C'est une rentrée particulièrement chargée que nous propose Native Instruments cette année, avec l’arrivée, entre autres nouveautés, de la troisième version de Maschine Mikro, étonnante à plus d’un titre.
Sortie le 18 septembre, Maschine Mikro Mk3 surprend d’abord par son prix de 249 €, ce qui constitue tout de même une baisse de cent euros par rapport aux versions précédentes ! Qu’est-ce que la belle a dans le ventre et que cache cette baisse de tarif ? C’est ce que nous allons voir tout de suite ensemble.
Qui est-elle ?
La Maschine Mikro troisième du nom nous est livrée dans sa boîte en compagnie d’un câble USB, d’un ensemble de petits flyers comprenant les informations d’enregistrement du produit, la mention d’une offre spéciale du site Sounds.com et des autocollants. Aucune documentation n’est fournie sur papier mais une version PDF pourra en revanche être téléchargée sur le site du fabricant. Pour l’instant, le manuel n’existe qu’en anglais mais Native Instruments a l’habitude de proposer ses modes d’emploi dans plusieurs langues : je ne me fais donc aucun souci quant à l’apparition prochaine d’une version française.
La Maschine Mikro Mk3 mesure 320 × 177 × 45 mm pour un poids de 1,2 kg, ce qui en fait un modèle légèrement moins profond et moins haut qu’une Maschine Mikro Mk2. C’est d’ailleurs moins à cette dernière qu’à la récente Maschine Mk3 que l’on pense en la voyant. La matrice de 4×4 pads est ainsi entourée de quasiment les mêmes boutons et l’on y retrouve les mêmes commandes de transport, volume, swing et d’accès aux paramètres de plug-ins. On se réjouit enfin de la reprise du ruban tactile et de ses fonctions associées, qui sont désormais un standard chez Native Instruments.
Accompagné de trois nouveaux boutons dont nous reparlerons, l’écran semble en revanche avoir subi une très forte cure d’amaigrissement tandis que la face arrière ne propose qu’une prise USB et une encoche Kensington. On n’y verra point d’entrées et sorties audio comme sur la Mk3 « normale », la Mikro n’embarquant pas de carte audio intégrée contrairement à sa sœur aînée.
D’où vient-elle ?
Ce tour du propriétaire ne laisse aucun doute quant à la nature profondément « Maschinesque » de la bête et je ne peux pas m’empêcher de re-souligner ici le plaisir éprouvé à jouer sur les pads hérités de la Mk3. Leur largeur et leur excellente réactivité offrent un confort qui permet une subtilité et un plaisir de jeu énormes, n’ayons pas peur des mots. Mais la filiation avec la récente Maschine ne s’arrête pas là. Au plaisir de l’utilisation des pads nouvelle version s’ajoute celui de retrouver l’accès simplifié aux fonctionnalités de base comme l’activation des modes « pad » ou « keyboard » qui ne nécessitent plus de naviguer dans des sous-menus sans fin mais sont maintenant directement accessibles d’une simple pression sur un bouton. On se réjouira également du maintien du ruban tactile dans le design de ce nouveau contrôleur, devenu comme je le disais un standard chez Native Instruments depuis son apparition en huit exemplaires sur la Maschine Jam il y a deux ans. Et l’on retrouve toujours le même plaisir de pouvoir bénéficier d’un outil permettant à la fois le contrôle continu ou discret d’un paramètre donné.
À la lecture de ce paragraphe, on pourra remarquer qu’en évoquant la filiation de la Mikro Mk3 au sein de la famille Maschine, je parle beaucoup de la Mk3 mais finalement assez peu de la Mikro mk2, dont elle est pourtant le successeur direct. C’est que, par rapport à cette dernière, la Mikro mk3 présente d’énormes différences, et notamment pas mal d’améliorations.
Les caractéristiques évoquées plus haut comme les nouveaux pads de qualité supérieure aux anciens et l’accession directe à certaines fonctions rendent de ce point de vue l’interaction avec la Mikro mk3 infiniment plus agréable qu’avec les versions précédentes. Et je ne parle même pas de l’utilisation des Perform FX que l’apparition du ruban tactile rend enfin pleinement cohérente. L’absence de ce dernier sur les modèles précédents de Maschine Mikro faisait en effet perdre beaucoup d’intérêt à cette fonctionnalité.
On assiste donc globalement sur la Mikro mk3 à une fluidification de l’ergonomie sur un certain nombre de points par rapport aux ancêtres du contrôleur. Mais au-delà de ces évolutions, c’est tout autre chose qui se dessine.
