Dis moi ce que tu lis.
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Nantho Valentine
oryjen
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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.
[ Dernière édition du message le 12/05/2014 à 11:19:11 ]
Anonyme

Dans ce livre paru en 1935, le britannique Bertrand Russell (1872-1970) mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue et adeptes de quelques autres disciplines analyse les zones de frictions dans lesquelles les sciences et les religions se sont retrouvées et combattues au fil de l'histoire.
Il observe dans les premiers chapitres que les basculements de la religion (principalement catholique dans l'ouvrage) vers les sciences s'est faite progressivement en commençant d'abord par les sphères éloignées (astronomie) et sont redescendues sur terre (géologie, biologie) pour arriver sur l'homme (médecine vs démonologie) et son psychisme (l'âme et le corps).
Les rappels historiques et contextuels sont passionnants.
Viennent ensuite des chapitres sur le déterminisme depuis la découverte de la physique quantique, le mysticisme (« le mysticisme exprime une émotion, non un fait ; il n'affirme rien, et la science ne peut donc ni le confirmer, ni l'infirmer ») , le dessein cosmique ("L'homme n'est pas une preuve suffisante qui validerait l'idée d'un dessein cosmique") et un dernier chapitre passionnant sur la science et la morale.
Bien écrit et accessible, l'ouvrage peut avoir vieilli par certains aspects et l'intérêt réside principalement dans les derniers chapitres où l'éminent auteur, après avoir exposées les perspectives et contextes historique dans les premiers chapitres , s'empare des sujets et les met en relation avec les nouveautés de l'époque de la rédaction de l'ouvrage et sa propre réflexion à ce moment-là.
oryjen
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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.
quantat
Je serai personnellement incapable de dire si c'est bien de Russell, mais ça ressemble beaucoup aux traits d'humour dont sont friands les grands logiciens ... son paradoxe me conduit aux théorèmes d'incomplétude et aux problèmes d'autoréférence... qui eux mêmes me conduisent au problème soulevé par le concept de Nature et souligné par Levy Strauss (le problème d'autoréférence est là : le concept de "nature" est un fait de culture...)
Tu écrivais Orygen, qu'il y aurait une nature humaine ... c'est ce que tu tires de la lecture de Tristes Tropiques ? Tu pourrais en dire un peu plus ?
oryjen
J'ai trouvé dans Tristes Tropiques qu'un trait essentiel de la "nature humaine" serait peut-être d'avoir maille à partir avec la nature, en tant que concept, en tant que référence. Il y a un aspect important de l'identité humaine qui se joue toujours, et y compris ici et maintenant, face à l'environnement naturel, celui-ci nous étant symboliquement comme une sorte de miroir. On trouve l'exemple fascinant, dans ce livre, de ce peuple de la forêt dont la pâleur de teint de la noblesse était due au fait qu'ils ne sortaient jamais de leur habitation, parce qu'ils nourrissaient pour la nature (omniprésente juste autour d'eux), une horreur pleine de distinction!
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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.
[ Dernière édition du message le 13/05/2014 à 14:25:33 ]
Anonyme
Citation :
la pâleur de teint de la noblesse
comme dans l'Occident médiéval ! la nuance étant que les nobles dames se devaient d'avoir le teint de lait de celles (ceux) qui ne travaillent pas ; car le travail est IG-noble.
cyar
TheStratGuy
Citation de oryjen :Ce mot me semble particulièrement savoureux, à cause des sens multiples que l'on peut entendre en anglais avec les mots "right" et "left": "avoir raison" ou "être de droite" et "être laissé pour compte" ou "être de gauche".
Non mais là c'est surtout "who is left" = "qui reste/qui survit" (et "who is right" c'est effectivement "avoir raison"). Vouloir y donner un sens de "laissé pour compte" ou d'orientation politique, ça sent comme même grave la capillotraction et ça donne un truc vachement bancal au final je trouve...
Do not take life too seriously. You will never get out of it alive.
quantat
Citation de : oryjen
Ce mot me semble particulièrement savoureux, à cause des sens multiples que l'on peut entendre en anglais avec les mots "right" et "left": "avoir raison" ou "être de droite" et "être laissé pour compte" ou "être de gauche".
J'ai trouvé dans Tristes Tropiques qu'un trait essentiel de la "nature humaine" serait peut-être d'avoir maille à partir avec la nature, en tant que concept, en tant que référence. Il y a un aspect important de l'identité humaine qui se joue toujours, et y compris ici et maintenant, face à l'environnement naturel, celui-ci nous étant symboliquement comme une sorte de miroir. On trouve l'exemple fascinant, dans ce livre, de ce peuple de la forêt dont la pâleur de teint de la noblesse était due au fait qu'ils ne sortaient jamais de leur habitation, parce qu'ils nourrissaient pour la nature (omniprésente juste autour d'eux), une horreur pleine de distinction!
Oui je comprends en quel sens tu parles de "nature humaine". Finalement Levy Strauss se situait là dans la droite ligne de Hegel (comme presuqe tous les intellectuels français de cette génération).
