Connu pour ses interfaces et surfaces de contrôle pour DJ, Hercules nous avait surpris avec les XPS 2.0 DJ Monitor et leur excellent rapport qualité/prix. C’est dire si l’on est curieux d’écouter les DJ Monitor 5, vendues le double et qui, en termes de prestations, comme de tarifs ou de boomers jaunes, chassent ouvertement sur le terrain des Rokit RP5 de KRK…
Hello Speaker Yellow
Si les XPS DJ Monitors se posaient comme une forme de chaînon manquant entre le multimédia et l’enceinte de monitoring, dans le sillage de ce que proposait Edirol avec la série MA, il ne fait aucun doute qu’avec les DJ Monitor 5, Hercules quitte complètement le multimédia pour rentrer dans le monde du home studio. Finis par exemple l’amplification et les contrôles (interrupteur, potard de volume, graves, aigus) déportés sur l’enceinte droite : avec les DJ Monitor 5, les deux enceintes sont rigoureusement identiques à l’avant comme à l’arrière.
Et puisque décrire l’une, c’est du coup décrire l’autre, je vous propose un petit tour du propriétaire. Outre le Woofer de 5" et le tweeter de 1" ainsi que les deux évents, la face avant propose un interrupteur évoquant furieusement celui qu’on trouve sur les enceintes Adam, et un contrôle de volume cerclé d’un halo bleu. Notons que ce dernier est non cranté, pas même en position médiane : ça manque.
En face arrière, outre le connecteur du câble d’alimentation, on dispose de trois embases au format RCA asymétrique pour la première, au format Jack 6,35 mm symétrique pour la seconde, et au format XLR pour la dernière. En vis-à-vis de celles-ci, on dispose de switches permettant de modifier la réponse en fréquences de l’enceinte : un coupe-bas réglable à 56, 80 et 100 Hz, ainsi qu’un Shelf pour le haut et un autre pour le bas, avec la possibilité pour chacun de booster ou d’atténuer de 2 dB. Rien d’extraordinaire donc, mais des corrections bienvenues pour adapter la réponse en fréquences des enceintes à votre pièce.
Évoquons à présent la partie invisible en précisant que ces enceintes sont dotées d’une biamplification de classe A/B : 30 Watts pour le tweeter, 50 Watts pour le woofer, avec un crossover situé à 2,5 kHz et une pente de 12dB/octave, la réponse en fréquence étant supposée s’étendre de 50 Hz à 30 kHz. 30 kHz ? Voilà qui ne manquera pas d’intéresser ceux qui veulent parler à l’oreille des chauves-souris ou encore faire du dressage canin. Rappelons en effet que sur le papier, l’oreille humaine est capable dans le meilleur des cas d’entendre des sons jusqu’à 20 kHz, mais que cette valeur ne cesse de décroître au cours de l’existence, à plus forte raison quand on subit des traumatismes sonores, qu’on évolue dans des milieux bruyants ou qu’on est un utilisateur régulier de baladeur.
Les Hercules DJ Monitor 5 en violet, les KRK Rockit RP5 en jaune
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Finissons en indiquant que chaque enceinte pèse 7 kg pour des dimensions raisonnables de 31 cm de haut sur 22,2 cm de large, avec une profondeur de 23,5 cm, soit une bonne taille pour des 2 voies / 5" (plus larges en tous cas que des Adam A7X ou des KRK Rokit RP5). Côté look, la DJ Monitor 5 reprend le design initié avec les XPS : soit un mélange de bois sur les flancs et de plastiques mats et brillants en façade, dont la couleur noire serait assurément austère si le joli jaune du boomer ne venait KRKaïser tout ce petit monde. Mentionnons-le enfin : 4 patins adhésifs sont fournis pour assurer que l’enceinte ne glisse pas sur son support.
Vous savez tout. Passons à l’écoute.
De bas en haut
Boomer jaune contre boomer jaune, les Hercules seront comparées pour cette écoute aux toutes nouvelles Rokit 5 G3 qui s’avèrent donc plus compactes, mais plus jolies aussi, de mon point de vue. Mais le flacon important moins que l’ivresse, il convient de lancer quelques fichiers Lossless pour arbitrer ce petit match.
Le Enter Sandman de Metallica est intéressant pour les écoutes dans la mesure où, au-delà du mur de guitare de Bob Rock qui renseigne sur le médium, son intro à base de toms puis son charley ouvert permettent d’en apprendre un peu plus sur le bas médium et le haut du spectre. Et la différence entre nos deux concurrentes est flagrante dès le début du titre, les Hercules inhibant clairement le bas des toms alors qu’il est bien plus présent sur les KRK. L’arrivée du charley ouvert sur le riff renverse toutefois la vapeur sur le registre aigu, les KRK manquant de manière assez flagrante de détail à ce niveau. « L’aigu comme le haut médium » serait-on tenté de dire car, que ce soit sur les cymbales, les attaques des guitares ou plus important, la voix, les Hercules sont clairement plus intéressantes que les KRK qui perdent quantité de détails et manquent singulièrement d’air. C’est bien simple, lorsqu’on passe d’une paire à l’autre, on sent James Hetfield s’approcher ou au contraire reculer dans le mix.
