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Les clés du succès ?
9/10
Award Valeur sûre 2020
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En 2016, Arturia nous avait gratifiés d'un premier clavier/contrôleur/séquenceur, le Keystep, dont nous avions déjà vanté les qualités, mais qui nous avait également laissé sur notre faim par certains aspects.

Test de l'Arturia Keystep Pro : Les clés du succès ?

Nous avions alors envi­sagé la possi­bi­lité que la marque propose à terme un modèle plus évolué, à l’ins­tar de ce qu’elle avait fait pour la série des Beats­tep. Mais alors que pour ces derniers, Artu­ria n’avait mis qu’un an à faire évoluer son concept, ce n’est que cette année que nous avons vu appa­raître fina­le­ment un succes­seur au Keys­tep d’ori­gine, et ce au prix conseillé de 399 €. 

Le Keys­tep Pro saura-t-il justi­fier ce délai et ce tarif ? Répon­dra-t-il aux attentes que le précé­dent modèle avait géné­rées en nous malgré ses multiples quali­tés ? C’est ce que je vous propose de décou­vrir ensemble. 

Premiers pas

principalLa boîte du Keys­tep Pro contient bien sûr l’ap­pa­reil lui-même ainsi qu’un câble USB, une alimen­ta­tion auto­nome, un carton d’en­re­gis­tre­ment et une petite notice de démar­rage rapide. Le mode d’em­ploi complet est télé­char­geable sur le site d’Ar­tu­ria en français, anglais, alle­mand ou japo­nais.

L’ap­pa­reil est un paral­lé­lé­pi­pède de 589 × 208 × 38 mm et de 2,7 kg. Le châs­sis est métal­lique mais recou­vert d’une robe de plas­tique. L’en­semble repose sur 4 patins caou­tchou­tés qui assurent une bonne adhé­rence à n’im­porte quelle surface. L’ap­pa­reil est fabriqué « comme un tank », il est solide jusque dans ses potards qui sont bien ancrés, et s’il pèsera un peu dans le sac-à-dos, on n’aura en revanche pas à craindre les aléas du trans­port. Sa face supé­rieure est divi­sée en deux parties distinctes, l’une pour le jeu et l’autre pour le séquençage. La partie consa­crée au jeu est consti­tuée prin­ci­pa­le­ment d’un clavier de 37 touches sensibles à la vélo­cité et à l’af­ter­touch par canal. Les touches sont toutes surmon­tées de petites LED RGB dont l’em­ploi variera en fonc­tion des diffé­rents modes d’uti­li­sa­tion du contrô­leur. À gauche du clavier se trouvent les bandeaux tactiles verti­caux dévo­lus au contrôle du pitch-bend et de la modu­la­tion ainsi que les boutons de chan­ge­ment d’oc­tave. Mais on trouve déjà dans cette section des commandes dédiées aux fonc­tion­na­li­tés de séquençage,  notam­ment un petit haut-parleur (oui oui !) pour le métro­nome mais surtout un bandeau tactile hori­zon­tal appelé « looper » et sur lequel nous revien­drons. La partie du Keys­tep Pro dédiée au séquençage à propre­ment parler recouvre toute la moitié supé­rieure de l’in­ter­face. Les pas de séquences sont maté­ria­li­sés par 16 pads RGB surmon­tés de leurs boutons de sélec­tion de page et de cinq enco­deurs cran­tés sans fin entou­rés de leur couronne de LED. À leur gauche se situe la section régis­sant les 4 pistes de séquençage propo­sées par le Keys­tep Pro, chacune surmon­tée d’un écran LCD atti­tré. On trouve ensuite la section de commandes dédiée à la gestion des séquences, scènes et projets, et enfin la section regrou­pant les commandes de trans­port et la touche « shift » qui permet­tra d’ac­cé­der à de nombreuses fonc­tions alter­na­tives. Ces deux dernières sections sont surmon­tées par les enco­deurs pilo­tant le tempo et le swing, le bouton de tap tempo/métro­nome, ainsi que par un écran OLED indiquant toutes les infor­ma­tions impor­tantes du contrô­leur et accom­pa­gné de son enco­deur dédié. À l’ex­cep­tion de ce dernier, tous les autres enco­deurs sont sensibles au toucher.

