Guitariste phare des années 80, George Lynch est sans conteste l’un des plus éminents spécialistes du gros son, sur scène comme en studio. Alors quand il se met à parler guitare, ampli et enregistrement, on l’écoute forcément…
La Musikmesse a été l’occasion de rencontres aussi sympathiques qu’instructives… La preuve avec George Lynch, ‘guitar hero’ s’il en est, et grand spécialiste du gros son. Ce qui devait être un petit quart d’heure à s’informer de l’actualité de cette légende du rock option virtuose, s’est ainsi transformé en une bonne heure de discussion passionnée sur la guitare, les amplis et la quête du son ultime, sur scène comme en studio.
Avant toutefois de laisser la parole au maître, une présentation s’impose pour tous ceux qui ne le connaîtraient pas.
Who is George Lynch ?
« Je remercie mon public… j’existe encore après 30 ans de carrière ! »
George Lynch est l’un de ces (très) nombreux guitaristes de la vague du hard rock californien des années 80… avec cette particularité d’avoir encore une actualité chargée coté album et coté live, mais aussi avec nos constructeurs d’amplis et de guitares préférés ou encore côté pédagogie avec une école en ligne pour guitaristes en herbe.
Tout a commencé le 28 septembre 1954, jour qui a vu naître le petit George. A l’age de 10 ans il se met à la guitare et joue durant son adolescence dans de nombreux groupes de la région de Sacramento. Le plus connu est sans doute le groupe Sergeant Rocks qui connut à l’époque un succès d’estime. Il déménage alors pour Los Angeles dans les années 70 où il travaille avec les groupes The Boys et Xciter.
C’est Xciter qui a permis à George Lynch de se faire connaître comme un digne héritier de Jimi Hendrix et de Jeff Beck, option gros son. Il écume alors les scènes de LA et de sa région, au moment où Edward Van Halen et Randy Rhoads gagnent une reconnaissance internationale. Il les rejoint en tant que « rock star » avec le groupe Dokken. Il parcourt les scènes (stades ?) du monde durant la décennie 80 et enregistre 5 albums multiplatines entre 1983 et 1988. Il est alors considéré comme l’un des guitaristes de rock les plus influents. Il a au passage reçu un Grammy Award dans la catégorie « best rock instrumental »
Son aventure avec Dokken s’achève en 1989. Il enchaîne immédiatement avec un nouveau groupe : Lynch Mob, enregistre deux albums et assure leur promotion à l’occasion d’une tournée mondiale « sold out ». En parallèle de son activité dans Lynch Mob, George a envie d’expérimenter des choses nouvelles, d’approfondir et d’élargir son approche de la guitare. Il travaille alors à un album solo Sacred Grooove qui sort en 1993. Il gagne une reconnaissance immédiate pour son jeu bien plus éclectique qu’on ne pouvait le soupçonner jusqu’alors.
George disparaît alors de la circulation pendant quelques années où il passe du temps dans l’Arizona avec sa famille et adopte un style de vie loin des excès de la vie de rock star en tournée. Il revient fin 1994 avec le groupe Dokken pour deux nouveaux albums et trois années de tournées. Il relance alors son groupe Lynch Mob en 1998 avec un nouveau line up et sort dans la foulée l’album Smoke This caractérisé par un son ENOOOORME qui contribue à définir un genre « Heavy Techno Metal ». La tournée qui s’ensuit lui permet de rencontrer un public plus jeune.
George Lynch attaque le nouveau millénaire avec un agenda bien chargé, côté live et coté studio. A la fin de la tournée US de 2001, il travaille avec Jeff Pilson (basse) et Michael Frowein (Batterie). Ce qui devait être un projet de 3 mois est devenu une quête de 18 mois dans le « stone house studio » de George Lynch. Le résultat est l’album Wicked Underground qui sort en avril 2003 sous le nom LP (Lynch / Pilson). George Lynch reste alors dans son studio et revisite ses compositions des époques Dokken et Lynch Mob sort l’album Revolution également en 2003. Il s’ensuit une tournée mondiale.
