Chez Audio Technica, la variation est d'usage : son célèbre casque M50x a connu de multiples éditions colorées, avec suffixes accolés (RD, BL, DG, MG...), et le voici qui nous parvient aujourd'hui en version casque-micro, version spéciale 2023... pour le streaming, bien sûr !
Au début j’ai cru qu’on m’annonçait la naissance d’un nouvel enfant d’Elon Musk, mais non, l’ATH-M50xSTS est bien un casque. Ce qui est plutôt une bonne nouvelle, car, si je suis toujours content de tester un nouveau casque, je ne montre pas le même enthousiasme pour les excentricités (j’utilise ce terme par souci de politesse) du propriétaire d’X. Au passage, il est plutôt drôle de remarquer que quelqu’un qui souhaite tant laisser son nom dans ce qu’il reste d’histoire à l’humanité n’arrête pas de revenir à la lettre qui a toujours servi de signature anonyme aux illettrés…
C’était donc plutôt une belle journée quand j’ai reçu ce rutilant et gros casque-micro, dont les formes ne m’étaient pas étrangères, puisque j’avais testé le modèle sur lequel il se fonde il y a peu de temps de cela. Un micro-casque, ce n’est pas un produit courant pour les colonnes d’AF, je vous l’accorde, mais puisque nous avons ouvert nos tests à des produits de plus en plus focalisés sur le streaming, il ne nous semblait pas incongru d’y ajouter un casque, d’autant plus que la pratique du direct sur les tubes s’est fortement ouverte aux musiciens depuis 2020 (pas besoin de rappeler pourquoi…). Apparemment, vous pouvez même faire un live stream sur X (ou « Twitter », comme le nomme son propre centre de maintenance toujours pas mis à jour), ce qui nous permet de boucler le propos de cette introduction un brin décousue, et de passer à la présentation du casque !
Spécifications
Le M50xSTS est un casque de type circum-aural, fermé, avec un transducteur dynamique de 45 mm. Son aimant est probablement en néodyme, même si le site du constructeur précise seulement qu’il est réalisé dans une « terre rare » (drôle de choix de communication).
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
- impédance : 38 ohms, s’adapte à toutes les sources
- réponse en fréquence : 15 Hz à 28 kHz
Il est livré avec un seul câble, non détachable, qui est en fait un câble double avec deux terminaisons : une prise jack 3,5 mm TRS, avec adaptateur à vis 6,35 mm, et une connectique XLR pour le micro. Ce double câble est assez gros et lourd, d’une longueur de 2 mètres… Bref, ce n’est pas vraiment le casque que vous allez utiliser également dans les transports en commun ! Son usage se limitera à l’environnement du (home -) studio. D’autant plus que sa double connectique est un peu encombrante (en revanche, même double, le câble reste bien souple)
Si le câble n’est pas facilement changeable, on est content de voir qu’Audio Technica inclut dans l’emballage une autre paire de mousses :
Deux textures différentes, faux cuir ou tissu aéré, selon votre préférence, la température ambiante… C’est vraiment un très bon point, on aimerait que plus de marques s’en inspirent !
Le micro (cardioïde, à électret, dont la cellule est dérivée de celles utilisées pour la série 20) est monté sur un petit bras flexible (type col de cygne) qui permet de bien régler son placement. La flexibilité est excellente, ni trop molle, ni trop raide. On peut faire pivoter le bras vers l’oreille, pour non seulement écarter le micro de la bouche, mais surtout pour activer le commutateur de « mute ». Bien vu, c’est simple d’usage, facile à prendre en main.
On reviendra plus loin sur les performances sonores du micro.
Pour ce qui est son apparence générale, je reprends le propos du test précédent : son design est sobre bien que son apparence d’ensemble soit assez « mastoc », conséquence négative d’une construction plutôt solide et confortable, avec de grosses mousses, des joints et des axes épais… Gros casque, sans nuance esthétique donc, mais solide.
