Annoncé début 2010 par Radikal, l’Accelerator débarque enfin sur le marché du synthé virtuel analogique. Un VA de plus, diront certains, mais pour quoi faire ? En réalité, il est beaucoup plus que cela…
Initiée par Clavia en 1995, la synthèse virtuelle analogique (VA) est un concept surfant sur le revival des synthés vintage, leur son et leur prise en main immédiate. Au programme, deux oscillateurs basiques avec synchro, un bruit blanc, un filtre passe-bas, deux enveloppes, un portamento et le contrôle des paramètres via Midi… le tout en prise directe grâce à des commandes dédiées et un écran relégué à l’affichage des numéros de programmes. Le concept fait alors l’objet d’une guerre sans merci : Japonais, Américains, Allemands et même Français emboîtent le pas aux Vikings rougeoyants dans cette conquête du Nouveau Monde. L’architecture de base évolue, les oscillateurs se musclent, les filtres se multiplient, les modules s’interconnectent… et le son dans tout ça ? Faute de rivaliser avec celui des ancêtres sur le plan qualitatif, il fait dans la diversité, mais démontre assez rapidement les limites du numérique dès lors qu’on passe aux modulations audio : aliasing, artefacts métalliques, sifflements désagréables. En même temps, l’ergonomie souffre à nouveau, les pages menus tentant de reprendre la main sur les commandes directes qui ne suivent plus. En parallèle, le tout virtuel est passé par là, mais ne fait pas mieux, ni en audio, ni en ergonomie, ni en revenu pour ses concepteurs. Dans ce contexte, il semble aujourd’hui suicidaire de sortir un instrument VA haut de gamme. Les grandes firmes restent en retrait et ce sont les artisans qui montrent le chemin : en attendant le Solaris de John Bowen désormais en livraison, c’est l’Accelerator qui met le turbo et le double en cette fin d’année. Va-t-il nous coller au siège ?
Deutsche Qualität
Au premier contact, l’Accelerator inspire confiance. La construction métallique, les flancs en bois, la robe noire et anthracite, la sérigraphie, les molettes, la position de la connectique et le clavier 5 octaves ne sont pas sans rappeler le Virus Ti. La comparaison s’arrête toutefois là. La partie gauche de la façade est dédiée à l’édition des paramètres de synthèse et du séquenceur : pour cela, une matrice de 8 encodeurs et 8 poussoirs permet de manipuler une bonne quinzaine de lignes de paramètres, suivant le mode d’édition. Au centre, on trouve un LCD monochrome 128 × 64 pixels avec rétroéclairage RGB (7 couleurs au choix, il y en a pour tous les goûts). Il est facile à lire, avec une luminosité correcte et un contraste réglable. Il est entouré d’une section de navigation dans les menus : encodeur [Page] permettant la navigation dans les différentes pages menu (affichées sous forme d’onglets) + 2 boutons permettant de naviguer verticalement au sein d’une page + 3 encodeurs dont le rôle change suivant la page / ligne en cours d’édition ; juste à droite de l’écran, on trouve les boutons de mode d’édition (System, Performance, Arp), quelques encodeurs dédiés (volume de bus d’effets, départ / retour effets et tempo), ainsi que des boutons de transposition d’octave (mais pas de transposition directe par demi-ton…). Les 11 principaux encodeurs (les 8 de gauche et les 3 sous le LCD) sont programmables en mode performance, pour touiller en live ce que bon nous semblera.
La partie droite du panneau avant est dédiée à la sélection des sons (directe ou par catégorie) et des parties multitimbrales : mode de jeu (single, split, dual, multi), sélection de la banque, sélection du programme ; il y a par ailleurs une fonction Randomize et des boutons Chain / Next (nous y reviendrons). À gauche du clavier, on trouve les 2 molettes traditionnelles, secondées par 2 boutons permettant de lancer des modulations en temps réel, grâce à une matrice sur laquelle nous passerons un peu de temps plus tard. Le clavier 61 touches semi-lestées est sensible à la vélocité (initiale et relâchement) et à la pression par canal ; nous avons trouvé la réponse en dynamique de ce clavier excellente, avec un bon équilibrage (semi-lestage des touches), un rebond agréable et une profondeur de touche confortable ; la réponse en pression peut toutefois entrer vite en action lorsqu’on joue un peu lourd et si la courbe de vélocité est réglable en mode System (angles gauche / droit, intensités gauche / droite), nous avons suggéré au concepteur d’ajouter une courbe globale de réponse en pression dans un futur OS. L’ensemble de la connectique, y compris la prise casque, est relégué à l’arrière de la machine et assez bien ancrée : borne secteur 3 broches (alimentation interne, merci !), 2 entrées ligne symétriques TRS (gain ajustable par logiciel interne), 4 sorties audio (2 paires stéréo), une sortie optique S/P-Dif 24 bit / 96 kHz, un port USB Midi plug-and-play (mais pas audio), 2 prises pédales (interrupteur ou continu, mais sans inverseur de polarité) et un trio Midi. En sous face, une trappe permet d’accueillir 2 cartes d’extension de polyphonie.
