La marque japonaise Boss présente son nouveau système GM-800 Guitar Synthesizer accompagné d’une refonte de ses capteurs hexaphoniques pour guitare (GK-5) et basse (GK-5B). Voyons comment s’en sort ce nouveau binôme.
Caractéristiques
Si la guitare électrique, tout comme la basse, offre énormément de possibilités créatives grâce à une infinité d’effets toujours plus nombreux, le monde de la pédale dite « guitare-synthé » reste probablement encore marginalisé alors même que le concept est loin d’être récent. Il est vrai que la mise en œuvre ne se fait pas aussi facilement que pour une simple pédale d’effet traditionnelle. Dans ce cas précis, Boss a actualisé son capteur hexaphonique qui est adaptable aussi bien sur une guitare (GK-5) que sur une basse (GK-5B). Désormais, il est possible sur ces nouveaux micros d’ajuster l’espacement de chaque capteur interne pour s’adapter à tous les écarts de cordes. Pour ce test, j’ai installé le micro GK-5 sur une Yamaha Revstar RSP20 qui dispose d’un chevalet de type Tune-o-matic. L’installation a pris environ 40 minutes, mais la partie la plus délicate a été de régler la hauteur du GK-5 pour qu’il se trouve à environ 1 mm des cordes, conformément aux recommandations de la marque. Notez que si le micro est trop éloigné, le signal ne passe pas, en revanche, s’il est trop proche, la sensibilité sera telle que cela pourra générer des doublons lors d’attaques au médiator, en plus de fausser la dynamique de jeu. Le boîtier du GK-5 a également subi des modifications par rapport à celui du GK-3. Dorénavant, on y trouve seulement une prise jack TRS. Il n’y a plus de potentiomètre de volume ou de boutons permettant de basculer entre les scènes du pédalier, comme c’était le cas jusqu’à présent. J’ai également noté un détail qui, dans certaines situations, pourrait poser un problème : le système de fixation du boiter sur la caisse de la guitare rend l’utilisation de la sangle moins sécurisée du fait de la courbure que cela exerce sur le cuir de l’attache. Il serait probablement plus sûr de verrouiller sa sangle avec un système prévu à cet effet.
En ce qui concerne le GM-800, il semble s’inspirer du design du SY-300 de la même marque. Le boîtier mesure 246 × 134 × 63 mm et pèse 1,2 kg, avec une finition bleue. Sur la face principale de ce dernier se trouvent 5 potentiomètres : OUTPUT LEVEL, SELECT, 1, 2, 3 et 4. On compte également 10 boutons-poussoirs, dont 5 sont équipés de LEDs. On dispose de 4 footswitchs, sans « clic », qui permettent de passer d’une scène à l’autre et d’activer certains effets de jeu et diverses fonctionnalités (CTL1 et CTL2). Aussi, le GM-800 est doté d’un écran monochrome offrant une définition de 256 × 80 pixels.
Pour ce qui est de la connectique, elle se situe sur la partie supérieure de la pédale. On peut y trouver une entrée et une sortie « GK » de type Jack TRS 6,3 mm. La sortie permet de connecter son pédalier à un autre GM-800. La pédale peut être utilisée en mono ou stéréo, et la sortie gauche joue le rôle de prise casque. Il est possible de connecter deux pédales d’expression ou des footswitchs supplémentaires aux entrées CTL3, 4/EXP 1 et CTL 4, 5/EXP 2. En plus, nous avons une connexion MIDI IN/OUT qui sera particulièrement utile si l’on souhaite brancher le GM-800 à un synthétiseur. Le pédalier est doté de deux ports USB. Le premier permet de relier la pédale à son ordinateur afin de l’utiliser comme carte son, comme contrôleur MIDI ou de l’associer à l’application « Boss Tone Studio ». Le second est destiné à recevoir une clé USB qui permettra de mettre à jour le firmware de l’appareil ou pour importer des sons supplémentaires. Le port d’alimentation est également présent sur cette tranche et nécessite 9 VDC pour pas moins de 840 mA. Il est à noter que le bloc est fourni.