Un seul défaut clair nous est apparu à ce stade : le câble ne permet pas un écart assez grand entre les deux prises (jack et XLR).
Rien que sur notre Minifuse 2, ça commence à être bien écarté, ne prévoyez pas d’utiliser le M50xSTS avec une interface rackable, à moins que vous ne rechigniez pas à décoller les câbles ! Et que faire pour une interface un peu grosse ayant ses entrées à l’arrière et sa sortie casque à l’avant ? Bref… Il va falloir utiliser des cordons « rallonges » dans bien des cas.
Démontable ?
Oui, tout à fait.
Le casque est majoritairement monté avec de petites vis cruciformes, qui permettent un démontage de la plupart des parties. Par exemple :
Pour accéder au transducteur, il faut en premier lieu retirer la mousse d’isolation :
Cela révèle quatre petites vis cruciformes. Celles-ci retirées, on peut soulever la face avant de l’écouteur, qui révèle une plaque de fixation, maintenue par 3 autres vis :
Celles-ci retirées, on peut simplement enlever le transducteur :
Confort
Moyen
Comme nous l’avions dit auparavant, le M50xSTS offre une expérience mitigée : le M50x normal fait environ 285 gr, celui-ci en fait 330 gr et peut, à la longue, causer une certaine fatigue physique. Notons qu’avec le micro relevé (mode mute) il conserve l’intérêt de facilement se porter sur les côtés du cou, plaqué contre les clavicules, sans coller à la mâchoire et donc sans limiter les mouvements de l’utilisateur. Pratique lorsqu’on doit régulièrement mettre et enlever le casque dans un environnement pro.
Isolation
Excellente.
Le couplage des mousses avec le pourtour de l’oreille est parfait, et les nombreux axes de pliage permettent une mobilité accrue des écouteurs, leur permettant de bien s’adapter à toutes formes de tête.
On a particulièrement apprécié le confort de cette matière « aérée », plus douce sur les temps d’écoute longs que les habituelles oreillettes en similicuir du M50x.
Transport
Assez facile.
Oui le casque est gros, mais son pliage est « total », c’est-à-dire que les écouteurs viennent se placer intégralement dans l’arceau. Facile donc de le transporter dans un sac sans qu’il prenne trop de place, ni sans risquer de l’abîmer.
Benchmark
Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
On remarque :
- Une accentuation des basses autour de 100 Hz
- Un creux marqué un peu au-dessus de 300 Hz
- Un autre creux à 3 kHz suivi immédiatement d’un pic important à 4,1 kHz
- Nouveau creux à 5 kHz
- Une accentuation importante des aigus au-dessus de 11 kHz.
On s’attend à un casque très aéré, qui met en avant les attaques, avec des voix bien compréhensibles, dont l’articulation sera plus soulignée que le timbre, et avec des basses bien présentes. Au passage, on note que l’on retrouve parfaitement la courbe constatée auparavant, mais avec des graves nettement plus importants.
Distorsion :
La distorsion mesurée est inférieure à 0,2 % entre 100 Hz et 2 kHz. Même entre 20 et 70 Hz, ou à 4,1 kHz (les deux pics de distorsion), on reste en dessous de 1 %, ce qui est mieux que lors de notre test précédent.
Micro :
Le micro nécessite une alimentation +48 V CC pour fonctionner. On entend sur le test rapide ci-dessous, dans l’ordre :
- effet de proximité (typique d’un cardioïde, avec bas médiums gonflés et des plosives accentuées)
- son en position « normale », clair et distinct
- son en position éloignée
- bruits captés lors de la manipulation du micro
- sons environnants captés par la directivité cardioïde
Ce dernier point est pour nous le seul vrai défaut : étant donné que le micro se place sur le côté de la bouche, et non pas parfaitement dans l’axe de celle-ci, sa directivité cardioïde implique que la réjection maximale ne se trouve plus devant l’utilisateur (là où son interlocuteur se trouve, là où ses mains manipulent des objets), mais sur le côté. Donc tout bruit émis devant soi (comme, dans l’exemple, des doigts tapant sur un clavier – et je précise que j’utilise un clavier silencieux !) est immédiatement capté par le micro. Je suggèrerais donc qu’une directivité plus resserrée (hypercardioïde par exemple) constituerait un choix peut-être plus adéquat.
