Après les PedalBoard, GigBoard et LooperBoard, Headrush avance un nouveau (petit) pion dans le monde bien rempli des multi-effets : le MX5. Bonne surprise ?
On connaît bien les produits de la marque Headrush, appartenant au groupe InMusic qui possède notamment Akai, Alesis, Denon et M-Audio. Si la marque nous a habitués à de gros pédaliers comme les PedalBoard et LooperBoard, elle a montré par le passé qu’elle s’orientait peu à peu vers une miniaturisation avec l’arrivée du GigBoard en octobre 2018. Le petit dernier baptisé MX5 confirme cette direction avec seulement trois foot switches et une (petite) pédale d’expression.
Ce n’est pas la taille qui compte…
Dès la réception du communiqué de presse de Headrush, j’ai été fortement intrigué par le MX5. La marque le présente clairement comme le petit multieffet le plus puissant de sa catégorie avec une architecture multicœur très performante. Le format du MX5 est très pratique puisqu’il intègre le nécessaire dans un châssis super compact. Comme sur tous les autres produits de la marque, on trouve un écran tactile au centre de la machine. Cet écran de quatre pouces simplifie l’édition et la création de presets.
Le logiciel qui l’accompagne est très intuitif et se prend en main rapidement, c’est un bon point. Je n’ai pas rencontré de soucis en ce qui concerne la réponse de l’écran tactile, la navigation est rapide et fluide. Le châssis, aussi compact soit-il, n’inspire pas une extrême robustesse. Il affiche un poids d’un kilo et six-cents grammes, ce qui est certes, très léger, mais les côtés et le fond du boîtier confectionnés en plastique ne sont pas rassurants. Le potard de volume, l’encodeur rotatif, les footswitches et la pédale d’expression ont l’air en revanche très fiables et solides.
Le dos de l’appareil accueille la baie qui regroupe les différentes connectiques et de ce côté-là, le MX5 est bien équipé. On trouve de gauche à droite : l’entrée guitare (ou basse), l’entrée pour une pédale d’expression, la boucle d’effets stéréo (FX Send et FX return), la sortie mono/stéréo sur jack 6,35 mm (pour du mono, utiliser uniquement la sortie Left), la sortie casque sur mini-jack 3,5 mm, une entrée auxiliaire aussi sur mini-jack 3,5 mm et les ports MIDI. Pour gagner de la place, Headrush a choisi le format 3,5 mm pour ces deux fiches (MIDI In et MIDI Out), mais fournit un adaptateur mini-jack vers DIN. On trouve ensuite un port USB qui permet d’exporter/importer des boucles et des réponses impulsionnelles, et d’utiliser l’appareil comme interface audio, la fiche d’alimentation et le commutateur ON/OFF qui, à l’image du fond et des côtés, a l’air un peu fragile.
Le dessus de la machine est réalisé dans un métal texturé bien solide et la pédale d’expression dispose d’un revêtement qui accroche bien. Cette dernière, bien qu’assez petite, dispose d’un réglage de tension et d’un switch « toe » pour activer une wah par exemple. C’est bien vu. Les trois footswitches disposent chacun d’une petite barre lumineuse qui prendra la couleur du bloc qu’on lui assigne. L’écran est clair, suffisamment lumineux (on peut ajuster cette dernière de 1 à 5) et affiche clairement le chaînage audio.
Les sons clairs
Propriétaire d’un Line 6 Pod Go, je n’ai pas pu m’empêcher de comparer les sonorités des deux machines qui affichent des tarifs assez similaires. J’ai comme à mon habitude, construit des presets en partant d’une base totalement vierge pour évaluer l’ergonomie de l’appareil et de son logiciel. Dès le début de la confection du premier preset, j’ai été agréablement surpris par les façons dont on peut agencer les onze blocs disponibles ; il est en effet possible de réaliser une chaîne standard dans laquelle on insère les effets avant l’ampli et ceux qui seront après, l’ampli et son enceinte. Mais Headrush a été malin et propose aussi deux autres options de chaînage qui permettent de jouer sur deux amplis à la fois, c’est très chouette. De même, on peut très simplement choisir d’utiliser une enceinte ou deux ce qui est également très bienvenu.
