"Plus" ou pas, le nouveau casque Sennheiser marque le remplacement progressif de la série HD600 et des poussières par la nouvelle série "PRO" (c'est écrit en majuscule sur la boîte, ce n'est pas moi qui crie...). Le voici venu faire un tour dans notre banc d'essai !
C’est vraiment un des titres-jeux de mots les plus bizarres que j’ai commis dans nos colonnes, mais je tiens à préciser qu’en plus d’être une référence à l’U3P, c’est également un clin d’œil à une chanson. Si vous êtes en mesure de la nommer, il n’y a rien à gagner, à part un gros pouce jaune de ma part dans les commentaires.
Fraîchement annoncé lors du NAMM 2024, le HD 490 PRO Plus est donc le petit dernier de la marque allemande Sennheiser qui, soyons clairs, n’a plus grand-chose à prouver dans le domaine des casques. Cela dit, le casque est assez excitant : haut de gamme, il remplace de facto le HD 490 Pro, et côtoie le HD 660S2.
Spécifications
Le HD 490 PRO est un casque de type circum-auriculaire, ouvert, avec un transducteur dynamique. La taille du transducteur est de 38 mm.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
- impédance : 130 ohms
- réponse en fréquence : 5 Hz – 36,1 kHz
Le casque est livré avec d’assez nombreux accessoires : une mallette solide (on en reparle plus tard), deux câbles (torsadé de 1,8 m, droit de 3 m), avec une approche spéciale du câble torsadé (qui est en fait l’ajout d’une seconde mini spirale juste avant l’écouteur) qui est censé limiter la transmission des bruits mécaniques vers les écouteurs. On teste et, en effet, c’est assez efficace !
Le raccordement des câbles au casque se fait par mini-XLR trois points, et chaque câble se termine par une fiche jack 3,5 mm TRS + son adaptateur 6,35 mm TRS. Rien que du classique. On aimerait juste une connectique non sertie, plus facile à remplacer.
Autres accessoires, deux types de coussinets : couverture velours ou toile, pour deux conforts, mais surtout deux réponses en fréquence différentes (on en reparle au moment du benchmark). À noter aussi, un deuxième arceau, en toile également, est fourni pour remplacer ou tout simplement accorder les matières.
Pour finir, le casque est livré avec le plug-in dearVR MIX-SE de Dear Reality, qui permet de travailler la spatialisation virtuelle du programme sonore, et de reproduire artificiellement les conditions de mixage face aux enceintes, dans une salle traitée, lors de l’utilisation du casque. Très bel apport !
Ajoutez à cela une construction très robuste, avec un mélange plastique solide/métal qui donne confiance, des écouteurs qui tournent à 180 degrés (agréable lorsqu’on enlève et remet le casque souvent, ou qu’on le garde longtemps autour du cou), et des inscriptions R et L très claires (c’est un détail, mais ça facilite vraiment l’usage), et l’on se trouve devant un casque très séduisant dès le déballage.
Démontable ?
Oui,
D’abord on retire les coussinets :
Ils sont clipés, il suffit de tirer dessus. On soulève la mousse isolante marquée R ou L :
Et on la met de côté. Il suffit ensuite de retirer quatre vis, et la plaque de maintien se détache toute seule :
Le transducteur est collé à la silicone, mais on découvre un connecteur bien robuste, de belles soudures, et une construction sérieuse, avec des côtes qui permettent d’obtenir une meilleure solidité de la plaque de maintien, et une moindre déperdition des vibrations dans la structure du casque :
Le câble est sécurisé grâce à un ensemble de picots. C’est simple et fonctionnel (attention à bien remettre en place au remontage) :
Confort
Excellent,
Rien à redire, le casque ne serre pas trop, tout en tenant bien en place, les coussinets sont très doux, quelle que soit leur matière. De plus, l’arceau est rembourré comme il faut, et le casque n’est pas trop lourd (260 g). On notera juste que les coussinets de velours sont un peu chauds, on s’en doute. Mais on n’aura pas le même problème avec les coussinets toilés.
Isolation
Inexistante, car c’est un casque ouvert.
Transport
La version « Plus » du casque bénéficie d’une mallette bien solide, avec pochette interne pour conserver les accessoires. Hors de ce matériel, un peu contraignant, on peut prendre le casque avec soit dans un sac (pas de sac de protection vendu avec), mais attention il ne se plie pas. Cependant, les écouteurs tournent à 180°, permettant de le poser « à plat », et de prendre moins de place dans un sac ou une valise.
