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Guide d’achat
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Guide d'achat des workstations - Quelle workstation acheter ?

Un peu moins en vogue aujourd’hui, les workstations ont la peau dure dans l’univers sans pitié des synthés. Il faut dire que leur côté couteau suisse permet de créer des morceaux complets ou dépanner le musicien dans bon nombre de situations…

Quelle workstation acheter ? : Guide d'achat des workstations

FairlightIl n’est pas rare de manquer d’un son de piano, cordes, cuivres, synthé ou d’un kit de percus­sions bien parti­cu­lier. On peut bien sûr lancer sa STAN préfé­rée sur son ordi favori, commen­cer à char­ger des VST, assi­gner les pistes, régler le mixage, envoyer les bons effets et trou­ver la bonne cohé­rence sonore à tout ça, perdu au milieu de centaines de milliers de sons ou de plug-in pas toujours mis à jour, compa­tibles ou légaux. Ceci peut arri­ver en studio, sous la pres­sion d’un direc­teur artis­tique de bonne humeur, en répé­ti­tion, parce que les autres membres du groupe ont choisi d’ajou­ter des titres dans lesquels il faut faire du soutien ryth­mique avec une section de cuivres, un passage au B3, une nappe qui gargouille et un bouzouki qui grince, ou encore sur scène, parce que le sax s’est mis un coup de bec dans les gencives deux jours avant le concert. Le besoin n’est donc pas toujours spéci­fique ou prévi­sible.

Autre cas de figure, une aver­sion profonde pour tout ce qui touche à l’in­for­ma­tique, ses para­mé­trages, ses auto­ri­sa­tions, ses mises à jour, sa latence, quelle que soit l’uti­li­sa­tion faite. En contexte de home studio, on est aussi parfois un peu contraint par l’es­pace, si bien que vouloir produire un titre de A à Z sans s’en­com­brer de multiples synthés, modules, effets et enre­gis­treurs relève de la gageure. Et quand bien même, si par bonheur, on a la place et les sous, on peut vouloir pilo­ter un parc bien fourni à partir d’une machine centrale, façon Seigneur des Anneaux dawless. Sur scène enfin, ça peut être la crainte du PC qui déjante en direct, il parait que ça arrive. Heureu­se­ment, il existe une solu­tion maté­rielle, dernier rempart face à ce monde agres­sif, ce mauvais sort qui s’acharne, l’im­pos­si­bi­lité de repous­ser les murs ou la lassi­tude de passer d’un synthé à l’autre : la works­ta­tion. Mais au juste…

Qu’est-ce qu’une works­ta­tion ?

Synclavier-IIPour faire vite, c’est un gros synthé qui regroupe une section synthèse multi­tim­brale, des effets et un séquen­ceur. La section synthèse doit possé­der une poly­pho­nie élevée, pour jouer un maxi­mum de notes simul­ta­nées. On exige aussi une multi­tim­bra­lité confor­table, c’est-à-dire la capa­cité à produire des sons diffé­rents en même temps (basse, guitare, pianos, claviers élec­triques, bois, cuivres, cordes, percus­sions, synthés, FX…). Ensuite pour les effets, le plus sera le mieux, d’une part pour trai­ter sépa­ré­ment chaque canal sonore, d’autre part pour mettre la touche finale de maste­ring. Enfin niveau séquen­ceur, il s’agit de pouvoir construire des morceaux complets, soit de manière linéaire (enre­gis­tre­ment de pistes du début à la fin), soit en boucle (enre­gis­tre­ment de motifs puis assem­blage en morceaux). Avec tous ces outils, la works­ta­tion permet de produire un morceau complet en studio ou jouer plusieurs parties simul­ta­nées lors d’une session live.

On confond parfois works­ta­tion et arran­geur. Bien que ces deux instru­ments aient des liens de parenté dans leurs éléments consti­tu­tifs, il y a toute­fois une diffé­rence d’ap­proche fonda­men­tale : avec une works­ta­tion, on crée un morceau de A à Z, son par son, effet par effet, section par section, le tout assem­blé « à la pogne » dans un séquen­ceur ; avec un arran­geur, on opte pour une orien­ta­tion perfor­mance, avec des possi­bi­li­tés de synthèse limi­tées, mais une puis­sante section accom­pa­gne­ment qui génère auto­ma­tique­ment une ryth­mique complète, harmo­ni­sant des accords plaqués en temps réel, sur lesquels on ajoute une mélo­die ou du chant. Un arran­geur est plus appro­prié dans un contexte piano-bar ou bal avec une forma­tion mini­ma­liste (musi­cien seul ou musi­cien + chan­teur). Il peut-être aussi très utile pour les compo­si­teurs, permet­tant de tester rapi­de­ment diffé­rentes ambiances ou harmo­ni­sa­tions. Quelques rares arran­geurs se révèlent aussi être de véri­tables works­ta­tions, c’est le cas du PA4X de Korg.