Le premier preset que je me suis concocté est un son clair à la limite de la saturation (un bon moyen de tester la dynamique des sons proposés) obtenu grâce à une simulation de Fender Princeton Blackface que j’ai fait sortir sur deux enceintes différentes. Première grosse claque du test : le son et la sensation de jeu sont saisissants de réalisme. On a vraiment le sentiment de jouer un vrai ampli. La simulation réagit très bien aux variations de jeu, le contenu harmonique est bien là, la chaleur aussi, bref, j’ai été conquis et ai eu beaucoup de mal à m’arrêter de jouer. On retrouve même les contrôles pour le vibrato directement dans les réglages de l’ampli ! Les simulations d’enceintes (15 enceintes et 10 micros modélisés) sont très bien réalisées et les réglages sont intelligents. On choisit le micro qu’on souhaite utiliser, son placement devant le haut-parleur (dans l’axe ou désaxé), mais on peut également ajuster la saturation du haut-parleur ! Ce réglage, baptisé Breakup simule à quel point le haut-parleur est poussé et produit une saturation très particulière et remarquablement bien reproduite ici. Le son clair étant particulièrement enthousiasmant, je me suis laissé aller à placer un octaver et une fuzz avant d’attaquer l’ampli et là aussi, le résultat m’a bluffé. Comme le vrai Princeton Blackface, la simulation estampillée Headrush réagit très bien aux différentes pédales d’effets, c’est un bonheur.
Je reste du côté Fender de la force et me concocte un preset un peu plus velu qui combine un Tweed Deluxe et un Bassman. Excellente surprise encore une fois. Le grain des amplis Fender Tweed, années cinquante donc, est très bien reproduit, et on entend bien distinctement chacun des deux amplis. Le son obtenu est un crunch typique du son de Joe Bonamassa sur scène, son que j’ai essayé de gonfler un peu à l’aide d’une simulation de Tube Screamer qui a fait retomber un peu mon enthousiasme. Le côté numérique de cet effet est très perceptible et il « gâche » un peu le son, n’étant pas assez discret ni transparent à mon goût. Je fais le test avec la version Headrush de l’OCD de Fulltone, le résultat est un peu plus probant, mais on entend et surtout on ressent toujours cet aspect numérique. J’ai voulu tester la simulation de Vox AC30 qui constitue un véritable classique. L’ampli est très bien modélisé et réagit bien.
- Tweed Deluxe + Tweed Bassman – Rotary:OCD – Telecaster01:48
- AC30 – Telecaster03:18
On passe aux sons un peu plus velus, j’en profite pour m’armer de ma Les Paul Custom, en gardant ma Telecaster à portée de main.
Les gros sons, crunch, lead et plus si affinités
Ayant concocté des preset basés sur des simulations d’amplis Fender, il me semblait naturel de faire de même avec des sons d’amplis Marshall et de leurs dérivés. J’ai commencé par réaliser un preset construit autour d’une simulation de Plexi 100 watts, LE Marshall par excellence. Un peu comme pour les pédales de saturation mentionnées plus haut, le son est décevant et possède quelque chose de numérique et de « faux » qui n’est pas très agréable. Le grain est vaguement là, mais sans être très précis. J’ai eu beau triturer les réglages, essayer toutes les simulations d’enceintes, rien n’y a fait. Sans m’attarder sur cette mauvaise surprise, je passe au JCM800. Ce dernier, autre grand classique de Marshall est décliné en plusieurs versions, 50 watts, 100 watts et même une version « modded ». Le son est ici beaucoup plus convaincant, à croire que la marque a simplement passé plus de temps sur le JCM800 que sur le Plexi. Pour terminer avec les sons « à la Marshall », j’ai essayé au passage la simulation du légendaire Soldano SLO100 qui est ici très agréable. On ne retrouve pas le grain de l’ampli original, mais un son qui s’approche d’un Plexi sous stéroïdes, c’est sympa. Le ressenti est au rendez-vous et l’ampli a très bien réagi une fois boosté. Pour finir l’exploration globale des simulations d’ampli, j’ai fait des presets avec des amplis Orange, Mesa Boogie et Peavey. Le constat est identique à celui que j’ai fait concernant les sons Marshall : certains sont bons et d’autres non. Le 5150 de Peavey est ici très bien modélisé, c’est moins le cas pour les Orange et Mesa Boogie.
