Quand l'icône du Thrash Metal Dave Mustaine a annoncé rejoindre les rangs de Gibson, et developper une ligne complète d'instruments signature, j'avais hâte de poser les doigts dessus. C'est chose faite aujourd'hui avec pour commencer, la Gibson Dave Mustaine Flying V EXP. La guitare tient-elle ses promesses ? La marque de Nashville peut-elle produire des guitares Metal ?
Après avoir travaillé avec Jackson, ESP et Dean, le guitariste-chanteur-fondateur de Megadeth a été approché par Gibson il y a quelque temps pour développer une ligne complète de guitares signature. Si elles sortent un peu au compte-goutte, j’ai quand même eu la chance de poser les phalanges sur la Flying V EXP dans sa finition Antique Natural.
Tornado of Dave
Présentée dans son étui gris clair orné du logo Gibson et de la silhouette de Dave Mustaine, la guitare est assez jolie et élégante. La teinte de cette finition Antique Natural rappelle un peu celle du Korina, un bois que Gibson utilisait pour construire les premières Flying V et Explorer sorties en 1958. Cet étui est d’assez bonne facture et possède un intérieur noir qui met bien l’instrument en valeur.
Commençons par le début. Le nom de la guitare, Flying V EXP vient de la nature composite de la guitare : un corps de Flying V avec une tête d’Explorer. Le corps de l’instrument est en acajou assez bien sélectionné puisqu’il dévoile de jolis motifs qui courent le long des ailes. Le manche collé au profil SlimTaper est également en acajou et possède une volute à l’arrière de la tête, comme les Gibson des années 70–80. Elle est d’ailleurs bien réalisée et assez discrète. La touche est en ébène et possède un rayon compensé. La marque ne nous informe pas sur les chiffres exacts, j’ai toutefois eu l’impression qu’il s’agissait d’un rayon de 10 pouces en haut du manche qui s’aplatit pour arriver à 16 pouces sur les cases les plus hautes. Cette belle touche est sertie de 24 frettes médiums Jumbo et de repères appelés « Teeth » en nacre qui rappellent fortement ceux qui rythmaient la touche du modèle signature de Dave Mustaine chez Dean Guitars. Le diapason est de 25.5 pouces (oui, vous avez bien lu !). Dave Mustaine s’est approprié la Flying V et n’en a conservé que la forme. La tête a changé et la guitare ne dispose plus des bandes de caoutchouc latérales. Elle a un aspect très simple mais également assez élégant.
L’accastillage est noir et regroupe un cordier Stop Bar et un chevalet de type Nashville Tune-o-Matic estampillés Advanced Plating Inc. Les mécaniques sont des Grover Mini Rotomatic et le sillet est signé Graph Tech. Le cache truss-rod porte la signature de Dave Mustaine et les boutons de potentiomètres sont les célèbres Black Witch Hats. Enfin, l’embase jack est dissimulée dans la corne supérieure et il s’agit d’un modèle identique à ceux qu’on trouve sur les Stratocaster.
L’électronique est ici à l’image de la guitare : simple. On trouve deux micros humbucker Seymour Duncan. La position chevalet est occupée par un Thrash Factor, le modèle signature Dave Mustaine et la position manche est occupée par un ’59. Leur résistance de sortie respective sont assez éloignées puisque le Thrash Factor est mesuré à 16kohms environ et le micro manche à 7.5kohms. Ces micros sont contrôlés par un volume chacun, une tonalité générale et un sélecteur à trois positions. Ces contrôles sont positionnés de manière assez originale sur la table de la guitare et forment une sorte de courbe. La plaque arrière qui recouvre la cavité électronique épouse cette forme assez curieuse. Le potentiomètre le plus proche de la main droite (quand on est droitier) est celui qui ajuste le volume du micro chevalet, Thrash Metal oblige. Le suivant règle le volume du micro manche ; viennent ensuite dans l’ordre, le sélecteur et le réglage de tonalité. Dave Mustaine n’est pas omniprésent sur la guitare bien qu’on retrouve son autographe sur le cache truss-rod et sur la micro chevalet. Sa silhouette légendaire est imprimée discrètement au dos de la tête, juste au-dessus de la volute.
Holy Wars !
Après avoir découvert la guitare, je la sors de son étui et plaque les premiers accords. J’accroche tout de suite une sangle afin d’effectuer le test debout, les Flying V n’étant pas nécessairement conçues pour être jouées assis. Première bonne surprise, cette signature Dave Mustaine est très bien équilibrée et ne penche pas du tout, ni d’un côté ni de l’autre. Elle est assez légère et très maniable : une vraie guitare de scène.