Petite histoire des works­ta­tions

M1bS’il est bon de rappe­ler que les systèmes Fair­light CMI et NED Syncla­vier pouvaient déjà reven­diquer ce titre à la fin des 70’s, on consi­dère le M1 de Korg comme la première works­ta­tion de l’his­toire, en 1988. Il offre 16 voix de poly­pho­nie, 8 canaux de multi­tim­bra­lité, un séquen­ceur Midi 8 pistes d’une capa­cité maxi­male de 12000 notes et 2 multief­fets simul­ta­nés. La synthèse se limite à la lecture d’échan­tillons, il y a peu de para­mètres de synthèse, le filtre est assez quel­conque et les possi­bi­li­tés de modu­la­tion limi­tées. Korg va vite deve­nir le grand spécia­liste de la works­ta­tion, perfec­tion­nant le concept à inter­valle régu­lier : 01/W, Trinity, Triton, M3 ; avec l’Oasys, on atteint le paroxysme, rassem­blant diffé­rents moteurs de synthèse dans un clavier inté­grant carte PC, carte son, disque dur et logi­ciel spéci­fique tour­nant sous Linux. Béné­fi­ciant de progrès tech­no­lo­giques, le Kronos est à ce jour la plus puis­sante works­ta­tion jamais sortie, pas même égalé par le récent Nauti­lus.

Retour au siècle dernier. Dans le sillage du M1, la concur­rence s’or­ga­nise plus ou moins vite : côté USA, Enso­niq prend le flam­beau, coif­fant E-mu alors concen­tré sur les échan­tillon­neurs. Citons les VFX-SD, SD-1, TS, MR. E-mu finira par inté­grer une Rom à son Emula­tor-4, qui reven­diquera le titre de works­ta­tion sous le vocable E-Synth. En 1992, Kurz­weil sort un OVNI, cumu­lant synthèse modu­laire virtuelle, échan­tillon­nage, arpé­gia­teur, séquen­ceur, effets : le K2000, digne héri­tier du K250. Il ne cessera d’être décliné, puis la marque aban­don­nera un temps les works­ta­tions avant de doter certains pianos de scène de fonc­tion­na­li­tés complètes (PC4, Forte). Récem­ment, le K2700 marque le grand retour de Kurz­weil sur ce marché. Alesis sortira le Fusion, une works­ta­tion pleine de bons ingré­dients, qui n’aura hélas pas le succès qu’elle mérite. Côté euro­péen, ce fut morne plaine, on peut toute­fois signa­ler les S2/S3 et l’Equi­nox sortis en 1995 et 1999 par GEM (Italie), société dispa­rue depuis dans le cosmos.

EX5Côté japo­nais, la concur­rence est aussi féroce : chez Yamaha, la série SY est suivie par la série EX, formi­dables works­ta­tions qui préfi­gurent ce qu’on trouve aujour­d’hui sur le marché. Non contente de mélan­ger synthèse, effets, séquences, la série EX offre diffé­rents moteurs sonores : lecture de samples, FM, modé­li­sa­tion analo­gique, modé­li­sa­tion physique, effets poly­pho­niques. Hélas, le construc­teur aban­donne petit à petit cette concep­tion au fur et à mesure de l’évo­lu­tion de la gamme Motif. Aujour­d’hui, les séries Montage et MODX intègrent unique­ment la lecture de samples et la synthèse FM. Chez Roland, le D-20 sort la même année que le M1, c’est une base de D-50 trans­formé en works­ta­tion (synthèse LA avec ajout de drums, multi­tim­bra­lité, séquen­ceur et un pratique lecteur de disquettes). Mais la marque s’im­pose surtout avec la série Fantom, décli­née en de nombreuses varia­tions, solides mais pas spécia­le­ment origi­nales, jusqu’aux Fantom et Fantom-0 basés sur l’ar­chi­tec­ture Zen-Core, offrant diffé­rentes modé­li­sa­tions et permet­tant d’en char­ger en option. Nous y revien­drons évidem­ment dans notre sélec­tion.

Critères de choix

Choi­sir une works­ta­tion aujour­d’hui est devenu quasi corné­lien, parce que chaque construc­teur a sa propre couleur sonore, ses domaines de prédi­lec­tion, ses tech­no­lo­gies, sa gamme, sa concep­tion spéci­fique du produit et son posi­tion­ne­ment prix. Voilà à notre sens les points prio­ri­taires à scru­ter avant achat.