La fabrication du GM-800 est réalisée en Malaisie et la qualité est, comme toujours chez Boss, remarquable. La pédale est lourde et donne l’impression de pouvoir encaisser les aléas d’une utilisation intensive. Enfin, le prix de vente constaté au moment de la rédaction de ces lignes est de 769 euros pour le GM-800, 222 euros pour le GK-5 et 299 pour le GK-5B.
Restons ZEN
Le cœur du GM-800 est conçu autour du système de synthèse sonore « ZEN-Core ». Il s’agit du même système que l’on retrouve sur des machines comme le Fantom ou le Jupiter-X. Ainsi, le GM-800 peut se vanter d’avoir une bibliothèque de sons impressionnante, 1200 précisément. Cette bibliothèque propose un large choix d’instruments tels que des pianos, des instruments orchestraux ou encore des sons de synthétiseurs. La pédale dispose également de 70 sons rythmiques que l’on pourra manipuler directement sur sa guitare ou sa basse. Outre cette impressionnante collection sonore, il y a pas moins de 90 types d’effets (réverbe, phaser, chorus, etc.). Par conséquent, il est fort probable que vous ayez deviné que la prise en main du GM-800 n’est pas immédiate en raison de toutes ses fonctionnalités. Toutefois, même si l’interface n’est pas particulièrement attrayante, j’ai pu naviguer de manière très fluide dans les différents menus du pédalier après quelques heures de manipulation.
Il est essentiel de comprendre que le GM-800 fonctionne avec un système de « scènes », 150 emplacements en tout. Chaque scène offre la possibilité de jouer 4 instruments en plus d’une section rythmique. On accède à chacun de ces instruments en appuyant sur les boutons-poussoirs lumineux. La partie la plus importante de l’apprentissage concerne la compréhension des différents réglages disponibles pour configurer un instrument. Par exemple, on peut restreindre la zone de jeu de l’instrument numéro 1 aux trois cordes graves et celle de l’instrument numéro 2 aux trois cordes aiguës. Il est aussi possible de les positionner dans l’espace, de gérer les volumes individuels, d’appliquer des effets ou encore de définir des accordages/octaves différents. La manipulation de tous ces éléments à même la pédale se fait de manière plutôt confortable une fois que l’on s’est familiarisé avec l’interface, mais il est vrai que l’on va plus vite en passant par l’application « Boss Tone Studio ». Le design de cette dernière est similaire à celui déjà vu pour d’autres produits de la marque. L’application présente l’avantage d’être claire et simple à utiliser. Toutefois, il sera nécessaire de procéder à la mise à jour du firmware pour pouvoir s’en servir. Il est également possible d’utiliser le GM-800 pour s’enregistrer sans avoir recours à une carte son externe. Le pilote ASIO est à télécharger sur le site de Boss. Même si je n’ai eu aucun souci pour mettre à jour la pédale ou pour installer l’application et les pilotes ASIO, j’ai trouvé que l’expérience utilisateur était vraiment dépassée. Là où la concurrence tend à centraliser la maintenance de ses machines au sein d’applications uniques qui s’occupent de la mise à jour, de l’installation d’éventuels pilotes et logiciels, Boss nous demande de télécharger trois archives à installer individuellement et dans l’ordre. Il y a un aspect old school qui, s’il est loin d’être insurmontable, ne convient pas à un appareil sorti en 2023 et vendu à presque 800 euros.
Quid du son ?
Pour ces extraits sonores, je me suis basé sur quelques préréglages initiaux que j’ai modifiés et adaptés. Notez que les possibilités sont en réalité infinies du fait du système de combinaisons.
