Overloud est un éditeur de plug-ins qu’on ne présente plus. Les qualités des produits de la marque sont indéniables, l’équipe d’Audiofanzine peut en témoigner. Cependant, je dois bien avouer qu’à titre personnel, je n’ai jamais eu l’occasion de me pencher sur l’un de leurs joujoux. Du coup, lorsque la rédaction m’a demandé si j’étais intéressé par un banc d’essai de la nouvelle mouture de leur simulateur d’ampli guitare/basse, j’ai bien entendu sauté sur l’occasion !
Alors évidemment, je ne suis pas bien placé pour juger des avancés entre TH3 et les versions précédentes. Toutefois, j’ai une certaine connaissance de la concurrence – Guitar Rig de Native Instruments, Bias Desktop de Positive Grid, Amplitube 4 que j’ai testé récemment, ainsi que des freewares en veux-tu en voilà. De plus, un regard neuf, complètement vierge de tout a priori est toujours intéressant, n’est-ce pas ? Voyons donc ce que l’engin a dans le ventre…
OPI d’Overloud
Balayons d’emblée les questions techniques. TH3 est disponible aux formats VST, AU, RTAS et AAX, ainsi qu’en version Standalone pour Mac et PC (32 et 64-bit). L’installation est d’une simplicité enfantine. Notez que l’achat d’une licence donne droit à l’autorisation sur 3 ordinateurs ainsi que sur une clé USB. Niveau consommation en ressources, une instance oscille entre 0,30 et 0,50 % sur ma machine (Mac Pro fin 2013 Hexacœur Xeon 3,5 GHz – 32 Go DDR3), cette variation dépendant de la complexité du patch utilisé. TH3 est donc relativement peu gourmand. J’ai cependant constaté des pics de consommation autour de 0,70 % lors du passage d’un preset à un autre. Rien de rédhibitoire en soi, mais cela s’accompagne malheureusement d’une altération sonore qui, bien qu’extrêmement brève, n’en est pas moins gênante. Enfin, sachez que TH3 n’induit aucune latence supplémentaire, ce qui garantit un confort de jeu uniquement limité par l’incompressible latence de votre carte audionumérique.
Passons maintenant aux choses sérieuses. À la première ouverture, TH3 est « vide ». Afin d’obtenir un premier son, deux options s’offrent à vous via les panneaux latéraux escamotables « Presets » et « Components ». En tant que nouvel utilisateur, j’ai naturellement commencé par naviguer à vue dans l’océan des présets. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’éditeur italien n’est absolument pas avare en la matière avec plus de 1 000 présets couvrant tous les styles musicaux ! S’en est même trop à mon humble avis, d’autant que le gestionnaire de banques/présets ne comprend pas de fonctions telles que la recherche ou des tags par genre. Bref, pour découvrir rapidement l’engin cela peut faire la blague cinq minutes, mais pour obtenir un résultat sonore précis, l’utilisateur aura plus vite fait de partir de zéro et de constituer petit à petit son patch via les « Components ».
Situé sur la droite, ce panneau « Components » donne accès aux pédales, amplis, baffles, etc. qui s’insèrent par simple glisser/déposer au cœur de l’interface. Des options de tri permettent de n’afficher que tel ou tel type de composants. À l’usage, l’ensemble est somme toute agréable de prime abord, mais… Car il y a un « mais » de taille niveau ergonomie : la navigation laborieuse au sein du patch par glissement latéral à la souris. Plus vous ajouterez de composants et plus il sera pénible de vous balader dans votre chaîne pédales/ampli/baffle/effets. Et les options de zoom (de 25 % à 200 %) ou de redimensionnement de l’interface ne suffisent pas à faire passer la pilule.
Autre point noir ergonomique, s’il est possible de déplacer un élément de la chaîne d’un endroit à un autre par un glisser/déposer, il est impossible de le faire pour plusieurs éléments en même temps. Pour un patch simple, ce n’est pas forcément la mer à boire. En revanche, cela aurait été diablement pratique lors de l’utilisation de la fonction « Split chain ». En effet, imaginons que vous ayez un patch basique avec une ou deux pédales, un couple ampli/baffle et une réverbe en sortie. Tout à coup, l’envie vous prend de doubler le plaisir en ajoutant une deuxième chaîne via le « Split chain ». L’ajout du split s’effectue toujours via glisser/déposer à l’endroit de votre choix comme le montre l’image ci-contre, et les points d’entrée/sortie ne sont pas mobiles. Sentez-vous venir le problème ? Avant de pouvoir constituer la deuxième branche du split, il vous faudra déplacer un à un les éléments du patch original sur la première branche… Une fonction de sélection/déplacement multiple ou quelque chose comme un couper/coller auraient vraiment pu faciliter la manœuvre.
