La marque française Pulsar a trouvé que la période printanière était particulièrement propice pour nous présenter son nouveau plugin, le moteur de réverbe spring joliment appelé Primavera.
La réverbe à ressorts occupe un joli rôle dans l’histoire de la production musicale, et c’est Laurens Hammond, le créateur de l’orgue éponyme, qui a été le premier à mettre au point ce dispositif pour un effet musical en 1939… Sacré Laurens ! En effet, en sortant d’une période où la seule possibilité d’ajouter de la réverbération à une source sonore dont l’environnement acoustique en était dépourvu était la chambre d’écho, on a vite eu envie et besoin d’une solution moins encombrante qu’une pièce dédiée à cela.
Comme beaucoup d’innovations, celle de la réverbe à ressorts (spring reverb en anglais) vient d’une expérience qui n’était initialement pas destinée à la production musicale. Des chercheurs d’une société de télécom américaine se sont en effet rendus compte, en simulant une communication téléphonique longue distance avec une ligne à retard à ressort, qu’en la déréglant, elle créait un effet de réverbération. Les équipes de Hammond se sont ensuite servi de ce principe dans un but musical, obtenant un résultat très loin d’une réverbération acoustique naturelle mais dont la densité et le caractère harmonique particulier deviennent rapidement une signature sonore à proprement parler. Ce procédé sera très vite repris par un grand nombre de constructeur d’instruments de musique, et notamment la quasi-totalité des fabricants d’amplificateurs pour guitares électriques, claviers, ou autres basses électriques. Chez Fender, on associera notamment les ressorts à des lampes, ce qui participera grandement à l’élaboration du son mythique et caractéristique de la période 60's chez ce constructeur.
De ce fait, la Spring Reverb devient vite un allié du compositeur comme de l’instrumentiste, l’aidant à caractériser sa sonorité comme influençant son mode de jeu et son écriture (elle a notamment pesé sur le son des mouvements surf rock, yéyé, psyché), mais elle s’invite également en studio à une époque où elle est plus accessible et surtout moins encombrante que les fameuses réverbérations à plaque. Certaines unités produites par AKG, Pioneer, Telefunken, Fostex, Orban, etc. deviennent ainsi cultes au point qu’après PSP, Klanghelm et Universal Audio, c’est au tour de Pulsar de se pencher sur la recréation de ces réverbes au caractère bien trempé et évocateur d’une époque.
Pulsar, la pulsion du design
On connaît bien les plugi-ns Pulsar, et on les accueille souvent à bras ouverts, d’abord parce qu’ils sont – cocorico – Made In France, mais surtout parce qu’ils sont très bien faits ! La marque a d’abord développé des émulations de compresseurs vintage très efficaces comme le 1178 ou le MU, puis s’est lancé sur le terrain de l’égalisation avec le (passif) Massive et le 8200, mais elle avait déjà exploré aussi les effets temporels avec son Echorec. Parmi les points communs à toutes les productions de Pulsar, on citera le caractère vintage, voire franchement rétro, des machines choisies, et cette première réverbe Primavera ne déroge pas à la règle. L’autre caractéristique de la firme Grenobloise qui saute aux yeux, c’est son parti-pris pour le design : tous les plugins sont très beaux, évocateurs de la machine qui les a inspirés, avec un peu de malice dans les termes utilisés et les codes visuels, mais toujours avec beaucoup de goût ! Et cela se vérifie une fois de plus avec cette Primavera dont le visuel nous a vraiment séduits. Le plug-in se présente sous la forme d’une unité de réverbe avec ses quatre ressorts disposés au-dessus et un panneau avant dans un vert un peu pastel typé « vert d’eau » ou « menthe », qui lui donne un côté un peu Surf Rock, franchement 60's, tout à fait cohérent avec l’univers de la spring. Précisons que ce plugin sera à terme vendu 99 €, mais pour son lancement, il est en ce moment à 59 €, et on le retrouve dans une offre à 99 € avec l’Echorec.