- 1 – Wide Piano Pad00:32
- 2 – Piano + Pad00:23
- 3 – Horn Ensemble00:21
- 4 – Staccato Strings + Rev hall00:21
- 5 – Flute Ensemble00:24
- 6 – Ride et basse cordes 5 et 6 + Vibraphone00:14
- 7 – Organ Dist – portamento ON00:15
- 8 – Spacey Bells + Pédale EXP00:40
- 9 – Rotary Organ00:08
- 10 – Dual Sync Lead – chromatic OFF00:17
- 11 – Pad + Pitch Bend00:38
- 12 – Fretless bass00:23
- 13 – Nylon Syn Brass00:36
- 14 – Popping Brass + Pulse00:24
Tout d’abord, il me semble important de parler des sensations de jeu. Ces dernières sont perfectibles et jouer de manière naturelle demande un petit temps d’adaptation. Même avec une installation du micro qui semble idéale et qui suit les recommandations de Boss, j’ai rencontré d’occasionnels décrochages sur des notes jouées (un peu trop rapidement) sur les cordes graves. Par ailleurs, il convient d’être attentif à la propreté de son jeu, car une petite résonance qui passerait inaperçue dans un cadre « conventionnel » peut déclencher quelques notes, parfois totalement hors de propos. Il faut aussi prendre en considération la gestion du vibrato et du bend. Ainsi, le GM-800 permet, dans les paramètres de chaque instrument, de choisir entre activer ou non le mode « chromatic ». Si celui-ci est activé, alors un bend se traduira par le fait de passer à la note suivante sans entendre de notes intermédiaires, cela peut être pratique pour apporter du réalisme à certains instruments (les vents de l’exemple 5). De la même façon, il est possible d’utiliser les effets de portamento et de legato avec une activation qui peut se faire lors d’un changement de note sur une seule corde ou sur l’ensemble du manche.
En ce qui concerne la qualité des sons, il y a du bon, voire du très bon, mais aussi du très moyen. Les sons de synthétiseurs sont intéressants et il est possible de se concocter des scènes vraiment très originales (exemple 8). Les pianos sont également assez surprenants et faciles à jouer. En revanche, les instruments orchestraux ne sont pas vraiment à la hauteur en matière de réalisme lorsque l’on compare le GM-800 aux standards actuels dans ce domaine. Plus précisément, je ne suis pas convaincu de pouvoir réellement utiliser ce genre de cuivres ou de vents dans une vraie production de musique à l’image. Toutefois, il existe une fonctionnalité qui sera particulièrement intéressante pour les compositeurs qui manipulent de nombreux instruments virtuels et qui sont meilleurs guitaristes que pianistes : l’option « Guitar to MIDI ». Une fois activée, il est possible d’utiliser le GM-800, et donc sa guitare, comme un contrôleur MIDI dans sa STAN. J’ai expérimenté avec les violons de la banque Appassianota Strings de Spitfire Audio (sans utiliser le Control Change 1) et un synthétiseur de la marque UVI. Cela fonctionne correctement, mais il faudra, là aussi, prendre ses repères du point de vue des sensations de jeu.
- 15 – DAW – Appassionata00:26
- 16 – Synth Anthology 400:10
Pour conclure
Le Boss GM-800 est un appareil solide et agréable à utiliser, bien qu’il présente une certaine forme de complexité en raison de ses nombreuses fonctionnalités. On est séduit par son impressionnante bibliothèque de sons et d’effets, tout comme par son système de « scènes », qui permet de concevoir des sons complexes sur les plans sonores et techniques. Néanmoins, si le catalogue est vaste, tout n’est pas irréprochable et certains instruments, notamment orchestraux, ne sont pas toujours convaincants. Nous aurions également souhaité que Boss fournisse un effort pour rendre l’expérience utilisateur plus confortable et plus en phase avec les tendances actuelles en ce qui concerne la partie informatique. On peut affirmer sans risque que le GM-800 trouvera un intérêt auprès des compositeurs qui sont davantage guitaristes que pianistes et qui travaillent avec de nombreux instruments virtuels. Enfin, il convient de prendre en compte le coût du GM-800 en additionnant celui du GK-5 (B).