2004 voit un retour aux sources avec l’album de reprises Furious George et une compilation de morceaux revisités avec quelques invités de marque : Lost Lynch.
Les présentations étant faites, place à l’interview proprement dite…
Are You ESPerienced ?
George Lynch est réputé pour avoir un son énoooooooooooorme tant sur scène qu’en studio… et je peux témoigner de la véracité de cette réputation. Alors, à défaut d’un secret bien gardé dans les doigts du guitariste, le choix du matériel et de la façon de travailler doit avoir son importance. Voici, remis dans l’ordre les principales descriptions, recommandations, expériences et astuces glanées lors de cet entretien.
D’où vient cette jolie guitare posée juste à côté de nous ?
Pour mes guitares, je travaille avec ESP depuis plus de 20 ans. Ils m’ont toujours fourni des instruments qui sonnent immédiatement, avec une finition superbe et en complète adéquation avec mes goûts. En ce moment j’utilise cette SUPER V… elle est très confortable, a un look d’enfer et franchement, cette gratte a le MOJO !
Tu peux nous la présenter un peu plus en détail ?
C’est à la base une interprétation d’une Flying V avec un corps un peu plus léger et confortable, une tête personnalisée et des micros spécialement choisis. Moi qui jusqu’à présent n’avait joué quasiment que sur des guitares avec un manche vissé, ça me change de redécouvrir une guitare avec un manche collé. Le sustain est différent et le son très chaleureux… c’est étonnant … cette guitare est incontestablement l’une des plus versatiles que je possède tout en ayant une très forte personnalité.
Côté look, le côté vieilli de l’accastillage, des capots micros et de la plaque métallique rend vraiment bien ! Ca n’est pas que je sois fan des guitares vintage… une bonne guitare électrique n’a pas besoin de vieillir pour bien sonner tant que les bois sont bons et que le luthier connaît son métier. Mais cette finition donne un côté authentique à la guitare… la pose comme un instrument qui mérite le respect et sur lequel tu vas imposer ta marque. En plus, avec les griffes et les endroits où le cuivre est visible, chaque instrument devient unique et on n’est pas obligé de chercher les pains ou le numéro de série pour reconnaître l’instrument. C’est important d’avoir une guitare qui donne envie de jouer !
Et pour les micros ?
Il y a en position aiguë un micro Seymour Duncan développé exprès pour cette guitare, puissant et incisif, il marche aussi bien pour des sons clairs claquants que pour des crunchs avec de la gniak et je retrouve mon son favori pour les grosses distos, en solo comme en rythmique. En position grave, on trouve un simple bobinage au format humbucker, directement inspiré des P90 mais avec un bobinage spécial pour éviter d’attraper trop de buzz. Je suis tombé amoureux de la façon dont il sonne sur cette guitare. En plus, il se marie bien avec le micro aigu pour donner des sonorités très équilibrées mais jamais plates."
Un conseil pour bien choisir son instrument ?
A part prendre une ESP et de préférence une superV ? En fait, dès que l’on parle d’un instrument sérieux qui va devoir t’accompagner durant une grande partie de ta vie de guitariste il y a un truc qui me semble vraiment très important. Le choix du luthier ou du vendeur est essentiel pour le choix de la guitare elle-même. Il va te falloir essayer beaucoup de choses pour définir tes goûts et il est préférable d’être guidé lors de ces essais. Il faut rester ouvert à la fois à tes coups de cœur et aux suggestions de ton luthier (vendeur). S’il connaît son métier, il va te proposer des choses sans doute surprenantes, mais qui colleront étonnamment au « Graal guitaristique » que tu cherches sans savoir bien le définir.
C’est ce process que j’ai suivi avec ESP pour cette guitare. J’ai essayé plein de choses différentes, j’ai pu définir le look assez vite, identifier ce que je voulais retrouver de mes guitares habituelles et la part de nouveauté… Mais jamais je ne me serais orienté sur une guitare en acajou avec un manche collé et un simple bobinage type P90 en micro grave. Pourtant, la suggestion d’ESP m’a conquis après quelques minutes d’essais.
Du Rectifier au Randall MTS…
J’ai appris la sortie de ton MTS Lynch Box RM100LB, un nouvel ampli signature chez Randall. Comment a-t-il été développé ?