Palette sonore

K2000Cela peut paraitre une évidence, mais une works­ta­tion qui coche toutes les cases lais­sera toujours un senti­ment mitigé si la palette sonore ne corres­pond pas à nos attentes. On pardon­nera plus faci­le­ment l’ab­sence d’une fonc­tion pour­tant essen­tielle que des sons insa­tis­fai­sants à nos oreilles ; car qu’à l’usage, on arri­vera toujours à contour­ner une fonc­tion manquante, mais quoi qu’on fasse, on aura toujours ce son qui nous rebute. On revien­dra dessus encore et encore, à grand coup de correc­tions, trai­te­ments internes puis effets externes : beau­coup d’éner­gie pour rien, ce type d’ins­tru­ment est censé être auto-contenu, donc plaire tel quel.

Il n’y a pas de miracle, un synthé aussi complet soit-il n’est pas génial dans tous les types de sono­ri­tés. Déjà parce que le construc­teur veut se démarquer, ensuite parce qu’il se base souvent sur des échan­tillons signa­ture de la marque qu’il décline à travers les années. Donc tout va dépendre de l’uti­li­sa­tion, des styles musi­caux visés, actuels et futurs, si on veut renta­bi­li­ser son achat sans perdre de la valeur en reven­dant tous les trois ans. C’est là qu’il faut se deman­der si la palette sonore peut être éten­due, soit par char­ge­ment d’échan­tillons, soit par ajout de moteurs de synthèse (nous y revien­drons). Dernier point à regar­der pour ceux qui font du live, la machine permet-elle des tran­si­tions douces entre les sons, en parti­cu­lier les combi­nai­sons multi­tim­brales ? Cela varie selon les modèles.

Qualité de fabri­ca­tion

Ensoniq2Le niveau de gamme joue évidem­ment sur la qualité de construc­tion, à commen­cer par les maté­riaux, qui déter­minent la soli­dité et le poids : coque en acier lourd, alu plus léger, bois massif ou imita­tion, plas­tique plus ou moins résis­tant. Ensuite, les inscrip­tions : pein­ture (laque, émail, époxy, Nextel granu­leux – très fragile dans le temps), séri­gra­phie (fine ou épaisse, gravée ou en relief), Lexan (auto­col­lant trans­pa­rent hyper résis­tant dont les inscrip­tions sont proté­gées, car réali­sées côté colle). Puis la soli­dité des commandes : poten­tio­mètres, enco­deurs, curseurs, inter­rup­teurs, sélec­teurs, pads. Sont-ils bien ancrés, précis, répondent-ils à l’ac­cé­lé­ra­tion (enco­deurs), à la dyna­mique (vélo­cité et pres­sion pour les pads), les capu­chons sont-ils agréables à manier, en quelle matière sont-ils faits (certains maté­riaux Soft Touch ont tendance à se dégra­der dans le temps) ? Puis l’écran : dimen­sions, réso­lu­tion, lumi­no­sité, contraste, réponse (aucune, tactile résis­tif simple, tactile capa­ci­tif multi­touch). Après, le clavier : nombre de touches, taille (stan­dard, slim, mini, piano…), lest (léger, semi-lesté, lourd), action (enfon­ce­ment, pres­sion, relâ­che­ment, rebond, bruit éven­tuel), réponse dyna­mique (vélo­cité initiale, pres­sion mono, pres­sion poly­pho­nique, vélo­cité de relâ­che­ment). Clai­re­ment, le niveau de gamme est segmen­tant, on a souvent des claviers moyens en entrée/milieu de gamme (sans capteur de pres­sion, sans ressorts métal­liques, à ensembles de touches moulés) et des Rolls en haut de gamme (avec capteur de pres­sion, avec touches indé­pen­dantes, ressorts métal­liques, lestage impec­cable). Enfin, l’an­crage de la connec­tique : vissée, sertie ou bran­lante de partout ?

Ergo­no­mie

On passe ensuite à un point crucial pour une works­ta­tion : l’er­go­no­mie. Si elle est capil­lo­trac­tée, c’est un tue-l’amour, des galères en pers­pec­tive et une revente doulou­reuse à terme. Ques­tions-clés : combien y a-t-il de commandes directes (curseurs, poten­tio­mètres, inter­rup­teurs), comment sont-elles placées (logique­ment, bien espa­cée ou trop serrées), quels para­mètres peut-on modi­fier en temps réel (synthèse, sélec­tion/acti­va­tion/coupure d’un canal ou d’une piste de séquen­ceur, commandes de trans­port du séquen­ceur Play/Stop/Conti­nue/Record/Avance/Retour, accès direct aux effets), de quels contrô­leurs dispose-t-on (molettes, pads, rubans, capteur optique), comment se passe l’édi­tion via les menus (défilé inter­mi­nable de pages, onglets bien rangés, spéléo­lo­gie, lisi­bi­lité, taille des carac­tères, faci­lité d’ac­cès aux para­mètres-clés), comment les programmes sont-ils triés (par numéro, par nom, par caté­go­rie, par favori), peut-on créer des listes faciles à rappe­ler en live ?

