un instrument ou un effet virtuel), deux switchs pour transposer le clavier de 3 octaves vers le haut ou vers le bas, et enfin un bouton SET qui permet de sauvegarder ou rappeler jusqu’à 4 configurations MIDI différentes, ce qui s’avère bien pratique et nous permet d’évoquer le mode EDIT du clavier.
Tout comme sur Keystation Mini 32 de M-Audio, on dispose de quelques fonctions d’édition qu’on n’attendrait pas forcément sur un clavier de cette taille. Il est ainsi possible de personnaliser l’assignation de l’encodeur, ou encore la courbe de réponse en vélocité des touches, d’accéder à un bouton Panic… En mode EDIT, les touches du clavier changent de fonction et permettent d’activer l’édition de tel ou tel paramètre, de saisir le numéro d’un canal MIDI ou celui d’un contrôleur. Si, nanti du petit manuel multilingue (dont français), la chose n’a rien d’extrêmement compliqué, elle n’en demeure pas moins relativement fastidieuse et on aurait adoré passer par un utilitaire dédié, que ce soit sur PC, Mac ou iDevice. D’autant qu’en l’absence d’afficheur, on est jamais sûr d’avoir saisi la bonne valeur… Certes, une fois votre configuration enregistrée dans un Set, vous serez tranquille mais avant d’en arriver là, il faudra suer à grosses gouttes sur vos mini touches.
Autre chose qu’on n’attendait pas : un bundle. Malgré son prix modeste et ses deux câbles, l’iRig Keys est fourni avec le droit de télécharger deux freewares sous iOS (sic !) mais aussi une version de SampleTank 2L embarquant 2 Go de samples. Même s’il s’agit là d’un vieux logiciel qui n’a hélas toujours pas été porté au format 64 bit, Sampletank n’en demeure pas moins une boîte à sons très digne d’intérêt et qui permet de faire encore de bien jolies choses, notamment grâce au moteur audio STRETCH.
On apprécie l’attention donc et même si l’on en voudrait toujours plus (une housse et plus de contrôleurs librement assignables notamment), on est obligé de reconnaître qu’IK Multimedia a réussi son pari haut la main avec son premier clavier maître.
Conclusion
Lors de la fabrication d’un équipement nomade, les enjeux sont toujours les mêmes : il s’agit de déterminer le meilleur compromis entre solidité et légèreté, taille et confort d’utilisation, prix et fonctionnalités, puissance et autonomie. C’est vrai pour une radio ou un réchaud, un ordinateur portable ou un baladeur, et ça l’est aussi pour un clavier maître.
Avec l’iRig Keys, IK Multimedia se démarque de la concurrence sur nombre de ses choix et offre du coup un produit singulier à un prix relativement agressif. Avec ses 3 octaves, ses deux molettes, son connecteur pour pédale et ses possibilités d’édition, ce petit clavier est assurément plus riche que nombre de ses rivaux. Mais il est aussi moins portable : contrairement au Keystation Mini 32 de M-Audio, il ne tiendra pas dans le premier Eastpak venu, cependant qu’IK ne propose même pas de housse pour le protéger. Du coup, en dépit de son faible poids et de son encombrement relativement réduit qui permettent malgré tout de l’emmener en voyage (mais plus dans une valise donc), on en vient à le considérer comme un petit clavier sédentaire pour ceux qui n’ont pas de gros besoins en la matière et manquent de place pour accueillir un 49 touches standard. Il fera en tout cas, dans ce contexte, le bonheur de plus d’un utilisateur d’iPad ou d’ordinateur portable…
Une chose reste sûre également : à l’heure où IK Multimedia vient d’acquérir une usine en Italie pour relocaliser sa production et après un Winter NAMM Show 2013 au cours duquel le fabricant transalpin a fait montre d’une volonté de diversification de sa gamme, on est curieux de voir si cet iRig Keys aura des petits frères…