J’ai des goûts qui se sont affirmé avec le temps pour mes amplis… mon principal problème est que pour avoir les sons qui me plaisent vraiment j’ai besoin d’au moins quatre ou cinq amplis … chacun dans un format différent (combo, tète + baffle, système en rack) et avec des puissances qui vont du simple au triple. En plus, ce sont quasiment tous des amplis qui ont plus de 10 ans et qui ont un son que je ne retrouve pas sur les modèles d’aujourd’hui. Sans parler des soucis de fiabilité, c’est une situation dont je peux m’accommoder dans mon studio mais qui n’est en fait pas pratique du tout.
L’idée était alors de concevoir un ampli sans concession sur ces quelques sons que je souhaite retrouver, qui soit solide, et vraiment pratique en toute circonstance. Dans mes recherches j’ai entendu pas mal de bêtises… alors j’ai préféré demander à un vrai guru de l’amplification guitare. Il doit y en avoir trois ou quatre dans la région de LA… comme Bruce Egnater entre autres… et ce qui est bien, c’est qu’on trouve un de ces gurus chez Randall.
Le concept des amplis MTS m’a vite semblé très pratique et les amplis et modules existants vraiment convaincants même s’il ne correspondaient pas à mes envies. En plus, l’équipe de Randall était très motivée par le projet. On a alors décidé de se lancer dans ce projet un peu fou de mettre trois ou quatre amplis radicalement différents dans un seul et même ampli d’un prix qui ne soit pas déraisonnable.
Quels sont les amplis qui t’ont servis de modèle et comment les as-tu choisis ?
J’ai pris quelques-unes de mes guitares favorites, quelques amplis de ma collection, ceux disponibles chez Randall et ceux de la boutique du coin, on a mis tout ça dans une grande salle et on a TOUT essayé. C’est d’ailleurs assez surprenant de découvrir autant de choses sur des amplis que je pensais connaître. Le simple fait de les mettre les uns à côté des autres en passant très rapidement d’un son à un autre nous a vraiment révélé à quel point ce genre de choix est subjectif et les difficultés qui l’on peut rencontrer pour caractériser clairement un son et des sensations de jeu.
On a retenu au final quatre amplis qui avaient LE TRUC pour un type de son et que l’on retrouve dans les quatre modules développés par Randall.
Le SUPER V produit un son clean directement inspiré d’un vieux Vox AC30. Il sonne très acoustique avec des aigus très chantants, des graves chaleureux et des médiums légèrement creusés.
Le BRAHMA est directement inspiré d’un Marshall plexi des années 60, modifié pour être « poussé » plus facilement et sonner un peu plus gras. Il produit un son idéal pour des parties rythmiques très énergiques.
MR. SCARY est issu d’un truc improbable modifié au-delà du raisonnable. Cet ampli ne devrait pas sonner, mais il a le « mojo » et est devenu la source principale de mon son avec Dokken et Lynch mob. Il produit en fait un son proche du Brahma, mais avec beaucoup plus de gain et de punch. Les graves sont solides et très précis, les médiums et aiguës capables de percer n’importe où.
Le GRAIL est issu d’un des premiers Mesa/Boogie Rectifier. Il a un son très ‘épais’ et plutôt moderne… idéal pour grossir une rythmique en overdub et pour les solos."
Tu dis que tu as appris beaucoup de choses lors des essais… Quels sont les points les plus marquants ?
A part le côté subjectif de la chose et l’importance de mettre les amplis côte à côte pour se faire une idée juste, il y a un truc étonnant avec les vieux amplis : ils sonnent presque toujours différemment de leur équivalent moderne… mais après pas mal de tests on s’est aperçu que ça n’est pas lié au vieillissement de l’électronique et très rarement à un changement des schémas… mais tout simplement au changement de certains composants.
C’est remarquable sur le Rectifier que l’on a retenu. Il est plus facile à régler que le même modèle venant de la boutique du coin tout simplement à cause de ses transfos. Je ne pense pas que c’est valable pour le reste de la gamme Mesa/Boogie pour celui là c’est magique … il suffit de monter les « vieux » transfos « no name » dans le Rectifier moderne pour retrouver le son.
