Deuxième synthé proposé avec Komplete, Kontour offre une continuité de l’approche autour de la synthèse FM. Promesse de perspectives inédites ou énième déclinaison d’une synthèse éprouvée ? Réponses.
Bon an, mal an, l’éditeur Native Instruments nous livre une nouvelle version de son ensemble d’instruments et d’effets, plus ou moins complet suivant les versions, Komplete. C’est la dixième version qui nous est parvenue, dans sa version Ultimate, sans clavier associé. L’objet de ce test est l’un des trois nouveaux synthés offerts avec la collection, Kontour…
L’éditeur a en effet pris pour habitude de sortir en même temps que la Komplete quelques nouveautés, et de les offrir dans cette dernière. Cette année, on a droit à la Definitive Piano Collection (voir le test ici) et à trois synthés différents, qui seront tous testés pour AF, Rounds, Polyplex (voir le test ici) et celui qui nous intéresse ici, Kontour.
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Le concepteur en est Stephen Schmitt, soit l’un des créateurs de la société Native Instruments avec Daniel Haver et Volker Hinz, et surtout à l’origine de Generator, puis Reaktor, soit la matrice de quasi tous les synthés et effets sortis chez l’éditeur. Passionné de synthèse FM depuis son acquisition d’un DX7-II et curieux de la faire évoluer, il a su proposer des instruments empruntant plus ou moins aux principes créés par Chowning (et à ceux de la modulation de phase), en offrant des ajouts de son cru : ainsi des FM7/8, Cha-Osc, Weedwacker ou encore Spark. Dans sa préface au manuel de Kontour, Schmitt présente ce dernier comme le successeur de Spark, dont on pourra trouver le test ici. Voyons de quoi il retourne.
Introducing Native Instruments Kontour
Kontour peut être acheté seul sur le site de l’éditeur, pour la somme de 99 euros, ou au sein de la Komplete (de 199 euros l’update à 499 euros la version complète) et de la Komplete Ultimate (de 399 euros l’update à 999 euros la version complète), sans oublier les versions incluant les nouveaux contrôleurs de la maison (voir ici).
Installation et autorisation sont habituelles, via le Service Center et le numéro de série fourni, et l’on pourra utiliser Kontour avec la version complète de Reaktor 5 aussi bien qu’avec sa version gratuite (Reaktor Player). Une version standalone et des déclinaisons sous forme de plug-ins aux principaux formats actuels sont fournis, sachant qu’il faudra de toute façon passer par Reaktor.
Le synthé est conçu autour de la synthèse FM (que Schmitt ne différencie pas ici de la synthèse par modulation de phase, tout comme il rappelle que c’était le principe à l’œuvre dans les DX7), on dissèque tout ça.
Syn, OP, Sys
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Il est toujours intéressant de s’arrêter sur l’architecture d’un synthé, notamment dans les constructions faites dans Reaktor (on ne descendra pas au niveau des modules, même si l’on peut jeter un coup d’œil aux différentes captures d’écran). Kontour est constitué de deux oscillateurs fournissant une sinus avec des entrées de modulation (auto-modulation, en provenance de l’autre oscillateur ou de la boucle de feedback), deux (wave)Shapers, une section de mixage, deux générateurs d’enveloppe ADBDSR (deux decays avec breakpoint central) pour les volumes (Osc et Shapers), un générateur d’enveloppe AD pour la hauteur et les filtres, un modulateur en anneau, un Comb Filter polyphonique, un filtre de quatrième ordre à variable d’état, une section Feedback très complète et un dernier Shaper polyphonique sur la sortie, puis une section d’effets comprenant Cabinet, Gap Filter, Flanger, Echo et Reverb (voir encadré).
Et Schmitt ne serait pas fidèle à lui-même s’il n’avait pas inclus une partie mélangeant puissance et ergonomie en lieu et place des LFOs, ici quatre Macros accessibles dans la partie supérieure, mais aussi dans le Panel A, incluant un Motion Recorder (un séquenceur de mouvement) par Macro, on y reviendra. Le synthé est fourni avec un peu moins de 400 présets, classés selon 11 familles, Keys, Plucked, Metallic, Wind, Percussion, Bass, Lead, Pad, Soundscapes, SFX et Nonlinear Labs.
