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L'Art

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Sujet de la discussion L'Art
Il y a d'abord cette citation de T.W. Adorno:

"Que deviendrait l'art, écriture de l'histoire, s'il rompait avec le souvenir de la souffrance accumulée?"

Aujourd'hui on ne souffre plus forcément au sens physique du terme en faisant de l'art, mais combien de rock stars alcooliques ou droguées, les origines des clubs de jazz où se retrouvait la communauté noire alors discriminée, le blues et le gospel.
Que dire des textes du premier goupe de rap les "Last Poets"?
Maria Callas, Ray Charles, Mozart, Pollock, Satie et bien d'autres auraient-ils fait la musique qu'ils ont fait si ils n'avaient pas souffert d'une manière ou d'une autre?
Voilà être une rock star n'est-il pas un moyen de palier à une souffrance/carence? vouloir être reconnu ou autres "pathos"?

La souffrance, sociale ou personnelle est à mon avis à l'origine de pas mal de créations.
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Citation : La souffrance, sociale ou personnelle est à mon avis à l'origine de pas mal de créations.



Je ne suis pas du tout, mais alors pas du tout, d'accord avec cette idée. D'abord parce que la souffrance est universelle alors que l'art ne touche que quelques-uns. A mon sens, si Satie, Mozart... étaient des artistes, ce n'est pas parce qu'ils ont souffert. Ca, c'est seulement parce qu'ils étaient des hommes. S'ils étaient des artistes, c'était précisément parce qu'ils étaient *un peu plus* que des hommes. Je pense qu'associer souffrance et art est un cliché qui ne repose sur aucune réalité. On peut faire de l'art et être parfaitement heureux. Je pense même qu'on ne peut faire de l'art que dans un état de bonheur intense. S'il y a un empêchement à l'exercice de l'art, c'est bien la souffrance. Les fameux "poètes maudits" ont évidemment vécu des drames. Mais ma concierge aussi en a vécu. La différence, entre ma concierge et les artistes, c'est que ces derniers expriment leurs souffrances d'une façon très spéciale. C'est ce "très spécial" qui fait la différence. Pas la souffrance.
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Mon propos n'était pas de réduire la production artistique dans son ensemble, comme étant uniquement due à la souffrance, mais il faut je pense se rendre compte qu'elle fut un moteur pour certains hommes/femme artistes.
Cette souffrance fut peut-être le moteur de ce queqlue chose de spécial et l'art une "catharsis".
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Ah vos posts sont excellents...

Pour ce qui est de la souffrance, je suis d'accord qu'elle fut le moteur de bien des créations, et donc à ce titre, ne devrait on pas en finir avec elle ? Je suis assez d'accord pour dire que la vision de l'artiste torturé est trés romantique et cliché.
Après tout on devrait se poser la question ici de "qu'est ce qui aujurd'hui" est un nouveau moteur pour la création.
La souffrance est universelle, et les oeuvres tournant autour du nombril d'un artiste me gonflent au plus haut niveau. Quelle que soit la souffrance d'un artiste, elle ne doit pas être son propos. Et d'ailleurs, si les artistes souffrent, c'est bien d'être artiste, car je crois qu'il n'y a rien de plus dur intellectuellement parlant à assumer. Mais pour moi, le moteur principal, qui lui ne pourra jamais changer, c'est le travail, commun à tout les génies auquels nous nous référons.

Quand à la microtonalité comme avenir de la musique, pourquoi pas ?

Hors sujet :
C'est marrant comme au début j'étais à donf sur ce sujet, mais je dois vous avouer qu'en ce moment mes préoccupations sont plus d'ordre politique ou social. Je me sens trés mal en voyant ce qui se passe en France pour ne parler que de mon environnement proche, j'ai peur même. J'ai l'impression d'assister à une montée de haine et de xénophobie incontrolable... Et vous ?