La réverbe des amplis
La documentation fournie par la marque – une fois encore bravo Pulsar, car elle est très précise et instructive – nous apprend que ce plugin n’est pas une réverbe à convolution, mais une conception algorithmique qui permet de se rapprocher davantage du comportement non linéaire et accidenté de la spring. À la suite de l’interrupteur on/off, les différents réglages sont compartimentés dans trois cadres bien distincts : à gauche la section Preamp, au centre le cœur de la Pulsar Primavera, et à droite la section Output.
Dans la première section, on remarque deux filtres High Pass et Low Pass, et on note que le premier est levé par défaut à 150 Hz ; assez pertinent, car on souhaitera souvent se débarrasser des graves dans une réverbe. Au-dessus, un potentiomètre de Drive pour saturer le signal et un sélecteur pour choisir entre une préamplification à tube (Tube) ou transistor (Ger).
À l’opposé, la section Output comporte les classiques Mix, pour doser la réverbe et le signal d’origine si on utilise le plug-in en insert, et Volume, mais aussi deux potentiomètres rotatifs très intéressants : Présence qui accentue les haut-mediums, à l’instar de ce qu’on trouve régulièrement sur les amplis guitare, mais surtout Ducking. Ce dernier permet de compresser plus ou moins la réverbération quand le signal d’origine est présent, et c’est un outil essentiel pour placer une réverbe dans son mix. Mieux encore, Primavera permet de désigner un autre signal pour déclencher cette compression, via le sidechain externe.
Au centre, on trouve tous les paramètres qui permettent de choisir et caractériser la réverbe : les six modèles différents qui ont été reproduits dans Primavera, du plus « Lofi » au plus « Hifi », le pré-délai, la tension du ressort, le temps de réverbération (Decay), l’Excitation qui met en avant le bruit du ressort, et enfin la largeur (Width) de la stéréo. En s’attardant sur les potards ou interrupteurs, on voit s’ouvrir en haut à droite une petite fenêtre qui nous informe sur ce réglage, ce sur quoi il agit ou sur les caractéristiques du pré-réglage concerné, ce qui est à la fois très utile et instructif car on y retrouve une partie des renseignements présents dans la documentation.
Deux voyants lumineux attirent notre attention : celui qui nous indique quand un préréglage choisi est « mono », et la lumière jaune qui s’allume quand le signal atteint un certain seuil de saturation par le potentiomètre Drive.
Des guitares, mais pas que…
Quand on nous met un joli plugin comme celui-ci entre les mains, on a évidemment envie de l’essayer dans de nombreux contextes Le plus pertinent reste tout de même de mouiller, réverbérer des prises de guitare électrique enregistrées volontairement sans réverbe pour pouvoir en rajouter dans le logiciel, et ainsi garder la main sur le dosage de signal reverbéré, profiter des possibilités de spatialisation que nous offre le plug-in. Pour l’occasion, on ressort donc de nos tiroirs quelques morceaux teintés plutôt folk, surf, rock ou psyché, et on tente de substituer les réverbes utilisées à l’origine par notre Primavera.
Nous trouvons un thème de guitare aux couleurs surf folk, teinté de grands espaces américains, et on l’envoie directement dans nos ressorts. Un petit tour des différentes émulations s’impose, parce qu’on cherche là une réverbe plutôt ample, avec un spectre assez large et une jolie définition, mais qui puisse révéler une présence percutante dans les haut-mediums. Le panel est large, et en se fiant à nos oreilles et aux petits descriptifs que l’équipe de Pulsar a pris la peine d’ajouter, notre choix se porte sur le GBS. C’est tout ce qu’on attend d’une réverbe à ressorts large et moderne, des jolis graves et des aigus délicats, une jolie couleur et surtout beaucoup de profondeur. Afin de perfectionner notre trouvaille, on se permet donc d’élargir encore un peu la spatialisation, et d’augmenter la tension des ressorts. C’est extrêmement efficace et en cumulant ça à une présence plus élevée, on arrive à obtenir exactement ce que nous cherchions, tant en termes de densité harmonique des haut-médiums, que sur l’aspect dynamique et l’explosivité de la machine. Le résultat est sans appel, on a trouvé ce qu’on cherchait en un rien de temps, et en y prenant beaucoup de plaisir.
