Revelator, c'était déjà le nom d'un micro de podcasting (sorti en 2020) et depuis l'année dernière, c'est une série d'interfaces dédiée spécialement aux créations de contenu numérique, c'est-à-dire au nouveau marché sur lequel la concurrence fait rage. Et sur ce terrain, PreSonus tire son épingle...
Voici donc l’io24, qui a récemment trouvé sa suite dans l’io44, version plus simple, encore plus portative mais, cela va de soi, moins complète. Dans le marketing du constructeur, l’io24 est une interface faite pour les podcasteurs, les vlogueurs, les streameurs, etc. et qui doit donc répondre à quelques critères de base :
- portabilité et auto-alimentation
- autant d’entrées et de sorties que possible pour une interface de taille réduite
- bonne capacité de routage numérique pour gérer l’enregistrement et la diffusion de plusieurs sources numériques, de plusieurs mix… pour fluidifier au maximum la gestion des sources en direct
- si possible des effets embarqués en DSP pour pouvoir traiter chaque source à la prise, avec des presets accessibles rapidement
L’io24, comme on le verra répond à ce cahier des charges. Reste à savoir si elle le fait bien…
Coin coin
La première chose qui nous frappe en découvrant l’io24, c’est l’idée que l’on perçoit derrière son design : une forme qui ressemble à une lame de cognée, ou à un bloque-porte. Bref une forme en coin, qui permet de gagner de la place là où il faut (devant) et d’en économiser derrière. On est donc clairement dans une lignée « créateur de contenu », plus que « home-studiste » : comme on le verra, beaucoup de paramètres sont accessibles depuis la façade, modifiables en un tour d’encodeur, rapidement et en direct. L’arrière, en revanche, avec sa panoplie de connectiques, est d’une totale sobriété.
En façade, donc, on trouve deux entrées micro/ligne sur combo XLR/Jack 6,35 mm TRS. Les entrées micro donnent sur des préamplis micro XMAX-L, version adaptée aux plus petites alimentations du préampli XMAX, que l’on trouve entre autres dans la 68C. PreSonus nous annonce jusqu’à 60dB de gain ; on verra ce que l’on mesure de notre côté. À côté des entrées, un petit écran LCD avec son encodeur cliquable : on y reviendra plus tard.
En dessous de chaque bouton d’entrée, un bouton (type hot key), nommé « preset », permet de passer d’une présélection d’effets à une autre, depuis la façade. C’est l’idée que nous avons trouvée la plus intéressante sur cette interface : pouvoir, d’une touche, changer subtilement (ou drastiquement) le son d’une entrée, en direct, durant un live stream par exemple. Attention au côté gadget (bien que, si les effets « voix de Dark Vador » et « écho de stade » sont votre came, on ne va pas vous juger !), mais par exemple la possibilité de rajouter rapidement un gate, pour minimiser les repisses dans un micro ouvert, et de l’enlever aussi rapidement, sans avoir besoin de passer par le logiciel ; ou d’avoir toujours deux presets vocaux prévus, que l’on peut tester rapidement juste avant une interview pour voir celui qui s’adapte le mieux à la voix de l’invité… Bref, il y a pas mal d’idées à développer, selon l’usage de chacun.
À l’arrière, on trouve une entrée et une sortie MIDI (format DIN),
puis deux sorties de monitoring (format jack 6,35 mm TRS) et une sortie casque (jack stéréo 6,35 mm). À notre avis, c’est vraiment la moins bonne idée du lot, et surtout l’idée la moins cohérente dans la conception de l’appareil : les prises casques à l’avant, c’est toujours mieux et plus logique. Mais l’interface est petite, et la place est bien évidemment limitée. L’alimentation se fait par un port USB-C situé lui aussi à l’arrière. On remarquera qu’aucune de ces connectiques n’est fixée au châssis : ce n’est pas catastrophique, mais c’est toujours mieux pour la longévité de l’interface. Tant pis.
L’écran LCD (voir ci-dessous) est assez intéressant. En effet, il fournit l’accès à de nombreuses infos : sur un visuel principal, on observe les niveaux d’entrée, de sortie, le réglage du master, la connexion USB, les 48V et la sélection des presets d’effet. Les deux boutons 1 et 2 permettent ensuite d’accéder à une seconde interface visuelle, donnant à voir, par voie, le gain, les presets, l’alim fantôme et le filtre passe-haut (80 Hz). L’encodeur permet de sélectionner, depuis le visuel principal, trois réglages : volume des sorties monitors, de la sortie casque, et l’équilibre entrées/retour USB. Tout cela demande un petit temps de prise en main mais devient, très vite, totalement instinctif.
Et puisqu’on parle de contrôles, voyons voir le logiciel Universal Control.
