Après l’OB-X, l’OB-Xa est le deuxième synthé de la lignée des OB et sans aucun doute le plus célèbre d’entre eux. Simple et généreux, il a marqué à jamais la musique des 80’s. Voyons pourquoi…

Blue line
À gauche du clavier, la section de modulation s’est musclée par rapport à l’OB-X. On retrouve les deux leviers de modulation à ressort (modulation/pitchbend), dont le mode d’action est si singulier : le pitchbend est à droite et est inversé ; il peut agir sur plus ou moins 2 ou 12 demi-tons, sur les 2 VCO ou uniquement sur le VCO2 (utile lorsque les VCO sont synchronisés). Le levier de modulation est à gauche et fonctionne en traction ; il pilote la quantité de vibrato (LFO indépendant des LFO principaux) sur les VCO (VCO1, VCO2 ou les deux). L’action des leviers peut être activée/coupée sur chaque canal dans les modes Split/Double. On peut transposer l’ensemble du synthé sur plus ou moins une octave avec des touches idoines. Côté clavier, c’est le même modèle Pratt-Read 5 octaves que sur l’OB-X, une merveille quand il est bien entretenu, une horreur lorsqu’il est rincé (touches décalées, mécanique claquante, faux contacts). Nous l’avons entièrement restauré.
Caractère bien trempé
Les nappes, strings, cuivres et polysynths sont emblématiques, avec un soyeux, une rondeur et un bas de spectre énorme, suivant que l’on utilise un filtre 2 ou 4 pôles. Les deux modes ont une différence de couleur beaucoup plus marquée que ceux de l’OB-8. C’est lié au fait qu’ils utilisent chacun une électronique spécifique. Le mode 4 pôles de l’OB-8 est presque trop sage à côté de la patate du mode 4 pôles de l’OB-Xa ! Le mode 2 pôles rend hommage à l’OB-X. D’ailleurs, on se prend vite au jeu en créant de nombreuses déclinaisons à partir d’une même base, en jouant sur les formes d’ondes, la quantité de modulation de la PWM par le LFO, les ouvertures de filtre ou la réponse des enveloppes. Mais ce ne sont pas les seuls domaines de prédilection de l’OB-Xa, puisqu’on trouve d’excellents orgues claquants, des pianos électriques émouvants, de plus ou moins subtiles synchro et d’énormes portamento polyphoniques façon générique THX. On n’a pas la souplesse des modulations de l’OB-8, on reste dans du classique, mais quel classique ! C’est d’ailleurs surprenant qu’une même machine puisse être tour à tour émouvante et imposante.
Quatre à huit
On passe au filtre, ou plutôt aux filtres. Il s’agit de deux filtres passe-bas résonnants fonctionnant alternativement en mode 2 ou 4 pôles. On écrit filtres au pluriel, parce que chaque mode dispose de son propre CEM3320. Ils restent toutefois exclusifs. L’avantage, c’est que la circuiterie autour des CEM3320 est très différente entre les deux modes, ce qui donne des résultats très contrastés, plus extrêmes que le filtre de l’OB-8 dont les deux modes sont basés sur le même CEM3320. En mode 2 pôles, pousser la résonance augmente le niveau audio du signal en restant à la limite de l’auto-oscillation. En mode 4 pôles, le niveau de sortie est plus fort, au point de faire saturer l’étage de sortie dans certains cas, mais la résonance l’atténue. On obtient une belle diversité de sonorités, entre subtilité et bourrinage ; rien à voir avec le filtre 2 pôles SEM discret de l’OB-X, brillant et généreux. Revers de la médaille, il y a quatre ajustables par voix rien que pour les filtres (fréquence et pente !) dans un OB-Xa. Un potentiomètre contrôle le contour du filtre (et le pitch du VCO2) piloté par une enveloppe dédiée (modulation positive uniquement). On trouve aussi un simple interrupteur de suivi de clavier (donc 0 ou 100 %). Vient ensuite le VCA avec, rappelons-le, un panoramique individuel réglable au moyen d’un potentiomètre interne, peu pratique. Les fonctions HOLD et CHORD permettent de maintenir un accord et de le transposer au clavier. Enfin le portamento polyphonique est la fonction idéale pour les glissements de notes vertigineux. Il fonctionne en mode continu par défaut, mais peut passer en mode chromatique sur les dernières version d’OB-Xa à portamento numérique.
Modulations basiques
Ce n’est en revanche pas le cas des enveloppes, présentes à deux exemplaires pour chaque voix (circuits intégrés analogiques CEM3310, rappelons-le). L’une est assignée au filtre et routable vers le pitch du VCO2 (utile pour les synchro à balayage d’onde), l’autre est uniquement assignée au VCA. Elles sont de type ADSR, avec une plage de réglage très confortable, permettant à la fois une bonne pêche et des temps longs. Voilà, c’est tout, on ne peut pas dire que l’OB-Xa soit une bête au rayon des modulations ou des paramètres de synthèse au sens large, nous restons bien au contraire dans du très basique et il faudra attendre l’OB-8 et sa fameuse « Page 2 » pour voir augmenter les possibilités de modulation, avant qu’Oberheim ne se lâche plus encore sur les modèles suivants (Xpander/Matrix-12), au point que cela devienne une spécialité maison.
