Quatre ans après la sortie des S5000 et S6000, Akai revient en force sur le marché des échantillonneurs hardware. Avec leur nouveau moteur, les Z4 et Z8 sont les premières machines à franchir le mur du son à 24 bits / 96 kHz. Cela permettra-t-il à Akai de reprendre le flambeau ?
(Test initialement paru en mai 2002)
Concentré ces derniers temps sur l’audio numérique, Akai a délaissé pendant plusieurs années le marché des échantillonneurs, ouvrant ainsi la porte aux concurrents hardware et aux solutions informatiques. Il faut dire que ce marché est arrivé à maturité depuis quelque temps. Peu de nouveautés sont arrivées, soit parce que les produits ne sont que des déclinaisons (E4 E-mu, A5000 Yamaha), soit parce que l’échantillonnage est devenu une fonction des grosses stations de travail (Trinity Korg et K2600 Kurzweil). Mais avec la nouvelle série Z, Akai propose une véritable évolution technologique, grâce à un VLSI maison couplé à un CPU Intel. La machine peut ainsi travailler en 24 bits à 96 kHz, la référence actuelle de l’audio pro. Nous avons testé les Z4 et Z8 (OS 1.03C). Pour plus de clarté, nous faisons référence au Z8, les particularités du Z4 étant reprises en encadré.
Ergonomie réussie mais connectique réduite
Dans son rack 2 unités en alu brossé recouvert d’un panneau bleu flashy, le Z8 tranche avec la couleur crème et la démesure des précédentes productions Akai. Plus concentrée, la façade comporte 8 potentiomètres rotatifs assignables, des touches de mode, une astucieuse molette Jog / Shuttle pour la navigation et l’encodage et deux potentiomètres de volume (sortie et entrée audio). Pour l’édition, on dispose d’un afficheur bleu fluo surmontant 6 touches de fonctions. Malgré une résolution de 248 × 60 points et une belle lisibilité, l’écran est trop petit à notre goût. L’ergonomie est cependant préservée, grâce à la clarté des menus et à des touches astucieuses : « Window » pour ouvrir des fenêtres de paramètres suivant la page menu, d’autres touches pour l’accès direct au sampling, le stockage temporaire en mémoire tampon, le chargement ou la sauvegarde. Bien vu !
Côté connectique, on trouve en façade une prise casque et une interface USB hôte pour connexion à une unité de stockage ou un clavier alphanumérique. Une baie permet de recevoir une unité interne 3,5 pouces, le Z8 étant le premier échantillonneur dépourvu de toute unité de stockage… le floppy a bien vécu ! Sur la façade arrière, on se limite au strict minimum : interface USB pour ordinateur, 4 prises Midi (2 In et 2 Out / Thru), 2 sorties audio, 2 entrées sampling (toutes en jack 6,35 symétrique), une interface SCSI 50 broches half-pitch compatible Ultra, une entrée et sortie S/PDIF, ainsi qu’une entrée Wordclock BNC avec terminaison. Une baie libre permet d’accueillir une carte optionnelle, à choisir entre l’IB-4ADT (2 entrées / 8 sorties ADAT) ou l’IB-48P (8 sorties analogiques symétriques). Bref, on est loin de la richesse de la connectique du S6000 !
Ram record
Le Z8 est un échantillonneur polyphonique 64 voix et multitimbral 128 parties sur 32 canaux Midi. Sa mémoire Ram de 16 Mo peut être étendue à 512 Mo, ce qui constitue un record en la matière ! La machine travaille à une fréquence d’échantillonnage de 44, 48 ou 96 kHz. Le choix est hélas global. En revanche, la fréquence de sortie est indépendante, ce qui facilite la synchro numérique. Les convertisseurs travaillent en 24 bits / 96 kHz, avec suréchantillonnage 64 fois en entrée (A/N) et 128 fois en sortie (N/A). Le son produit est très cristallin et dynamique. A 96 kHz, on obtient une bande passante de 20 Hz – 42 kHz, ce qui est appréciable lorsque la source comporte des fréquences élevées. Un luxe pas toujours nécessaire qui se paie cher… la polyphonie chutant à 32 voix.
Moins radin qu’à l’habitude, Akai livre son joujou avec un CD-Rom qui renferme plus de 750 Mo d’échantillons. Au programme, des sons d’Arp Odyssey, de MiniMoog, une guitare, un B-3, des percussions, des basses, des pianos électriques, une banque GM, des boucles… et un énorme grand piano acoustique stéréo à quatre niveaux de vélocité, généreusement multisamplé sur 235 Mo (!). Merci pour cette banque de qualité honnête. Mais le Z8 est compatible avec tous les anciens modèles Akai, en attendant E-mu et Roland. Avant d’entrer dans le vif du sujet, un mot sur le manuel, très décevant, trop concis et décrivant des fonctions pas encore développées. Le S6000 avait commis les mêmes péchés, déjà très contestables.
Simplification de l’échantillonnage
Le Z8 perpétue la culture de la simplification de l’échantillonnage développée sur la série S6000. Beaucoup d’efforts ont été consacrés à la réduction des étapes laborieuses. Ceci permet notamment de capturer une suite de sons à partir d’un CD Audio suivant un seuil de déclenchement, de les normaliser, les nommer et les assigner à un programme en une seule étape. Bien entendu, tous les réglages classiques avant sampling sont présents, avec affichage graphique des niveaux et des crêtes : source audio, durée, assignation, mode de déclenchement, utilisation des effets… mise à part la fréquence, réglée au niveau global et dont le changement initialise la machine, un comble ! En revanche, la commutation 16 / 24 bits se fait le plus naturellement du monde.