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Amanite> ton post fait bien la distinction entre la souffrance comme oeuvre artistique de l'artiste/souffrant voire nombriliste et la souffrance comme moteur. Cette distinction peut paraître simple/évidente mais il me paraît essentielle qu'elle soit notifiée pour le reste du débat, merci de l'avoir précisé.

Citation : Quelle que soit la souffrance d'un artiste, elle ne doit pas être son propos.



Même si c'est rendu d'une manière artistiquement "valable"?

Hors sujet :

Citation : J'ai l'impression d'assister à une montée de haine et de xénophobie incontrolable... Et vous ?



J'aurais tendance à penser à une instrumentalisation. Je vois et je regarde ce qui se passe, mais aussi ce qui ne se passe pas.
Je ne suis pas fan de Michael Moore, mais dans Bowling et Farenheit il décrit bien comment on peut faire flipper la populace.

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Oui à la microtonalité comme avenir musical :aime:

Avant Partch et Cage il y avait aussi Charles Ives avec sa pièce pour piano en quart de ton entre 1903 et 1924...l'avant-gardiste celui-là !!!
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Citation : Même si c'est rendu d'une manière artistiquement "valable"?



C'est une question de priorité. Je sais que les travaux d'auto-appitoiement ne me touchent plus. Par mes goûts personnels, je suis attiré par des oeuvres dont le propos ou le sens proposent un élargissement de l'artiste et son travail, vers le monde extérieur, ou à l'inverse, mais des oeuvres où l'artiste n'est pas/plus le centre du monde. A ce titre j'admire le travail de Hans Hacke (ses installations sur Total et tout ça). Je ne supporte plus non plus cette tendance de l'art à réfléchir sur lui même, cette mode de l'art parle de l'art, même si cela doit être contenu dans tout travail (savoir se situer). Attention je ne dis pas que cela ne fut pas pertinent un temps.
Il y a une artiste dont le travail autobiographique me touche cependant, mais parce que au delà des anecdotes qu'elle fige photographiquement, elle dresse le portrait de sa génération et de ses maux. C'est Nan Golding (je sais pas si j'écorche pas un peu).

Hors sujet : Figure toi que je ne supporte pas Michael Moore. Pour moi ce type a compris qu'il y avait moyen de faire du blé avec les idées altermondialistes (films, livres, dvd etc...). Il participe lui aussi à une technique de diffusion de masse. J'appelle ça de l'alter-libéralisme.
Je lui préfère 100 fois le documentariste Pierre Carles, qui lui pour le coup est censuré de partout (son film "pas vu pas pris" a été victime d'une tentative d'étouffement quasi réussie par Canal et la plupart des médias français).
Et pour ce qui est de ma peur, ce n'est pas celle qui est propagée par les campagnes de terrorisme médiatique à coups de discours sur l'insécurité, mais celle générée par la montée en puissance de discours plus que fashos, le fait qu'aujourd'hui il n'y a plus de honte à s'avouer raciste, homophobe ou nationaliste puisque bien de nos enarques donnent l'exemple (regarde en Italie ce gros porc de Berlusconi, et du coup, la montée des néos fafs dans les stades de foot, jusqu'à ce capitaine de je sais plus quelle équipe qui se permet de faire le salut nazi après un but). Ou ce député UMP qui passe actuellement en jugement pour avoir dit que l'homosexualité est un danger pour l'humanité, sans regretter quoique ce soit. Ou bien les histoires de polygamie (quand on sait qu'on a eu pendant 14ans un président polygamme, y'a de quoi se marrer), bref j'en passe et des meilleures.
Et aussi ces trois gamins que j'ai vu lundi matin, au pied des cités proches de chez moi. Quelques caravanes de roms qui se réfugient aux pieds des tours puisque toutes les aires d'acceuil des gens du voyage ont été fermées, et ce gamin de trois ans qui me cours après pour me demander une pièce, pendant que son frêre et sa soeur de 6-7 ans coupent du bois sur des palettes avec un scie pour alimenter le feu autour duquel ils se réchauffent. Ca m'a rendu malade pour la journée. Je sais bien que cela a toujours existé, mais j'ai juste l'impression que cela se généralise dans l'indifférence générale.

