Joe Bonamassa est un des bluesmen les plus talentueux de sa génération et c’est également un collectionneur invétéré. Il a, dès son plus jeune âge, été entouré par les guitares et c’est assez naturellement qu’il se lance très tôt dans la collection d’instruments vintage. Le guitariste effectue souvent des Guitar Safari avec son technicien guitare, Mike Hickey, afin de dénicher les instruments les plus beaux, les mieux conservés et les plus rares. Lors d’un de ses voyages dans l’Ohio, au magasin Hauer Music à Centerville, Joe Bonamassa est reparti avec une rarissime Les Paul Custom noire de 1958 à trois micros, guitare communément appelée Black Beauty. C’est cet instrument qu’Epiphone a décidé de reproduire et que j’ai entre les mains aujourd’hui.
From 1958, with love
Cette Epiphone Joe Bonamassa Black Beauty Les Paul Custom est donc directement inspirée de l’instrument original de 1958 qui a rejoint la collection du bluesman. Le corps de l’instrument est entièrement en acajou, y compris la table. Le manche, également en acajou, est sculpté selon le profil 50’s, profil que nous avons découvert sur la Gibson Les Paul Standard 50’s l’an dernier. La touche est en ébène, sertie de 22 frettes et de repères « Blocks » en pearloid. Le diapason mesure 24,724 pouces et le sillet est signé Graph Tech, il est en Nubone. L’accastillage est doré et intègre le célèbre couple Tune-o-Matic/Stopbar estampillé LockTone qu’on a l’habitude de trouver sur les multiples Epiphone qui nous sont passées entre les paluches. Les mécaniques en revanche sont assez inhabituelles, il s’agit du modèle Historic d’Epiphone. Les boutons sont très originaux, ils sont en plastique blanc et rouge et apportent un côté vraiment ancien à la guitare. Le filet qui fait le tour du corps est un multi-plis, traditionnel sur un modèle Custom, et il est de couleur Antique Ivory, une sorte de blanc (très) cassé qui donne l’impression que la guitare a passé de nombreuses années à traîner sur la scène d’un club enfumé. On retrouve un filet simple qui fait le tour du manche et qui redevient multi-plis pour faire le tour de la tête. Cette dernière est d’ailleurs la nouvelle tête Kalamazoo de la marque. Le diamant scindé en deux, signature des Les Paul Custom, est également de couleur légèrement passée ce qui ajoute au côté vintage de la guitare.
L’électronique est un peu décevante en un sens. On retrouve sans grande surprise des micros Epiphone, les fameux ProBuckers 2 et 3. Les positions manche et centrale accueillent le ProBucker 2 et la position chevalet est équipée d’un ProBucker 3. On aurait aimé des micros Gibson USA sur ce modèle un peu prestige. Ces micros sont contrôlés par deux potards de volume et deux de tonalité. Les deux du haut contrôlent le micro manche alors que les deux du bas agissent sur le micro chevalet et le micro central. Les potentiomètres sont des CTS et ils sont munis de boutons Black Top Hats avec pointeurs métalliques. Les condensateurs sont des Orange Drop, la sortie jack est signée Switchcraft. Enfin, cette Les Paul Custom Black Beauty est fournie dans un étui rigide floqué des inscriptions « JB/Bonamassa/Nerdville, CA » et « FRAGILE ». L’étui est noir avec intérieur jaune clair, ça fait plaisir.
The Meaning of the Blues
En jouant la guitare pour la première fois à vide, on est surpris par l’ampleur du son qu’elle dégage. Le bois semble bien résonner et on sent les vibrations se propager dans presque toutes les parties du corps. La lutherie est soignée et les finitions sont impeccables. Un bon point pour ce qui est de la première approche.
On branche la Les Paul dans le très chouette Marshall SL-5 et c’est parti pour les sons clairs. On reconnaît bien le timbre de la Les Paul, assez particulier et plutôt doux en micro manche et central. Cette position de micro est d’ailleurs assez inhabituelle mais pas dénuée d’intérêt. Le son est moins rond que celui du micro manche mais pas aussi tranchant que celui du micro chevalet ; c’est un entre-deux plutôt sympa et qui sonne bien en funk. On a la précision du micro chevalet mais en conservant une bonne présence dans les bas-médiums. Le micro chevalet, sans surprise, fait déjà saturer légèrement le canal clair de l’ampli et fait donc une transition idéale vers les sons crunch. On passe sur le canal saturé de l’ampli en modérant le niveau de gain dans un premier temps.
La guitare sonne comme une Les Paul avec un peu moins d’aigus. L’absence de table en érable joue en ce sens et donne à la guitare un son un peu plus épais. Les sons crunch sont bien définis et très rock’n’roll. L’instrument a un comportement très droit et ne donne pas droit à l’erreur. Mais le galbe du manche étant confortable, on apprivoise rapidement la bête et les pains se font de plus en plus rares. D’autant que la touche en ébène offre une sensation de jeu très agréable et permet un jeu fluide et précis. Le micro central reste assez intéressant en son crunch, les micros manche et chevalet sont sans grande surprise. Le son est bon mais on aurait aimé des micros avec davantage de personnalité. C’est dommage. Ils développent néanmoins le son auquel on est habitué et on n’est pas du tout dépaysé, c’est bien une Les Paul. On augmente le taux de saturation de l’ampli pour entrer sur le territoire des sons Lead. À ma grande surprise pour un instrument aux caractéristiques vintage, la guitare encaisse bien le gros son. Son comportement reste droit et le niveau de sortie modéré des micros pousse à attaquer inconsciemment les cordes plus fort et changer un peu sa manière de jeu, c’est sympa. Le sustain est énorme et on peut presque faire partir chaque note jouée en larsen. La Les Paul a toujours été un des instruments favoris des bluesmen pour ce sustain très caractéristique qui permet une grande expressivité quand on joue. Joe Bonamassa ne s’y trompe pas et possède probablement la collection de Les Paul d’époque la plus complète qui soit, d’autant qu’il continue d’y ajouter des instruments dès qu’il en a l’occasion.
Different Shades of Les Paul
La Les Paul Custom Black Beauty Joe Bonamassa est une guitare agréable à jouer et fidèle au concept de base de la Les Paul Custom. L’identité de la guitare originale est bien présente même s’il s’agit d’un instrument neuf. Le travail effectué sur les différents filets, sur le logo Epiphone et le diamant splitté est vraiment intéressant et confère à la guitare un aspect patiné plutôt joli. C’est dommage que le vernis du corps et du manche n’ait pas bénéficié du même traitement. Elle sonne bien, résonne bien et donne beaucoup. Son gros sustain ravira les bluesmen et autres adeptes du jeu très expressif. Proposée au tarif de 799 € et livrée en étui rigide, la Les Paul Joe Bonamassa a un bon rapport qualité prix.