En résumé, les ques­tions d’er­go­no­mie, c’est « vais-je pouvoir faci­le­ment créer un son, le retrou­ver dans une banque, le combi­ner à d’autres, l’en­voyer dans diffé­rents effets, pilo­ter plusieurs instru­ments externes, créer des motifs, les assem­bler en séquences et rappe­ler tout ça rapi­de­ment » ? Et la ques­tion qui fait flip­per tout le monde sur scène : « combien de temps met la works­ta­tion à booter en cas de panne de courant » ? Souvent, vu tout ce qu’il y a à char­ger, la réponse est « un certain temps ». Et donc, y a-t-il des bogues connus et des risques de freeze avérés ?

Connec­tique

EquinoxComme les works­ta­tions sont capables de produire plusieurs sons simul­ta­né­ment, pilo­ter des modules externes, répondre à nos solli­ci­ta­tions au pied et à l’œil et s’in­ter­fa­cer avec le monde infor­ma­tique, il convient de jeter un sérieux coup d’œil à la connec­tique. Combien de sorties analo­giques (paires stéréo, indi­vi­duelles, avec effets, sans effets) ? Combien d’en­trées audio, quel type (minijack, jack 6.35, XLR avec préam­pli micro), comment le signal entrant est-il routé en interne (vers le filtre, vers les effets) ? Idem pour l’au­dio numé­rique, avec la ques­tion corol­laire : a-t-on une véri­table inter­face audio inté­grée ? Là encore, le niveau de gamme (donc de prix) est très discri­mi­nant au plan de la connec­tique audio.

On passe ensuite aux entrées pour pédales : combien de pédales (inter­rup­teurs, conti­nues), sont-elles assi­gnables, à quoi, pour chaque partie ou globa­le­ment ? Juste après, y a-t-il des prises CV/Gate pour pilo­ter des instru­ments analo­giques externes, combien, confi­gu­rables pour quel type de signal, pilo­tées par quoi en interne ? Vient l’heure du Midi : combien de prises, quel format ? Concer­nant l’in­ter­face USB, que trans­met-elle : Midi, CC, Sysex, banques, audio multi­piste, stockage de données, OS ? La works­ta­tion peut-elle pilo­ter direc­te­ment des synthés hôtes par USB ? Certaines machines proposent des alter­na­tives à l’USB pour le stockage, telles que des cartes SD. Enfin, on peut regar­der le type d’ali­men­ta­tion (interne ou externe). Là encore, le niveau de gamme est discri­mi­nant.

Fonc­tions clavier de commande

Les works­ta­tions sont aussi des claviers de commande. Cela peut être inté­res­sant de se poser la ques­tion de ce qu’on veut pilo­ter, tant en interne qu’en externe. Cela dimen­sion­nera au passage la taille idéale du clavier, les modèles en rack ayant disparu. Certaines marques déclinent leurs works­ta­tions en diffé­rentes natures de clavier au sein d’une même gamme. On regar­dera tout parti­cu­liè­re­ment le nombre maxi­mal de parties pilo­tables, l’af­fec­ta­tion des canaux Midi sortants (numéro, géné­ra­teur interne, externe, les deux ?), le zonage du clavier, les fenêtres de vélo­cité et les filtres Midi (chan­ge­ments de programmes, contrô­leurs physiques – touches, molettes, pédales, rubans, commandes en façade, pads, messages Midi clas­sique, CC, RPN, NRPN). Certaines works­ta­tions sont limi­tées sur ces diffé­rents points, soit en nombre de canaux trans­mis, soit dans leur assi­gna­tion (numéro de canal = numéro de partie), ce qui est péna­li­sant pour certains usages.

Moteurs de synthèse

Trinity M3Aujour­d’hui, une works­ta­tion doit être capable de produire 128 voix de poly­pho­nie sur 16 canaux multi­tim­braux, avec allo­ca­tion dyna­mique des voix (chaque canal puise les voix dispo­nibles au fur et à mesure qu’elles se libèrent). C’est le mini­mum syndi­cal. En matière de synthèse, les works­ta­tions utilisent toutes la lecture d’échan­tillons comme outil de base. Il faut dire que c’est le moyen le plus simple d’of­frir la palette sonore la plus large. Certaines machines permettent aussi l’échan­tillon­nage direct ou l’im­port d’échan­tillons (créés par l’uti­li­sa­teur, la marque ou des déve­lop­peurs sonores de tierce partie).

