Le lancement d’une nouvelle série chez Marshall est déjà en soi un évènement rare. Alors, lorsque le mythique constructeur décide de réunir au sein de cette série d’amplis à modélisation tous ses plus grands succès, notre curiosité ne peut qu’être piquée au vif. Plus de deux semaines avant sa sortie officielle mondiale, Audiofanzine vous livre son verdict sur le tout nouveau Marshall Code 25.
Vivre dans la peau d’un autre n’est jamais évident. Assumer un héritage gargantuesque non plus. Et c’est pourtant les deux missions des nouveaux amplis Code de Marshall. Dévoilée lors du dernier NAMM Show, cette série est censée proposer une multitude de sons d’amplis Marshall plus mythiques les uns que les autres. Pour réaliser une telle prouesse, la marque s’est tournée vers la modélisation, et a décidé une nouvelle fois de faire confiance à l’entreprise plébiscitée de logiciels Softube.
Préliminaires
Pour ce test, nous avons eu accès au plus petit combo de la série, le Code 25. Ce petit carré de 43 × 45 × 37,2 cm distille 25 watts. Le terme « balance » est d’ailleurs plus approprié, tant la bête et son HP de 10" sont impressionnants en termes de puissance et de volume sonore. Je n’en reviens toujours pas ! Néanmoins, si ces 25 watts survitaminés ne vous suffisent pas, sachez que des versions de 50 et 100 watts (combo ou tête d’ampli) existent aussi, et que celles-ci ont exactement les mêmes fonctionnalités.
Mais revenons-en à notre Code 25. Le combo embarque 100 presets, tous paramétrables. Chaque programme est composé de 7 couches, placées dans un ordre précis, qui lui donnent vie :
- La première couche s’intitule Pre FX. Il s’agit d’effets de type stompbox. Elle regroupe un compresseur, une distorsion, une auto-wah, et un pitch shifter
- La seconde couche, Amp, regroupe les modélisations d’amplis de puissance. Il y en a 14, et ce sont principalement des classiques de Marshall (JTM45 2245, DSL100H, 1962 Bluesbreaker, ou encore JCM2555 Silver Jubilee) et quelques incontournables de l’univers guitare (le préampli « American » est très typé Fender par exemple). Enfin, une position Natural permet de passer outre les modélisations MST, notamment pour utiliser des pédales externes.
- La troisième couche regroupe les modulations sous l’appellation Mod. On y trouve un chorus, un flanger, un phaser et un trémolo
- La couche suivante, Del, regroupe les delays (Studio, Vintage, Multi, et Reverse)
- La cinquième couche, Rev, comprend quatre types de réverbe (Room, Hall, Spring et Stadium)
- La sixième et avant-dernière couche est essentielle, puisqu’il s’agit de la section d’amplis de puissance. Nommée Amp, elle offre quatre possibilités : Classic Marshall 100 W (classe A/B avec des lampes EL34), Vintage Marshall 30W (classe A/B avec des lampes 5881), British Class A (classe A avec des lampes EL84), et American Class A/B (classe A/B avec des lampes 6L6).
- Enfin, la dernière couche, Cab, concerne les baffles. Elle regroupe huit classiques de Marshall : 1960 (4 × 12" Celestion G12-T75), 1960V (4 × 12" Celestion Vintage 30), 1960AX (4 × 12" Celestion G12M-25), 1960HW (4 × 12" Celestion G12H-30), 1936 (2 × 12" Celestion G12-T75), 1936V (2 × 12" Celestion Vintage 30), 1912 (1 × 12" Celestion G12-B150), et 1974CX (1 × 12" G12M-20).
Toutes les modélisations ont été réalisées par Softube, en apportant un soin particulier au matériel choisi pour les enregistrements. Marshall emploie donc le terme de MST (sic), soit Marshall Softube pour désigner sa nouvelle technologie. Chaque preset est modifiable à tout instant, en changeant l’un des paramètres assignés aux différentes couches ou en modifiant les contrôles de gain, de volume, et l’EQ 3 bandes. Cela offre donc des possibilités innombrables pour modeler son propre son. Enfin, toute modification peut être enregistrée par l’intermédiaire du bouton Store, et le nouveau preset remplacera l’ancien.