arrièreLa connec­tique du Keys­tep Pro située sur la tranche arrière de l’ap­pa­reil est parti­cu­liè­re­ment riche car elle regroupe : une prise USB, une entrée pour une pédale de sustain, une sortie pour le signal du métro­nome accom­pa­gnée de son propre poten­tio­mètre de volume rétrac­table, deux sorties et une entrée MIDI DIN, deux sorties et une entrée CV dédiées aux signaux de synchro­ni­sa­tion, huit sorties CV/gate dédiées aux éléments de batte­rie, et enfin 4 trios de sorties CV gate, vélo­cité ou modu­la­tion et pitch. Le tout est accom­pa­gné non seule­ment d’une fente Kensing­ton de sécu­rité, mais surtout d’un bouton marche-arrêt et d’une prise pour l’ali­men­ta­tion, ces deux derniers éléments assu­rant la possi­bi­lité d’uti­li­ser le Keys­tep Pro en dehors de toute connexion infor­ma­tique. Je vous encou­ra­ge­rais d’ailleurs à ce sujet à employer l’ali­men­ta­tion même lorsque vous êtes connecté en USB à votre ordi­na­teur : cela vous permet­tra d’an­nu­ler la boucle de masse qui ne manquera pas de se mani­fes­ter lors de l’uti­li­sa­tion des sorties CV.

Pour termi­ner cette première prise de contact avec le Keys­tep Pro, on notera que toute la nomen­cla­ture des connexions a été égale­ment séri­gra­phiée sur la face supé­rieure du contrô­leur, nous évitant ainsi d’avoir à constam­ment retour­ner l’ap­pa­reil à chaque bran­che­ment de câble. On ne manquera pas de remer­cier Artu­ria pour cette déli­cate et trop rare atten­tion !

Le clavier

Le clavier du Keys­tep Pro est un semi-lesté à mini-touches sensibles – comme nous l’avons vu – à la vélo­cité ainsi qu’à l’af­ter­touch par canal. Il s’agit du même clavier que sur le Keys­tep premier du nom à ceci près que l’on dispose main­te­nant de 37 touches et non plus 32. La diffé­rence peut sembler minime mais elle se fait sentir. J’avais déjà exprimé dans mon article concer­nant le Nova­tion Laun­ch­key 37 MK3 tout le bien que je pensais de cette confi­gu­ra­tion, et je réitère ici : 37 touches sont à mon sens le compro­mis idéal entre porta­bi­lité et plai­sir de jeu, même s’il faut recon­naître que les mini-touches sont forcé­ment un peu moins confor­tables que des touches de taille normale. Et c’est toujours avec joie que l’on constate la présence de bandeaux tactiles en lieu et place des tradi­tion­nelles molettes de pitch-bend et de modu­la­tion, des bandeaux qui conjuguent aussi bien l’ac­cès direct aux valeurs de para­mètres que la possi­bi­lité de contrô­ler ces derniers de manière conti­nue. Le jeu sur le clavier se trouve par ailleurs encore valo­risé par la présence d’un puis­sant arpé­gia­teur et d’un mode « chord » permet­tant comme son nom l’in­dique de créer des accords. Nous revien­drons plus en détail sur ces fonc­tion­na­li­tés après nous être penchés sur les grands prin­cipes de fonc­tion­ne­ment de l’ap­pa­reil.

4 pistes pour les domi­ner tous

pistesLe Keys­tep Pro arti­cule son fonc­tion­ne­ment essen­tiel­le­ment autour des pistes de séquençage.