Benchmark
Voici donc notre protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
Nota bene : la courbe violette représente la réponse en fréquence avec les coussinets en velours, la bleue avec les coussinets en toile. On remarque donc des différences marquantes :
- +3 dB à 20 Hz avec les velours, et plus de graves en général, et cela jusqu’à 300 Hz
- Une réponse linéaire de 30 à 700 Hz
- +2 dB à 1 kHz et des poussières avec les coussinets toile
- Un léger creux, dans les deux cas, vers 3 kHz
- Une accentuation des aigus (légèrement plus forte avec les coussinets de velours).
Dans l’ensemble, et dans les deux cas, le profil est très linéaire.
Distorsion :
À gauche, THD mesurée avec les coussinets de velours, à droite avec les toiles. Avec les velours, c’est très bas ! Toujours sous 0,5 % et égale à 0,05 % de 200 Hz à 2 kHz. Avec les coussinets en toile, ça remonte, avec 2 % à 20 Hz, et une moyenne à 0,2 %.
Écoute
Richard Hawley – Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. Essai rapide d’échange de coussinet : oui, on entend la différence, avec les velours, le grave ressort clairement plus. C’est aussi plus chaud. Sur la guitare, on a déjà beaucoup d’infos : des médiums bien timbrés, beaucoup de dynamique, des détails grâce aux aigus (coups de plectre). Pour la voix, même impression, à la fois du coffre et de l’articulation. C’est très convaincant. Pour la contrebasse, les coussinets en velours donnent un peu trop de présence à l’instrument, ce qui commence à nuire à sa lisibilité. Avec les coussinets en toile, pas de problème. Voyons avec un titre où la basse prend une place prééminente…
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. La même impression : les écouteurs velours, malgré une tout aussi grande fidélité des timbres et du placement stéréo, ajoutent un tout petit trop de présence au grave/bas-médium à notre goût, avec la tendance de noyer un peu plus des infos dans le reste du mix. Pour ce qui est de travailler le grave, d’un instrument ou équilibré entre plusieurs instruments, pourquoi pas ? Mais pour une écoute d’ensemble d’un mix, on préfère les coussinets de toiles, sans percevoir plus de distorsion (taux inaudible).
Massive Attack – Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. La voix est magnifiquement rendue : juste un peu en avant dans le mix, détaillée, articulée sans excès, avec beaucoup d’aigus, mais sans sifflement gênant. À l’opposé du spectre, avec les coussinets de toiles, la basse est bien présente sans être envahissante, et laisse beaucoup de place aux médiums, en particulier le piano qui résonne avec beaucoup de présence. Les coussinets de velours font pencher l’équilibre général du mix vers le grave, avec un peu moins de succès à notre avis.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. On est bluffé : avec les coussinets de toile, on discerne la grosse caisse de la contrebasse sans problème (pas toujours le cas, dans notre expérience, avec certains casques), et avec les coussinets de velours on perçoit très bien le trombone-basse, dans les longs accords à partir de 3:00. Dans les deux cas, les cuivres font effet de corps tout en restant distinguables les uns des autres. Les cymbales, parfois trop en avant, n’envahissent pas du tout l’avant-scène du mix.
Edgar Varèse – Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 min. Comme sur le morceau précédent, sur des ensembles d’instruments acoustiques, on n’est moins frappé par le « surplus » de grave des coussinets de velours. Cela reste notable, bien entendu, mais l’effet d’ensemble est moins gênant que sur des titres avec des basses électriques plus proéminentes. Velours ou toile, l’accentuation de l’aigu reste efficace pour rendre avec un grand réalisme l’acoustique de la salle, et sa « réponse » plus ou moins importante selon la dynamique de jeu des différentes percussions. L’image stéréo s’en trouve vraiment magnifiée, avec une largeur et une précision de placement gauche-centre-droite qui nous a paru très convaincante.
Conclusion
Vous l’aurez compris, on a préféré une paire de coussinets. C’est dû à la façon dont les écoutes sont faites : avec des morceaux finis, mixés, masterisés – donc sur lesquels on cherche à la fois à saisir le rendu de certains détails, mais toujours en rapport avec l’ensemble (puisqu’on n’en peut pas choisir d’écouter un seul, ou seulement deux, instruments).
Ce qui revient à dire que les coussinets de velours trouveront sûrement leur utilité, mais que dans le cadre d’une écoute comme on les pratique, ils tiraient moins leur épingle du jeu que les coussinets toilés, qui permettaient vraiment au casque de donner son meilleur.
Et quel meilleur ! Clarté, précision, image stéréo large, équilibre des différentes plages de fréquences… Ajoutez qu’il a été construit en Europe, et l’on est vraiment très impressionné par ce casque, qui allie qualité sonore et sérieux de la construction, pour obtenir des résultats (presque) totalement convaincants.