- Plexi DualCab – TS808 – Telecaster01:11
- JCM800 DualCab ) TS808 – Chorus – Telecaster02:04
- SLO100 DualCab – Delay – LP Custom00:35
- Rectifier DualCab – TS808 – Telecaster01:06
- Rectifier DualCab – LP Custom01:39
- Orange – LP Custom01:14
- 5150 DualCab- WhiteBoost – LP Custom00:57
Effets, looper… lui manque-t-il quelque chose ?
Puisque la marque nous permet d’utiliser jusqu’à onze blocs en même temps, autant les remplir ! Comme mentionné plus haut, les effets de saturation m’ont un peu déçu bien que certains soient quand même sympa comme l’OCD ou la Fuzz Face. Du côté des délais et réverbes en revanche, Headrush a effectué un travail très approfondi. Ces effets temporels sont très soignés et le résultat obtenu, que ce soit en mono ou en stéréo, est très agréable. Les réverbes sont bien typées et on reconnaît bien les différentes saveurs des réverbes à plaques ou à ressorts. De plus, la fonction « spillover » (débordement) permet, lors d’un passage d’un preset à un autre, de laisser les queues de réverbe et délais mourir naturellement ; c’est top. Les effets de modulation sont aussi très bien réalisés et leurs réglages très complets permettent d’être très précis. Les multiples chorus et la simulation de haut-parleur rotatif m’ont beaucoup plu. Les différents compresseurs fonctionnent bien, mais manquent un peu de caractère à mon goût. Les effets du type octaver, Whammy, filtres et wah sont fonctionnels et sympa, mais manquent de charme.
Chacun des trois foot switches revêt une fonction bien spécifique quand on maintient une pression continue dessus. Le premier permet de basculer entre les différents modes : Stomp ou Rig, le deuxième permet d’accéder au looper, et le dernier active et désactive l’accordeur. Ce dernier est précis et facile à lire.
Comme chacun sait, Headrush a sorti un looper très complet il y a deux ans, le Looperboard. C’est donc naturellement qu’on retrouve un looper très performant au sein du MX5. Ce dernier dispose d’un temps d’enregistrement de plus de trois heures ! De plus, on peut facilement importer et exporter des boucles via le port USB en connectant l’appareil à son ordinateur.
Du très bon… et du moins bon
Le MX5, dernier-né dans la famille de pédaliers multieffets de chez Headrush, jouit d’une conception très complète et de plusieurs options bien pensées. Cependant, beaucoup d’inégalités sont à constater d’où mon bilan assez mitigé. Si les sons clairs et crunch sont très réalistes, tant à l’écoute qu’au jeu, ce n’est pas vraiment le cas pour les sons Hi-Gain. Comme pour le Pedalboard de la marque, il faudra passer beaucoup de temps sur ce MX5 pour réussir à lui faire sortir un son Metal correct et à la hauteur des remarquables sons clairs. La marque a eu l’intelligence de limiter le nombre d’effets, d’amplis et d’enceintes virtuelles ce qui rend la navigation simple et efficace : on ne perd pas des heures à parcourir la liste des amplis. L’essentiel est là et c’est amplement suffisant. De plus, on peut importer un grand nombre de réponses impulsionnelles dans le pédalier. Malgré sa taille réduite, le fabricant a réussi à intégrer beaucoup de fonctions dans l’appareil, qui rendent son utilisation vraiment simple et intuitive. Les différents modes de fonctionnement sont bien pensés et bien que le nombre de foot switches soit limité à trois, Headrush a intégré un mode « Scenes » qui permet d’activer/désactiver plusieurs blocs sur simple pression d’un foot switch. Seul petit bémol sur le matériel, la pédale d’expression n’est pas facile à manipuler ; je ne chausse que du 42 et demi, mais sa taille (parfaitement égale à celle d’un iPhone 5) rend l’utilisation d’une wah assez complexe. Encore une fois, les bassistes sont un peu les perdants du match avec seulement 4 amplis qui leur sont dédiés, c’est dommage bien que la simulation d’ampli Ampeg SVT soit très convaincante.
Proposé au tarif de 500 €, le Headrush MX5 incarne un concurrent dangereux aux HX Stomp et autres Zoom G6 dans le sens où il est le plus puissant de sa catégorie. Les sons sont globalement satisfaisants même si j’émets des réserves quant aux sons Hi-Gain. La foultitude de réglages permet de se concocter des presets très originaux et les onze blocs disponibles ainsi que leurs trois options de chaînage autoriseront beaucoup de variations. Le rapport qualité/prix est satisfaisant, mais quelques points restent à revoir.