Celles-ci sont au nombre de quatre, plus une piste dédiée à l’au­to­ma­tion des messages MIDI CC. La première piste permet de choi­sir entre une ligne de séquence normale ou bien dédiée aux éléments de batte­rie. Pour les trois autres pistes, on peut choi­sir d’ac­ti­ver le séquen­ceur ou bien l’ar­pé­gia­teur indi­vi­duel­le­ment grâce aux boutons dédiés. Les pistes du Keys­tep Pro peuvent pilo­ter chacune un ou plusieurs modules hard­ware ou logi­ciel indé­pen­dants, et ce via les connec­tiques USB, MIDI ou CV. Chacune d’elle dispose de sa propre section de para­mé­trage faci­le­ment iden­ti­fiable sur le panneau supé­rieur du clavier grâce à un code couleur. Chaque piste peut ainsi faci­le­ment être acti­vée, mise en solo ou mutée, et sa desti­na­tion USB, MIDI DIN ou CV peut égale­ment être rappe­lée et modi­fiée à la volée. Selon la piste acti­vée, le contenu de ses séquences sera repro­duit et modi­fiable sur la série de 16 pads rétro-éclai­rés, repre­nant à chaque fois la couleur de la piste sélec­tion­née. Toute­fois, si des séquences sont actives sur d’autres pistes que celle actuel­le­ment sélec­tion­née, leur acti­vité sera rappor­tée par un petit témoin lumi­neux sur chacune des pistes concer­nées. On garde ainsi tout le temps une vision d’en­semble sur l’ac­ti­vité géné­rale du séquen­ceur. Nous verrons plus loin qu’il est possible de program­mer plusieurs séquences – ou « patterns » dans le jargon du Keys­tep – par piste, et l’on peut navi­guer direc­te­ment entre elles grâce aux petites flèches gauche et droite situées sur chaque piste. Le numéro du pattern actif pour chacune d’elle s’af­fiche alors dans le petit écran LCD atti­tré. On notera avec plai­sir que le Keys­tep Pro permet d’as­so­cier deux pistes entre elles pour les pilo­ter simul­ta­né­ment via le clavier avec un point de split libre­ment défi­nis­sable. Chaque partie du clavier conser­vera alors les réglages propres à la piste corres­pon­dante. Ces réglages ne se limitent d’ailleurs pas unique­ment à la program­ma­tion des séquences mais englobent égale­ment d’autres para­mètres, dont l’un des plus impor­tants est la tona­lité.

La clé de l’har­mo­nie

La program­ma­tion des lignes de séquences, celle des arpèges ainsi que l’uti­li­sa­tion du mode chord seront forte­ment influen­cées par le choix de la tona­lité. Chaque piste peut d’ailleurs béné­fi­cier de la sienne propre, ce qui fait que l’on pourra par exemple avoir un arpège mineur joué à la main gauche pendant que la main droite ajoute des notes à une séquence majeure lue sur la deuxième piste. Oui, ce clavier permet bien des expé­riences ! Mais pour­sui­vons. Comme pour de nombreux autres éléments de l’ap­pa­reil, le para­mé­trage de la tona­lité s’ef­fec­tue direc­te­ment via des combi­nai­sons de la touche « shift » et des touches du clavier concer­nées. On accède ainsi aux gammes chro­ma­tique, majeure, mineure natu­relle, mineure harmo­nique et aux modes dorien et mixo­ly­dien, ainsi qu’à deux autres gammes ou modes libre­ment défi­nis­sables, tout autant que la tonique. Si le choix de la tona­lité se fait aisé­ment et fonc­tionne parfai­te­ment avec le système de séquençage et l’ar­pé­gia­teur, j’au­rais en revanche des réserves à formu­ler sur la manière dont ce système inter­agit avec le jeu pianis­tique à propre­ment parler, mais nous y revien­drons à la fin de cet article. Pour le reste, on ne pourra que souli­gner que l’er­go­no­mie du Keys­tep Pro révèle une réflexion qui semble avoir globa­le­ment traversé toute la concep­tion du contrô­leur comme nous allons le voir au cours de cet article.

Les potards de contrôle

Globa­le­ment, toutes les fonc­tion­na­li­tés du clavier sont faci­le­ment acces­sibles via des contrô­leurs dédiés, et notam­ment les 8 enco­deurs rota­tifs. On accède ainsi faci­le­ment aux commandes globales ou par piste de tempo ou de swing, ainsi que de hauteur, de durée, de déca­lage tempo­rel, de vélo­cité ou encore de déclen­che­ment aléa­toire des notes. 7 enco­deurs sur 8 sont sensibles au toucher : un simple effleu­re­ment déclenche l’af­fi­chage du para­mètre concerné sur l’écran OLED de l’ap­pa­reil. Les cinq enco­deurs de droite peuvent égale­ment envoyer des messages CC d’une simple acti­va­tion de la touche « control », ce qui emplira de joie les habi­tués de l’an­cien modèle auquel cette fonc­tion faisait cruel­le­ment défaut ! 