D’autres intègrent des formes de synthèse alter­na­tives à la lecture samples. On trouve la modé­li­sa­tion de pianos acous­tiques, la modé­li­sa­tion de claviers élec­triques, la modé­li­sa­tion analo­gique, la synthèse FM, la modé­li­sa­tion physique, la modé­li­sa­tion d’orgues à roues phoniques, les arti­cu­la­tions d’ins­tru­ments acous­tiques, la synthèse modu­lai­re… Il faut donc bien étudier ce que proposent les marques et les tierces parties (styles musi­caux, nombre et taille des banques d’échan­tillons, moteurs addi­tion­nels, qualité globale, tarif, type de licence – achat, mode SaaS, nombre d’ins­tal­la­tions simul­ta­nées, porta­bi­lité vers un autre instru­ment). Ce n’est d’ailleurs pas toujours clair d’une marque à l’autre.

Multief­fets

Une works­ta­tion étant un instru­ment en prin­cipe auto­nome, elle doit pouvoir trai­ter simul­ta­né­ment plusieurs canaux sonores par des effets de nature diffé­rente. On s’at­ta­chera donc à analy­ser combien d’ef­fets sont dispo­nibles en même temps, s’ils sont parta­gés ou exclu­sifs par canal, comment se fait le routage pour chaque partie (inser­tion, bus, Side­chain), quels éven­tuels sacri­fices sont faits quand on passe du mode programme simple au mode combi­nai­son multiple ou séquen­ceur (autre­ment dit, que devient le son d’un programme simple traité par les effets quand on le met dans un contexte multi­tim­bral ?).

D’une manière plus clas­sique, on regar­dera la liste des algo­rithmes four­nis, les éven­tuels effets à modé­li­sa­tion, le nombre de para­mètres éditables, les possi­bi­li­tés de modu­la­tion en temps réel, les présé­lec­tions d’ef­fets four­nies pour ne pas partir de zéro et la qualité sonore (en parti­cu­lier les réverbes, qui sont parfois le talon d’Achille des synthés d’en­trée de gamme). Les works­ta­tions disposent aujour­d’hui d’ef­fets globaux, pour l’am­biance géné­rale d’un morceau (chorus, réverbe), le maste­ring (compres­seur et limi­teur multi­bande) et les correc­tions pour tenir compte du lieu d’écoute (EQ multi­bande). On scru­tera aussi les éven­tuelles possi­bi­li­tés de trai­ter des sons externes ou un micro par des boucles d’ef­fets. Ah tiens, y a-t-il un voco­deur ?

Arpé­gia­teur

FantomX6Ce n’est pas le point clé pour une works­ta­tion, mais c’est toujours agréable d’avoir un petit arpé­gia­teur pour géné­rer des motifs en temps réel ou créer des parties de séquences quand une program­ma­tion à la main serait fasti­dieuse. On se posera d’ailleurs la ques­tion de savoir si la works­ta­tion permet d’uti­li­ser l’ar­pé­gia­teur et le séquen­ceur simul­ta­né­ment ou encore d’en­re­gis­trer des motifs arpé­gés dans le séquen­ceur. Autre ques­tion, est-ce que les notes arpé­gées sont envoyées en Midi, toujours utile pour pilo­ter un appa­reil externe ?

Les points-clés pour un arpé­gia­teur sont les suivants : modes de synchro­ni­sa­tion (internes, externes), types de motifs (simples, complexes, mono­die ou poly­pho­nie), nombre maxi­mal de notes mémo­ri­sées pour géné­rer l’ar­pège, possi­bi­lité de créer ses propres arpèges, trans­po­si­tion d’oc­taves, réponse à la vélo­cité, facteurs aléa­toires (notes, Ratchets), nombre d’ar­pèges qui peuvent tour­ner simul­ta­né­ment, ça va peut aller de 1 à 16 !

Séquen­ceur

S’il y a bien un module déter­mi­nant pour les works­ta­tions, c’est le séquen­ceur. Il doit évidem­ment être multi­tim­bral et capable de pilo­ter des géné­ra­teurs internes et des modules externes (Midi, USB, parfois en CV/Gate). Toutes les marques et produits ne sont pas à égalité dans ce domaine, on a d’ailleurs constaté des rétro­pé­da­lages fâcheux chez certains fabri­cants, réfu­tant même l’ap­pel­la­tion works­ta­tion pour leurs propres produits. On regar­dera d’abord le nombre de pistes, la capa­cité de notes, la nature de la mémoire des séquences (perma­nente ou effa­cée à l’ex­tinc­tion des feux) et les possi­bi­li­tés d’im­port/export de séquences (en interne, par exemple depuis le mode motif, ou en externe, sous forme de SMF de type 0 ou 1).

