opinion Qu'est ce qui vous navre automatiquement ?
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C'est surtout qu'il y a eu deux phénomènes conjoints.
D'abord, les directeurs artistiques des maisons de disque qui étaient souvent des vieux de la vieille de la musique, aux parcours variés, mais connaissant vraiment bien le métier et le milieu et sachant donc reconnaître un·e vrai·e artiste ont été remplacés par des "chefs de produits", des jeunes loups sortis d'écoles de commerces, personnes de marketing, mais n'ayant guère de connaissance du métier.
Ensuite, ces gens se sont dits, avec leur vision marketing, qu'il fallait optimiser. Donc, au lieu de proposer 2000 références dont la plupart ne se vendraient qu'à quelques milliers d'exemplaires, on allait en proposer 20 ou 30 fortement marketées pour qu'elles arrivent en tête des charts et se vendent par millions.
Au passage, on a donc laissé tombé le réseau de disquaire qui n'avait plus d'utilité pour se concentrer sur les supermarchés. Eux prennaient tous les quelques centaines de mêmes références, mais bon, le client achète ce qu'il y a, n'est-ce pas ?
Donc, exit la possibilité même de découvrir plein d'artistes puisque les majors arrêtaient d'en produire plein. Même des artistes déjà éprouvés. Rappelez-vous les Nougaro et tant d'autres se faisant virer de leurs maisons de disques.
Sauf que le public est pas si con. S'il peut acheter de la merde en masse, ça ne fait pas le compte.
En plus, tout ça est arrivé au moment d'une bulle. Comme une bulle financière ou immobilière : un moment où, pour une raison X ou Y, les ventes sont hors normes en volume ou en prix.
Là c'était les deux : le remplacement des discothèques des gens qui étaient sur K7 ou sur Vinyl par des CD. CD qui coûtaient moins cher à fabriquer, mais étaient vendus plus cher.
CD dont beaucoup ne coûtaient rien en production puisque celle-ci avait déjà été payées et amortie par les ventes sur d'autres supports.
Sauf que quand les gens ont terminé de remplacer leur discothèque, les ventes se sont effondrées. Crise du disque.
Crise pour laquelle on a eu beau jeu d'accuser le piratage qui se développait effectivement avec d'abord l'arrivée des graveurs, puis de l'échange de mp3 sur l'Internet naissant.
(je passe sur la soit-disant responsabilité du piratage dans la crise du disque. J'en ai déjà parlé ailleurs et c'est pas le sujet). Juste que quand on regarde les chiffres de vente, ben ils sont simplement retombés, après des années très très très fastes, au niveau normal d'avant l'avènement du CD.
Crise, ça veut dire restrictions. Donc, les maisons de disques, en bonne intelligence, se sont mises à renforcer la politique qui les avait si bien menées dans le mur : produire peu d'artistes, mais en les mattraquant un max.
Donc, des coûts d'album énormes dont plus de la moitié en marketing, mais bon, c'est le business mon bon monsieur.
Surtout qu'il y a eu de fortes concentrations avec fusions, rachats, etc.
Là où on avait des dizaines de maisons de disques dont beaucoup de moyennes qui assuraient quand même pas mal du marché, il n'y a plus que 4 majors.
Et qui dit grosses boîtes dit financiers, market-boys en costard Kenzo... mais pas directeurs artistiques, producteurs venant de métiers musicaux, etc. Donc formatage, sécurité, etc. Pour signer un artiste, il faut qu'il promette de faire un carton. On ne prend pas de risque. Pour qu'il promette de faire un carton, ben il faut qu'il ressemble à quelque chose qui a déjà fait un carton.
Entre temps, les disquaires qui étaient relativement spécialisés, compétents, connaissaient leur clientèle et savaient lui faire découvrir des nouveautés, donnant la chance à de nouveaux artistes et des artistes hors norme de trouver leur public avait disparu, vaincus par les supermarchés qui vendaient moins cher les "hits" qui assuraient le fond de roulement, puis par la VPC.
Heureusement, on a vanté la magie d'Internet pour remplacer ça. Grâce aux réseaux sociaux, le moindre artiste qui bricole dans sa chambre pouvait toucher des millions de fans grâce à son talent.
Mon cul.
Donc voilà. A de rares exceptions près, faut pas compter sur les maisons de disques pour sortir des artistes originaux.
Pour rappel, Matmatah avait vendu 60 000 exemplaires de leur premier album en autoproduction avant qu'une maison de disque ne daigne s'intéresser à eux.