TU me donnes envie de le relire ce texte...
a.k.a
Finalement Levy Strauss se situait là dans la droite ligne de Hegel
Je me rappelle très bien d'un passage vers le début du livre, au cours duquel il critique vivement la démarche dialectique (héritage direct de Hegel) et sa formation philosophique en général. Par ailleurs, vu la position de H. sur les femmes par exemple, je doute qu'il accorde autant d'importance que Lévi-Strauss à des "sauvages". Bon, ça remonte à loin pour moi Hegel, en même temps...
J'ai retrouvé le passage :
Là, j'ai commencé à apprendre que tout problème, grave ou futile, peut être liquidé par l'application d'une méthode, toujours identique, qui consiste à opposer deux vues traditionnelles de la question; à introduire la première par les justifications du sens commun, puis à les détruire au moyen de la seconde; enfin à les renvoyer dos à dos grâce à une troisième qui révèle le caractère également partiel des deux autres, ramenées par des artifices de vocabulaire aux aspects complémentaires d'une même réalité : forme et fond, contenant et contenu, être et paraître, continu et discontinu, essence et existence, etc. Ces exercices deviennent vite verbaux, fondés sur un art du calembour qui prend la place de la réflexion; les assonances entre les termes, les homophonies et les ambiguïtés fournissant progressivement la matière de ces coups de théâtre spéculatifs à l'ingéniosité desquels se reconnaissent les bons travaux philosophiques.
quantat
Citation de : a.k.a
Citation :Finalement Levy Strauss se situait là dans la droite ligne de Hegel
Je me rappelle très bien d'un passage vers le début du livre, au cours duquel il critique vivement la démarche dialectique (héritage direct de Hegel) et sa formation philosophique en général. Par ailleurs, vu la position de H. sur les femmes par exemple, je doute qu'il accorde autant d'importance que Lévi-Strauss à des "sauvages". Bon, ça remonte à loin pour moi Hegel, en même temps...
J'ai retrouvé le passage :
Citation :Là, j'ai commencé à apprendre que tout problème, grave ou futile, peut être liquidé par l'application d'une méthode, toujours identique, qui consiste à opposer deux vues traditionnelles de la question; à introduire la première par les justifications du sens commun, puis à les détruire au moyen de la seconde; enfin à les renvoyer dos à dos grâce à une troisième qui révèle le caractère également partiel des deux autres, ramenées par des artifices de vocabulaire aux aspects complémentaires d'une même réalité : forme et fond, contenant et contenu, être et paraître, continu et discontinu, essence et existence, etc. Ces exercices deviennent vite verbaux, fondés sur un art du calembour qui prend la place de la réflexion; les assonances entre les termes, les homophonies et les ambiguïtés fournissant progressivement la matière de ces coups de théâtre spéculatifs à l'ingéniosité desquels se reconnaissent les bons travaux philosophiques.
C'est tout à fait juste ce que tu dis aka : le structuralisme de Levy Strauss est en parfaite opposition avec la dialectique hegelienne...
L'héritage hégélien que j'indiquais se limite ici à ce qu'Hegel dit du rapport primitif de l'homme à la nature qui l'environne (qui est ce contre quoi et par rapport à quoi il se définit)
quantat
... j'oubliais : grand merci pour ce texte qui dénonce le lien intime entre la dialectique et la sophistique (curieusement Descartes disait déjà ça)
cyar
a.k.a
Quantat > de rien.
Anonyme
Lu le dernier tome du Seigneur des Anneaux.
Alors le 1er m'avait intéressé, le 2ème fait tourner avidement les pages, et le 3ème m'a laissé KO debout.
Je suis vraiment content d'avoir lu ça tardivement, et surtout d'avoir attendu d'être prêt à le lire (en y étant quasi forcé, grâce au fait d'avoir retrouvé cet exemplaire de 1972 dont je ne sais toujours pas comment il a pu arriver chez moi).
Le style et/ou la traduction est toujours aussi bon(ne), et le récit gagne encore en fluidité dans cet opus, qui se lit plus facilement que les précédents.
En revanche, si déjà le film Les 2 tours prenait quelques libertés avec le bouquin, là c'est quasi de l'arnaque. La fin du film, avec l'armée des morts, je l'ai toujours trouvée merdique et artificielle, et c'est tout de même un gros parti-pris en regard du bouquin. Même chose pour la mort de Saroumane, dont le personnage dans le film est sous employé (à la différence de Legolas, sorte de super Jedi omniprésent et omnipotent dans les films, bien plus réservé et à la présence plus sporadique dans les bouquins.)
On sent la sympathie de Tolkien pour les personnages d'apparence modestes, comme les Hobbits (la fin du bouquin, totalement absente du film, est assez géniale) et évidemment Aragorn, dont j'ai enfin compris qu'il avait 90 balais au moment des événements.
Finalement y a assez peu d'action, et celle ci est rapidement envoyée (la bataille de fin dure ptet maxi 30 pages, et encore), au profit de descriptions, de dialogues, le tout au profit des personnages eux même.