Speziale Ergonomie
L’Accelerator est basé sur des DSP et démarre en moins de 5 secondes. Nous en avons testé la version 1.5 de l’OS, qui s’est révélée très stable. L’ergonomie, originale, nous a toutefois un peu déroutés. La programmation matricielle est présente à toutes les sauces : en édition directe (partie gauche du panneau), mais aussi dans les menus. Le concepteur a toutefois pris soin de connecter les pages menus aux paramètres édités en direct, les 2 éditeurs se suivant parfaitement. Toutefois, comme tous les paramètres ne sont pas directement accessibles, il faut donner de l’encodeur (les 4 autour de l’écran) et du curseur de défilement vertical pour atteindre certaines valeurs (les enveloppes notamment). Tous les rotatifs sont des encodeurs lisses avec fonction poussoir (pour entrer dans un sous-menu, lancer un éditeur ou générer une fonction). Il y a donc des ramifications qu’il convient de bien maîtriser pour ne pas se perdre. Par exemple, lorsqu’on est dans une page menu en train d’éditer une partie d’un son dual, le fait de sélectionner l’autre partie rebascule le menu au début, ce qui nécessite de replonger dans la bonne page / sous-page. Qui plus est, le choix d’une partie à éditer coupe l’autre, ce qui impose de sélectionner la partie dite « Master » pour entendre l’édition de la partie précédente dans son contexte. De même, pour sélectionner un son, il faut appuyer sur le bouton [Bank], puis sur une des touches [0]-[9], puis sur le bouton [Program], puis de nouveau sur une des touches [0]-[9]. Cela aurait été plus simple en appuyant consécutivement sur 2 touches numériques. Heureusement, un mode de sélection par catégorie permet de s’y retrouver et un mode Chain permet de préparer jusqu’à 100 configurations live (Song Chain) à incrémenter avec la touche [Next] ou une pédale ; dans une Song Chain, on peut stocker jusqu’à 10 enchaînements de performances / programmes, avec les sons à utiliser, le réglage des commandes en temps réel et le paramétrage des parties internes / Midi.
Certaines fonctionnalités sont très originales : premier exemple, l’encodeur [Page] fait office de zoom, dans l’affichage des pages, lorsqu’on appuie dessus (vue de tous les paramètres de la page, vue de 9 paramètres avec leurs valeurs, édition détaillée d’un paramètre ou affichage graphique) ; autre exemple, maintenir un bouton enfoncé appelle la plupart du temps une page d’aide bien précieuse ; autre exemple encore, l’écran affiche graphiquement et en temps réel les formes d’ondes et des courbes d’enveloppes (mais pas la réponse des filtres) ; toujours au rayon des exemples originaux, la fonction Randomize crée automatiquement des sons en mixant les paramètres de différents programmes d’une catégorie donnée, puis les nomme en sélectionnant au hasard des mots dans une base de données intégrée de substantifs et d’adjectifs ; les résultats sont très souvent directement exploitables. De même, l’Accelerator permet d’enchaîner ses programmes mono ou bitimbraux sans couper le son, puisqu’il est doté, comme nous le verrons, de 4 bus d’effets alors qu’il n’en utilise que 2 dans ces modes. Au final, l’ergonomie n’est pas mauvaise en soi, juste très différente des autres machines que nous avons eues entre les mains jusque-là. Après un certain temps d’acclimatation, l’Accelerator se révèle même extrêmement souple, peu de synthés permettent en effet d’éditer précisément les sons dans leur contexte multitimbral, alors que l’arpégiateur tourne et qu’on modifie une séquence en temps réel, le tout sans interruption !
Mur du son
Le parcours des quelques centaines de sons livrés avec la machine démontre immédiatement une grande variété de timbres, allant bien au-delà des synthés VA concurrents. Nous avons particulièrement apprécié la grosse patate sur les basses, la largeur des nappes (en grande partie liée aux effets internes d’ensemble, excellents), le caractère FM bien trempé de certains sons, la polyvalence des orgues (profitant des 3 oscillateurs, des 2 filtres multimodes, de l’attaque des enveloppes et de l’effet Leslie intégré), les effets spéciaux effrayants (tirant parti des modulations audio, de la matrice de modulations et des effets), les percussions « analogiques » bien punchy et les nombreuses lignes arpégées ou séquencées ; mais ce qui nous a le plus bluffés, ce sont certains sons de cordes pincées et d’instruments à vent, basés sur le filtre à feedback intégré (String Filter), dérivé d’un modèle de type Karplus-Strong, apportant un caractère organique indéniable.
Globalement, le son est large, ample, gros, détaillé… les niveaux de sortie sont très élevés (+6 dB) et la patate est assurée par un limiteur que l’on peut activer sur les bus audio. Les EQ paramétriques permettront à chacun d’équilibrer le son suivant ses goûts personnels. Ce n’est que dans les octaves supérieures des programmes utilisant à outrance les modulations audio que l’aliasing apparaît, plus tardivement que sur la plupart des synthés numériques qui utilisent des ondes riches en harmoniques. Lorsqu’on manipule les encodeurs, la prise est directe, la réponse est fluide, les paramètres cruciaux étant codés avec précision (14 bits via Midi). Nous avons vu que le jeu live était le point fort de l’Accelerator, grâce à un workflow continu et un certain nombre de commandes en temps réel. Il en est une dernière très originale sur un synthé : la puce d’accélération, empruntée à certains portables et mobiles, capteur qui mesure en 3D l’assiette du synthé dans l’espace et la traduit en 2 sources de modulations (axes transversal et longitudinal) ; réservée à ceux qui n’ont pas peur de pencher les 9 kg de leur synthé dans tous les sens ou qui se prennent pour Keith Emerson light.