Si on veut découvrir des choses intéressantes et originales, ben faut voir les (web)radios indépendantes, les réseaux sociaux où des gens partagent leurs coups de coeur dans des fils dédiés à tel ou tel style musical, les chaînes youtube... et surtout aller aux concerts. Pas les énormes machins genre Bercy ou les Zéniths, mais dans les SMACs, les petits et moyens festivals (certains gros aussi, si on reste pas scotché à la grande scène et ses têtes d'affiche), les bars-concerts, les petites salles.
Et compter sur ses réseaux de copains mélomanes.
Et si on n'a pas le temps ou les sous d'aller beaucoup en concert (ou qu'on a des gosses à gérer, ou que les salles intéressantes sont trop loin, etc), on peut toujours suivre la programmation des salles et lieux intéressants et écouter ce qu'ils programment...
En ce qui me concerne, je découvre plus de choses intéressantes que je n'ai le temps d'en écouter. Donc non, la création n'est pas morte.
Je ne suis pas d'accord sur le fait que le mainstream n'a toujours diffusé que de la merde mainstream. ça me fait chier de le dire, mais à l'époque où je me tapais Drucker et son "Champs-Elysées" le samedi soir chez mon vieux, ben j'ai vu des artistes franchement pas mainstream comme Thiefaine, les garçons bouchers et pas mal d'autres. A un moment de leur carrière où ils étaient très très loin d'être aussi connus qu'ils le sont aujourd'hui. La première fois que j'ai vu Thiefaine en concert quelques années plus tard, c'était dans une salle de 500 places et elle était pas pleine.
ah quoi penses-tu? en cuisine je vois bien, par contre
Sinon moi je fais partie de la masse qui ne fait pas la différence entre un mp3 bien encodé et du wav, donc bon...
sonicsnap
85155
AF, je suis ton père
Membre depuis 18 ans
ikto > 
Je suis anti-compétition!
Je suis anti-compétition![ Dernière édition du message le 24/01/2024 à 18:31:39 ]
iktomi
14739
Drogué·e à l’AFéine
Membre depuis 5 ans
Hé ho ! J'l'ai dis le premier ! 
Will Zégal
75055
Will Zégal
Membre depuis 22 ans
Citation :
De toutes façons choisir un nouvel artiste est la partie du travail des maisons de disques qui les a toujours fait le plus flipper et pour laquelle elle sont le plus nulles. Alors autant faire du neuf avec du vieux.
C'est surtout qu'il y a eu deux phénomènes conjoints.
D'abord, les directeurs artistiques des maisons de disque qui étaient souvent des vieux de la vieille de la musique, aux parcours variés, mais connaissant vraiment bien le métier et le milieu et sachant donc reconnaître un·e vrai·e artiste ont été remplacés par des "chefs de produits", des jeunes loups sortis d'écoles de commerces, personnes de marketing, mais n'ayant guère de connaissance du métier.
Ensuite, ces gens se sont dits, avec leur vision marketing, qu'il fallait optimiser. Donc, au lieu de proposer 2000 références dont la plupart ne se vendraient qu'à quelques milliers d'exemplaires, on allait en proposer 20 ou 30 fortement marketées pour qu'elles arrivent en tête des charts et se vendent par millions.
Au passage, on a donc laissé tombé le réseau de disquaire qui n'avait plus d'utilité pour se concentrer sur les supermarchés. Eux prennaient tous les quelques centaines de mêmes références, mais bon, le client achète ce qu'il y a, n'est-ce pas ?
Donc, exit la possibilité même de découvrir plein d'artistes puisque les majors arrêtaient d'en produire plein. Même des artistes déjà éprouvés. Rappelez-vous les Nougaro et tant d'autres se faisant virer de leurs maisons de disques.
Sauf que le public est pas si con. S'il peut acheter de la merde en masse, ça ne fait pas le compte.
En plus, tout ça est arrivé au moment d'une bulle. Comme une bulle financière ou immobilière : un moment où, pour une raison X ou Y, les ventes sont hors normes en volume ou en prix.
Là c'était les deux : le remplacement des discothèques des gens qui étaient sur K7 ou sur Vinyl par des CD. CD qui coûtaient moins cher à fabriquer, mais étaient vendus plus cher.
CD dont beaucoup ne coûtaient rien en production puisque celle-ci avait déjà été payées et amortie par les ventes sur d'autres supports.
Sauf que quand les gens ont terminé de remplacer leur discothèque, les ventes se sont effondrées. Crise du disque.
Crise pour laquelle on a eu beau jeu d'accuser le piratage qui se développait effectivement avec d'abord l'arrivée des graveurs, puis de l'échange de mp3 sur l'Internet naissant.
(je passe sur la soit-disant responsabilité du piratage dans la crise du disque. J'en ai déjà parlé ailleurs et c'est pas le sujet). Juste que quand on regarde les chiffres de vente, ben ils sont simplement retombés, après des années très très très fastes, au niveau normal d'avant l'avènement du CD.
