Ultrasone commence à être connu, dans nos colonnes, comme la marque de casque aux basses rebondies, aux aigus cristallins : des casques qui peuvent donc avoir leur fonction bien précise dans le travail de l'ingé son ou du musicien, mais qui se démarquent aussi par une signature sonore clivante.
Et n’oublions pas de préciser que, pour cette raison, les casques Ultrasone ont jusqu’ici fait l’objet de tests aux résultats plutôt positifs dans nos colonnes (exemple : le Pro 550 ou le Signature Natural), mais toujours avec des critiques substantielles adressées à la marque, en particulier sur une certaine fatigue auditive ressentie par les différentes personnes qui les avaient alors utilisés.
En sera-t-il autrement avec ce signature X ? C’est ce que nous allons voir, mais débutons d’abord avec une présentation rapide du produit.
Spécifications
Le Signature X est un casque de type circumauriculaire, fermé, avec un transducteur dynamique. La taille du transducteur est de 50 mm.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
- impédance : 32 ohms
- réponse en fréquence : 5 Hz — 32 kHz
Le câble droit fait 1,2 m et le câble torsadé (sur la moitié de sa longueur) fait 2 mètres, étirable jusqu’à 2,8 mètres environ. Le câble droit se termine par un jack 3,5 mm, le torsadé par un jack 6,35 mm. La connexion au casque se fait par un jack 2,5 mm à baïonnette. À noter que, sur notre exemplaire, le système à baïonnette ne fonctionnait pas bien, car il était très dur de tourner le jack jusqu’à ce qu’il s’enclenche à fond. Donc, en tirant dessus… le jack se détachait.
Pour finir, comme pour les Signatures Master et Natural, le système S-Logic (ici en version « 3 », qui a pour but d’affiner et d’accentuer la spatialisation et l’impression de profondeur sonore) et le système ULE — pour Ultra Low Emission (qui limiterait la présence du champ magnétique du haut-parleur à proximité de l’oreille) sont constitués assez simplement d’une plaque de mu-métal entre le HP et l’oreille et d’une série d’évents et de réflecteurs pour « travailler » acoustiquement les réflexions au sein du pavillon de l’oreille. Pour référence, voici sa mise en application sur le Signature Natural (rouge), puis sur le X (noir), où l’on remarque qu’il y a des différences réelles et importantes d’un casque à l’autre :
Démontable ?
Oui, partiellement,
D’abord, retirons les coussinets :
On devine, sur le pourtour du haut-parleur, trois trous permettant d’accéder aux vis de maintien. Un petit tournevis cruciforme et…
On découvre le transducteur, avec un léger calfeutrage arrière, en papier très fin, similaire au papier qui bouche les ouvertures pratiquées aux bordures de la plaque de fixation. La connectique microjack est quant à elle située sur un petit circuit imprimé détachable, et elle est donc remplaçable en cas d’oxydation ou de casse. Un bon point.
Les soudures sont propres et de belle facture, le câble est fin, mais a l’air solide et a été installé avec assez de longueur pour ne rien risquer d’arracher lors du démontage.
Alors, sur le circuit on remarque 4 emplacements, non utilisés, pour souder… des diodes ?! On dirait un pont de redressement… Réemploi d’une carte servant sur un autre appareil ? Mystère…
Pour finir, je précise que l’arceau est également démontable, mais son remontage nous a très vite paru compliqué (pas impossible non plus) et l’on a préféré limiter les risques avec un casque, ne l’oublions pas, prêté.
Confort
Bon.
Pour un « gros » casque, avec du plastique épais et de grosses articulations, le Signature X est plutôt léger et confortable. Le coussinet de l’arceau fait bien son travail d’amortissement, et les écouteurs sont larges et ne tiennent pas trop chaud à la longue.
Isolation
Excellente.
Les coussinets prennent bien le pourtour de l’oreille et permettent une bonne réjection des sons externes. Le Signature X fait même un bon casque d’écoute nomade, utilisable dans les transports en commun ou dans la rue.
Sécurisé, grâce à sa mallette bien solide, ou pratique dans un sac à dos ou un tote bag car le casque se plie sur lui-même de façon à prendre moins de place et à protéger les écouteurs.
Benchmark
Voici donc notre protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
On remarque :
- linéaire de 40 Hz à 1 kHz
- un léger creux entre 1 kHz et 2 kHz
- un nouveau creux, bien plus important, entre 5 et 6 kHz
- des aigus légèrement accentués au-dessus de 6 kHz
- un creux descendant à partir de 13 kHz
Et des transducteurs bien appariés dans l’ensemble !