Les exemples audio ci-dessous sont choisis pour démontrer les différentes spécificités de l’Accelerator abordées lors du test :
- Dans « Blowjob », le souffle de la flute de pan est simulé par le String Filter intégré, ce qui permet un rendu bien plus réaliste qu’un simple bruit filtré. La vélocité agit sur ce filtre complexe et original via la matrice de modulation
- « Prends-le » est un son basique réchauffé aux effets phaser et flanger interne. Un bon système d’écoute permet d’apprécier les basses bien rondes
- « Du balai » est un son d’ouverture de filtre assez proche du grain des poly Oberheim des années 80 (on a au studio un OBX, un OB8 et un Matrix-12 pour comparer)
- « Arp Ram Dam », des arpèges aléatoires obtenues dans le mode séquenceur
- « Live Seqz » illustre le jeu en temps réel sur le séquenceur à pas. Deux sons sont empilés en couche et utilisent des lignes de séquences différentes. Le même accord est maintenu mais les pas sont activés / coupés en direct, les sens de lecture sont modifiés pour chaque ligne et les fréquences de filtre triturées
- « Are Are » est une copie de son PPG typique, obtenue par interaction des oscillateurs et filtrage intensif, prouvant que l’Accelerator est bien plus qu’un simple VA
- « Lows » démontre à ceux qui ont un bon système d’écoute la rondeur des basses façon Moog et la qualité du filtre en mode passe-bas 4 pôles
- « Feumeu » est un ensemble de sons typiques FM, joués sans interruption, permettant au passage de démontrer les enchaînements sans interruption dont est capable la machine
- « Tech yes » reprend des sons type TB-303 en jouant sur la pente des filtres
- « Arpoly » met en scène l’arpégiateur polyphonique sur la partie basse et lead, alors que le second canal est utilisé pour les strings. Le grain est assez analo dans cet exemple et le spectre agréable sur toute la tessiture
- « Anana split » est un son splité dont la largeur est obtenue avec les effets internes, notamment le chorus qui ne sonne pas du tout numérique (nous avons comparé avec des chorus analo Roland des années 70)
- Dans « Eduardo », le lead est contrôlé par l’aftertouch par canal (départ effets et synchro), qui n’agit pas sur la nappe
- « Ifex » démontre quelques interactions d’oscillateurs (FM, modulation en anneau, synchro) sans aliasing notable ; les programmes sont enchaînés sans interruption des effets, pourtant très différents d’un son à l’autre
- « Mad Fermeture » reprend un son poly vintage typique, clin d’œil à Supertramp (mais en beaucoup plus bourrin ici, on ne se refait pas, avec un son plutôt typé Oberheim que la délicate string machine utilisée à l’époque)
- Blowjob00:45
- Prends le00:34
- Du balai00:34
- Arp ram dam01:17
- Live seqz01:52
- Are Are00:22
- Lows00:56
- Be free00:45
- Feumeu00:50
- Tech yes01:08
- Arpoly00:54
- Anana split00:54
- Eduardo00:38
- Ifex01:00
- Mad fermeture00:27
Hautes fréquences
Dans sa version de base, l’Accelerator est un synthétiseur numérique polyphonique 8 voix bitimbral. La mémoire interne renferme 500 sons simples, 300 performances, 100 enchaînements et 60 séquences. La génération sonore est basée sur une synthèse soustractive très élaborée, intégrant plusieurs filtres et pas mal de modulations audio. Une seule voix est générée par 3 oscillateurs, un générateur de bruit et une modulation en anneau. Les oscillateurs sont à ondes continues, passant sans à-coup par les ondes sinus, triangle, dents de scie et rectangle. Un paramètre modulable, TLM (Time Linearity Modulation – cf. schéma), permet d’en modifier le contenu harmonique dans le temps ; ainsi on pourra jouer sur la largeur d’impulsion de l’onde rectangle ou rendre trapézoïdale l’onde dents de scie. Les oscillateurs disposent d’un tas de possibilités d’interaction : synchronisation de 1 par 2, modulation en anneau de 2 par 3 et modulation de phase de 1 ou 2 ou 3 par 2 ou 3. Ce dernier cas correspond à une FM complexe avec niveaux de modulation séparés (donc 6 valeurs) et 2 boucles de feedback (2 -> 2 et 3 -> 3).