Une fois capturé, le son peut être normalisé, nettoyé et bouclé. Le bouclage dispose d’un affichage graphique avec zoom, deux modes (à l’endroit et alterné) et un crossfade (linéaire, logarithmique, sinusoïdal) avec recherche automatique des points zéro. Le signal peut ensuite être trituré dans tous les sens. Comme pour le S6000, certains traitements sont globaux (normalisation, fusion, mixage, conversion de la fréquence d’échantillonnage et/ou réduction de bits, Timestretch avec mise au tempo, Pitch shift, conversion bidirectionnelle mono – stéréo) et d’autres s’opèrent entre deux points paramétrables (troncature, copie, insertion, effacement, inversion, fondu). Enfin, une fonction permet de définir des portions d’échantillon pour découpage ultérieur. Le Z8 propose d’écouter les versions pré- et post-traitement avant de choisir, merci ! Les échantillons sont sauvegardés au format .WAV, un choix judicieux pour une compatibilité immédiate.
Modulations à l’honneur
Les échantillons sont assemblés en Keygroups au sein de programmes. Chaque Keygroup dispose de traitements de synthèse indépendants et peut contenir 4 samples stéréo, avec réglages séparés de tessiture, crossfade et vélocité. L’architecture sonore d’un Keygroup est basée sur le schéma classique « hauteur, filtre, amplificateur, panoramique ». D’excellente qualité, le filtre dispose de 33 algorithmes très variés allant de 1 à 6 pôles. On trouve les modes passe-bas, passe-haut, passe-bande, réjection, peak, phasers et formant. Mieux, il existe un mode triple connectant 3 filtres 1 ou 2 pôles en série avec courbes de réponse, fréquences de coupure et résonances séparées. Fortiche !
Les modulations sont à l’honneur, grâce à une matrice de 64 cordons. Au nombre de 36, les sources sont constituées de 3 enveloppes, 2 LFO et des contrôleurs Midi (potentiomètres rotatifs, molettes, vélocité, aftertouch, note Midi et des contrôleurs externes). Les 51 destinations sont les paramètres des LFO, les segments d’enveloppe, les fréquences des filtres, leurs résonances, le panoramique… la liste est longue. Les générateurs d’enveloppe sont de type ADSR (amplitude) et multisegments (filtre et auxiliaire). Les LFO disposent de 6 formes d’ondes et peuvent eux-mêmes être modulés en vitesse, délai et profondeur. Enfin, un mode « drum » permet d’assembler des échantillons en kits de percussions de manière aussi simple qu’un programme classique. Une excellente souplesse !
Multitimbres à 128 parties
Les programmes peuvent être assemblés au sein de programmes multitimbraux. Là où le Z8 enfonce le clou, c’est dans sa faculté de gérer, dans chaque Multi, pas moins de 128 parties indépendantes sur 32 canaux Midi séparés. Ah si seulement la polyphonie était de 128 voix ! Pour chaque partie, on peut régler le volume, l’accordage, le panoramique, le statut (mute / solo), la tessiture, le bus d’effet (avec réglage du départ) et la sortie audio.
Il est même possible d’éditer les programmes et les échantillons dans leur contexte multitimbral avec les effets activés. Bien utile, une fonction permet de purger la mémoire des programmes et échantillons qui ne sont pas utilisés en Multis. Le nombre de Multis dépend de la mémoire interne disponible. Au bout du 274ième Multi à 16 canaux, nous n’en avions consommé que 30%… Signalons enfin la présence d’un lecteur Midifile disponible en mode Multi lorsque des morceaux au format SMF sont chargés.
Nouveau processeur d’effets
Le S6000 possédait 2 multieffets et 2 réverbérations. Avec son nouveau processeur d’effets 4 bus travaillant en 24 bits / 96 kHz, le Z8 propose une approche différente. Chaque bus possède un multieffets à 50 algorithmes élémentaires : réverbérations, délais, chorus / flanger / haut parleur tournant, processeurs de dynamique, EQ, distorsions… Les réverbérations disposent de différentes tailles de pièce et de plateau. Leur qualité est identique à celle du S6000, à savoir un peu métallique à haute dose. Au global, le nombre de paramètres n’est pas faramineux, juste l’essentiel. En revanche, pas de modulation dynamique en vue ni d’effets combinés. Ceci dit, il est possible de router la sortie d’un bus vers l’entrée d’un autre et ainsi connecter plusieurs effets en série.
Pour ceux qui ne veulent pas se prendre la tête, le Z8 possède un mode Quick FX, doté de presets classés par résultat espéré : « Dirty », « Distant », « Fat »… tout cela est très clair. Il est même possible de resampler avec les Quick FX et comparer immédiatement les versions originelles et traitées, tout comme avec les effets paramétrés à la main. En mode stéréo, les effets 2 et 4 sont fort logiquement liés aux processeurs 1 et 3. Bref, une bonne surprise que cette section effets même si quelques améliorations sont attendues.
Une nouvelle référence
Le Z8 représente un progrès important par rapport à ses aînés. Certes, la machine n’est pas exempte de défauts, à commencer par sa connectique limitée, son écran réduit, quelques exotismes manquants (effets tordus, arpégiateur) ou ses spécifications promises mais pas disponibles au lancement. On attend également l’adaptation du logiciel d’édition Ak.sys. Mais avec ses 24 bits / 96 kHz, son ergonomie, sa qualité audio, sa section synthèse, ses performances et sa gestion disque souple, le Z8 devrait s’imposer sur le marché de l’échantillonnage comme la nouvelle référence.