Mais le Keys­tep Pro améliore les perfor­mances déjà hono­rables de son prédé­ces­seur dans bien d’autres domaines, comme par exemple la créa­tion d’ac­cords.

En parfait accord…

Le Keys­tep Pro reprend ainsi le système du modèle précé­dent qui permet de créer des accords compo­sés d’au­tant de notes que l’on souhaite, accords que l’on déclen­chera ensuite par l’ac­ti­va­tion de leur note la plus basse.

encodeursCelle-ci ne sera d’ailleurs pas forcé­ment la fonda­men­tale, un accord de Do Majeur enre­gis­tré en posi­tion de 2e renver­se­ment se déclen­chera par exemple en appuyant sur le Sol. Mais le système proposé par le Keys­tep Pro se distingue toute­fois de deux manières de celui du modèle précé­dent. Là où l’an­cien Keys­tep permet­tait d’ajou­ter des notes à un accord pré-exis­tant, le Keys­tep Pro permet main­te­nant égale­ment d’en reti­rer. Mais surtout, on peut faire corres­pondre les accords à la tona­lité défi­nie précé­dem­ment. Dans ce cas de figure, tous les accords que je pour­rai program­mer repren­dront obli­ga­toi­re­ment les notes consti­tu­tives de cette tona­lité, et leur nature s’adap­tera auto­ma­tique­ment ! Admet­tons par exemple que nous soyons en tona­lité de Do majeur (toujours…). Tout d’abord, je ne pour­rai pas program­mer de Do mineur, même si j’en­fonce la touche de Mi bémol. Et une fois l’ac­cord programmé, si j’en­fonce la touche Do, c’est bien l’ac­cord de Do majeur qui sera joué, mais si j’en­fonce en revanche la touche Ré, ce sera Ré mineur qui sera auto­ma­tique­ment produit en respect de la tona­lité géné­rale de Do majeur. (Pas de panique si vous êtes perdus, nous avons tout un dossier pour vous initier ou vous rafraî­chir la mémoire au sujet de l’har­mo­nie en musique occi­den­tale !) C’est ici égale­ment que l’er­go­no­mie très étudiée du Keys­tep Pro fait merveille, car toutes ces mani­pu­la­tions s’exé­cutent de manière parti­cu­liè­re­ment intui­tive au regard de leur appa­rente complexité. Les petites LED au-dessus des touches ne sont d’ailleurs pas les dernières à prou­ver leur utilité, ce qu’elles font égale­ment lors de l’usage de l’ar­pé­gia­teur.

… décom­posé

Bien entendu, l’ar­pé­gia­teur du Keys­tep Pro propose toutes les fonc­tion­na­li­tés habi­tuelles de ce genre d’ou­til. On peut ainsi faire jouer les notes des touches enfon­cées vers le haut, le bas, en aller-retour avec ou sans la répé­ti­tion des notes extrêmes, dans l’ordre dans lequel elles ont été action­nées ou bien de manière aléa­toire. L’am­pli­tude de l’ar­pège peut s’étendre d’une octave au-dessous des touches enfon­cées jusqu’à trois octaves au-dessus. La touche « hold » libé­rera nos mains de l’obli­ga­tion de conser­ver les touches enfon­cées, permet­tant non seule­ment de nous consa­crer à d’autres tâches comme par exemple la mani­pu­la­tion de para­mètres, mais égale­ment de rema­nier les arpèges à notre guise en ajou­tant ou modi­fiant des notes et leurs règles de jeu, le tout sans jamais inter­rompre le flux sonore.

La marche au pas !

généralMais l’ou­til réel­le­ment emblé­ma­tique du Keys­tep Pro, c’est bien entendu son séquen­ceur. 