Scott Bakula
Un potard rotatif cranté que l’on peut également actionner en appuyant dessus permet de naviguer entre les 100 presets. Ce contrôle est au cœur du fonctionnement du Code 25. En effet, il permet d’explorer l’ampli et de régler chacun des paramètres des effets et des modélisations. Pour cela, il est suppléé par un écran LCD. La navigation via le panneau de contrôle est d’ailleurs assez fastidieuse, et l’écran particulièrement petit. L’ergonomie n’est donc pas le point fort de la bête, mais son fonctionnement a pour mérite de le rendre assez accessible et intuitif. Pour autant, et comme souvent avec les amplis numériques, une lecture du manuel s’impose pour réellement profiter des différentes fonctions. Notons également que l’écran est un peu plus grand sur les modèles plus puissants.
Les 100 presets d’usine sont majoritairement composés de saturations. C’est du Marshall, et il faut le faire savoir ! Bien souvent, les préamplis sont déclinés dans différents programmes avec des sons clairs, des sons saturés, et des effets. Voici une fournée de 12 exemples sonores présentant des presets avec des grosses saturations ou des crunchs. Portez bien attention au nom de l’extrait, il indique le préampli et les micros de la guitare utilisés.
- 1 Bluesbreaker OD avec micro double aigu 00:09
- 2 Silver Jubilee OD avec micro double aigu 00:33
- 3 American Crunch avec micro intermédiaire 00:20
- 4 JTM45 avec micro simple aigu 00:27
- 5 DSL OD avec micro double aigu 00:23
- 6 American OD avec micro double aigu 00:24
Comme je l’ai déjà indiqué, c’est tout d’abord la puissance du Code 25 qui étonne. Je n’ai jamais dépassé le premier quart du bouton Master, et pourtant je n’ai pas été raisonnable sur le volume sonore (Red Led, Los Teignos et Momiok peuvent en témoigner…). Concernant le son des presets, c’est très varié et variable. De base, trop de programmes sont noyés sous les effets et l’on trouve assez peu de crunchs, j’ai été un peu déçu. Les quelques sons de ce type sont assez réussis, mais je n’ai pas vraiment retrouvé la sensation grisante qu’offre l’impact de l’attaque sur la saturation avec les amplis à lampes. Par contre, les saturations moyennes et fortes m’ont vraiment plu. On sent que cet ampli est taillé pour le gros rock, et qu’il le fait bien ! Les saturations extrêmes sont par contre souvent trop compressées, par forcément bien égalisées, mais l’on sent que l’on peut obtenir quelque chose en travaillant les réglages. Globalement la variété de sons est tellement grande que chacun y trouvera certainement son compte. Écoutons à présent des presets de sons clairs.
- 7 DSL Clean avec micro intermédiaire 00:12
- 8 American Clean avec micro simple grave 00:12
- 9 JVM Clean micro double grave avec tonalié aux 3:4 00:20
- 10 American Clean avec micro intermédiaire 00:21
Encore une fois, la variété est au rendez-vous. J’ai aimé le claquant de certains presets, la rondeur d’autres, et la dynamique du jeu du guitariste est bien retranscrite. Les simulations dites « acoustiques » sont par contre assez mauvaises, mais, pour être honnête, je n’ai jamais aimé ce type de son.
Découvrons à présent la modification des presets. Le premier élément que nous allons tester est le changement des HP. Étant donné qu’il n’existe pas de programme vide, il est nécessaire de partir d’un preset d’usine. Je suis donc parti du preset JCM800 sans aucun effet. Il suffit ensuite de rester appuyé sur le bouton Cab quelques secondes, et d’utiliser la molette Preset. Écoutez l’impact du changement de haut-parleurs dans l’extrait suivant.
Faisons maintenant la même chose avec l’ampli de puissance. Le son de départ est toujours le preset JCM800 sans aucun effet.
Enfin, modifions le préampli. Ce réglage aura évidemment un impact énorme, puisqu’il est l’élément déterminant de l’empreinte sonore.
Ces différents réglages, couplés à l’EQ 3 bandes très efficace et aux contrôles de volume et de gain, ouvrent les portes d’un univers immense. Les possibilités sont multiples, et permettent par exemple de corriger les défauts de certains presets non aboutis. De plus, il est possible de régler pour l’ampli de puissance la présence et la résonance. Il faut encore une fois utiliser le bouton Preset pour cela. En entrant dans des menus, puis des sous-menus, puis des sous-sous-menus, on se rend compte que la navigation est tout de même laborieuse. Le choix de Marshall de réduire le nombre de contrôles et d’utiliser principalement un écran est intéressant, mais la marque ne s’est pas donné les moyens d’offrir une expérience utilisateur plaisante et innovante. Ce défaut se retrouve encore plus lorsque l’on désire ajouter des effets et les paramétrer. Écoutons d’ailleurs ce que donnent ces derniers ! Encore une fois, jetez un œil au nom des exemples audio pour connaître les effets et micros utilisés.