Chaque oscillateur peut être accordé par demi-ton et en finesse, dispose d’un décalage de phase (avec position free running, comme sur un VCO, mais pas de simulation de drift), d’un battement, d’un volume et d’un suivi de clavier (permettant de modifier le nombre de demi-tons par octave, en plus ou en moins). Arrêtons-nous un instant pour expliquer la différence entre un detune (comme sur la plupart des synthés) et un battement (comme sur les Moog Taurus par exemple) : un detune produit un désaccordage qui varie en fonction de la fréquence des notes jouées alors qu’un battement produit un désaccordage constant sur toute la tessiture. Poursuivons : l’onde de l’oscillateur 1 peut, par ailleurs, être inversée, ce qui permet des effets de phase avec un autre oscillateur non inversé légèrement désaccordé. Le générateur de bruit est plus complexe que ce qu’on trouve habituellement sur les VA, puisqu’il dispose d’un filtre multimode résonant séparé (passe-bas, passe-haut, passe-bande, réjection en 12 et 24 dB / octave) et d’un suivi sur la fréquence de coupure. C’est idéal pour la génération de sons de percussions à la sauce analogique, bravo ! Avant d’attaquer les sections suivantes, signalons dès à présent que l’Accelerator peut déclencher ses voix de différentes manières : 3 modes de priorité de note, redéclenchement des enveloppes, legato, portamento, glissando…
Filtres boostés
L’Accelerator offre 2 filtres multimodes résonants principaux et 1 filtre à feedback intermédiaire (String Filter). Les niveaux des 5 sources sonores (3 oscillateurs + modulation en anneau + bruit) peuvent être dosés indépendamment vers chaque filtre, ce qui nous fait 10 départs séparés pré-filtres, rien que ça ! Ceci explique en partie l’énorme potentiel de la machine sur les nappes en tout genre. Par contre, on ne peut pas (encore) router les signaux externes, quel dommage ! Là aussi, chaque filtre principal offre les modes passe-bas, passe-haut, passe-bande, réjection en 12 et 24 dB / octave. La résonance est auto-oscillante et plutôt sifflante. C’est plus agressif et moins musical que les filtres analogiques vintage auto-oscillants des machines du studio, mais on salue l’absence de bridage à ce stade. La fréquence de coupure dispose d’un suivi de clavier bipolaire et peut être modulée par une enveloppe, de manière bipolaire également (l’enveloppe 3 est pré-assignée au premier filtre et l’enveloppe 4 au second). Enfin, on peut doser la sortie du premier filtre vers le second, ce qui permet de passer du réglage parallèle au réglage série tout en douceur. Là encore, chapeau pour cette section filtres, qui fait de l’Accelerator un concurrent de poids du Waldorf Q dont il reprend une partie de la philosophie des oscillateurs et des filtres.
Mais le Radikal va beaucoup plus loin dans ce domaine, puisqu’il propose un filtre tout à fait original : le String Filter. Il s’agit ni plus ni moins d’une ligne à retard qui est mise en auto-oscillation à fréquence audio, générant des transitoires à hautes fréquences dans les premiers instants du son. On peut ainsi imiter le comportement de cordes pincées, de cordes frottées, voire de souffles (en injectant un peu de bruit dans le filtre, en inversant la phase de la boucle de feedback et en réglant parcimonieusement les enveloppes et les niveaux). Les paramètres concernent l’accordage de la ligne à retard, l’injection à partir du premier filtre principal vers le second (avec possibilité d’inverser les phases), le feedback, l’atténuation des basses fréquences, l’atténuation des hautes fréquences, l’autobend initial (simulant une variation de pitch dans la période transitoire, comme sur une corde pincée) et le temps de glide. En fin de traitement, la sortie audio de chaque filtre principal peut être dosée en volume et en panoramique dans la section ampli. Le volume est alors contrôlé par un Trim, la vélocité et 2 enveloppes (1 et 2) assignées « dans le dur » à chaque canal d’ampli. Le signal stéréo ainsi constitué peut être sculpté une dernière fois par un EQ 3 bandes paramétriques (dont les fréquences balayent l’ensemble du spectre, c’est assez rare pour le signaler), puis s’en va rejoindre la section effets où il pourra passer sa tenue de soirée avant de sortir.
Tout ce qui bouge…
Comme nous l’avons déjà vu, pour ceux qui suivent, l’Accelerator dispose d’un paquet de sources pour moduler les sons. À commencer par 6 enveloppes AHDSR (dont 2 sont pré-assignées aux filtres et 2 figées vers les VCA, pour ceux qui ne suivent pas). Plutôt rapides à la détente (elles produisent un léger clic lorsque les attaques sont à zéro, les déclins faibles et le maintien bas), leurs temps et niveaux peuvent eux-mêmes être modulés, grâce à la matrice dont nous allons bientôt parler. Par ailleurs, on trouve 4 LFO, dont 3 polyphoniques (phase indépendante par voix) et 1 paraphonique (commun à toutes les voix d’une partie). Chaque LFO dispose de formes d’ondes continues comme les oscillateurs (127 positions passant par les sinus, triangle, dents de scie, rectangle, plus une position aléatoire) ; un affichage graphique de la forme d’onde aurait été appréciable. On peut en régler la vitesse et la phase (pour les 3 LFO polyphoniques, avec mode free running). La profondeur des LFO peut être contrôlée par la molette de modulation, la pression et la pédale d’expression, alors que la vitesse peut être contrôlée en Midi ou via la molette de modulation. Il manquerait, pour être complet, un fondu et un délai, chose que l’on peut réaliser avec une enveloppe dans la matrice, parlons-en tout de suite…
Pour chacune des voix de polyphonie, l’Accelerator dispose d’une matrice de modulation 32 points (cf. schéma). Chaque point dispose d’une source (à choisir parmi 50 paramètres), une destination (91 paramètres) et un niveau de modulation bipolaire. Parmi les sources, on trouve les LFO (valeur absolue ou réelle), les enveloppes (valeur réelle ou avec Sustain calé à zéro), tous les contrôleurs physiques (molettes, pédales, encodeurs, boutons, vélocité initiale, vélocité de relâchement, pression), le tracking clavier, les 3 lignes du séquenceur (cf. ci-après), un générateur aléatoire et les fameux 2 axes d’accélération, calculés suivant l’inclinaison spatiale du synthé. Parmi les destinations, citons les formes d’ondes continues de chaque oscillateur, les TLM, toutes les modulations de phase, les niveaux pré / post filtrage, les coupures, les résonances, les LFO (vitesse / profondeur), les paramètres du String Filter, les temps de chaque enveloppe (séparément)… Point particulier, les niveaux de modulation des 32 points peuvent eux-mêmes être des destinations, ce qui permet de créer des modulations de modulations, très bien vu ! Il existe une seconde matrice de modulation agissant sur toutes les voix d’une partie (bus ou effets). Celle-ci offre 8 points, 23 sources (LFO global, certains contrôleurs physiques) et 11 destinations (niveau / vitesse du LFO global, balance globale des effets, balance de chaque effet, vitesse du Leslie). Sur un Accelerator équipé d’une extension voix et du logiciel de modélisation d’orgues, le volume du click et de la percussion sont prévus parmi les destinations. Que manquerait-il à cette excellente section pour devenir extraordinaire ? Un petit générateur de rampe et un petit générateur de retard parmi les sources, plus de paramètres d’effets parmi les destinations et quelques fonctions mathématiques pour mélanger plusieurs modulations.