L’équipe Randall a aussi réussi à me faire changer d’avis sur les amplis câblés en point à point. Il existe un prototype câblé ainsi avec les quatre canaux. On a fait un essai avec le modèle commercial et ces deux amplis sonnent exactement pareil ! Je ne suis pas en train de dire que ça ne sert à rien de câbler un ampli en point à point… simplement, qu’un constructeur qui connaît son métier peut faire un autre choix et sortir un ampli qui sonne aussi bien.
Autre truc : tout compte dans un ampli ! Il suffit pour s’en convaincre de voir l’histoire des « vieux » transfos du Rectifier. Je suis épaté que la tête Randall propose 4 sons si différents et si fidèles à leur modèle avec une même section de puissance et un même baffle. C’est vraiment étonnant !
A propos des baffles, je suis assez maniaque à ce sujet et je passe beaucoup de temps pour les sélectionner. Je ne sais pas ce que le baffle du Randall donne avec autre ampli, mais il est incroyablement versatile associé à la Lynch Box. Il sonne bien à un volume raisonnable ET à un volume déraisonnable.
Toujours à propos des baffles justement, mon modèle fétiche est un vieux Hiwatt monté avec des HP « fane » Purple Back. Il a plus de 20 ans et je suis incapable de trouver un autre baffle qui sonne pareil… Pourtant, ils sont toujours produits à l’identique aujourd’hui. En fait, contrairement à l’électronique des amplis, un baffle vieillit et son son évolue au fur et à mesure que l’on s’en sert. C’est gênant parce que je trouve qu’il faut une dizaine d’années d’utilisation « normale » pour qu’un baffle se révèle.
J’ai deux astuces pour « vieillir » artificiellement un baffle. La première est très efficace mais plutôt dangereuse pour le porte-monnaie. Il s’agit d’assouplir à la main le cône de chaque HP. Ça demande un certain doigté et on ruine le HP une fois sur deux.
La deuxième est contraignante mais marche très bien. Il s’agit de brancher les baffles sur une sono qui diffuse en boucle un balayage dans les basses fréquences. Ça se fait facilement avec un synthé ou un oscillo de laboratoire. Le seul souci est que pour que ça fonctionne il faut le faire à fort volume et pendant quelques jours d’affilée. C’est un coup à devenir fou et à se faire détester de son voisinage.
Le son Lynch, de la scène au studio…
J’ai eu l’occasion de constater que tu as un son sur scène très proche de celui de tes albums… Tu as une recette magique ?
Merci. J’ai toujours attaché une grande importance à mon son en live. Je veux que mon public profite au mieux de ma musique et ça passe en grande partie par la qualité sonore et une espèce de « signature » que je cherche à reproduire systématiquement. J’ai toujours été surpris par l’attitude de beaucoup de guitaristes connus pour la qualité de leur son… Ils sont capables de passer un temps infini à peaufiner le son de leur album et ne se préoccupent pas plus de cinq minutes de leur son sur scène dés que le sondier fait un signe « ok ça roule »… d’accord… lorsque le sondier en question assure le son est bon… mais il n’a généralement plus rien de personnel. Je ne sais pas d’où vient cette attitude… peut-être que c’est parce que le son d’un album reste et qu’une fois fini un concert est parti pour toujours.
Il n’y a pas de vraie recette magique de ce point de vue…juste quelques habitudes qui aident bien. Déjà un truc évident : bien choisir son matériel et le disposer correctement sur la scène. Il est important de disposer d’un matériel qui sonne de façon très typée, qu’il soit fiable, constant et pratique à utiliser. Ensuite il faut apprendre à communiquer avec les sondiers, trouver les mots justes pour leur expliquer ce que l’on attend, savoir écouter leurs demandes et respecter leur boulot. Au final, c’est ce gars-là qui sera responsable de ton son alors lui payer une bière peut aider aussi.