Où va-t-elle ?
Il n’aura échappé à personne que la taille de l’écran de la Maschine Mk3 n’a plus rien à voir avec celle des modèles précédents. C’est loin d’être un détail et cela s’avère être finalement assez révélateur. Il convient à ce stade de considérer une chose : les fonctionnalités dorénavant accessibles directement par un bouton et non plus par la navigation dans des menus peuvent rendre caduque la mise à contribution d’un écran trop large. Vous me rétorquerez que ce n’était pas le cas sur la Maschine Mk3 qui, malgré l’accès direct aux fonctions sus-citées se pare de deux magnifiques écrans couleur. Ce à quoi je répondrai tout d’abord que nous avons affaire ici à un contrôleur dont le design vise à lui faire occuper le moins d’espace possible, et ensuite que la question centrale n’est pas là.
Cette réduction de l’écran entre la Mikro mk2 et la Mikro mk3 signifie bien autre chose. En effet, les anciennes itérations de Maschine Mikro avaient été clairement imaginées comme des contrôleurs Maschine « normaux » en version réduite. Sur ces dernières, l’accès à certaines fonctionnalités pouvait éventuellement se trouver légèrement complexifié par l’absence de second écran et celle des encodeurs rotatifs des Maschine « normales ». Mais au prix de ces quelques compromis ergonomiques, on retrouvait grosso modo la même philosophie d’utilisation entre ces dernières d’un côté et celles au format « Mikro » de l’autre. Si le système Maschine reposait déjà sur l’interaction entre un contrôleur matériel et un logiciel, l’idée était tout de même d’offrir à l’utilisateur une expérience la plus proche possible de l’utilisation des beatboxes matérielles de type MPC.
Avec la Mikro Mk3, Native Instruments instaure un nouveau rapport entre l’utilisateur, le contrôleur Maschine et le logiciel associé. Si par le passé, celui-cil pouvait être globalement cantonné à un fonctionnement en tâche de fond, il est ici pleinement mis à contribution. En effet, contrairement à ses ancêtres, la Maschine Mikro Mk3 s’avère pensée davantage comme un contrôleur de son soft associé et beaucoup moins comme la matérialisation physique de ce dernier. Et c’est bien cette nouvelle philosophie-là que traduit la réduction de l’écran citée plus haut, puisque c’est maintenant principalement l’écran de l’ordinateur qui servira d’affchage principal.
Cette nouvelle philosophie s’avère d’ailleurs parfaitement cohérente si l’on considère d’autres d’éléments de l’univers Native Instruments. Tout d’abord, on constate que les claviers Komplete Kontrol S permettent de piloter le logiciel Maschine grâce à leurs écrans et encodeurs rotatifs presqu’aussi bien que les contrôleurs dédiés, et que la chose qui leur manque principalement dans ce contexte, ce sont des pads. On ne s’étonnera donc guère que les dimensions de la nouvelle Maschine Mk3 correspondent quasi parfaitement à l’espace disponible sur les claviers en question.
Par ailleurs, comme je l’ai écrit plus haut, Native Instruments a sorti il y a deux ans le Maschine Jam, dont nous avons vu qu’il marquait déjà une rupture importante dans la philosophie Maschine de par son approche et ses fonctionnalités totalement nouvelles. Si la Mk3 « normale » reprenait certaines des nouveautés proposées initialement par le Jam, il manquait à l’écosystème Maschine un appareil moins cher, pouvant s’utiliser en parfaite harmonie avec le Jam tout en évitant en bonne partie les doublons de fonctionnalités, et le tout dans un environnement se rapprochant davantage de la production studio que de la scène. C’est là aussi chose faite avec la mikro Mk3 dont le prix additionné à celui du Jam (249 € + 289 € = 538 €) ne dépasse que d’une vingtaine d’euros celui d’une Maschine Mk3 (519 €).
Ceci étant dit, il convient de nous plonger un peu plus en détail dans les implications liées à ce changement de philosophie.
Comment y va-t-elle ?
Avec la mikro Mk3, on abandonne donc l’idée d’un workflow principalement centré sur le hardware. À ce titre, l’une des suppressions les plus révélatrices est celle de la fonction « Save » pourtant emblématique des contrôleurs Maschine ! Le changement de philosophie se ressent dès le début du travail musical : adieu le browsing au contrôleur uniquement. En effet, le système proposé par la Mikro mk3 et matérialisé par les trois petits boutons à gauche de l’écran impose de choisir via la souris l’onglet dont on pourra ensuite explorer le contenu via l’encodeur rotatif. On peut légitimement se demander pourquoi Native Instruments n’a pas songé à affecter les flèches de son contrôleur à la navigation entre les catégories du browser.