Comme précisé plus haut, les pas de séquences sont maté­ria­li­sés par une rangée de 16 pads que l’on peut virtuel­le­ment multi­plier par 4 grâce aux boutons de pages dédiés pour obte­nir ainsi des séquences de 64 pas maxi­mum. On peut enre­gis­trer pour chaque piste indi­vi­duel­le­ment jusqu’à 16 séquences et libre­ment program­mer leur enchaî­ne­ment dans l’ordre que l’on souhaite. Les patterns des 4 pistes actives à un instant T peuvent être sauve­gar­dés à leur tour dans 16 scènes. Enfin l’en­semble de tous les patterns, enchaî­ne­ments, scènes et para­mètres peut être sauve­gardé dans un « projet », 16 au total égale­ment ! Et tout cela peut ensuite être exporté vers l’or­di­na­teur grâce à l’ap­pli­ca­tion MIDI Control Center sur laquelle nous revien­drons. Toutes ces options de sauve­garde sont parti­cu­liè­re­ment bien­ve­nues car si l’on dispose bien d’une fonc­tion « undo », celle-ci n’est cepen­dant appli­cable que dans certains contextes bien précis.

Les séquences peuvent être enre­gis­trées de trois manières diffé­rentes: direc­te­ment en acti­vant les pas concer­nés, en mode « pas-à-pas » (avec possi­bi­lité de défi­nir la durée des notes et des silences) ou bien grâce à l’en­re­gis­tre­ment « live » de ce que nous jouons sur le clavier.

stripsLes pas, les séquences, les patterns, les scènes et les projets peuvent être copiés, collés et suppri­més. Chaque pattern peut béné­fi­cier de sa propre divi­sion tempo­relle de la noire à la triple-croche, en binaire ou en ternaire, de sa propre durée réglée au pas de séquence près et enfin de son propre réglage tonal comme vu précé­dem­ment. Les séquences sont jouables à l’en­droit, à l’en­vers ou dans le désordre, trans­po­sables par demi-tons ou par octaves, quan­ti­fiables à 50 ou 100%, déca­lables ryth­mique­ment et enchaî­nables en atten­dant ou non la fin de la séquence précé­dente. Chaque pas peut conte­nir jusqu’à 16 notes simul­ta­nées. Comme dans le mode « chord », les notes peuvent faci­le­ment être ajou­tées ou reti­rées indi­vi­duel­le­ment, notam­ment et toujours grâce au système très pratique de LED au-dessus des touches qui indiquent toujours quelles sont les notes actives. Non seule­ment chaque pas de séquence, mais chacune des notes indi­vi­duelles qu’il contient béné­fi­cie de ses propres carac­té­ris­tiques de vélo­cité, durée, point de départ que l’on peut modi­fier grâce aux enco­deurs dédiés. Cela permet ainsi par exemple de faci­le­ment « huma­ni­ser » le jeu de l’ac­cord contenu dans un pas en modi­fiant les para­mètres indi­vi­duels que nous venons de citer. Lorsque l’on entre en mode « control », les enco­deurs en ques­tion envoient alors des messages MIDI CC dont l’au­to­ma­tion pourra être enre­gis­trée sur la piste dédiée aux messages de ce type.

L’en­re­gis­tre­ment et la lecture des séquences sont pilo­tées par les commandes de trans­port du clavier, rien de parti­cu­liè­re­ment neuf là-dedans. Sauf qu’Ar­tu­ria a décidé d’y adjoindre une fonc­tion­na­lité parti­cu­liè­re­ment bien­ve­nue. Il s’agit du « looper », ce bandeau tactile hori­zon­tal auquel je faisais réfé­rence au début de cet article. Celui-ci permet de répé­ter la part de séquence qui vient d’être jouée aussi long­temps que l’on main­tient son doigt appuyé. La durée de ce segment pourra être d’un temps, d’un demi-temps, d’un quart de temps ou d’un huitième de temps selon l’en­droit que l’on touchera sur le looper.