Autrement, j’aime me rendre compte de la façon dont ma guitare sonne pour le public. J’ai un truc pour ça… J’ai enregistré quelques boucles représentatives de mon jeu avec ma guitare en direct. Je les ai mises sur un DAT et j’attaque mon ampli avec un boîtier de réamp… Comme ça je peux me promener dans la salle tout en m’entendant jouer « en situation live » et aller discuter la chose avec le sondier beaucoup plus efficacement.
Et pour le son en studio ?
Je trouve qu’obtenir un super son en studio est un des grands challenges pour tout guitariste. La principale règle que j’ai retenue au cours de toutes ces années est qu’il n’y en a pas vraiment. Il faut TOUT essayer et lorsque ça sonne vraiment bien on ne cherche pas plus loin et on enregistre un maximum de choses. Il y a tout de même quelques constantes qui reviennent pour faire un bon son de guitare…
En général un ampli qui sonne super bien dans la pièce est un bon point de départ… mais pas toujours sans doute parce que l’on apprend à faire des prises fidèles à la source alors ça se ressent. Le choix du préamp et du compresseur est capital et, bizarrement, bien plus important que le choix du micro que l’on met devant le baffle. Je ne sais pas d’où ça vient. Mes préférés en la matière sont un vieux préamp Chandler, de vieux modules Telefunken V72 et pour le compresseur, je suis fan de celui de Groove Tubes.
Un truc pour la façon de bosser : il faut pouvoir faire de vraies comparaisons et passer directement d’une option à une autre dans les conditions d’écoute du mix. Ca s’applique à tout type de choix en studio d’ailleurs… Pour que ça soit possible, j’ai pris l’habitude d’absolument tout enregistrer et de tout noter pour chaque prise. Un petit appareil photo numérique est alors très utile et remplace avantageusement le vieux Polaroïd. Au final, je travaille mes sons davantage dans la cabine que devant l’ampli.
Autre aspect très important dont on parle peu : le son « direct » fait la différence vraiment très souvent ! Je me souviens de l’enregistrement des albums de Dokken et de Lynch Mob. On disposait d’une quantité de matos hallucinante et nos prises sonnaient la mort ! Au moment du mix on a tout essayé mais la sauce ne prenait pas. La solution est venue d’un petit préamp et de son module de simulation de HP. Seules, les pistes enregistrées avec ce petit machin sonnaient vraiment mal… mais une fois mélangées à nos prises de la mort c’était magique et tout se mettait en place tout seul. Depuis j’ai approfondi cette voie et je peux te dire qu’une très grande partie des pistes de guitare présentes sur mes albums sont en fait des prises directes mélangées avec le son de l’ampli repiqué plus classiquement.
Enfin, un dernier point qui va sans doute en choquer quelques-uns : il faut bosser en numérique ! C’est plus pratique, ce que tu fais est vraiment reproductible et surtout, au final, ça sonne mieux. J’ai eu l’occasion de faire tout un album dans un studio de folie avec tout le matos dont on peut rêver et un producteur au savoir-faire incontestable… au final, c’est sans doute l’album où je suis le moins satisfait de mon son.
Il y a certes des albums produits tout en analogique qui sont de vraies références en terme de qualité sonore… ceux des Beatles ou de Pink Floyd par exemple. Franchement je pense que leur qualité vient bien plus du fait que ces mecs et leurs producteurs sont des génies et certainement pas du matos utilisé. Pour un musicien qui se met à la production comme moi, ça marche vraiment mieux avec les solutions numériques du marché.
Un petit DOJO pour la route ?
Peux-tu nous exposer ta vision sur l’évolution du monde de la musique ?
Le monde de la musique n’a plus grand-chose à voir avec celui que j’ai connu à mes débuts. Deux choses ont changé d’une façon radicale :le musicien d’aujourd’hui doit être « aware » et les choses vont beaucoup plus vite.