On se prend ensuite au jeu de faire défiler les différents préréglages destinés aux guitares, le Reactant Spacecraft et le Epic Solo sont très intéressants dans ce cas précis, mais leurs durées sont excessives, alors que l’American Amp et son caractère mono est plutôt convaincant aussi, dans un tout autre registre. On notera cependant qu’il n’y a pas tant de préréglages dédiés aux guitares, et qu’ils sont a priori destinés à être utilisés en insert et non en piste effet.
Dans le but d’éprouver notre nouvel outil dans différents contextes, on se dit qu’on essaierait bien de l’insérer sur une piste de trompette d’un projet de hip hop plutôt old school. La piste est mono, et à notre grand étonnement, le plugin ne nous propose pas d’option pour passer la piste de mono à stéréo. On change donc notre fusil d’épaule et on crée une piste effet auxiliaire pour faire de nouveau défiler les modélisations. Cette fois, on cherche quelque chose de plus caractérisé, plutôt ciblé dans le haut du spectre, et qu’on pourrait tenter de distordre en se penchant sur le module préamp du Primavera. On s’arrête sur le mode HR12, qui est apparemment la modélisation d’un appareil Hifi japonais vintage. L’image est très marquée, débarrassée de toutes ses composantes graves ainsi que de sa lourdeur, et les premières réflexions sont assez bondissantes et un peu retardées, malgré un pré-delai pour l’instant réglé au minimum. Ça nous parait parfaitement adapté, mais on a bien évidemment envie de le personnaliser un peu plus. On tente de tordre le signal en rajoutant du drive, le résultat nous plaît, mais les premières réflexions sont maintenant trop jaillissantes. C’est le meilleur prétexte pour essayer le ducking, et ainsi compresser le signal réverbéré avec le signal sec afin de préserver la clarté de la source et donner de la distance et de la profondeur à notre spring. On finit par rajouter un peu de tension aux ressorts pour resserrer encore un peu le spectre harmonique et en lisser la composante tonale. Le résultat est plein de caractère, on entend parfaitement les ressorts qui viennent soutenir parfaitement les aspérités du son de bugle. En faisant défiler les pré-réglages dédiés aux cuivres, on s’arrêtera sur le Dirty Mojo qui enlève l’aspect tendu de la partie, et va au contraire en souligner le côté plus vaporeux, doux et inégal. Il est basé sur le mode SR202 et va chercher la distorsion harmonique des transistors Germanium au lieu des lampes que nous utilisions précédemment.
En dernier lieu, il nous paraissait important de faire un petit clin d’œil à Mr Hammond, et de nous mettre en situation avec un orgue. On s’arrête cette fois instantanément sur le mode Tubby, qui est décrit comme étant la dédicace de l’équipe Pulsar au style de musique Dub vintage. Pour le Dub, on ne saura pas dire, mais ce qui est certain, c’est que c’est bien vintage comme on aime, sans pour autant être trop baveux ni trop agressif. L’ensemble est parfaitement équilibré sans qu’on ait grand-chose à rajouter ou à modifier, donc pourquoi chercher plus loin ? Par zèle, on va juste essayer d’exagérer au maximum la largeur de la spatialisation et la profondeur conférée par le pré-delai, puis on testera de rajouter un peu de ducking pour nettoyer l’espace… Le préréglage Airy Key Space donnera un aspect bien plus doux et psychédélique, sachant qu’il est basé sur le module de réverbe de la fameuse RE201, réputée pour la richesse de ses mediums et son côté extrêmement sombre. En y rajoutant un peu de drive du mode Germanium et en jouant sur le paramètre Excitation à environ 6 ou 7, on assisterait presque à une messe macabre…
Springtime reverb, summer of love
Que dire ? On adore ce plug-in ! Il est beau, bien pensé et bien expliqué par le constructeur. Mais il sonne surtout extrêmement bien. Les fonctionnalités comme le Ducking, la Tension ou la Présence rendent cette spring réverbe très fine, facile à placer dans un mix, agréable à utiliser… Bref, il n’y a rien à redire si ce n’est que, décidément, on aime le printemps !