S2Un séquen­ceur doit permettre d’as­sem­bler faci­le­ment des motifs (créés de manière cyclique, comme une ryth­mique) et d’en­re­gis­trer en mode linéaire (sur une durée indé­ter­mi­née, ou a minima très longue). Certains sont d’ailleurs limi­tés en nombre de mesures. Sur une works­ta­tion, le séquen­ceur doit idéa­le­ment pouvoir se program­mer en temps réel, en pas à pas et en mode grille. Il doit ensuite offrir des possi­bi­li­tés d’édi­tion globales (copier/coller/insé­rer/suppri­mer), par fenêtre de note, par section de plusieurs mesures et par évène­ment isolé. On appré­ciera aussi les possi­bi­li­tés d’en­re­gis­trer des auto­ma­tions (CC Midi) et de les éditer après coup. C’est encore mieux lorsque cela se fait de manière graphique, sous forme de piano roll ou de liste dérou­lante. C’est le luxe lorsque l’écran permet de glis­ser-dépla­cer des évène­ments, mais c’est encore trop rare­ment le cas.

Dernier point, les pistes audio. Certains séquen­ceurs intègrent des pistes audio en paral­lèle des pistes Midi. Cela permet d’en­re­gis­trer des instru­ments externes ou des voix, ou encore de boun­cer des pistes Midi pour récu­pé­rer de la place. C’est le cas chez Korg dès l’en­trée de gamme, avec 16 pistes audio direct-to-disk. La concur­rence permet la plupart du temps de géné­rer un mix audio stéréo pour l’ex­por­ter ensuite.

Notre sélec­tion

Aujour­d’hui, il ne reste que quatre marques produi­sant des works­ta­tions : Korg, Roland, Yamaha et Kurz­weil. Il y a donc peu de produits et peu de renou­vel­le­ment. Tout va être ques­tion de gamme, de marque, de palette sonore, d’er­go­no­mie, de qualité de construc­tion, de possi­bi­li­tés d’ex­ten­sion et d’in­ter­façage avec l’ex­té­rieur (autres synthés en Midi, STAN logi­cielles en audio).

Moins de 1000 €

Kross 2La série Kross 2 de Korg est la seule sous la barre des 1000 €. Elle propose deux modèle (61 touches légères et 88 touches lourdes). Poly­pho­nique 120 voix et multi­tim­bral 16 parties, le Kross 2 offre une Rom réduite basée sur la lecture de samples, 7 multief­fets, 2 arpé­gia­teurs et un séquen­ceur Midi 120.000 notes (sans édition graphique) ; il peut égale­ment échan­tillon­ner et expor­ter des fichiers WAV. Sa construc­tion est light, son petit écran ne faci­lite pas l’édi­tion et il manque de commandes directes. Pour ceux qui veulent se lancer sans se ruiner. Il y a égale­ment le Krome EX 61 (61 touches semi-lestées), on parle juste après de la série…

Entre 1000 et 2000 €

Le segment des works­ta­tions de moyenne gamme dans les 1000–2000 € est le plus disputé. Les modèles proposent tous au moins 120 voix de poly­pho­nie sur 16 canaux multi­tim­braux. On peut encore trou­ver les modèles Krome EX (73 touches semi-lestées et 88 touches lourdes) datant de 2012. Bien mieux construit que le Kross 2 (qui a repris ses modes combi­nai­son et séquen­ceur), il s’ap­puie sur un moteur PCM de 3,8 Go, un grand écran graphique tactile qui améliore consi­dé­ra­ble­ment l’édi­tion et 8 multief­fets. Une sorte de Kronos light concen­tré sur les PCM avec un séquen­ceur plus ergo­no­mique, mais sans échan­tillon­nage utili­sa­teur ni exten­sions.

MODXDans la même gamme de prix, on trouve la série MODX de Yamaha (61 et 76 touches semi-lestées, 88 touches lourdes). Ce sont de véri­tables petits Montage. Construits plus légè­re­ment et possé­dant moins de commandes directes, ils béné­fi­cient toute­fois des mêmes moteurs de synthèse (Rom PCM iden­tique de 128 voix, FM 8 opéra­teurs réduite à 64 voix), des mêmes effets (réduits à 15 multief­fets max), du même géné­ra­teur de motifs ryth­miques multi­tim­bral sur 16 canaux et de l’USB audio (réduite à 4 entrées / 10 sorties). C’est au niveau du séquen­ceur linéaire que le bât blesse, le MODX étant juste capable d’im­por­ter des séquences 16 pistes ou d’en enre­gis­trer en temps réel sans pouvoir les éditer. Sur ce point, son statut de works­ta­tion est souvent discuté. C’est une machine complexe, parfois compliquée. Pour nous, une excel­lente works­ta­tion de milieu de gamme avec une palette sonore très équi­li­brée, sans doute la meilleure en termes de « sons acous­tiques ».

