Il y a un peu plus de 2 ans, le constructeur français Arturia posait un premier pied sur la planète interfaces audio. NAMM 2019, les Grenoblois annoncent deux nouveaux modèles dont l’AudioFuse 8Pre qui nous intéresse aujourd’hui. Essai transformé ?
L’AudioFuse, même si elle n’était pas parfaite, nous avait à l’époque globalement séduits, récoltant au passage 4 étoiles amplement méritées. En effet, pas mal de bonnes idées lui permettaient de se démarquer sur ce marché sursaturé, tout en étant solide, compacte et performante. Autant le dire tout de suite, l’AudioFuse 8Pre est moins originale, et ses fonctionnalités restent simples. Le design est passe-partout, le format rack 1U autorisant moins de fantaisies que le format desktop, mais le tout nous semble bien assemblé et sérieux.
On retrouve sur la face avant les 8 potards permettant de régler les gains des 8 entrées analogiques disponibles. Ces dernières peuvent encaisser des niveaux micro et ligne via des connecteurs de type combo XLR/Jack TRS. Les deux premières entrées placées sur la face avant pourront aussi accepter les niveaux instruments générés par les guitares et basses électriques. Pour chacune des entrées, on pourra activer directement sur la face avant l’inverseur de phase, le pad de –20 dB et l’alimentation 48 V. Une série de 7 LED permettra d’avoir un rapide aperçu du niveau du signal entrant, et deux autres autoriseront à changer la fréquence d’échantillonnage et la source de l’horloge. On peut aussi apercevoir un autre bouton, situé tout à droite, permettant de passer du mode USB (interface audio classique) au mode ADAT. Ce dernier fera fonctionner l’AudioFuse 8Pre comme un convertisseur muni de 8 préamplis afin de l’utiliser conjointement avec une autre interface audio ou une console numérique, par exemple. On termine le tour de la face avant avec les deux potards de volume, un pour la sortie enceintes et un pour la sortie casque. À noter que l’on pourra choisir la source pour les enceintes, à savoir la sortie de la table de mixage virtuelle ou le retour USB de votre ordinateur. Il sera aussi possible de passer en mono. La sortie casque se voit quant à elle affublée de deux connecteurs, un jack 6.35 mm et un mini-jack. La même bonne idée que sur l’AudioFuse première du nom.
À l’arrière, on retrouve les 8 entrées analogiques en combo XLR/Jack TRS, mais il est à noter que les deux premières entrées disposent d’inserts symétriques au format Jack TRS. Plutôt cool et pas si courant que ça. Les 10 sorties analogiques sont en jack TRS, l’E/S Wordclock en BNC et l’E/S ADAT en TOSLINK. On termine avec le connecteur pour l’adaptateur secteur mural et le port USB type C, sachant que ce dernier reste aussi compatible avec ce bon vieil USB 2 disponible sur tous les ordinateurs (et si ce n’est pas le cas, il est temps de changer).
Partie logicielle
Une fois le driver installé, l’AudioFuse Control Center s’ouvre sous nos yeux ébahis. Première remarque : l’interface graphique n’est pas vraiment redimensionnable et prend une bonne partie de l’écran. Heureusement, on pourra replier les entrées, la table de mixage ou les sorties au besoin. Pour le reste, c’est du grand classique, avec des faders linéaires, des pans, des mutes, des solos… L’utilisateur pourra n’afficher que certaines entrées/sorties, grouper des pistes et choisir la source pour chaque entrée. Le choix restera néanmoins limité et on pourra choisir entre plusieurs choses : l’entrée correspondante, par exemple l’entrée 7–8 pour la sortie 7–8, le retour USB correspondant ou encore le Cue Mix. On ne pourra donc pas envoyer n’importe quelle source ou entrée vers n’importe quelle sortie comme on peut le faire sur certaines interfaces audio. De même, il n’existe qu’un seul Cue Mix. On ne pourra donc avoir qu’un seul mixage et il sera par exemple impossible d’envoyer un mix dans les enceintes et un mix différent dans le casque. Ce dernier point est un peu dommage, mais on espère qu’Arturia pourra augmenter les possibilités de son interface audio dans une prochaine mise à jour. On termine quand même par un point positif : une fonction loopback permettra de renvoyer la sortie de la table de mixage virtuelle vers votre séquenceur afin de l’enregistrer. Pratique dans certaines situations. Vous l’aurez compris, l’interface logicielle reste claire et facile à appréhender, même si des limites demeurent bien présentes.
Benchmarks
Nous avons réglé la mémoire tampon au minimum (16 échantillons) afin d’obtenir la meilleure latence : 1.23 ms en entrée et 2.14 ms en sortie (à 96 kHz). Ces résultats sont très bons, même si avec 16 échantillons, il va falloir que votre ordinateur suive. Afin de tester l’interface, nous avons fait des benchmarks avec notre APx515 d’Audio Precision, et nous allons pouvoir comparer les résultats à ceux obtenus avec les interfaces que nous avons précédemment testées. Voici les résultats obtenus avec les niveaux ligne :
Avec une déviation de ±0,024 dB, l’AudioFuse 8Pre obtient un excellent résultat, équivalent à la très performante Scarlett 18i20 (±0,022 dB) testée récemment et principale concurrente sur le secteur. Il n’y a donc rien à redire, et encore moins vu le prix de l’interface. La distorsion est du même acabit, ne dépassant jamais les 0,003 %, c’est même mieux que la Scarlett qui tourne plus vers les 0,005 %. Pour le prix, et même d’une manière générale, c’est toujours aussi excellent.
Avec les préamplis réglés sur 34 dB (sur les 75 dB disponibles !), la déviation n’augmente que très peu (±0,032 dB), c’est un peu plus que la Scarlett (±0,014 dB), mais à ce niveau de précision, autant dire que c’est indécelable à l’oreille. La distorsion est tout bonnement excellente, restant sous la barre des 0,002 % sur la quasi-totalité du spectre. Rien à redire donc pour la partie préamplification qui en plus de la grosse réserve de gain de 75 dB (contre 56 dB pour la Scarlett), reste parfaitement silencieuse (107 dB, contre 100 dB pour la Scarlett). Nous sommes vraiment au niveau des meilleures interfaces testées sur AudioFanzine, tout simplement.
L’entrée instrument a une légère atténuation dans le haut du spectre à partir de 15 kHz et une déviation de ±0,101 dB, mais cela ne gênera pas les guitares et basses électriques. Sa distorsion tourne autour des 0,003 %. On termine avec la sortie casque qui possède la même très légère atténuation dans le haut du spectre (déviation de ±0,119 dB) et une distorsion un peu plus importante quand elle est poussée à fond (0,01 %), mais elle possède une énorme réserve de puissance (2,827 Vrms, contre 1,672 Vrms pour la Scarlett), permettant d’avoir un niveau de cheval peu importe le casque utilisé. Faites quand même attention à vos oreilles !
Conclusion
Avec ses excellentes performances audio, son bundle et ses inserts, l’AudioFuse 8Pre a d’excellents arguments face à la concurrence. Les seules limites concernent la partie interface audio et ses possibilités de routing ainsi que les quelques fonctionnalités que l’on peut retrouver chez la concurrence (2e sortie casque, micro de talkback). Reste à l’utilisateur de savoir si ces choses lui seront utiles. Quant à ceux qui veulent l’utiliser uniquement en ADAT en tant que préampli/convertisseur, ils peuvent y aller les yeux fermés !
Tarif public conseillé : 699 €