Malgré tout ça, Overloud a tout de même inclus quelques fonctions plutôt bien pensées que je vous liste en vrac :
- Section « Level » d’ajustement du niveau d’entrée afin d’optimiser le réglage de votre DI ;
- « Master controls » avec Noise Gate, choix de la sensibilité en fonction des micros double ou simple bobinage, EQ basique en guise de balance pour le haut et le bas du spectre, potards « Reverb » et « Delay » afin de majorer ou minorer de façon globale ces effets pour tous les présets ;
- Fonction Undo/Redo bien pratique ;
- Remplacement « à chaud » de n’importe quel composant par un composant du même type via un simple clic droit ;
- Ajout direct du HP correspondant à un ampli via clic droit ;
- Fenêtre de propriétés des HP pour le choix des micros, leur mélange ainsi que l’ajout d’un micro à l’arrière ou d’un micro incliné à 45 °, le choix de l’ambiance et la fonction « Respire » que vous entendrez plus tard ;
- Placement simplissime des micros devant les HP ;
- Import/export et copier/coller dans le panneau Presets ;
- MIDI Learn simple et puissant via clic droit sur le composant à piloter et choix d’une affectation MIDI globale (donc commune à tous les presets) ou liée au preset actuel.
Désolé de ne pouvoir détailler tout cela, mais ce banc d’essai est déjà relativement long et il nous reste encore beaucoup de choses à aborder, la principale étant le nerf de la guerre, à savoir le son !
VQ
Avec TH3, Overloud cherche clairement à occuper le terrain en masse : 69 amplis guitare, 3 amplis basse, 35 HP guitare, 2 pour basse et la possibilité d’utiliser des réponses impulsionnelles de HP tiers, 75 pédales et racks d’effet, et 18 modélisations de micro. Face à une telle abondance, vous comprenez bien qu’il m’est impossible de tout décrire par le menu, c’est pourquoi je vous invite à jeter un œil sur le site de la marque afin de découvrir la liste complète du matériel virtuel disponible. Une remarque cependant concernant la quantité d’amplis annoncée. Le « 69 » est à prendre avec des pincettes. En effet, les versions physiques de certains amplis modélisés possèdent plusieurs canaux. Or, plutôt que de créer une seule modélisation avec tous les canaux pour ce genre d’ampli, les Italiens ont préféré les « découper » en plusieurs modélisations, une par canal. Le nombre d’amplis disponible s’en trouve donc artificiellement gonflé. Enfin, il y a tout de même largement de quoi faire malgré cette « petite astuce comptable ».
La quantité, c’est bien, mais c’est un argument commercial qui tombe un peu à plat lorsque la qualité n’est pas au rendez-vous… La bonne nouvelle, c’est qu’ici l’éditeur italien prouve une fois de plus que sa réputation n’est pas usurpée ! Les simulations d’amplis/HP sont nettement à la hauteur de ce qu’il y a de mieux actuellement. Les racks d’effets tirent également très bien leur épingle du jeu, avec une mention spéciale pour les réverbérations, ce qui n’est pas étonnant puisqu’elles sont basées sur les plug-insBreverb etSpringAge de la marque. Quant aux pédales, elles sont tout aussi convaincantes à un détail près selon mon oreille. TH3 intègre des modélisations de pédales que je possède « IRL », à savoir une ProCo Rat et une Big Muff PI. Prises séparément, les modélisations me paraissent plus qu’honnêtes. En revanche, lorsque j’ai essayé de chaîner les deux, je n’ai pas réellement retrouvé les sonorités que j’attendais. Je ne dis pas que le rendu est inintéressant, mais l’interaction à laquelle je suis habitué n’est pas au rendez-vous à mon humble avis.
Prenons à présent un instant pour évoquer le confort de jeu. Sur l’ensemble des produits similaires que j’ai eu l’occasion de titiller, TH3 est sans nul doute celui qui m’a procuré les meilleures sensations de jeu. Je ne saurais absolument pas expliquer le pourquoi du comment, mais au-delà de toutes considérations d’esthétiques sonores, TH3 a su, plus que quiconque, me donner cette impression si particulière de réellement palper chaque note du bout des doigts. Chapeau bas Overloud !
Avant de passer à la séance d’écoute, une dernière remarque concernant l’accordeur intégré. Bien qu’il puisse dépanner, ce dernier n’est pas franchement ce que l’on pourrait qualifier de crème de la crème. En effet, sa petite taille le rend peu lisible et nuit donc à son utilisation, dommage.
TH3 AJ
Face à la multitude de possibilités offertes par TH3, difficile de réaliser une session d’écoute exhaustive. Néanmoins, voici quelques exemples sonores qui vous donneront peut-être envie de juger la bête par vous-même.