Crise, ça veut dire restrictions. Donc, les maisons de disques, en bonne intelligence, se sont mises à renforcer la politique qui les avait si bien menées dans le mur : produire peu d'artistes, mais en les mattraquant un max.
Donc, des coûts d'album énormes dont plus de la moitié en marketing, mais bon, c'est le business mon bon monsieur.
Surtout qu'il y a eu de fortes concentrations avec fusions, rachats, etc.
Là où on avait des dizaines de maisons de disques dont beaucoup de moyennes qui assuraient quand même pas mal du marché, il n'y a plus que 4 majors.
Et qui dit grosses boîtes dit financiers, market-boys en costard Kenzo... mais pas directeurs artistiques, producteurs venant de métiers musicaux, etc. Donc formatage, sécurité, etc. Pour signer un artiste, il faut qu'il promette de faire un carton. On ne prend pas de risque. Pour qu'il promette de faire un carton, ben il faut qu'il ressemble à quelque chose qui a déjà fait un carton.
Entre temps, les disquaires qui étaient relativement spécialisés, compétents, connaissaient leur clientèle et savaient lui faire découvrir des nouveautés, donnant la chance à de nouveaux artistes et des artistes hors norme de trouver leur public avait disparu, vaincus par les supermarchés qui vendaient moins cher les "hits" qui assuraient le fond de roulement, puis par la VPC.
Heureusement, on a vanté la magie d'Internet pour remplacer ça. Grâce aux réseaux sociaux, le moindre artiste qui bricole dans sa chambre pouvait toucher des millions de fans grâce à son talent.
Mon cul.
Donc voilà. A de rares exceptions près, faut pas compter sur les maisons de disques pour sortir des artistes originaux.
Pour rappel, Matmatah avait vendu 60 000 exemplaires de leur premier album en autoproduction avant qu'une maison de disque ne daigne s'intéresser à eux.
Si on veut découvrir des choses intéressantes et originales, ben faut voir les (web)radios indépendantes, les réseaux sociaux où des gens partagent leurs coups de coeur dans des fils dédiés à tel ou tel style musical, les chaînes youtube... et surtout aller aux concerts. Pas les énormes machins genre Bercy ou les Zéniths, mais dans les SMACs, les petits et moyens festivals (certains gros aussi, si on reste pas scotché à la grande scène et ses têtes d'affiche), les bars-concerts, les petites salles.
Et compter sur ses réseaux de copains mélomanes.
Et si on n'a pas le temps ou les sous d'aller beaucoup en concert (ou qu'on a des gosses à gérer, ou que les salles intéressantes sont trop loin, etc), on peut toujours suivre la programmation des salles et lieux intéressants et écouter ce qu'ils programment...
En ce qui me concerne, je découvre plus de choses intéressantes que je n'ai le temps d'en écouter. Donc non, la création n'est pas morte.
Je ne suis pas d'accord sur le fait que le mainstream n'a toujours diffusé que de la merde mainstream. ça me fait chier de le dire, mais à l'époque où je me tapais Drucker et son "Champs-Elysées" le samedi soir chez mon vieux, ben j'ai vu des artistes franchement pas mainstream comme Thiefaine, les garçons bouchers et pas mal d'autres. A un moment de leur carrière où ils étaient très très loin d'être aussi connus qu'ils le sont aujourd'hui. La première fois que j'ai vu Thiefaine en concert quelques années plus tard, c'était dans une salle de 500 places et elle était pas pleine.
[ Dernière édition du message le 24/01/2024 à 18:39:47 ]
iktomi
14739
Drogué·e à l’AFéine
Membre depuis 5 ans
sonicsnap
85155
AF, je suis ton père
Membre depuis 18 ans
kosmix
46307
Ma vie est un thread...
Membre depuis 19 ans
Belle synthèse de l'histoire récente du music-business 
Putain Walter mais qu'est-ce que le Vietnam vient foutre là-dedans ?
venuxdeluxe
3887
Squatteur·euse d’AF
Membre depuis 13 ans
iktomi
14739
Drogué·e à l’AFéine
Membre depuis 5 ans
Neveud
6242
Je poste, donc je suis
Membre depuis 4 ans
Citation :
Qui n'a pas été confronté un moment ou autre à un " putain de robot de merde ! "
ah quoi penses-tu? en cuisine je vois bien, par contre
Sinon moi je fais partie de la masse qui ne fait pas la différence entre un mp3 bien encodé et du wav, donc bon...
Alain Souchon n'est pas un film
[ Dernière édition du message le 25/01/2024 à 15:57:52 ]
sublime gate
7669
Je poste, donc je suis
Membre depuis 4 ans
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