Fantom-06Chez Roland, le milieu de gamme est en passe d’être remplacé. La série Fantom-0 (61 et 76 touches semi-lestées, 88 touches lourdes) va succé­der à la série FA. Il va falloir être très atten­tif, car les noms de modèles se ressemblent, entre anciennes et nouvelles gammes, mais pas les spéci­fi­ca­tions ! Avec un prix plus attrac­tif, le Fantom-0 a une qualité de construc­tion infé­rieure au Fantom, à base de plas­tique moulé et d’un clavier sans capteur de pres­sion. Il a aussi un peu moins de commandes directes et une connec­tique moins avan­cée. Au plan synthèse, il cumule la lecture de samples, le Super­Na­tu­ral Acous­tic, le Super­Na­tu­ral Piano & EP (préins­tal­lés, contrai­re­ment au Fantom haut de gamme) et la modé­li­sa­tion d’orgues à roues phoniques. On pourra instal­ler d’autres moteurs option­nels, en parti­cu­lier la modé­li­sa­tion de synthés vintage maison. Si la poly­pho­nie n’est pas commu­niquée, la multi­tim­bra­lité est de 16 parties. On béné­fi­cie d’une grosse section de 20 multief­fets, d’un séquen­ceur 16 pistes avec une édition complète (mais limité à des motifs de 64 mesures), de possi­bi­li­tés de clavier de commande avan­cées, de l’échan­tillon­nage utili­sa­teur et d’un port USB audio 2 entrées / 16 sorties stéréo. C’est donc un modèle réduit plus abor­dable que l’oné­reuse série Fantom.

PC4bOn termine ce moyen de gamme avec la série PC4 de Kurz­weil (modèles 76 touches semi-lestées et 88 touches lourdes avec pres­sion). On passe à 256 voix de poly­pho­nie, sur une base de 2 Go de PCM auxquels s’ajoutent 2 Go en Flash Ram pour impor­ter des samples addi­tion­nels (le PC4 ne sample pas lui-même), une synthèse modu­laire virtuelle (VAST) permet­tant d’em­pi­ler/casca­der 32 couches d’al­go­rithmes variés (oscil­la­teurs, filtres, modu­la­teurs audio, synchro­ni­sa­tions, autres modu­la­teurs), la modé­li­sa­tion d’orgues à roues phoniques et la FM 6 opéra­teurs (compa­tible DX7). Le PC4 possède une section de 32 multief­fets remarquables aux plans qualité, possi­bi­li­tés de modu­la­tion et options de routage. Il est capable de se trans­for­mer en clavier de commande 16 zones, avec commandes directes assi­gnables. Il possède un arpé­gia­teur multi­tim­bral 16 parties et un séquen­ceur 16 pistes (à pas avec CC Midi, clas­sique avec édition graphique). La palette sonore est excel­lente, même si certains samples datent un peu. Dommage que son écran ne soit pas plus grand ni tactile.

Plus de 2000 €

NautilusPour le haut de gamme, on passe globa­le­ment à plus de 200 voix de poly­pho­nie (cela dépend des moteurs de synthèse) sur 16 canaux multi­tim­braux. On peut d’ailleurs regret­ter qu’au­cun construc­teur n’ai poussé à 32 canaux, pour les compo­si­teurs les plus exigeants ou ceux qui aiment empi­ler les sons comme des mille-feuilles. La works­ta­tion qui embarque le plus de moteurs de synthèse est le Nauti­lus de Korg (61 et 73 touches semi-lestées, 88 touches lourdes). Le petit modèle commence d’ailleurs à un tarif juste en-dessous de 2000 €. C’est la seule works­ta­tion à date capable de lire les multi­samples par strea­ming. On retrouve les 9 moteurs de synthèse du Kronos pouvant être utili­sés simul­ta­né­ment en mode multi­tim­bral (pianos acous­tiques, PCM, modé­li­sa­tion de claviers élec­tro­niques et d’orgues, modé­li­sa­tion physique de cordes, modé­li­sa­tion de synthés analo­giques, modu­la­tion de phase / FM 8 opéra­teurs), les séquen­ceurs d’ondes, le puis­sant proces­seur à 16 multief­fets, le double arpé­gia­teur poly­pho­nique et le séquen­ceur 16 pistes Midi + 16 pistes audio direct-to-disk. Le Nauti­lus peut échan­tillon­ner et impor­ter des banques de toute nature. Hélas, le construc­teur a limité le nombre de commandes directes et n’a pas employé de clavier répon­dant à la pres­sion. C’est donc une série à cheval entre les deux gammes, qui ne prend pas la suite du Kronos.