- 14 Chorus, Delay et Reverb avec micro double grave 00:26
- 15 Tremolo avec micro double grave 00:23
- 16 Delay avec micro intermédiaire 00:19
- 17 Reverb micro intermédiaire 00:20
- 18 Reverb Spring avec micro intermédiaire) 00:16
- 19 Auto Wah avec micro simple aigu 00:15
- 20 Flanger et delay avec micro double aigu 00:21
J’ai trouvé les effets assez étonnants. La plupart sont réussis, et très finement réglables. Un Tap Tempo permet de modifier la vitesse des effets temporels, mais on peut aussi régler ça à la milliseconde près grâce à l’écran LCD et au bouton Preset. Les points négatifs que j’ai pu relever sont des réverbes qui manquent un poil d’identité, et un pitch shifter si ce n’est raté du moins anecdotique. Rayon bonnes surprises, j’ai beaucoup aimé l’auto-wah et les delays. Pour moi, les différentes sections d’effets sont une réussite pour peu que l’on prenne le temps de les paramétrer.
Et plus si affinités…
Aujourd’hui, tout ampli moderne qui se respecte se doit d’être connecté. Ainsi, le Code 25 offre une entrée ligne pour brancher une source sonore, une sortie casque, un port USB pour directement s’enregistrer dans une STAN, et une connectivité Bluetooth. C’est là que les choses deviennent intéressantes, puisque Marshall à développé une application spécifique nommée Gateway sur iOS et Android. Cette application permet de contrôler les amplis de la série Code via un appareil mobile. Je vais être clair, sur le papier cette appli est un petit bijou. C’est simple, plutôt joli, et la navigation laborieuse que je reprochais tant au Code 25 devient à l’inverse un plaisir et un atout considérable pour cet ampli. De plus, il est possible de personnaliser les presets directement dans l’application, et de les sauvegarder dans l’appareil mobile. Ce n’est donc pas 100 presets que vous pouvez enregistrer, mais bien 200. Il est également possible de partager ses presets, et des programmes signatures d’artistes sont prévus. Cette franche réussite m’amène d’ailleurs à me demander pourquoi Marshall n’a pas sorti ce logiciel sur PC et Mac. C’est très dommage pour les non-possesseurs de smartphone, ou les amateurs de Windows Phone. De plus, l’application n’est pas encore complètement au point et j’ai eu des soucis pour connecter l’ampli en Bluetooth. Marshall semble conscient de ce problème, puisque la firme travaille déjà sur des mises à jour de son logiciel. Il faudra donc attendre un peu pour confirmer cet aperçu très positif.
Enfin, notons la présence d’un accordeur intégré, et le développement par Marshall d’un pédalier externe assez semblable au Stompware. Avec tout cela, on obtient une machine moderne adaptée à toutes les situations.
Braquo
Le Code 25 est un ampli brutal (quelle puissance, quel volume !), taillé pour le rock, mais conservant néanmoins une grande polyvalence. La semaine dernière, nous testions le VT20X de Vox. La comparaison est inévitable, puisqu’il s’agit dans les deux cas de petits combos à modélisations proposés autour de 200 € (189 € pour le Vox en moyenne, contre 230 € pour le Marshall). La comparaison des deux amplis résume d’ailleurs assez bien les qualités et les défauts du Code 25. Soyons clair, je n’ai pas retrouvé les bons crunchs et sons clairs du VT20X, ni cette sensation analogique liée à la reproduction de la finesse et de la dynamique du jeu. Mais le VT20X pêchait sur les grosses saturations, et ce n’est pas le cas du Code 25. Le Code est bon et très polyvalent sur le gros rock, pas forcément sur le métal extrême, mais sur tout le hard et le heavy métal. De plus, le dernier né de Marshall est beaucoup plus profond dans sa gestion des paramètres : beaucoup de combinaisons sont possibles, les effets sont plutôt réussis, et l’application pour gérer tout cela sera un régal lorsqu’elle sera stable.
Au final, le Code 25 a les défauts de ses qualités : c’est un ampli Marshall, avec l’empreinte sonore de la marque. Si c’est ce que vous recherchez, essayez-le. Ça reste de la modélisation, vous n’aurez pas les mêmes sensations qu’avec un ampli à lampes, mais c’est un bon produit. À l’image du VT20X, ce Code 25 obtient donc 4 étoiles, mais son tarif un peu supérieur ne lui permet pas d’obtenir l’award Qualité/Prix comme son rival.