On pourra toutefois accéder directement via le contrôleur à la liste des favoris ou bien encore aux derniers projets en date, et on appréciera l’aspect pratique de ces derniers points. Ce qui est valable pour le chargement des plug-ins l’est également pour leur suppression ou bien leur désactivation : tout cela se fait désormais uniquement via l’ordinateur. Au rayon des « pertes d’autonomie » par rapport aux versions précédentes de la Maschine Mikro, on regrettera également de ne plus pouvoir bénéficier du plein accès direct aux paramètres de mixage. Si le volume global du projet et les volumes individuels de chaque groupe et Sound peuvent être réglés sans recourir à l’ordinateur, il n’en va pas de même pour les panoramiques et les sorties auxiliaires. Un peu dommage.
Bien entendu, on se doute que la taille de l’écran ne permet plus l’édition de samples sur le contrôleur. Mais s’il est aussi petit, l’écran n’en est pas moins parfaitement lisible quels que soient la luminosité extérieure et l’angle de vue que l’on adopte, ce qui constitue un très bon point.
J’entends déjà de nombreuses voix s’élever dans le lointain pour s’insurger contre toutes ces restrictions d’autonomie, et c’est un point de vue que je peux totalement comprendre. Lesdites restrictions restent toutefois parfaitement cohérentes au vu de l’évolution de philosophie que nous avons évoquée. Et il faut reconnaître une chose : l’ergonomie hybride issue de l’utilisation conjointe du contrôleur matériel, de la souris et de l’écran d’ordinateur fonctionne parfaitement bien ! On a vite fait de tirer pleinement parti de cette configuration et de se tailler un workflow efficace où même le petit écran de la Mikro révèle toute son utilité en tant qu’affichage d’appoint. Et bien entendu, le workflow est encore accéléré si l’on dispose d’une Maschine Jam.
Il y a en revanche certaines limitations ou suppressions de fonctionnalités qui ne s’expliquent pas par ce changement de philosophie. Ainsi, si la Maschine Mikro dispose d’une fonction Snapshot au même titre que le Jam ou la Mk3, il est impossible sur cette dernière d’effectuer plus d’une seule sauvegarde des paramètres. Et cela va malheureusement plus loin, car si vous ouvrez sur votre système un fichier Maschine disposant de plusieurs snapshots (donc créé avec une Maschine Mk3 ou une Jam), vous ne pourrez pas accéder à ces derniers avec la Maschine Mikro mk3. C’est très dommage, et cela pourrait presque être considéré comme de l’incitation à l’achat de produits supplémentaires de la part de Native Instruments.
Enfin, je me dois de souligner l’incompréhension que je ressens face à la suppression d’une fonctionnalité en particulier : la possibilité d’utiliser la Maschine Mikro mk3 comme un simple contrôleur MIDI/USB autonome ! Bien entendu, on peut toujours passer par le logiciel Maschine et router des messages MIDI issus de ce dernier vers une STAN-hôte ou bien une sortie physique. Mais ce n’est pas forcément pertinent lorsque l’on est à la chasse de la moindre ressource processeur disponible et que l’on souhaite juste utiliser les pads de la Maschine pour piloter un VST de percussions dans sa STAN habituelle. Espérons que Native Instruments propose rapidement une mise à jour afin de corriger ça !
Conclusion
Avec la Maschine Mikro mk3, c’est à un changement de paradigme que l’on assiste. Tous les précédents contrôleurs de la série représentaient en quelque sorte des matérialisations physiques du logiciel auquel ils étaient reliés et proposaient à l’utilisateur une expérience aussi déconnectée de l’ordinateur que possible. Il en va autrement avec la petite dernière.
Celle-ci se présente bien davantage plutôt comme un outil qui viendrait assister l’utilisation du logiciel, et non l’inverse. On constatera même qu’elle complétera particulièrement bien un setup « Native Instruments » déjà constitué par exemple d’un clavier Komplete Kontrol S ou d’une Maschine Jam. Bien entendu, ce changement de philosophie se fait au prix de nombreuses coupes dans l’« autonomie » qui caractérisait les précédents modèles. Mais si vous ne détestez pas le travail de production musicale sur un écran d’ordinateur et sur le logiciel Maschine en particulier et que vous cherchez un contrôleur « Maschine » pour un tarif plus que raisonnable, cette petite Mikro Mk3 pourrait se révéler un choix fort intéressant.