À cœur ouvert
L’autre partie de la restauration concernait l’électronique. D’abord la vérification de l’alimentation et des différentes capa, puis le remplacement d’un VCO CEM3340 défectueux. Ensuite, les mises à jour de service (les fameuses « ECO »). Pour l’OB-Xa, il y en a eu une bonne quarantaine suivant les révisions et les générations de cartes internes. Comme si 9 révisions ne suffisaient pas, les générations de cartes n’ont pas toutes suivi à la même vitesse, si bien qu’il y a des panachages : par exemple trois types de cartes voix, sept types de cartes de contrôle (32 ou 120 mémoires, ancien ou nouvel Autotune, portamento analogique ou numérique), deux modèles de cartes de modulation (avec des ajustables placés différemment…), deux générations de cartes mères pour les voix (avec VCA finaux CEM3330 ou CEM3360 et valeurs de résistances différentes). Bref, il a fallu faire un tableur Excel pour déterminer quelles mises à jour de service étaient prescrites et nécessaires (parce que certaines modifications tardives ne sont pas compatibles entre les modèles, d’autres s’annulent et d’autres enfin ne sont plus utiles si on met un kit Midi Encore Electronics, ce que nous avons fait !).
Le kit Midi Encore Electronics est une bénédiction. Déjà parce qu’il règle un paquet de problèmes liés aux EPROM, aux RAM et à la pile de sauvegarde (on n’en a plus besoin). Ensuite parce qu’il est compatible avec tous les modèles d’OB-Xa. Ensuite, toujours, parce qu’il utilise un processeur Z80 cadencé plus vite. Enfin parce qu’il monte la mémoire à 120 programmes, 8 Splits et 8 Doubles quelle que soit la version d’origine. Le kit est facile à installer (quelques trous à faire dans la coque, 8 câbles à souder pour les prises Midi et quelques composants numériques à retirer, en général sur support). Donc pas de charcuterie au menu… Il faut toutefois être attentif aux instructions techniques du site Encore Electronics suivant le modèle d’OB-Xa concerné, notamment la version de l’Autotune, sous peine de voir toutes les voix désactivées lorsqu’on lance la fonction. Une fois installé et configuré, à nous les changements de programmes, les automations par CC Midi et les dumps de programmes via Sysex. Etape finale, la recalibration du synthé : DAC et LFO sur les cartes de contrôle, carte latérale de modulation, cartes mères et cartes voix, soit environ 140 ajustables. Prévoir un oscilloscope, un multimètre, un accordeur, un mini-tournevis et une bonne demi-journée de travail. Mais au final, quelle satisfaction de faire revivre une si belle machine !

- 01 Welcome Glide00:29
- 02 Strings 2P00:18
- 03 Strings 4P00:42
- 04 Vague Souvenir00:48
- 05 My Life00:18
- 06 Square Pulse00:56
- 07 Soft Res01:01
- 08 Bee Three00:36
- 09 Croc Organ00:42
- 10 Soft Sync00:37
- 11 Res Sync00:22
- 12 Filter Flow00:24
- 13 Bronski Boy00:19
- 14 Petite Fille01:07
- 15 Jump Intro00:40
- 16 Jump Bridge00:31
- 17 Jump Solo01:06
- 18 Jump Full04:05
Conclusion
L’OB-Xa est le plus emblématique de la série OB. Il se démarque du caractère sonore de l’OB-X dont il conserve toutefois le côté rustique et se révèle un peu plus turbulent que l’OB-8 qui lui succède, avec lequel il partage pourtant la quasi-totalité de l’électronique analogique. L’OB-Xa est moins stable et plus caractériel. La grosse restauration que nous avons faite à quatre mains a toutefois démontré qu’avec de la préparation et de la patience, on peut refaire un OB-Xa 8 voix à la fois stable, performant et équipé du Midi dernier cri. Quant au son, voici l’une des signatures les plus marquantes de l’histoire de la synthèse, avec ces magnifiques timbres soyeux et généreux reconnaissables entre mille. Toutefois, l’OB-Xa a ses lacunes (peu de possibilités de modulations, pas d’arpégiateur) et se révèle finalement complexe à maintenir, avec ses nombreux connecteurs et ajustables. Pour avoir enfin réuni une fratrie complète OB-X/OB-Xa/OB-8, il faut bien avouer qu’il est très difficile de choisir entre ces machines si attachantes, dotées d’une signature sonore commune tout en se révélant finalement bien différentes. Pourvu que l’ami Philou oublie son OB-Xa…