Écoute
Richard Hawley – Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. On retrouve ce qu’on connaît du M50x, avec quelques modifications : un médium présent (y compris dans le bas médium) rendu avec assez de subtilité, et un aigu bien présent aussi, qui favorise la clarté des articulations. On perçoit également un assez bon équilibre des fréquences entre elles, sauf une sorte « d’absence » dans le haut-médium, où l’on ressent une sorte de creux (particulièrement sur la voix, où c’est assez clair), qui altère certains timbres. L’image stéréo est très bonne, et les queues de réverbe sont faciles à suivre.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. Sur ce morceau, ça marche super bien : la basse (clavier basse en fait) est très bien séparée de la grosse caisse, et le casque la suit jusque sur les notes les plus graves avec une précision et un équilibre des notes entre elles assez redoutable. La voix est très finement définie, y compris ses défauts, grâce à une réponse en fréquence qui monte très haut sans défaillir. L’image stéréo est très bonne.
Massive Attack – Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. La résonance sub de la grosse caisse (perceptible durant le premier couplet) est plutôt bien présente, ou en tout cas bien perceptible lors d’une écoute très attentive. Sur le deuxième couplet, où la voix enchaîne les sonorités en « S », on ne remarque pas de sibilance gênante malgré des aigus très présents. En revanche, la bosse à 4 kHz s’entend assez bien sur la voix : il y a une légère résonance un peu « nasale » sur certaines notes.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Dans l’ensemble la masse de cuivres est assez lisible, bien qu’un peu brouillonne, car comme souvent avec les casques qui filent bien jusqu’à 20 kHz, les cymbales se retrouvent un peu trop en avant et « mangent » les cuivres parfois. La contrebasse est un peu trop gonflée par ce grave très présent, elle en devient un peu « pâteuse ».
Edgar Varèse – Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0:30 et 1:15 min. Ici, la réponse en fréquence accentuée dans l’aigu et dans le grave servent vraiment bien l’enregistrement : ça claque, ça tape, c’est explosif quand il le faut, tout en gardant un bon rendu des écarts dynamiques très importants dans cette composition. Très belle image stéréo : les résonances naturelles de la salle sont bien rendues. Certaines notes fantomatiques des cymbales et des gongs, en arrière plan, restent bien lisibles.
On réitère le seul point faible au bout d’une heure d’écoute attentive : le casque est lourd, un peu trop chaud, et l’on a envie de se libérer le crâne pour quelques minutes…
Conclusion
On peut résumer ainsi notre opinion : cette énième itération du M50x offre de très bonne performances sonores (aussi bien à l’écoute qu’à la captation), et une qualité de construction robuste, qui permettra à ceux qui veulent l’exploiter pour du streaming de travailler avec un objet de qualité. La sonorité du M50x s’adaptera très bien à l’usage des streamers, mettant bien en valeur les voix, tout en étant un bon casque de référence, ou un casque adapté à la prise également. Et s’il est vrai que le micro bénéficierait d’une directivité mieux pensée — à notre avis — cela reste un défaut mineur. En revanche, nous ne pouvons pas omettre, pour ses possibles utilisateurs, de souligner qu’il a « les défauts de ses qualités », comme on le dit couramment : une construction solide, mais lourde, une isolation excellente, mais qui tient chaud, une connectique sérieuse, mais encombrante… Il s’agit donc d’un casque qui imposera quelques contraintes, non négligeables, mais pour une qualité sonore indéniable.