… et qui s’agite !
Fort de l’expérience de son concepteur sur les produits Quasimidi et le Spectralis, l’Accelerator se devait d’offrir un arpégiateur et un séquenceur dignes de ce nom. En la matière, nous allons voir qu’il ne déçoit pas, bien au contraire ! L’arpégiateur est un modèle polyphonique programmable sauvegardé au sein de chaque programme. Il se synchronise à tout ce qui tourne en tempo dans la machine, ou via Midi. Un mode Hold permet de tenir le motif, en ajoutant dans sa mémoire tampon soit les notes entrées uniquement nouvelles, soit toutes les notes entrées y compris les doublons. On peut régler la direction de reproduction : haut, bas, haut + bas, haut + bas avec répétition des notes extrêmes, aléatoire, dans l’ordre de jeu ou en séquence. Dans ce dernier mode, c’est le séquenceur qui pilote la reproduction des notes (voir ci-après). On peut également paramétrer la résolution, la longueur du motif, le temps de porte, la répétition des notes (1 à 4 fois), l’étendue (1 à 4 octaves) et la réponse en vélocité. En mode séquenceur d’arpèges, on peut créer des motifs utilisateur polyphoniques 11 voix sur 32 pas, en définissant le sens de lecture, en transposant les motifs… le tout en temps réel !
En parallèle, l’Accelerator offre un séquenceur à pas « type analogique », là encore orienté temps réel. On dispose de 32 pas polyphoniques avec 3 lignes de modulations assignables via le clavier, les 8 encodeurs et les 8 boutons de la matrice d’édition située en partie gauche du panneau avant. Chaque pas est activable / mutable / modifiable en temps réel. Pour chacun de ces pas, il convient de rentrer la(les) note(s) à jouer : numéro(s), vélocité(s) et durée(s) ; cela est fait en temps réel, en maintenant l’encodeur du pas-cible enfoncé et en jouant la note ou l’accord au clavier. Ensuite, on crée les 3 lignes de modulations, dont les destinations sont affectées via la matrice ; les encodeurs servent alors à modifier la valeur de ces 3 lignes pour chaque pas, le tout pendant que la séquence tourne. De même, le sens de lecture de la séquence peut être modifié en direct (en avant, en arrière, en alternance ou de manière aléatoire), tout comme le nombre de pas, la résolution et le temps de porte. Le motif peut être transposé en temps réel, avec un certain nombre de répétitions (1 à 4) et d’auto-transpositions (suivi de clavier). Ah, si seulement on pouvait créer des kits de percussions et leur assigner un motif ! Les séquences ainsi créées sont sauvegardées dans une mémoire de 60 emplacements. Dans chaque Performance et Song Chain, on peut charger une séquence et sauvegarder son numéro, ce pour chaque partie multitimbrale. Au final, voici une section très puissante orientée temps réel, un des atouts indéniables de l’Accelerator.
Hyper espace
La section d’effets de l’Accelerator est particulièrement réussie et fait partie intégrante du grain de la machine. Elle est, comme nous l’avons dit, en partie responsable de la variété et de la largeur des sons. Elle permet également le traitement de signaux externes connectés aux entrées audio (niveaux micro et ligne, mono ou stéréo). On dispose de 4 bus d’effets stéréo dont 2 utilisés directement pour les parties sonores et 2 autres pour les transitions de son sans interruption. Avec des extensions de voix, les 4 FX seront utilisables en même temps, au détriment des transitions sans à-coup. Un bus stéréo comprend une chaîne d’effets avec des balances Wet / Dry pour chaque unité d’effet. Il n’est pas possible de modifier le routage (alterner parallèle / série) ou l’ordre des effets. En entrée, on règle les niveaux de la partie assignée (volume et Trim), le limiteur (pour compresser à mort les niveaux), le Trim du bus en entier, le départ vers la sortie principale, le départ vers la sortie auxiliaire et le gain des entrées audio. Une fenêtre graphique permet d’observer le niveau des signaux des bus en temps réel (avec des lignes de repère à +6dB, 0 dB et en deçà).
