Dans notre sélection de casques "de référence", le HD 650 sort un peu du lot : plus onéreux, plus "HiFi" (d'après son fabricant)... Cependant, il a été progressivement reconnu, depuis son lancement en 2003, pour ses qualités en mixage, et est aujourd'hui souvent présent dans les milieux pros.
Ce mois-ci, nous ajoutons à nos tests, qui d’habitude suivent les sorties récentes, un passage en revue de six casques qui ont plus que fait leurs preuves : les indéboulonnables, les classiques, ceux que l’on trouve comme écoute de référence dans de nombreux studios, mais aussi dans d’autres domaines où la captation sonore joue un rôle phare (radio, cinéma, TV, régie…). Il s’agit également de six références qui font toujours partie des meilleures ventes chez leur constructeur respectif, et cela plusieurs décennies après leur première production. Chacun d’entre eux est connu pour quelque aspect particulier (confort, isolation, solidité, légèreté…). Certains tirent vers le « neutre » (si tant est que cette notion existe pour des transducteurs), d’autres sont franchement du côté de l’écoute « effet loupe ».
Certains de ces casques avaient fait l’objet d’un comparatif AF il y a maintenant… douze ans ! Maintenant que notre méthode de test s’est affinée et que nous avons sous la main notre propre testeur, il nous a paru intéressant d’établir ces six tests « de base », auxquels tous nos lecteurs pourront se référer.
Et cette fois-ci, nous nous penchons sur le HD 650 de Sennheiser
Présentation/déballage
Précisons tout de suite : ce casque se trouve dans une catégorie de prix supérieure par rapport aux autres casques « de référence » sélectionnés pour cette série d’articles. Nous l’abordons donc avec de plus hautes exigences, et nous reviendrons dans la conclusion sur notre perception de son rapport qualité-prix.
Spécifications
Le HD 650 est un casque de type circum-aural, ouvert, avec un transducteur dynamique. La taille du transducteur est de 42 mm.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
- impédance : 300 ohms, donc il nécessite l’usage d’un amplificateur
- réponse en fréquence : 10 Hz - 41 kHz
Le casque a un câble droit de 3 mètres, bien malléable, et apparemment assez robuste. Le câble se termine d’un côté par une fiche jack TRS 6,35 mm, avec un adaptateur TRS 3,5 mm (ce n’est pas commun). De l’autre, on trouve deux connectiques droite-gauche (une par oreillette). Avantage : un câble qui se détache automatiquement en cas de choc, sans tirer le casque avec lui (vers la gauche) puisque la tension est répartie entre les deux oreillettes. Un casque qui s’adapte également bien à toutes les installations, puisque son câble, au centre de votre torse, peut aussi facilement se connecter vers un appareil sur votre droite ou votre gauche. Désavantage : l’utilisateur doit faire attention, lorsqu’il branche le câble, à ne pas inverser droite et gauche.
Question robustesse, il se dégage du casque une impression générale de solidité : arceau en métal, grilles en métal et, comme nous le verrons juste en dessous lors du démontage, une structure plastique bien renforcée, de manière à solidifier les oreillettes. Seul bémol : les connectiques d’oreillettes, qui ne bénéficient pas d’un système de fixation câble/oreillette suffisamment solide (comme un système à baïonnette, par exemple) et dont nous craignons qu’elles développent des faux contacts à la longue.
Démontable ?
Oui.
Comme d’habitude, on commence en retirant les mousses :
On peut également ôter la grille arrière, simplement en faisant levier avec un petit outil :
Au passage, on peut admirer le dessin de l’armature, qui a pour but de solidifier la structure recevant le transducteur, tout en supportant la très fine toile en fibre métallique qui sépare l’avant et l’arrière du HP :
Le transducteur, quant à lui, peut tout simplement se déclipser :
Pour travailler plus confortablement, il est possible de retirer complètement l’oreillette, en ôtant la petite jointure au bout de l’arceau :
Il suffit ensuite de tirer sur l’oreillette pour la désolidariser. L’absence de câble entre les deux oreillettes est alors un point positif :
Il est également possible de retirer la mousse de l’arceau, par la même opération :
Sur Internet, nous avons facilement trouvé :
- câble de rechange
- connectique d’oreillette de rechange
- mousses d’oreillettes de rechange
- mousses d’isolation de rechange
- mousses d’arceau de rechange
Confort
Excellent.
Mousses en velours, oreillettes très larges qui couvrent bien l’oreille et s’adaptent bien à la forme du crâne grâce à un système de pivot vertical (voir photo ci-contre), serrage pas trop fort… Le casque est très confortable, même s’il ne s’agit pas du plus léger de notre ensemble de référence (260 grammes, plus léger que le ATH-M50x ou le DT 770 PRO, mais plus lourd que le HD-25, bien évidemment… Ensuite, on n’est pas dans la même catégorie !).
Isolation
Il s’agit d’un casque ouvert, donc pas d’isolation à noter. Toutefois, nous n’avons pas perçu trop de fuites vers l’extérieur, lors du benchmark.
Transport
Décevant.
Avant 2019, le HD 650 était vendu dans une boîte en carton épais, avec une mousse dans laquelle venait parfaitement se loger le casque. Aucune pochette de transport n’était fournie mais la boîte, bien que grosse, pouvait être réutilisée pour protéger le casque durant son transport.