Bref, je mesure maintenant pourquoi on qualifie ça d’œuvre majeure de la littérature.
[ Dernière édition du message le 13/05/2014 à 18:10:02 ]
Djardin
Le synopsis, vite fait : c'est en 1943 sur le front russe. Un allemand à une permission et peut rentrer à l'arrière et il découvre que derrière, c'est tout cassé aussi.
Apparement Remarque a eu des problèmes avec les nazis dans l'entre deux guerre, sous prétexte qu'il était pacifiste, et a émmigré aux USA. Il a donc écrit ce bouquin comme une fiction (à "L'ouest rien de nouveau", c'était une fiction mais ça se basait de sa vie et de celle de ses camarades dans les tranchées).
Ben ça reste dans la même veine : c'est cynique et sinistre et la guerre c'est moche. Avec en prime par rapport à plein de bouquins pacifiste de guerre : c'est le point de vue des allemands en 1943 sur le front Russe. Ils savent trois trucs :
-la guerre est perdue pour eux
-ils ont commis des attrocités et vont devoir payer pour ça.
-ils se sont fait bourrer le mou par la propagande pendant des années.
Donc c'est encore plus sinistre et cynique.
Bref, pour l'instant, c'est dur, mais bien. et "à l'ouest rien de nouveau" est un livre super.
Sinon avant j'ai lu un truc bien plus léger : "les 3 mousquetaires" et "20 ans après" d'Alexandre Dumas. Ben c'est cool, il y a de l'action, de l'aventure, de l'humour. on a vraiment l'impression de lire un scénario de film à grand bugdet. C'est très agréable à lire. Le style et un peu "léger". En gros, il décrit les scènes de combat, les vannes que s'envoit les gens. mais pas de grosses descriptions romantiques qui ne servent à rien, pas de détail, pas de lourdeur. (d'où le côté scnéraio : ça décrit l'aventure, point).
Un petit bémol toutefois sur "20 ans après" : Dumas considère que ces lecteurs ont de la culture et connaissent le contexte de l'époque (le coadjureur, le cardinal de Retz et le prince de Condi sont la même personne. bon, ben sans le savoir ça complique vachement le bouquin !)
On lirait ça plutôt que du Maupassan en collège, plein de gamin aimerait la lecture (ou du moins considereraient que la lecture, ce n'est pas un but en soit, le but c'est de pouvoir se faire raconter une histoire)
Youtou => j'avais lu les livres en 6eme. après avoir vu les films, je voulais les relire. j'ai jamais dépassé la sortie de la comté tellement le style et lourd et poussif.
Un copain m'a conseillé un truc : "tu sautes les 300 premières pages et commence le livre une fois sortie de la comté". tu penses que ça vaudrait le coup ? ou ça reste un style lourd tout du long ?
Référence en matière de bon gout capillaire et vestimentaire.
homme à tête de zizi.
[ Dernière édition du message le 13/05/2014 à 22:57:04 ]
oryjen
Même point de vue chez Lovecraft, d'ailleurs, dans cette nouvelle dont j'ai oublié le nom, où il décrit une ville à travers les âges.
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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.
[ Dernière édition du message le 13/05/2014 à 23:18:12 ]
oryjen
Ma-gni-fi-que!
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L'artiste entrouvre une fenêtre sur le réel; le "réaliste pragmatique" s'éclaire donc avec une vessie.
Dr Pouet
Citation :Levy Strauss
J'ai retrouvé le passage :
Citation :Là, j'ai commencé à apprendre que tout problème, grave ou futile, peut être liquidé par l'application d'une méthode, toujours identique, qui consiste à opposer deux vues traditionnelles de la question; à introduire la première par les justifications du sens commun, puis à les détruire au moyen de la seconde; enfin à les renvoyer dos à dos grâce à une troisième qui révèle le caractère également partiel des deux autres, ramenées par des artifices de vocabulaire aux aspects complémentaires d'une même réalité : forme et fond, contenant et contenu, être et paraître, continu et discontinu, essence et existence, etc. Ces exercices deviennent vite verbaux, fondés sur un art du calembour qui prend la place de la réflexion; les assonances entre les termes, les homophonies et les ambiguïtés fournissant progressivement la matière de ces coups de théâtre spéculatifs à l'ingéniosité desquels se reconnaissent les bons travaux philosophiques.
Excellent.
un art du calembour qui prend la place de la réflexion
J'adore
[ Dernière édition du message le 13/05/2014 à 23:41:01 ]
vodevil
C'est quand qu'on va où?
Anonyme
vodevil
C'est quand qu'on va où?
Anonyme
TheStratGuy
Do not take life too seriously. You will never get out of it alive.
Jofree
Cordwainer/Instrumentalité, déjà évoqué ici mais amha c'est un ouvrage majeur de la SF
Le cranchage des sondeurs, la guerre n° 81, Artyr Rambo, la trilogie des planètes, etc... c'est parfois désuet mais rien que la diversité des thèmes et la singularité de l'oeuvre c'est
"To boldly go where no man has gone before."
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