Passons maintenant aux effets, dont 7 peuvent tourner en même temps dans chaque bus : disto, délai, phaser, Leslie, chorus, réverbe et EQ. La distorsion offre 7 paramètres : dosage Wet /Dry, gain préampli, gain de sortie (important pour atténuer le signal), EQ paramétrique 1 bande (types Peak, Hi Shelving, Low Shelving, Lowpass, Highpass, Bandpass, Notch, Allpass). Le délai de modulation va plus loin qu’un simple délai, puisqu’il est capable de générer des effets de flanger et de doublement ; les paramètres éditables concernent le dosage Wet /Dry, le temps, le feedback, la largeur stéréo, le temps de pré-délai, le feedback de pré-délai, la vitesse de modulation (avec synchro Midi), la profondeur de modulation, les valeurs de l’EQ paramétrique de sortie (type, FC, gain, Q) et les valeurs de l’EQ de feedback (idem). Vient ensuite le phaser, un ensemble de filtres Allpass dont les fréquences sont modulées en simultané par un LFO ; les paramètres disponibles sont le dosage Wet /Dry, la vitesse, la fréquence la plus basse, la fréquence la plus haute, la largeur stéréo et le feedback. Le simulateur de Leslie, pour sa part, simule un effet à deux haut-parleurs tournants (graves et aigus), avec pas moins de 15 paramètres disponibles, parmi lesquels les vitesse / accélération / décélération / largeur stéréo / gain de chaque haut-parleur et la fréquence de Crossover entre les deux. Vient le tour du chorus, tout particulièrement réussi et appréciable sur les sons un peu froids : celui-ci simule l’effet de 4 lignes à retard stéréo modulées : on peut modifier le dosage Wet /Dry, la vitesse de modulation, la profondeur, le temps de délai moyen, l’atténuation des hautes fréquences et la largeur stéréo.
Arrive ensuite une réverbération de type Room : on y définit le dosage Wet /Dry, la taille de la pièce, l’atténuation des hautes fréquences, l’étendue stéréo, l’égalisation du signal réverbéré (EQ paramétrique avec 8 types de réponse) et le temps de pré-délai. Cette réverbe, sans être transcendante, est toutefois largement utilisable si on atténue un peu les hautes fréquences. Enfin, un EQ paramétrique 1 bande vient clôturer le spectacle ; il est placé en série et offre les mêmes 8 types de réponse que précédemment et jusqu’à 3 paramètres modifiables. Nous avons remarqué un petit bug sur le délai de notre Accelerator : lorsque le niveau individuel Wet / Dry du délai est à zéro, il persiste un léger délai audible ; ce n’est pas trop grave, car le phénomène disparaît si on coupe directement le délai (Bypass). Au final, il manque à cette section déjà sophistiquée un vocodeur et des possibilités de routage un peu plus complexes, comme nous l’avons déjà indiqué. Signalons pour terminer que les effets sont sauvegardés avec les programmes, mais ça on s’en serait douté.
Multivitaminé
En mode Performance, on peut sauvegarder le mode de jeu (single, split, dual, multi) ainsi que tous les paramètres sonores pour chaque partie multitimbrale, y compris les paramètres d’effets et d’arpégiateurs. La mémorisation est gérée indépendamment des 500 programmes de base, ce qui signifie qu’un Accelerator équipé d’une extension de voix (et dont la multitimbralité passe ainsi de 2 à 8 parties) peut sauvegarder jusqu’à 2400 programmes additionnels dans ses 300 performances. Une partie est constituée d’une zone avec son propre mode de jeu (local et/ou externe via Midi), sa tessiture, sa transposition (par demi-ton), sa fenêtre de vélocité, la transposition du séquenceur, ses canaux Midi (entrée et sortie), l’envoi et la valeur de certaines commandes Midi (banque, programme, volume, panoramique), la reconnaissance et l’émission de certains contrôleurs (pédale de Sustain, molette de modulation). En mode multitimbral, l’arpégiateur et le séquenceur sont également multitimbraux (2 à 8 parties selon les options installées), ce qui est une excellente nouvelle. Nous serons toutefois a priori limités à 4 bus d’effets stéréo quelles que soient les options de voix installées…
C’est en mode Performance que l’on peut définir la partie éditable par défaut et assigner les 11 encodeurs (les 8 de la matrice d’édition et les 3 sous l’écran) à des paramètres à contrôler en temps réel. Chaque encodeur peut contrôler une partie et un paramètre différent ; l’Accelerator est livré avec des gabarits ; l’un d’entre eux assigne les volumes des 8 parties aux 8 encodeurs de la matrice d’édition. Le mode Performance est donc le mode privilégié pour l’utilisation de l’Accelerator en clavier de commande, avec 8 zones indépendantes en émission / réception. Pour parfaire ce mode, Radikal a eu l’idée, plutôt que de fonctionner directement avec des canaux Midi In / Out sur les parties, d’utiliser des définitions Midi. Au lieu d’affecter des canaux Midi à une partie (en entrée ou en sortie), on définit des canaux internes ; c’est en mode System qu’on « reconnecte » canaux internes et canaux Midi ; cela est utile, par exemple, lorsqu’on ajoute à son Setup un synthé capable de ne recevoir que sur un canal Midi fixe (genre un synthé vintage midifié de la première heure) : on n’aura pas besoin de reconfigurer les canaux Midi dans toutes les performances utilisant ce synthé, mais simplement de définir à quel numéro interne doit être « reconnecté » l’unique canal Midi sur lequel fonctionne ce synthé ; autre possibilité intéressante de ce mode définition Midi, la conversion des messages de changement de banques / programmes; quel que soit le mode de fonctionnement des synthés raccordés (en MSB ou en MSB / LSB). Pas bête !