Mais attention, le positionnement du casque a de l’influence sur les résultats, plus que pour d’autres casques. Ainsi, en le positionnant plus ou moins vers l’avant ou l’arrière de l’oreille on obtient :
Avec une différence de 3 puis de 5 dB à 20 Hz et une accentuation de plus en plus marquée entre 4 et 5 kHz, juste avant le creux.
Distorsion :
La distorsion mesurée est basse, ne dépassant jamais 1 % (à 20 Hz) et étant principalement sous 0,1 %, avec des harmoniques impaires bien en retrait, en particulier dans le grave. Ça laisse une bonne impression !
Écoute
Richard Hawley — Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. On apprécie bien la précision dans la reproduction de la guitare (les attaques, le son du médiator sur les cordes), mais sans agressivité, grâce à des aigus un peu en retrait dans le très haut du spectre. La voix a du coffre, peut-être plus que de l’articulation ou du détail. Les réverbes sont très bien suivies, l’image stéréo est précise, mais la basse est un peu trop en avant, et bénéficierait d’un casque avec un grave légèrement plus en retrait.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Trop de basse là aussi : c’est juste une question d’équilibre, le rapport entre le clavier-basse et la batterie va dans le sens de la basse, plus que de la batterie, qui se trouve un peu supplantée dans le mix. Dans les parties calmes, un problème similaire apparaît sur la voix, quand l’effet de proximité par rapport au micro ressort de façon un peu exagérée. Sinon, on apprécie beaucoup le « punch » du casque, et sa capacité à rendre les détails sans pour autant se montrer fatigant.
Massive Attack — Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. De la basse ! de la basse ! Le casque en donne beaucoup, parfois proche de l’excès, mais son caractère par ailleurs détaillé, sans fatigue, et ses médiums très bien rendus, rendent l’ensemble plutôt convaincant. Toutefois, comme sur le morceau précédent, on aimerait avoir un petit EQ sous la main pour enlever quelques dB sous 60 Hz.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Très bien ! En premier lieu, belle image stéréo, large et détaillée. Les cymbales, souvent trop mises en avant par des casques axés sur l’aigu, se trouvent juste à leur place dans le mix. La contrebasse est très facile à suivre et, contrairement à ce que l’on percevait sur le premier morceau, elle brille vraiment par sa précision, et n’est jamais trop en avant par rapport au reste des instruments. Quant aux cuivres, dans le médium et le haut médium, on perçoit à la fois l’effet d’ensemble, et l’on arrive à très bien suivre les instruments séparément les uns des autres.
Edgar Varèse — Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0 h 30 et 1 h 15 min. On reste sur une même impression qu’avec le morceau précédent. Peut-être que, par sa courbe, le casque se prête bien aux ensembles d’instruments acoustiques ? En tout cas, on apprécie vraiment l’effet à la fois détaillé, riche de timbres divers sur toute l’étendue du spectre, le bon suivi des résonances graves comme aigües, et le rendu fidèle des dynamiques extrêmes.
Conclusion
On a vraiment aimé ce casque Ultrasone, nettement plus que ceux que nous avions testés jusqu’ici.
Le vrai argument pour nous, c’est qu’on y retrouve ce qui fait un bon outil de travail à nos yeux : à la fois un rendu intéressant (où le constructeur allemand a su y aller un peu plus mollo que d’habitude sur le grave et l’aigu), et donc un rendu plutôt linéaire, un instrument assez confortable (surtout vu sa taille et sa robustesse) et en plus, cerise sur le gâteau, une écoute agréable, doux, jamais fatigante, bref un vrai plaisir lors de séances de travail longues.
Alors oui, parfois le casque rend « trop » de grave, et l’on a vu que son placement sur le crâne y est pour quelque chose. C’est un défaut, mais c’est aussi un élément à maîtriser pour l’utiliser, et qu’un petit EQ arrivera à minimiser. Toutefois, sur l’ensemble de l’écoute, on l’a trouvé plutôt très convaincant, et cela tout particulièrement sur le rendu des instruments acoustiques, et des grands ensembles d’instruments. Pour nous, le Signature X constitue une possible « référence » future, même s’il n’a pas encore l’ubiquité d’un DT-770 ou d’un ATH-M50.