Lorsque je dis que le musicien d’aujourd’hui doit être « aware », c’est un bête constat. Quand j’ai commencé à jouer et grosso modo jusqu’à la fin des années 80 il était possible d’être un simple guitariste ou un chanteur et de faire une carrière complète… ça n’est plus vrai aujourd’hui ! le musicien qui rencontre le succès aujourd’hui, en plus d’avoir un peu de talent musical doit connaître les autres instruments, être un showman, être un producteur (au sens audio du terme), être un business man, être un manager, etc. C’est devenu un métier bien plus complet et complexe… et malheureusement la formation n’a pas suivi. Il n’est pas forcément très facile de bien s’entourer aujourd’hui et c’est souvent dommage. La volonté artistique est souvent occultée par tout ces « à côté ».
Pour l’accélération des choses, c’est aussi un simple constat… Il est aujourd’hui bien plus facile de gagner 1 000 000 $ avec sa musique mais il faut le faire vite et l’opportunité ne se présente en général qu’une fois. Regarde tous les grands groupes des années 60 ou 70… Aujourd’hui il ne feraient pas de deuxième album…
Le challenge est devenu double aujourd’hui : Il faut rencontrer le succès très vite (dés le premier album… idéalement dés le premier single) et ensuite il faut arriver à durer. Le musicien qui a tout compris aujourd’hui est celui qui arrive à casser ces deux challenges en inventant une façon de faire de la musique qui lui permet de vivre en dehors de ce système. Les vieux dans mon genre ne comptent pas vraiment… J’ai rencontré le succès et la reconnaissance il y a plus de 20 ans et j’ai eu la chance de ne pas gaspiller ce que j’ai pu y gagner et aujourd’hui je peux bosser sans contraintes.
Heureusement, il est aussi devenu plus facile de diffuser sa musique aujourd’hui alors il reste de la place pour les musiciens talentueux un peu plus futés qu la moyenne.
Et toi dans tout ça ?
Aujourd’hui, j’ai la chance d’avoir une famille merveilleuse et de pouvoir faire de la musique sans contraintes… alors j’en profite pour varier mes activités selon mes envies. Au final, je n’ai jamais eu autant de projets différents en même temps !
NDR : On passera sous silence le récit des vacances de George à Paris et ses fantasmes de sonorisation des déserts de l’Arizona pour se concentrer sur son actualité musicale…
Un nouvel album ?
Je prévois d’enregistrer un album pour cet été. Le line up n’est pas encore définitif mais les premières sessions sont prometteuses…L’idée est de s’enfermer pendant quelques semaines dans mon studio, d’enregistrer tout ce qui nous passe par la tête et d’en sortir rapidement des morceaux qui se tiennent et un album cohérent. Enfin la dernière fois que j’ai voulu enregistrer rapidement et sortir un album en trois mois, j’y ai passé un an et demi. Promis cette fois-ci on va aller à l’essentiel ! Ça sera un album principalement voire uniquement instrumental où chaque musicien pourra explorer son jeu et ses envies. Une espèce de très long bœuf autour d’une dizaine de thèmes que l’on retravaillera dans la foulée pour le rendre audible.
Tu es également sur le point de lancer le 'George Lynch Dojo’. Peux tu nous en dire plus à ce sujet ?
C’est un tout nouveau projet qui me tient particulièrement à cœur. Je vais lancer mon DOJO : une école de musique en ligne dédiée à la guitare. Je souhaite aller bien au-delà d’une simple mise en ligne de mes partitions ou d’un recueil de trucs et astuces. Nous allons proposer une vraie démarche pédagogique et un suivi personnalisé pour mes élèves. A défaut d’inviter tout le monde dans l’Arizona, l’idée est de suivre à distance le travail de mes élèves, de leur proposer des exercices, des vidéos, des conseils personnalisés et de leur permettre d’échanger leurs expériences. Chacun pourra alors se construire un jeu solide, révéler son talent et développer un style personnel. En plus, on pourra rendre la chose fun avec des concours en ligne et des exercices un peu plus rigolos que des descentes de gamme.
Je compte m’y investir personnellement et y consacrer une bonne partie de mon temps. J’ai beaucoup appris de rencontres lorsque je tournais dans la région de Sacramento ou lorsque je suis arrivé à LA. J’espère pouvoir reproduire la richesse de ces échanges avec mes élèves, leur apporter un peu de l’expérience que j’ai glanée au cours de ma carrière et les aider à progresser selon leurs désirs.