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C'est vrai que le cliché de l'artiste torturé, mais aussi celui du fou, ont la vie dure. J'en connais quelques uns d'aspirants artistes qui, semblent-ils, se sentent obligés de voir la vie en noire pour se la raconter genre "je suis un incompris, je suis malheureux", par exemple toute cette vague de néo-goth qui se croient tous souffrants et poètes, et vont jusqu'à rechercher la souffrance physique et la torture psychologique pour justifier leur nombrilisme et remplir le vide que tout le monde a dans son existence.

Un cousin m'a sortit un jour, alors qu'il parlait de sa fascination pour les musiciens "Pour moi, pour faire de la musique il faut être fou". Et semblait convaincu de ça. Alors je réfléchissais et me disait "alors quoi, il faut être fou ou souffrant pour être un artiste ?". Alors, oui, c'est du romantisme, mais pour la folie c'est aussi la volonté pour le commmun des mortels de sacraliser et/ou de diviniser l'artiste, car la folie et la souffrance l'isole du reste des hommes.

Je crois que si beaucoup d'artistes ont eu un rapport particulier à la souffrance, c'est peut-être aussi lié à une sensibilité particulière à leur interaction avec les autres qu'à une souffrance plus grande, et pour ça je suis complètement d'accord avec "autour du temps"

Citation : A mon sens, si Satie, Mozart... étaient des artistes, ce n'est pas parce qu'ils ont souffert. Ca, c'est seulement parce qu'ils étaient des hommes



Citation : Quelle que soit la souffrance d'un artiste, elle ne doit pas être son propos. Et d'ailleurs, si les artistes souffrent, c'est bien d'être artiste, car je crois qu'il n'y a rien de plus dur intellectuellement parlant à assumer


:bravo:

Hors sujet : C'est clair que la situation fout les boules. Quand je vois ça, je me dis : on est au XXIe siècle, les gens ont accès à la culture, à la communication avec énormément de gens différents de pleins d'endroits différents, et après une mode universaliste, on retourne à des instincts chauvins, méfiants, nombrilistes, tribaux. Pourquoi ? Dans son ensemble, la civilisation se refuse-t-elle l'accès à un semblant de paix durable, à une certaine harmonie ? Ou est-ce que tout ça découle uniquement de manipulation de ceux qui tirent les ficelles ?

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>Des mains pleines de doigts

Moi aussi je suis d'accord avec autour du temps, mais on ne m'ôtera pas l'idée que la souffrance a pu être ou est encore dans certains cas un moteur de création.

Hors sujet : Un jour j'ai vu une émission sur des enfants clochards à Bucarest, qui vivaient dans la merde, sniffaient de la colle etc etc...
Lorsque j'en parlais le lendemain avec une copine elle me dit alors:
"A notre époque, quand même c'est malheureux".
Il m'a alors paru évident de lui répondre que notre époque justement permet ce genre de choses, toutes les conditions sont réunies pour que tout cela arrive.
On a voulu simplifier/pacifier le monde et la société à coup de droits de l'homme universels, du Bac pour tous et du bien-être de la (sur)consommation.

Tout ça est très réducteur et la réalité étant bien plus multiple et complexe, et nos politiques sont aujourd'hui dans l'incapacité d'abandonner enfin leur putain de modèles de merde car (pour caricaturer)ils se sont piégé en "vendant" leurs pouvoirs aux businessmen voire à des mafieux.