Aujourd’hui le casque est fourni dans une boîte en carton très fin, avec une simple découpe interne (dans le carton) pour maintenir l’appareil en place, lui-même fourré dans un sac en plastique non fermé. Pas de pochette de protection pour les transports, et le casque ne se plie absolument pas.
N.B. Il est possible d’acheter une mallette de transport chez d’autres fournisseurs que Sennheiser.
Benchmark
Voici donc le nouveau protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
Voilà un casque plutôt linéaire, à l’exception de quelques bosses et creux :
- Accentuation entre 3 et 4 kHz, donc on s’attend à des voix bien mises en avant.
- Creux important à 6 kHz, qui devrait là aussi s’entendre en minimisant l’agressivité des aigus.
- Second creux à 10 kHz
- accentuation prononcée à 16 kHz, donc on peut s’attendre à un sentiment « d’aération » dans les aigus.
- Filtrage progressif du grave en dessous de 100 Hz, donc sûrement des basses pas trop prononcées, mais quand même présentes.
On remarque que la promesse du constructeur de transducteurs appariés à 1 dB est presque totalement respectée, à l’exception d’une déviation gauche-droite légèrement plus forte (2 dB) à 10 kHz.
Distorsion :
La distorsion mesurée est assez basse, principalement aux alentours de 0,2 %, jusqu’à 100 Hz. C’est le meilleur résultat obtenu dans toute cette série d’articles, le seul casque s’en approchant étant le ATH-M50x.
Écoute
Richard Hawley – Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. Tout de suite, on est frappé par la précision dans l’aigu du casque : son du plectre qui touche la corde, articulation de la voix… Le suivi des réverbes sur les différents instruments, et tout particulièrement sur la scie musicale, est tout simplement excellente. La contrebasse, parfois un peu brouillonne sur ce mix, est plutôt aidée par des graves pas trop soulignés.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Là aussi, on apprécie la précision du rendu du grave : le clavier-basse est bien séparé, dans son attaque, de la grosse caisse. Le timbre nasal de la voix n’est pas trop accentué, les articulations et les plosives sont rendues de façon précise, sans être trop fatigantes à l’oreille pour autant.
Massive Attack – Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. L’extrême grave n’est pas tout à fait « là », mais il n’est pas remplacé, comme c’est parfois le cas, par une sorte de résonance bas-médium qui a tendance à brouiller le mix. Sur la voix, les sons en « S » du deuxième couplet ne sont pas suraccentués (le pic à 16 kHz est compensé par le creux à 10 kHz, ça rend bien sûr ce genre de sonorités « agressives »). Le piano est très bien mis en valeur, avec une certaine richesse harmonique, grâce aux médiums bien linéaires et à la bosse à 3–4 kHz.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Précision des médiums : on est gâté avec ce casque, dont le profil plutôt calme dans le grave favorise la bonne lecture des harmonies sax alto/sax ténor/trompette/trombone. Le trombone-basse, lui, est moins lisible mais, à l’opposé du spectre, les cymbales sont en avant… mais pas trop ! Heureusement, le casque ne fait définitivement pas trop d’effet « loupe » dans l’aigu.
Edgar Varèse – Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 min. Comme on l’avait repéré dès le premier morceau, l’image stéréo, le suivi des résonances dans l’espace, sont vraiment rendus avec une grande acuité. Les percussions médiums ne sont pas en reste, et celles à large spectre (tam-tam, par exemple) sont retranscrites avec une belle fidélité. On est aussi frappé par la puissance des écarts dynamiques, avec des fff qui passent sans problème.
Conclusion
En conclusion, les seuls points négatifs concernant ce casque se concentrent sur le soin apporté à la durabilité du produit.
Au point de vue de la sonorité, pour un casque de mix (en en connaissant la RF pour pouvoir, selon ses besoins, ajouter une correction) nous avons trouvé le HD 650 de très bonne facture, avec une grande précision aussi bien dans le grave (pas trop accentuées, et c’est tant mieux) que dans le médium (très linéaire, et là aussi c’est tant mieux) et encore dans l’aigu (attention aux quelques creux qui atténuent des aspects potentiellement agressifs, à bien garder en tête pour ne pas se trouver avec un mix trop flatteur). Côté confort, là aussi rien à redire. Et le casque peut facilement se réparer !
Le seul point qui nous a vraiment fait tiquer, c’est donc cette impression d’économies « à la petite semaine » qui sont réalisées sur l’emballage (bien inférieur à ce qui était fourni avant), sur la facilité du transport (pas de sac de protection), et sur la durabilité des connectiques (peu sécurisées, l’usage régulier risque d’entraîner des faux contacts). Si du point de vue « audio » le casque nous a semblé présenter les qualités que l’on peut espérer dans sa gamme de prix (très bon appairage des transducteurs, distorsion basse), si sa construction nous a paru adéquate (solide et démontable à la fois), il nous semble toutefois décevant de voir qu’un produit de cette qualité fasse l’objet de petites économies qui en limiteront l’usage ou la durée de fonctionnement. Reste un bon, voire un très bon casque, mais prévoyez d’en prendre soin par vous-mêmes…