Après le brasier provoqué par la sortie du Spark testé ici, Blue Microphones continue dans sa lancée avec un nouveau microphone au look très... différent ! Toujours dans une optique de proposer des produits originaux et abordables, le Reactor vient donc compléter la gamme de la marque américaine. Allez, on décolle.
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Si la marque de la « bouteille bleue » n’a pas l’âge avancé de ses confrères germaniques, il va sans dire que sa réputation grandissante nous a habitués à une lignée de microphones plutôt remarquable, dans tous les sens du terme. Et ce n’est pas avec ce petit nouveau qu’elle va nous dire le contraire. Le Reactor a en effet été conçu dans l’idée de faciliter les placements de microphone pour des prises de son stéréophonique. Corps trop imposants, capsules difficiles à faire coïncider… Avec des microphones large membrane « classiques », pas toujours évident de respecter les différentes théories du placement stéréophonique. C’est donc dans un souci de faciliter la vie des ingénieurs du son que Blue a décidé de proposer ce microphone au corps radicalement différent (de ce qu’on peut trouver habituellement) et dont la capsule, fixée sur un système Swivel — orientable — peut effectuer une rotation de 90°.
En lieu et place du traditionnel « cylindre » qui fait généralement office de corps, le Reactor est donc bâti sur un petit « tambour » en métal solide, d’une bonne dizaine de centimètres de diamètre pour une épaisseur de 5 cm. Au-dessus de sa jolie robe rouge carmin, la capsule au teint gris métallisé trône fièrement, amenant la hauteur totale du micro à un peu plus de 20 cm. Pour le coup, au moment du déballage, j’étais vraiment surpris car, à première vue, le micro m’a vraiment fait penser à une sorte d’instrument de mesure navale pour esthète épris de science-fiction !
À l’intérieur du disque, sur un des côtés, on retrouve une drôle de « lentille » bleutée qui — si on regarde de plus près — permet en réalité de sélectionner la directivité du Reactor. On a donc la possibilité de choisir entre trois directivités : cardioïde, bidirectionnelle ou omnidirectionnelle. La sélection se fait en déplaçant de manière circulaire la lentille sur la directivité souhaitée. Inutile de vous préciser qu’à première vue, j’étais un peu dérouté par ce système quelque peu inhabituel, mais ce choix esthétique peu commun donne un cachet particulièrement classe à ce microphone.
Sur le papier — d’un point de vue technique —, le Reactor s’inscrit vraiment dans la lignée des autres microphones Blue, en affichant des performances qui ont fait la (bonne) renommée de la marque. Offrant une sensibilité de 22 mV/Pa en cardioïde (18 mV/Pa en Bi et Omni) pour une pression acoustique maximale admissible de 138 dB SPL, le Reactor possède une dynamique de 130 dB et un rapport signal/bruit de 84,5 dB pour un niveau de bruit équivalent de 7,5 dB. Plutôt pas mal. Du point de vue de la réponse en fréquence affichée (20 Hz – 20 kHz), la courbe reste quasiment linéaire de 50 Hz à 2 kHz. En dessous de 50 Hz, on observe une pente qui fait chuter la réponse jusqu’à 10 dB à 20 Hz, et on constate 2 légères bosses dans l’aigu, à 5 kHz et à 8 kHz. Passé 10 kHz, la courbe rechute légèrement pour afficher une légère pente d’atténuation (2 dB environ) au-dessus de 15 kHz. Dans les autres directivités, le comportement fréquentiel reste similaire, avec ce même pic dans l’aigu (mais dont la bande est bien plus large) pour une directivité omni et des graves et aigus bien plus atténués en mode bidirectionnel.
Côté prestations, le Reactor est livré dans un petit coffret renforcé de mousse avec un design et une charte esthétique qui reprend son identité visuelle générale. Celui-ci est également livré avec une suspension dédiée, sur laquelle on vient visser le Reactor, et dont le design vient renforcer le côté « science-fiction ». Tout comme pour son petit frère, le Blue Spark, on retrouve le mini filtre anti-pop estampillé « Blue » qui vient se fixer — par son système aimanté très ingénieux — autour de la bague de la capsule. Enfin le manuel, toujours aussi agréable à lire, vient compléter cette petite liste de produits dérivés qui donnent un cachet unique au Reactor. En clair, quand on achète un microphone Blue, c’est tout un univers qu’on acquiert !