Les clés du fonc­tion­ne­ment

MIDI Control Center.JPGL’ef­fort que les fabri­cants du Keys­tep Pro ont accordé à l’er­go­no­mie de l’ap­pa­reil se retrouve égale­ment dans les possi­bi­li­tés de para­mé­trage de ce dernier. En effet, l’en­semble des para­mètres peut être confi­guré direc­te­ment via le clavier dans le menu « Utility ». En ce qui concerne le MIDI, on peut asso­cier chaque piste à un canal d’en­trée et à un canal de sortie poten­tiel­le­ment diffé­rents. On peut égale­ment choi­sir le numéro de CC, le port et le canal de trans­mis­sion ainsi que la courbe de réponse de chacun des enco­deurs. Cette dernière pourra égale­ment être défi­nie pour les para­mètres du clavier touchant à la vélo­cité et à l’af­ter­touch. On pourra égale­ment para­mé­trer la nature des messages de trans­port, ou bien si l’on souhaite émettre ou rece­voir des messages d’hor­loge dont on pourra égale­ment défi­nir l’ori­gine et le type. Chacun des 4 trios de sorties CV et des dix sorties CV/Drums pourra béné­fi­cier de sa propre confi­gu­ra­tion de voltage. Enfin, on pourra para­mé­trer divers autres détails comme le compor­te­ment du métro­nome ou encore la manière dont le Keys­tep Pro se mettra en veille. Tous ces para­mètres sont égale­ment réglables via l’ap­pli­ca­tion MIDI Control Center qui propose en plus les fonc­tions de mise à jour du firm­ware et plus géné­ra­le­ment d’échanges de fichiers entre le clavier et l’or­di­na­teur, dont les fameux projets évoqués précé­dem­ment. On appré­ciera aussi tout parti­cu­liè­re­ment que cette appli­ca­tion fonc­tionne sans néces­si­ter de quit­ter notre STAN et donc d’in­ter­rompre notre work­flow. Il est agréable de consta­ter à ce sujet que ceci est une pratique qui est en train de se géné­ra­li­ser parmi les fabri­cants dans le petit monde des appli­ca­tions de para­mé­trage. Cette appli­ca­tion est par ailleurs la seule à être livrée avec le Keys­tep Pro.

Faux-pas ?

En effet, à part le MIDI Control center, le clavier/contrô­leur/séquen­ceur d’Ar­tu­ria arrive nu comme un vers en termes de bundle logi­ciel et ne béné­fi­cie même pas de la licence d’ Able­ton Live qui accom­pagne quasi­ment tous les maté­riels liés de près ou de loin à la musique assis­tée par ordi­na­teur. On aurait pu en attendre un peu davan­tage à ce niveau-là.

En ce qui concerne l’ap­pa­reil lui-même, il n’est pas non plus tota­le­ment exempt de défauts malgré ses nombreuses quali­tés. Ainsi, on pourra éven­tuel­le­ment regret­ter que le bouton « hold » ait perdu par rapport à l’an­cien modèle sa fonc­tion d’al­ter­na­tive de pédale de sustain. Mais cela peut à la rigueur se comprendre sur un clavier comme celui-ci, plus grand que le précé­dent et auquel on aura plus faci­le­ment tendance à adjoindre une véri­table pédale. On pour­rait égale­ment se sentir un peu frus­tré que la piste de séquençage réser­vée aux « drums » ne permette de séquen­cer que 24 sons, limi­tant ainsi l’usage de certaines banques… mais ce serait oublier que c’est déjà beau­coup et que la plupart des séquen­ceurs de ce type ne se limitent qu’aux 16 sons des formats « MPC » et déri­vés habi­tuels.

utilityOn pourra davan­tage s’in­ter­ro­ger sur certains petits manques de cohé­rence dans le work­flow, comme par exemple le fait que les empla­ce­ments de stockage déjà occu­pés par des projets sauve­gar­dés ne sont pas appa­rents, alors que c’est le cas pour les empla­ce­ments de stockage des patterns et des scènes. Tout comme on pourra légi­ti­me­ment se deman­der pour quelle raison les séquences indi­vi­duelles sont enchaî­nables entre elles sans attendre la fin de la séquence précé­dente, alors que ce n’est pas le cas des scènes. Ou encore pourquoi l’on ne peut sauve­gar­der qu’une seule chaîne de séquences par piste et par projet. Tout cela n’est toute­fois pas bien grave, et je suis davan­tage dérangé par la sous-utili­sa­tion de la fonc­tion­na­lité d’an­nu­la­tion, que l’on ne peut vrai­ment employer qu’à de trop rares occa­sions. Je ne peux que vous conseiller d’ailleurs de sauve­gar­der un maxi­mum vos patterns, scènes, projets, etc. 