Quand j'ai entendu ce matin à la radio un économiste dire que
"L'Europe doit trouver une solution pour se sortir des problèmes budgétaires actuels et trouver un terrain d'entente."

je n'ai pas pu m'empêcher de dire à haute-voix:
"Il aurait peut-être fallu y penser avant!!!"...cette logique de se
foutre sur la gueule et dans la merde pour voir comment on pourrait s'en sortir. "On essaye, on verra bien, c'est au pied du mur qu'on vois le mieux le mur". J'caricature mais bon, ça me gonfle tout comme vous.

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Citation : la souffrance a pu être ou est encore dans certains cas un moteur de création



Oui bien sur

Mais la plupart des artistes malheureux ont exercé leur art MALGRE leur douleur.

C'est souvent ça qui donne une certaine intensité à leur oeuvre, et nous y rend plus sensibles

Parfois, leur art a été un moyen de dépasser la souffrance, en l'exprimant, en la transcendant, en la combattant ou en l'ignorant.

Mais ça n'a jamais été un passage obligé.

Si je puis me permettre cette équation :
le mal-être OBLIGE à être créatif
le bonheur PERMET d'être créatif
(mais ni l'un ni l'autre ne provoque le talent...)

Pour avoir vécu les deux situations de l'intérieur, je confirme que l'expérience (la mienne en tout cas) vérifie ce théorème.



Mais malgré le paradoxe de ce qui va suivre avec ce qui précède, je rejoins aussi l'analyse de Jacques Brel, qui dit en substance :

"Tous les artistes sont des malades, mais qui ont trouvé le moyen de l'exprimer. L'oeuvre est alors un pas vers le retour au bonheur. Mais il y a pire. Il y a celui qui est malade, mais pas artiste ; celui qui ne pond pas son oeuf !"

Autrement dit, le malheur n'est pas une condition suffisante à l'art

Mais ça, tout le monde ici le savait, n'est-ce pas ?
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Déterrage !!!
Je ne sais pas si vous avez entendu Jean Clair entre 8h30 et 9h ce matin dans la matinale de France-Inter sur le thème de l'identité culturelle européenne c'était :aime:

Il a magistralement dézingué toutes les utopies "gauchistes" de l'accès à la culture comme émancipatrice de l'homme aujourd'hui.

Les journalistes étaient presque choqués par tant "d'insolence", Sandra Freeman s'est ridiculisée et Pierre Weil ne voulait pas admettre que Jean Clair pouvait avoir raison.

En gros M.Clair expliquait qu'en l'An Mil le monde occidental a été recouvert par le blanc manteau de l'église et que depuis l'an 2000 c'est le blanc manteau des musées qui recouvre l'occident.

On invite les gens à aller au musée mais ils n'en ressorte pas cultivés pour autant, car la culture n'est pas magique et elle nécessite une éducation préalable qui devrait normalement être prodiguée par l'état au sein de l'éducation nationale, ce qu'elle ne fait plus depuis un certain temps.
Il proposait le retour de l'étude de l'histoire de l'art dans les écoles.

Mais l'état ne semblant pas avoir de projet allant dans ce sens, il fait la promotion des musées, en offrant une culture pratiquement accessible mais néanmoins intellectuellement incompréhensible car superficielle. Il ne suffit pas toujours de voir une oeuvre pour la comprendre.

Il regrettait bien évidemment l'amalgame culture et consommation, soulignant au passage que le futur directeur du centre Pompidou de Metz (qui ressemble selon lui à un Buffalo Grill)est une ancien de chez McDonald.

A un moment le journaliste je crois, faisait part du fait qu'il y avait 1000 traducteurs au parlement européen et que c'était là une belle image du brassage culturel européen.
Jean Clair lui, trouvait cela triste, car il fut un temps où l'on apprenait la langue des autres et que dans les années 20 beaucoup d'intellectuels parlaient plusieurs langues et traduisaient les oeuvres de leurs collègues étrangers.

Bon j'ai résumé au mieux mais je vous invite à aller écouter Jean Clair lui-même.

http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/septneuf_dim/index.php