À vide, elle projette correctement et déploie un volume assez conséquent. Le manche et le corps vibrent pas mal, on sent que la lutherie est soignée. J’inspecte la guitare sous toutes les coutures et ne trouve pas de défauts apparents. Le vernis est bien appliqué et ne déborde jamais sur le binding du manche. Le bord de la touche présente quelques marques d’usinage, mais c’est traditionnel chez Gibson. Les incrustations de nacre sont bien posées et les frettes sont bien arrondies et ne dépassent pas.
Directement arrivée de l’usine Gibson de Nashville sans même être passée sur l’établi du luthier, cette Flying V EXP est très bien réglée. La courbure du manche et l’action sont impeccables, la guitare est juste et très agréable à jouer, même avec ses cordes d’origine. Elle est montée en .010-.046.
Je branche la bestiole et c’est parti pour le Thrash ! Je commence comme à mon habitude par les sons clairs. En micro manche, le son est assez chaud et velouté. Sa faible résistance de sortie lui permet de rester clair sans faire saturer l’ampli. Ce micro rend d’ailleurs l’instrument plus polyvalent que ce qu’on pourrait imaginer, c’est une bonne chose. La position intermédiaire n’est pas plus intéressante que ça, les deux micros ne se marient pas très bien. Le côté perçant et puissant du micro chevalet l’emporte et cette position n’est pas très convaincante. En passant en micro chevalet, on quitte tout de suite le registre du son clair. Il est très agressif et fait saturer l’ampli instantanément. Je ne m’attarde donc pas sur le son clair et passe sur le canal saturé du petit Marshall SL-5 avec le gain autour de 1.5 pour des sons crunch.
Le micro manche réagit toujours aussi bien. Il est hyper précis mais en même temps très doux, c’est agréable. Il offre beaucoup de dynamique de jeu et retranscrit le toucher avec précision et musicalité. La position intermédiaire m’apparaît toujours aussi peu convaincante bien qu’un peu plus utilisable qu’en son clair. Le Thrash Factor installé en position chevalet porte décidément bien son nom. Il a un caractère très mordant et incisif qui m’a rappelé le micro signature d’Angus Young, en plus puissant. Néanmoins, il est très à l’aise en son crunch et apporte un côté Rock’n’Roll à la guitare qui n’est pas faite QUE pour le Thrash Metal.
En parlant de Thrash Metal, j’enclenche ma fidèle Carl Martin Panama pour atteindre des sonorités plus moustachues. Dans ce contexte, le micro chevalet est un régal absolu. Il encaisse la saturation avec beaucoup de précision et apporte une belle compression qui fait ressortir le jeu de paume avec agressivité, c’est très chouette et approprié. Il fournit une égalisation très adéquate pour ce style de musique : des basses resserrées, des médiums légèrement creusés et des aigus bien présents : In your face !
Ce micro est en fait basé sur le micro que Dave Mustaine a utilisé pendant l’enregistrement de l’album Rust In Peace que beaucoup d’aficionados (dont je fais partie) considèrent comme un manifeste du Thrash Metal. Et en jouant quelques riffs issus de cet album, on s’y croirait vraiment. Le micro manche encaisse également très bien les grosses saturations en apportant un côté plus vintage au son, c’est sympa. Les attaques sont bien retranscrites et on obtient cette sonorité presque liquide très intéressante. Attention cependant, les grosses saturations seront synonymes d’étouffoir à placer derrière le sillet si vous ne souhaitez pas entendre des résonances comme c’est le cas sur les extraits audio qui accompagnent ce test.
À Tout le Monde ? Pas vraiment …
Si la Dave Mustaine Flying V EXP est une belle réussite, son tarif pique un peu. Il vous faudra en effet débourser 2 790 € pour l’intégrer à votre arsenal, ce qui n’est pas donné au regard de la simplicité de l’instrument. Sa cote n’a pas l’air de s’envoler pour le moment bien qu’il s’agisse d’une série limitée pour l’instant. Très simple dans sa conception, la signature Dave Mustaine reflète bien la personnalité de l’artiste : directe et sans compromis ni chichis. C’est intéressant de voir Gibson sur le terrain de la guitare Metal avec des caractéristiques comme les 24 frettes, le diapason de 25.5 pouces ou encore le rayon de touche compensé. La guitare m’a beaucoup enthousiasmé par son côté polyvalent, joueur et très Rock’n’Roll. Elle possède un côté « plug and play » qui la rend attachante. Très confortable à jouer, elle est difficile à lâcher une fois que l’on a commencé à la jouer. Le tarif pourra en refroidir plus d’un et on attend avec impatience de découvrir la version Epiphone de ce beau joujou !