Mais ce qui m’a réel­le­ment inter­rogé, c’est le système étrange de program­ma­tion des gammes. En géné­ral, ce genre de système se justi­fie pour les personnes ne maîtri­sant pas forcé­ment l’har­mo­nie et qui ne souhaitent pas trop se prendre la tête sur l’usage des touches noires du piano. Donc bien souvent sur d’autres appa­reils ou logi­ciels, ce genre de système applique la gamme choi­sie sur les touches blanches de la gamme de Do Majeur afin d’en faci­li­ter l’exé­cu­tion. Ici, point du tout, si vous souhai­tez jouer une gamme autre que Do majeur ou La mineur natu­relle, vous serez obligé de jouer les alté­ra­tions concer­nées sur les touches noires corres­pon­dantes. Donc le système part du prin­cipe que vous connais­sez les notes alté­rées corres­pon­dant à la gamme que vous souhai­tez jouer. Dans ce cas, quel est l’in­té­rêt d’un tel système si pour le faire fonc­tion­ner, on doit déjà maîtri­ser la trans­po­si­tion harmo­nique sur le piano ? Ceci serait déjà suffi­sam­ment étrange en soi si le système n’était pas en plus inco­hé­rent avec lui-même:  pour jouer la gamme de Ré majeur, il vous impo­sera d’en­fon­cer réel­le­ment les touches noires corres­pon­dantes aux Fa # et Do # de la gamme, en revanche pour la gamme de Fa majeur, vous pour­rez la jouer inté­gra­le­ment sur les touches blanches, le Sib de la gamme étant alors dévolu à la touche blanche du Si. On obtient donc avec tout cela un système de trans­po­si­tion auto­ma­tique qui s’avère trop complexe pour ceux qui ne maîtrisent pas la trans­po­si­tion harmo­nique manuelle sur le piano et inutile pour les autres. 

Alors, que penser fina­le­ment du Keys­tep Pro ?

Conclu­sion

Je ne vais pas y aller par quatre chemins, tour­ner autour du pot ou encore faire preuve d’une rete­nue mal placée : le Keys­tep Pro m’a emballé ! 

Avec ses nombreuses possi­bi­li­tés de jeu, de séquençage et de contrôle, sa connec­ti­vité plétho­rique lui permet­tant de pilo­ter aussi bien des logi­ciels que du maté­riel physique en USB, en MIDI et en CV, son ergo­no­mie géné­rale abso­lu­ment limpide et sa capa­cité à être auto­nome d’un ordi­na­teur au point de pouvoir même s’en passer pour le para­mé­trage, le Keys­tep Pro d’Ar­tu­ria est à mon sens aujour­d’hui unique en son genre. Et les quelques défauts rele­vés – dont le bundle logi­ciel quasi-inexis­tant et le système de trans­po­si­tion pour le moins étrange – ne viennent enta­cher son éclat que de manière très super­fi­cielle.

Prix conseillé : 399 €

  • principal
  • général
  • arrière
  • pistes
  • encodeurs
  • strips
  • utility
  • MIDI Control Center.JPG

 

9/10
Award Valeur sûre 2020
Points forts
  • Qualité de fabrication
  • Clavier de 37 touches sensible à la vélocité et à l'aftertouch par canal
  • Les nombreuses possibilités de séquençage et d'arpèges
  • L'autonomie de toutes les pistes qui autorise toutes les folies rythmiques et harmoniques
  • La profondeur de paramétrage des séquences et des pas
  • Le mode chord
  • La richesse de la connectique et donc des modules matériels et virtuels contrôlables
  • L'ergonomie globalement très étudiée
  • Potentiellement totalement autonome d'un ordinateur
Points faibles
  • Un bundle logiciel inexistant en dehors du soft de paramétrage
  • Un système de transposition très étrange
  • La fonction "undo" utilisable pour le moment dans un nombre de situations trop restreint
  • Quelques toutes petites incohérences de workflow

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