Kommande
Une des premières choses à faire est de découvrir le potentiel du Macro Recorder : chacune des Macros dispose d’un certain nombre de destinations, fixées par l’éditeur (respectivement 11, 12, 12 et neuf). Chacune des destinations dispose d’un réglage d’activation et d’amplitude de l’action appliquée (on peut la borner grâce à un système d’anneau ou de fader colorés autour ou à côté des paramètres du synthé). La limite, car il y en a une hélas, et pas des moindres, est l’impossibilité (à moins de rentrer dans les entrailles des modules) d’assigner soi-même des destinations aux Macros, il faudra se contenter de celles fixées par l’éditeur. Reconnaissons que ces assignations sont plus que pertinentes, même si l’on aurait aimé avoir la main.
On peut utiliser ces Macros de façon simple, en leur assignant un contrôleur MIDI/OSC ou de façon plus complexe grâce aux Macro Recorders. Ceux-ci permettent d’enregistrer, programmer (via des présets ou en faisant bouger le gros bouton en temps réel) des courbes/formes d’onde d’automation/modulation qui seront donc envoyées vers les destinations dès la mise en lecture. Celle-ci peut se faire au déclenchement des notes jouées (Key, avec option Multi, où chaque note redéclenche la lecture), ou en permanence en activant le mode Loop. On dispose d’une synchro, en ratio ou valeur temporelle, d’une échelle et d’un offset modifiant l’amplitude de la forme d’onde, d’un fonctionnement graphique libre ou par pas (jusqu’à 32) avec lissage et fonction Swing (pas une quantification, mais une modification via la résonance d’un filtre de deuxième ordre). Enfin on peut y définir points de bouclage L/R et départ de lecture, S. De plus, ModWheel et Aftertouch peuvent être assignés à la commande de ces Macros, ce qui en renforce encore le potentiel expressif.
Prenons un son de basse, d’abord sans aucune Macro.
Maintenant, activons Color 1 (joue sur la brillance du son via la PM, les shapers et les cutoff/resonance) et Loudness, qui joue sur les volumes.
La différence est évidente, non ? Sans trop sortir du son de base, on entrevoit déjà toutes les variations possibles, puisque l’on peut se débrouiller pour appliquer des modifications synchrones ou au contraire soigneusement éviter tout synchronisme. Et l’on peut aller vers des choses plus extrêmes, mais toujours utilisables musicalement.
Prenons par exemple cet autre son.
Voici quelques Macros « basiques ».
Puis des Macros « n’importe quoi »… Lâchez les poules !
L’assignation des molettes, aftertouch, réponse à la vélocité, suivi de clavier aux différentes destinations possibles (hélas ici aussi non modifiables, on ne peut changer que le taux d’action des contrôles sur le paramètre) est fondamentale puisque, comme dans tout synthé utilisant de la FM/PM, la moindre modification peut avoir des conséquences sur le son, du plus petit tremblement aux conséquences extrêmes.
Prenons un Pluck assez basique.
Puis appliquons des modifications via les Macros, uniquement via l’aftertsouch et la molette.
Évidemment, afin que l’effet soit le plus probant possible, nous avons appliqué des modulations très marquées ; on peut travailler de façon beaucoup plus subtile. Et quasiment toutes les accélérations, ralentissements, répétitions plus ou moins hasardeuses sont possibles…
Voici quelques autres exemples de sons tirés de la bibliothèque, plus ou moins modifiés et Macroïsés pour la démonstration.
Bilan
Si l’on aime le son typique FM/PM, ce qui est mon cas, on retrouve dans Kontour tout ce qui fait l’intérêt de cette synthèse et plus (pas de doublon a priori avec un autre synthé FM), et le côté parfois surprenant des résultats, nettement moins prédictibles qu’avec de la synthèse soustractive. Si l’on ne connaît pas la synthèse FM/PM, voici une occasion de passer le cap, tant le synthé reste accessible, avec des modules rappelant des synoptiques plus communs, et l’aide à la compréhension que sont les Macros.
Si l’on n’aime pas le son FM/PM, eh bien, chacun ses goûts. En tout cas, à ce prix (seul et bien évidemment dans la Komplete), Kontour est une petite merveille dans sa spécialité, et je lui décerne bien volontiers un Award Valeur Sûre. Encore une réussite à mettre au crédit de M. Schmitt.