Comme nous l'avons vu la semaine dernière, l'utilisation d'un préampli micro externe peut s'avérer délicate pour un débutant. Afin de ne pas tomber dans le piège du "trop de coloration tue la coloration", je vous propose aujourd'hui une méthode qui devrait vous aider à mieux appréhender la chose.
Trop point n’en faut
Tout d’abord, il convient de bien connaître votre outil de travail. Pour ce faire, je vous invite dans un premier temps à ne pas faire l’économie d’une lecture attentive de la notice de votre appareil, car le constructeur y a certainement inclus des recommandations quant à son fonctionnement optimal. De plus, prenez également bien le temps d’effectuer des prises tests sans aucune considération artistique en suivant la démarche présentée lors d’un précédent article. Le but de la manoeuvre est ici de comprendre comment réagit votre préampli. Quand et comment altère-t-il la texture sonore ? Quels sont les conséquences sur la dynamique lorsque vous le poussez un peu ? Notez que dans l’idéal, vous devriez travailler avec un micro neutre afin de bien distinguer le caractère sonore de votre préampli lors de cette phase d’apprentissage. À défaut, utilisez un micro dont vous connaissez la pâte sonore sur le bout des doigts. Je sais que tout cela demande du temps, mais croyez-moi sur parole, ce sera en fin de compte du temps de gagné lorsque vous travaillerez réellement sur vos productions.
Bien, à présent voyons comment mettre vos constatations en pratique. Vous avez certainement relevé que le terme « coloration » revient souvent ces dernières semaines. Vous vous doutez bien que ce n’est pas par hasard. En effet, l’analogie avec la notion de couleur convient parfaitement.
Votre préampli micro peut être considéré comme un crayon de couleur sonore et plus vous « taperez dedans », plus vous obtiendrez une couleur sonore saturée. Or, lorsque vous dessinez, si vous appuyez tout le temps comme un bourrin sur votre crayon de couleur, il y a de fortes chances pour que le rendu final ne soit pas des plus attrayants. Mieux vaut nuancer la pression pour obtenir de beaux dégradés et ainsi imprimer un certain relief à votre oeuvre. Sauf que la maîtrise d’un dégradé, ça n’est pas forcément évident pour un dessinateur débutant. Par conséquent, je vous invite dans un premier temps à travailler sur une notion plus simple que je qualifierais de « contraste fort ».
Le principe du « contraste fort » est assez basique et pourrait se résumer ainsi : le noir ne ressort jamais mieux que lorsqu’il est entouré de blanc. Retranscrit dans le monde de l’audio, cela signifie que si vous souhaitez habiller un son d’une belle « coloration analogique », mieux vaut qu’il soit entouré de sons « neutres ». Ainsi, je vous invite à utiliser votre préampli en restant « dans les clous » sur la majorité de vos instruments de façon à ce qu’ils soient le plus neutres possibles, sauf sur un seul élément où vous pouvez y aller plus franchement afin de le faire sortir du lot. Attention, je ne vous enjoins absolument pas ici à forcer le trait au point de finir par déchirer la feuille ! Poussez juste votre joujou jusqu’à ce que vous perceviez distinctement sa couleur dans votre prise, ni plus, ni moins. De plus, il est primordial que vous sachiez tenir la bride de votre signal en sortie de votre préampli de façon à correctement attaquer votre convertisseur. Si vous avez oublié de quoi il s’agit, relisez de toute urgence cet article.
Vient à présent la question du choix de l’élément à colorer. Là, il n’y a malheureusement pas de réponse miracle tant cela est subjectif : choisissez celui sur lequel ça sonne dans le contexte de votre oeuvre ! Il convient de choisir celui pour qui la valeur ajoutée de la coloration est en adéquation avec vos objectifs de production. Cela peut être l’instrument central de votre titre de façon à le mettre encore plus en avant, mais cela peut aussi être un instrument secondaire dont le son vous semble trop « commun » à la source et qui n’arrive donc pas à trouver une place naturelle dans le mix. Bien entendu, plusieurs éléments de votre morceau peuvent correspondre à ce cahier des charges. Pourtant, je vous incite fortement à vous limiter à un seul d’entre eux dans un premier temps afin de bien éduquer votre oreille.
Une fois que vous aurez acquis la maîtrise de cette technique du « contraste fort » en l’ayant mise en pratique sur plusieurs productions, il sera alors temps de passer à la deuxième étape que nous verrons dès la semaine prochaine !