Evolution de l’espèce
L’Accelerator est promis à un bel avenir, si l’on en croit son géniteur (voir interview en fin de test). Sont déjà en cours de production des cartes d’extension de polyphonie et multitimbralité, déjà annoncées. Chaque carte ajoute 12 voix de polyphonie et on peut en installer 2 dans une trappe prévue à cet effet sous le synthé, pour un total de 32 voix, ce qui devrait suffire. L’ajout d’une seule carte rend déjà la machine multitimbrale sur 8 canaux. En outre, l’Accelerator autorise l’accès à ses 4 bus stéréo d’effets en même temps, au détriment des transitions de son sans coupure. On aurait préféré que les cartes ajoutent des bus d’effets, mais ce n’est apparemment pas le cas. L’autre avantage d’ajouter une carte additionnelle, c’est l’ouverture aux algorithmes de synthèse supplémentaires, telle la modélisation d’orgues à roues phoniques, déjà présentée à la MusikMesse de Frankfort ce printemps. Il s’agit d’un moteur tout à fait indépendant de la synthèse actuellement embarquée, offrant une polyphonie totale sur les 61 notes du clavier. Mais nous n’en savons pas plus pour le moment…
Nos conversations cordiales avec Jörg Schaaf ont aussi permis d’échanger sur un certain nombre d’améliorations ou fonctionnalités nouvelles, certaines déjà portées sur sa liste de développement. Cela ne constitue en aucun cas un engagement de sa part sur une disponibilité ; de plus, cela ne veut pas dire que certains autres points de progrès mentionnés ici ne soient pas déjà en développement. Voici donc ce qui peut être évoqué :
- Routage des entrées audio vers les filtres
- Modulation en temps réel des paramètres d’effets (autres que les départs effet)
- Affichage graphique de la forme d’onde des LFO, comme c’est le cas pour les oscillateurs
- Transposition du clavier globalement ou par partie à la volée, en appuyant sur un encodeur et une touche du clavier
- Réglage global de la sensibilité de l’aftertouch, en plus du réglage par performance déjà présent
- Indicateur de pages menu qui nécessitent de dérouler l’écran verticalement (ça va être difficile, car les écrans sont déjà bien chargés…)
Conclusion
L’Accelerator est une machine au départ un peu intrigante, mais au final très attachante, une fois que l’on en a compris la philosophie. Elle est capable de produire des textures synthétiques d’une grande variété sonore, au caractère tantôt analogique, tantôt numérique, à l’aise dans beaucoup de domaines : basses, nappes, pianos électriques, cuivres, orgues, cordes, vents, percussions… elle s’appuie pour cela sur des sections d’oscillateurs, de filtres, ded modulations d’et effets d’une très grande qualité, qui vont souvent bien au-delà de ce que la plupart des autres synthés VA actuels proposent. Les quelques reproches faits çà et là sont tout à fait acceptables et le concepteur s’est montré très ouvert aux suggestions d’amélioration. Très à l’aise en studio, l’Accelerator offre une orientation temps réel qui le prédestine à la scène, au direct, à l’improvisation… Bref, un véritable instrument capable de donner un grand coup d’accélérateur à la créativité !
Interview de Jörg Schaaf, concepteur de l’Accelerator
Pendant le test de l’Accelerator, nous avons pu échanger librement avec Jörg Schaaf, son bouillonnant concepteur. Nous avons évoqué un certain nombre de points, dont les mises à jour sur lesquelles il travaillait. Qu’il soit remercié pour sa franchise, son ouverture d’esprit et son implication.
AF : Quels sont les temps forts de ton parcours ?
Jörg Schaaf : Je suis tombé amoureux des synthés en écoutant ELP, Pink Floyd et Tangerine Dream dans les années 70. J’avais l’habitude de trainer au rayon synthés d’un magasin de musique local jusqu’au jour où ils m’ont demandé de travailler pour eux. Lorsque le Midi est apparu dans le monde des synthés, j’ai été littéralement subjugué par cette possibilité de contrôler plusieurs machines avec un ordinateur. À cette époque, peu de revendeurs étaient à l’aise avec la MAO. Je m’étais déjà fait la main avec des softs C-Lab sur Commodore 64 et plus tard sur Atari ; du coup, je suis rapidement devenu l’un des meilleurs revendeurs C-Lab, même dans cette petite ville où était situé le magasin.