La chose se confirme avec le Feel Good Inc de Gorillaz et sa prod Pop/Hip-Hop à gros son. La basse est un peu plus charnue sur les KRK, mais au prix d’un rendu extrêmement terne sur toute la moitié haute du spectre. Du coup, pour ce qui est de restituer les attaques de guitares et les 1001 petits bruits qui parcourent le titre dans les aigus, les Hercules s’avèrent beaucoup plus pertinentes que les KRK. Autrement plus brillantes, elles sont aussi bien plus à l’aise que les Rokit pour ce qui est des réverbs et donc, du positionnement des instruments dans l’espace.
Consoler of the Lonely des Raconteurs livre peu ou prou les mêmes informations, mais de façon parfois plus violente : bien présent sur les Hercules, le tambourin piégeux qu’on entend sur les ponts de ce titre surcompressé n’est pas loin de totalement disparaître sur les KRK. On frôle ainsi le carton rouge pour ces dernières qui se rattrapent néanmoins en offrant un peu plus de graves sur certains titres comme le Angel de Massive Attack ou sur les timbales du Also Sprach Zarathustra de Strauss. Et c’est là qu’on aura le plus de regret concernant les DJ Monitor 5 : on aurait aimé un peu plus d’énergie dans le bas.
Reste que même sur ce dernier titre, les Hercules s’en sortent bien mieux grâce à leurs aigus nettement moins ternes qui rendent justice aux inflexions des cuivres, au détail des cordes et une sensation d’air complètement absente des KRK qui jettent un voile sur tout ce qu’on leur soumet.
Finissons sur le Walk on the Wild Side de Lou Reed qui permet de juger du bas médium sur la contrebasse, du détail de l’aigu avec les réverbs et les balais, mais permet surtout de voir ce que tout cela donne sur le son qui nous est le plus familier : la voix. Sur ce point, les KRK sont beaucoup plus flatteuses en bas avec la voix du chanteur et c’est très agréable, mais par manque d’aigus, on a le sentiment que la voix est plaquée sur le Rokit alors qu’elle se détache du reste du mix sur les Hercules. Et si la contrebasse manque de corps sur les DJ Monitor 5, force est de constater que ces dernières offrent bien plus de détail concernant les attaques de guitares, les réverbs des chœurs ou la bâte du kick. L’attaque de cette dernière est floue sur les KRK alors qu’elle est nette sur les Hercules.
Une différence aussi flagrante demandera à être vérifiée sur une autre enceinte : même si la comparaison est déloyale du point de vue du tarif et de la taille des boomers, nous avons donc placé les Hercules face aux Adam A7X, que nous avions trouvées relativement brillantes. Bien évidemment, le manque de bas sur les DJ Monitor 5 est plus flagrant encore, vu qu’on passe sur des HP de taille supérieure pour la restitution du bas. Mais force est de constater que sur le registre aigu, on est dans quelque chose de beaucoup plus proche qu’avec les KRK sur la plupart des titres. Côté médium en revanche, les Adams semblent plus creusées, ce qui, une fois encore, est à mettre parmi les bons points des DJ Monitor 5.
Précisons pour finir que les réglages disponibles sur l’enceinte ne permettent pas de s’affranchir de sa personnalité de base : même en boostant les basses de 2 dB, on est loin de compenser les manques ressentis.
Conclusion
Hercules avait réussi son coup avec les petites DJ Monitors XPS dans le domaine du multimédia plus plus et il transforme l’essai avec ces DJ Monitor 5 qui sont réellement les premiers moniteurs ‘sérieux’ de la marque, étant entendu qu’on reste ici dans de l’entrée de gamme. Très portées sur le registre aigu, elles manquent toutefois de souffle dans la partie basse du spectre. Sans espérer voir des subs énormes sortir de ce genre de petits gabarits, on regrettera en effet que le bas médium soit ainsi en retrait, ce qui demeure assez étrange pour des enceintes ciblant, a priori, un public très friand de graves. Reste que dans l’ensemble, la DJ Monitor 5 s’en sort mieux que certaines de ses concurrentes pourtant réputées et qu’on espère bien voir la marque française compléter sa gamme avec un modèle 8 pouces et pourquoi pas, un caisson de basse. À écouter et à suivre donc.