MontagesChez Yamaha, le Montage est la version de luxe du MODX, au plan qualité de construc­tion, puis­sance de synthèse, commandes directes et effets. D’une qualité audio irré­pro­chable, il repré­sente le must en matière de palette sonore acous­tique (section PCM 128 voix stéréo) et synthèse FM (8 opéra­teurs, 128 voix). De nombreuses commandes et macro permettent un contrôle avancé du géné­ra­teur sonore interne et de synthés externes. Il est doté d’une section à 19 multief­fets (inser­tions, globaux, maste­ring) et de l’USB audio (4 entrées / 16 sorties, avec possi­bi­lité de passer à 192 kHz sur 4 canaux stéréo). C’est une machine complexe, à l’er­go­no­mie parfois dérou­tante, équi­pée d’un séquen­ceur à motifs très puis­sant, mais limi­tée par un séquen­ceur linéaire 16 pistes pas au niveau des autres works­ta­tions. Il existe en versions 61 et 76 touches semi-lestées, ainsi que 88 touches lourdes.


FantomsLe Fantom de Roland (61 et 76 touches semi-lestées, 88 touches lourdes) est le plus onéreux de la gamme. Il s’en sort très bien au plan de la palette d’échan­tillons PCM. Il béné­fi­cie de plus des moteurs V-Piano, Super­Na­tu­ral Acous­tic, VA géné­ra­liste, orgues à roues phoniques, ainsi que de possi­bi­li­tés d’ex­ten­sion (Super­Na­tu­ral Piano et EP, synthés célèbres de la marque modé­li­sés, nouveau moteur n/zyme permet­tant entre autres l’uti­li­sa­tion de tables d’ondes). L’ad­di­tion devient toute­fois lourde si on ajoute toutes les options dispo­nibles ! Au plan ergo­no­mie, c’est ce qui se fait de mieux sur le marché, un instru­ment exem­plaire dans chaque menu, que ce soit pour l’édi­tion des sons, le réglage des 21 multief­fets simul­ta­nés, la confi­gu­ra­tion du clavier de commande 16 zones internes + externes ou l’édi­tion du séquen­ceur 16 pistes Midi. Dommage que ce dernier ne permette pas la program­ma­tion de pistes linéaires (motifs chai­nables limi­tés à 64 mesures), ce qui peut être limi­tant pour certains types d’uti­li­sa­tion. Doté d’une connec­tique complète et d’une inter­face audio USB (3 entrées / 16 sorties stéréo), il est capable d’échan­tillon­ner, de créer des multi­samples à injec­ter dans le moteur PCM global ou de les jouer avec les pads. Il dispose d’un filtre analo­gique stéréo multi­mode assi­gnable en sortie.

K2700Le K2700 de Kurz­weil est une works­ta­tion très complète. C’est un instru­ment au son raffiné qui se mixe très faci­le­ment, mais Kurz­weil n’a pas renou­velé l’en­semble de sa palette sonore de multi­samples (certains datant du K250 de 1985 !), mis à part les deux prin­ci­paux pianos acous­tiques, versions compac­ti­fiées de celles du Forte. Heureu­se­ment, le K2700 jouit d’une synthèse modu­laire sans équi­valent sur 32 couches empi­lables ou casca­dables, d’une magni­fique section à 32 multief­fets et d’une puis­sance d’édi­tion sans égal (cf. PC4). Doté de 256 voix de poly­pho­nie sur 16 canaux multi­tim­braux, il peut faire tour­ner simul­ta­né­ment 16 arpèges, 16 séquences de CC Midi et 16 pistes de séquences linéaires, avec une édition milli­mé­trique. Hélas, le petit écran non tactile vient enta­cher son ergo­no­mie. Il dispose de 4,5 Go de samples, auxquels s’ajoutent 3,5 Go de Flash Ram pour les samples utili­sa­teur (il ne sample pas lui-même, ce qui est un retour en arrière par rapport au reste de la série K2XXX qui pouvait rece­voir une carte d’échan­tillon­nage option­nelle). Il dispose de contrô­leurs plus nombreux que le PC4, dont 16 pads dyna­miques et un grand ruban. Il offre aussi une inter­face audio USB stéréo. Il n’en existe à ce jour qu’une version 88 touches lourdes sensibles à la vélo­cité et à la pres­sion.

Conclu­sion

Après une domi­na­tion du marché sans partage pendant une ving­taine d’an­nées, les works­ta­tions ont aujour­d’hui perdu de leur superbe, au profit de solu­tions logi­cielles imbat­tables en puis­sance pure. Pour­tant, elles peuvent dépan­ner dans de nombreuses situa­tions, que ce soit au studio, en répé­ti­tion ou sur scène. Résul­tat, le nombre de marques présentes sur ce marché s’est consi­dé­ra­ble­ment réduit, tout comme la gamme qu’elles proposent, le plus souvent limi­tée à un modèle de milieu de gamme (1000–2000 €) et un modèle haut de gamme (plus de 2000 €). Cepen­dant, elles intègrent de plus en plus de possi­bi­li­tés de synthèse et d’ef­fets, mélangent diffé­rents moteurs à modé­li­sa­tion dispo­nibles simul­ta­né­ment, avec une fiabi­lité maxi­male et sans latence. Mais pour combien de temps encore ?


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