Un jour, deux types de chez Quasimidi sont entrés et m’ont acheté 3 MT-32 à un prix spécial pour faire du développement dessus. Nous avons eu des échanges très intéressants sur les spécifications d’un kit d’extension pour l’OS du MT-32 ; j’ai alors vendu ce kit en exclusivité pendant un bon moment et ça n’a pas trop mal marché. Mais Quasimidi a véritablement percé avec le développement de cartes de styles pour claviers Roland. Cela a élevé l’entreprise à un niveau lui permettant alors de développer des instruments de musique. Ils m’avaient engagé dans l’intervalle et nous avons sorti le Quasar en 1994. Quasimidi voulait combler un vide : produire des synthés numériques spécialisés pour les musiques Techno et House ; la QM-309 et le Raven ont ainsi rencontré un beau succès.
Radikal Technologies était le distributeur américain pour Quasimidi et quand Quasimidi a jeté l’éponge, ils m’ont engagé pour développer leurs propres produits. Nous avons sorti le SAC-2K in 2000, une surface de contrôle pour la MAO. Ce produit était très avant-gardiste et nous avons eu du mal à le faire intégrer à un niveau pro par les éditeurs de logiciels musicaux. Par chance j’ai pu convaincre Radikal de développer quelque chose qui ne dépende pas de la bonne volonté d’autres sociétés. Ce vécu avec les éditeurs m’a poussé à créer un produit totalement indépendant de l’informatique musicale – en fin de compte, tout le contraire de ce que je faisais à mes débuts au magasin. Le résultat, ce fut le Spectralis, un studio de musique électronique dans une boîte.
AF : Qu’est-ce qui t’a poussé à créer l’Accelerator ?
JS : Nous adorons le son du moteur hybride du Spectralis et nous voulions avoir un équivalent polyphonique. Nous voulions également un instrument à clavier. Les modules tels que le Spectralis sont plus difficiles à explorer dans un magasin. Parfois ils ne sont connectés à rien du tout. Là les clients potentiels qui veulent essayer notre moteur de synthèse peuvent simplement brancher un casque pour découvrir le son de l’Accelerator. Dernière chose et non des moindres, nous voulions des facultés de clavier maître capable d’organiser et contrôler un setup live complet.
AF : Comment s’est passé le développement, les joies et les peines ?
JS : La principale douleur, ça a été la disponibilité de certaines pièces. Le développement progressait plutôt vite, mais au moment où nous avons voulu démarrer la production, nous avons reçu un message d’un fournisseur annonçant 9 mois de retard sur le micro-contrôleur qui fait tourner notre système d’exploitation. Le choc !
AF : es-tu parvenu à atteindre tout ce que tu avais imaginé au départ pour l’Accelerator ?
JS : C’est une question amusante, parce que des projets tels que l’Accelerator ou le Spectralis commencent la plupart du temps avec une liste initiale de caractéristiques et le développement matériel correspondant. Mais au cours du processus de développement, un tas d’idées nouvelles viennent s’ajouter. Je pense au final que c’est allé bien au-delà de ce que j’avais imaginé au départ. Par exemple, je n’avais pas du tout prévu ces magnifiques algorithmes d’effets. Nous avons passé beaucoup de temps additionnel pour les finaliser ; du coup des effets comme le chorus ou la réverbe sonnent bien mieux que sur nos premières tentatives. Nous avons aussi ajouté beaucoup de fonctionnalités auxquelles nous n’avions pas pensé au départ. Par exemple, les motifs utilisateur de l’arpégiateur et la possibilité de les éditer alors que le moteur tourne, comme un séquenceur pas à pas. Nous sommes toujours impressionnés par le potentiel de cette section que nous n’avions pas imaginée au tout début du processus.
Une autre chose intéressante dans l’Accelerator est le String Filter. Nous avons eu cette idée en manipulant le délai numérique dans le bus d’effets. J’ai demandé à Andreas (le programmeur DSP et le designer de l’électronique de l’Accelerator) de créer un effet Karplus Strong avec le délai numérique. Nous avons alors ajouté un filtre dans le feedback du délai avec des options d’accordage par demi-ton dans la ligne de délai. Nous avons été impressionnés par les possibilités sonores de ce simple algorithme et du coup nous avons tenté de l’intégrer dans le moteur de synthèse. Après cela, nous avons ajouté une petite enveloppe de pitch pour synthétiser les cordes pincées, puis ajouté un second filtre avec un concept de routage assez sympa. Maintenant cet algorithme peut non seulement produire des sons de cordes pincées, mais aussi de cordes frottées et des effets de souffle pour les flûtes.
AF : Quelles améliorations sont déjà à l’étude ?
JS : Au-delà des extensions de voix qui sont déjà en cours de production, nous avons un tas d’idées pour des algorithmes de synthèse additionnels. Nous avions déjà présenté une modélisation d’orgue à tirettes harmoniques à la MusikMesse de Frankfort. Ce moteur a 61 voix de polyphonie et fonctionne totalement indépendamment du moteur de synthèse. Nous avons pas mal d’autres idées d’algorithmes, mais c’est un peu trop tôt pour en parler maintenant.
AF : Qu’aimerais-tu ajouter plus tard ?
JS : D’autres algorithmes…
AF : Quels sont les autres projets en réflexion avec Radikal ?
JS : À part le développement d’un nouvel OS pour le Spectralis et de nouveaux algorithmes de synthèse, nous n’avons pas planifié de nouveaux produits pour le moment.
AF : Que fais-tu en dehors de la conception d’instruments de musique électronique ?
JS : Je dors, je bois, je fume, je mange et parfois je joue de la musique ;-)