Commençons par des extraits utilisant uniquement des simulations d’ampli brutes avec différentes combinaisons de guitares et micros :
- 01 Orange Telecaster Std Neck 00:22
- 02 Orange Telecaster Std Bridge + Neck 00:22
- 03 Orange Telecaster Std Bridge 00:21
- 04 Orange Les Paul Std Neck 00:23
- 05 Orange Les Paul Std Bridge + Neck 00:23
- 06 Orange Les Paul Std Bridge 00:22
- 07 Brunetti Metro Telecaster Std Neck 00:21
- 08 Brunetti Metro Les Paul Std Neck 00:23
- 09 Brunetti Metro Strat Std Neck 00:21
- 10 Plexi Telecaster Std Bridge + Neck 00:23
- 11 Plexi Les Paul Std Bridge + Neck 00:22
- 12 Plexi Strat Std Middle 00:21
Les deux exemples suivants utilisent un préset de type Jazz avec une légère réverbération :
- 13 Jazz SG Std Neck 00:13
- 14 Jazz Gretsch WF Neck 00:15
Le riff funky ci-après illustre la technologie Respire qui, bien que subtile, contribue grandement au réalisme du rendu :
- 15 Funk Epi Les Paul Std Bridge Respire Off 00:17
- 16 Funk Epi Les Paul Std Bridge Respire On 00:17
Voici à présent quelques extraits utilisant des présets tendance Metal :
- 17 Metal Ibanez RG3550MZ US Death 00:18
- 18 Metal Ibanez RG3550MZ Metalcore Lead 00:18
- 19 Metal Ibanez RG3550MZ US Trash 00:18
- 20 Metal Ibanez RG3550MZ Prog FX 00:18
Les fichiers ci-dessous utilisent un de mes chouchous : la pédale de distorsion Brunetti Vanilla. D’abord le son du patch avec seulement l’ampli Brunetti Metropolitan, puis avec une petite dose de vanille, et enfin avec une bonne ration dégoulinante :
- 21 Vanilla Rick 330MG Dry 00:21
- 22 Vanilla Rick 330MG Light 00:21
- 23 Vanilla Rick 330MG Heavy 00:21
Pour finir, trois extraits employant des chaînes de pédales/effets bigarrées.
- 24 FX Rick 330MG Trem 00:24
- 25 FX Rick 330MG Slow Space 00:25
- 26 FX Rick 330MG Organizer 00:24
Voilà, c’est tout pour ce rapide tour d’horizon des sonorités de ce beau joujou. N’étant pas bassiste et n’ayant aucun fichier DI digne de ce nom à vous présenter, cette session fait malheureusement l’impasse sur la 4 cordes. Sachez cependant que cette nouvelle mouture propose 3 nouveaux amplis pour basse ainsi que 2 HP supplémentaires par rapport à la version précédente.
Looper HEV ?
Avant de conclure, un petit mot concernant la fonction « Looper ». Si ce dernier ne remplace bien évidemment pas un produit hardware ou software dédié, il est tout de même d’une qualité suffisante pour enregistrer rapidement des idées musicales ou se faire une « backing track » sur le pouce dans le but d’improviser. Cependant, son utilisation m’a laissé un goût d’inachevé… En effet, la bestiole propose des options intéressantes sans aller jusqu’au bout des choses, notamment à cause d’une implémentation MIDI partielle. Par exemple, il est possible d’ajouter un nombre impressionnant de couches d’overdub (je suis allé jusqu’à 12 avant de me lasser) et de réduire au silence ou mettre en solo n’importe quelle couche… à la souris. Pareil pour le bouton « Clear all » pour remettre le Looper à zéro, alors que ce serait tellement plus pratique de piloter ça depuis un pédalier MIDI. Les options de volume et panoramique de l’enregistrement/overdub ne sont également réglables qu’à la souris et avant enregistrement, pas a posteriori. Autre curiosité, le clic sur la croix d’une couche pour la supprimer entraîne l’arrêt de la lecture des autres boucles. Et pour achever la série des bizarreries, ce Looper intègre un métronome absolument inutile puisqu’il ne se déclenche qu’une fois l’enregistrement lancé… Difficile d’être carré dans cette situation-là, une option de « pre-roll » lançant le clic au moins une mesure avant d’enregistrer aurait été plus que bienvenue. Du côté du verre à moitié plein, on se réjouira tout de même de la présence d’un bouton « Reverse » pour jouer les boucles à l’envers, d’une fonction « Autostart » très efficace pour déclencher l’enregistrement à la première note jouée, ainsi que de la possibilité de sauvegarder le mixage des boucles dans leur ensemble ou en couche séparée.
Bilan HO
D’un point de vue strictement sonore, TH3 me semble être une belle réussite. La diversité des modélisations proposées et la malléabilité de la reprise micro des HP permettent vraiment d’obtenir un rendu sonore exemplaire quel que soit le style musical recherché. De plus, les sensations de jeu procurées placent le dernier né d’Overloud dans le haut du panier. Dommage que quelques défauts ergonomiques viennent noircir le tableau. C’est d’ailleurs cet état de fait qui lui coûte une étoile et un award… Toutefois, si vous êtes à la recherche d’un premier ampli virtuel à tout faire, TH3 est un candidat sérieux que je vous invite à tester sans attendre.
Tarif public conseillé : 299 €
Téléchargez les extraits sonores (format FLAC)