Soft qui peut (beaucoup)
Le logiciel est plutôt bien pensé, assez complet, quoiqu’un peu touffu. Il nous faudrait trop de paragraphe pour décrire toutes ses possibilités de mixage, de routage… mais pour faire bref, comme on le voit ci-dessous, dans sa version la plus simple (avec tous les effets désarmés), il propose d’accéder à deux voies pour les entrées physiques, ainsi qu’un canal « playback » et deux flux virtuels (pour l’enregistrement d’application à application). Un canal de réverbe assez simple permet de donner un peu d’espace aux mix (et permet l’accès à des présélections d’usine ou paramétrables). Plusieurs mixs vous sont proposés en sorties, dont certains peuvent être envoyés directement vers des logiciels de streaming, ainsi que la possibilité de créer des mixs monitoring et casque séparés.
Les effets embarqués (égaliseur, compression, gate et limiteur, ainsi que des effets de modulation vocale – detuner, ring modulator, slap back…) sont contrôlables de différentes façons. En premier lieu, chacun d’entre eux est paramétrable (réglage des effets et de leur ordre dans la chaîne), puis les chaînes créées sont enregistrables sous la forme de présélections.
Ces présélections sont accessibles de trois façons : deux d’entre elles sont assignées aux boutons « preset » en façade (à gauche sur la photo ci-contre), six autres peuvent être enregistrées et retrouvées grâce à un sélecteur rotatif (virtuel) qui contient aussi sept préréglages d’usines. Pour finir l’une d’entre elles peut être assignée à un bouton Hot Key (en haut à gauche) qui permet de l’activer rapidement et indépendamment des autres.
Ce logiciel est complété, dans le bundle, par Studio One Artist et l’ensemble des logiciels Studio Magic. Pour finir, cette interface et son logiciel sont compatibles avec macOS, Windows (ainsi que iOS et Android, pour la possibilité de gestion à distance depuis une tablette).
Benchmark
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision. Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD, rapport signal/bruit et déviation des voies, pour les entrées et sorties analogiques. Pour toutes les configurations, je règle le gain pour obtenir le meilleur résultat possible.
Gain max : Contrairement aux annonces de la marque, nous n’avons pu tirer que 40,1 dB des préamplis (avec une THD de 0,77 %). C’est toutefois très suffisant pour les usages avancés par PreSonus.
Résolution : 96 kHz – 24 bit
Commençons par les entrées ligne :
Déviation : bien droit, bien appairé, jusqu’à 2 kHz. Après, on note une déviation de ±0,129 dB dans le haut du spectre.
THD : ici, c’est assez moyen, avec 0,02 % jusqu’à 2 kHz, puis un profil en peigne, avec une série harmonique bien visible, ou la THD monte jusqu’à 0,2 %.
Rapport signal/bruit : 80,135 dB. cohérent avec les résultats notés ci-dessus.
À partir de ces résultats, le reste est à l’avenant. Par exemple, les entrées micro :
Déviation : ±0,101 dB.
THD : 0,013 % jusqu’à 2 kHz, un peu mieux
Rapport signal/bruit : 90,829 dB, donc un peu mieux aussi
Qu’en est-il de la sortie casque ?
Déviation : ±0,546 dB avec des voies moins bien appariés, et l’habituelle chute dans le haut du spectre, à partir de 2 kHz, encore une fois.
THD : Là aussi, on observe une plus grande disjonction entre les voies, avec une courbe autour de 0,01 % jusqu’à 2 kHz, après quoi on retrouve cette perturbation qui ressemble à une résonance.
Rapport signal/bruit : 81,263 dB
Quelle conclusion pouvons-nous tirer de tels résultats ? Dans la gamme de prix, on a vu mieux, certes. Nous pensons en particulier aux Minifuse d’Arturia, ou l’iD14 mkII d’Audient, qu’on trouve désormais presque au même prix. Mais…
Conclusion
…et c’est sur ce « mais » que repose notre jugement, il nous semble que ces interfaces ne combattent pas sur le même front. Ici, l’idée centrale, c’est les effets intégrés grâce aux DSP, et le développement d’une interface et d’un logiciel autour de cela : une interface faites plus pour travailler en direct son contenu, pour gérer ses streams, pour intégrer différentes sources dans un flux, en pouvant intégrer une partie de ce qui serait habituellement de la post-prod directement dans la prod. Et de ce point de vue, on a été séduit par cette petite interface qui fait (et permet de faire) vraiment beaucoup. Clairement, PreSonus ne vise pas vraiment le même public et, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils mettent le paquet pour atteindre leur cible : un objet léger et transportable, plutôt facile à prendre en main, un grand nombre de préréglages disponibles, gérables de différentes façons, pour que chacun puisse développer son workflow personnel… Alors certes, aux yeux de certains, les résultats à la mesure fixent les limites d’utilisation de cette interface, mais c’est aussi ce qui lui donne aussi sa personnalité, son « créneau ». Et puisque, depuis deux ans, tout les fabricants se jettent sur la marché des streameurs et vlogeurs, sur le marché de « la petite interface pour produire des podcasts », alors autant l’avouer : PreSonus nous propose ce que nous considérons, à ce jour, comme une des interfaces les plus abouties pour ce coeur de cible spécifique.