Reactions
Passés les premiers moments de la découverte, on s’attache assez vite à ce micro qui, bien que surprenant de prime abord, est vraiment agréable à regarder. En revanche, pour le manipuler, mieux vaut vous armer d’un pied solide et stable (ou de petits contrepoids !) car le Reactor pèse pas loin d’un bon kilo ! Sans vouloir faire mon geek en manque de muscles, exit les pieds et supports de mauvaise facture : si vous voulez, comme nous, faire adopter au Reactor des positions un peu inclinées, autant s’y prendre de bonne heure ! En position verticale, il est d’ailleurs presque plus judicieux de positionner le micro tête en bas que de manière traditionnelle… ce qui remet un peu en question la « raison d’être » initiale de ce micro. Après ces quelques — gentils — tumultes de placement, nous avons pu placer le Reactor (à côté d’un U87 servant simplement de « référence ») devant une batterie Gretsch, une Esquire branchée dans un ampli Brooklyn, une acoustique Martin et une voix. Le tout preamplifié par des Amek DMCL. Voici les différents extraits :
- Amb Drums Reactor00:12
- Amb Drums U8700:12
- Acoustic Reactor00:20
- Acoustic U8700:20
- Electric Guitar Reactor00:22
- Electric Guitar U8700:22
- Voice Reactor00:25
- Voice U8700:25
Dans les quatre exemples, je trouve que le Reactor s’en sort vraiment bien. Pas de doute, on est bien face à un micro moderne : niveau de sortie est élevée, l’aigu bien présent. En termes de réglages des préamplis, nous avons tenu à garder les mêmes réglages de gain pour les deux micros, afin de mettre en évidence la différence de niveau de sortie entre les deux micros. Dans l’extrait reprenant l’ambiance mono de batterie, le Reactor accentue la brillance générale du kit. Les cymbales ressortent de manière significative, mais l’attaque des fûts également, donnant pas mal de présence et d’attaque à l’ensemble. Le résultat est plus brillant qu’agressif ; tout dépend également des cymbales utilisées… Il aurait été intéressant de tester un couple de Reactor en overheads ; toutefois, je crains sincèrement que le poids total du microphone ne nous permette de le positionner sur un pied de manière aussi simple…
En ce qui concerne la guitare acoustique, on obtient un résultat cohérent, favorisant le strumming tout en gardant un bas bien tenu. Sur la guitare électrique en revanche, ce regain de brillance peut certainement porter préjudice lors d’un mixage, en donnant un caractère quelque peu agressif aux guitares, surtout jouées « rock ». À ce sujet, j’ai préféré le son de l’U87, qui est pourtant loin d’être mon choix numéro un en matière d’enregistrement de guitare électrique… Néanmoins, cela reste très subjectif.
Il va sans dire que l’élément qui bénéficie le plus des avantages de cette réponse fréquentielle reste la voix qui peut dès lors s’insérer dans un mix sans aucune difficulté. Il est vrai que le Reactor se montre particulièrement efficace dans ce domaine-là. Mises à part certaines voix féminines sensibles aux sifflantes, le Reactor devrait convenir à bon nombre de voix. Après, tout est question de goût. Pour ma part, je trouve quelque peu agaçant cet « effet de mode » qui tend à donner une réponse en fréquence rehaussée autour de 10 kHz sur la plupart des microphones actuels… Même les micros à ruban d’aujourd’hui gagnent en brillance ! Mais où allons-nous?!
Néanmoins, on ne peut pas reprocher à ce microphone de vivre avec son temps : racé et à l’esthétisme vraiment original, il offre finalement un rendu sonore agréable à écouter et adapté à de nombreuses situations d’enregistrement. D’un point de vue technique, rien ne manque, si ce n’est peut-être un filtre coupe-bas et un atténuateur… De mon point de vue, le seul hic de ce microphone reste son poids. Sans constituer un véritable « motif de renvoi », le Reactor a les inconvénients de ses avantages esthétiques et il ne sera pas facile à placer dans des positions peu communes. Cela étant, il offre une réelle plus-value dans la gamme des microphones Blue car on a affaire à un micro relativement polyvalent d’un point de vue sonore, qui tend à « redonner » de la vie et du brillant aux instruments qui pourraient sonner fades ou ternes, tout en « tenant » le bas du spectre de manière assez sobre. Si vous avez donc besoin d’un microphone abordable, au look vraiment original et capable de gérer un peu n’importe quelle situation d’enregistrement, ce microphone pourrait bien faire partie de votre futur arsenal !
Téléchargez les fichiers sonores : flac article
Conclusion
Blue Microphones enfonce le clou de l’originalité avec ce micro au caractère bien trempé. Le Reactor brille — dans tous les sens du terme ! — par sa singularité esthétique et sonore, qui lui ouvre un horizon plutôt large en matière d’enregistrement. À l’aise devant de nombreuses sources, il faudra néanmoins veiller à s’équiper de pieds et stands solides si on veut lui faire adopter des positions esotériques et ce, malgré l’ingéniosité de sa capsule rotative à 90°. Néanmoins, on retrouve le sérieux et la qualité de fabrication chère à Blue qui, pour 500 € TTC, nous gâte avec cette nouvelle petite fusée.
Merci à Red Led pour son jeu légendaire ainsi qu’à Marc Upson / Upson Studio pour le studio… et sa patience. Red Led appears courtesy of LeftWing Beard&Glasses Publishing