Cela fait de nombreuses années maintenant que Novation et Ableton entretiennent une relation qui, si elle n'a rien de vraiment officielle, n'en est pas moins constante et empreinte d'une certaine fidélité.
Aujourd’hui, le fabricant anglais revient avec la troisième itération de son petit clavier maître pensé principalement pour la célèbre STAN allemande en y incluant cette fois notamment une sortie MIDI physique, une prise de pédale de sustain mais surtout un arpégiateur matériel et une fonction de lecture d’accords, le tout pour 99 €. Alors, tenons-nous ici le clavier maître nomade idéal pour Ableton Live ? Qu’en est-il de la relation aux autres STAN ? Le présent banc d’essai tentera de répondre à ces questions.
Un mini bien mimi
La boîte contient outre l’appareil lui-même, un câble USB type B, une feuille de garantie et c’est tout. Un guide de démarrage en PDF et un raccourci vers la page web correspondante se trouvent… stockés à l’intérieur même du Launchkey, celui-ci étant détecté comme un lecteur externe lorsqu’on le relie à l’ordinateur. On trouvera un mode d’emploi plus détaillé sur le site de Novation.
Le Launchkey dispose de 25 touches et de 16 pads, toutes et tous sensibles à la vélocité, ainsi que de huit potards non crantés mais à butée et deux rubans, l’un de picth bend et l’autre de modulation. Différents boutons permettent d’accéder à toutes les fonctions de l’appareil, soit de manière directe, soit en usage conjoint avec la touche « Shift ».
À l’arrière, on dispose d’une prise USB de type B, une entrée pour une pédale de sustain et enfin une sortie MIDI au format mini-jack.
Mini-keys
Le Launchkey Mini troisième du nom s’est vu doté d’une nouvelle mécanique de clavier, et le fait est qu’il propose une qualité de jeu tout à fait honorable pour des mini-touches parfaitement secondée notamment par une bien meilleure réponse à la vélocité que par le passé : il n’est plus besoin de taper comme un sourd sur le clavier pour obtenir de hautes valeurs de vélocité. Les bandeaux de pitch bend et de modulation sont devenus maintenant la norme, remplaçant les fameuses molettes d’antan, mais c’est toujours aussi agréable d’en bénéficier.
Live action
C’est bien entendu pour le contrôle d’Ableton Live que ce clavier a été pensé à l’origine. L’intégration dans la fameuse STAN est on ne peut plus rapide car elle est … instantanée. Aucune configuration particulière n’est nécessaire, le Launchkey est immédiatement opérationnel.
Quiconque est déjà habitué au maniement de Live n’aura aucun mal à piloter les fonctionnalités du logiciel accessibles via le dernier petit clavier-maître de Novation. On navigue facilement dans la matrice de clips grâce aux flèches de direction en déplaçant un cadre de sélection de huit pistes. Ces dernières sont représentées sur le clavier par chaque paire verticale de pads. Une première pression sur l’un des deux pads permet de sélectionner une piste, une deuxième lance l’enregistrement d’un clip et une troisième en active la relecture. Chaque piste est automatiquement armée à la sélection et peut être facilement mutée, mise en solo ou bien stoppée dans sa lecture.
Live 10 oblige, le dernier Launchkey en date s’offre le luxe d’une combinaison de touches dédiée à la fameuse fonctionnalité de capture MIDI apparue dans la dernière version du logiciel allemand. Les potards peuvent piloter au choix le volume, le panoramique, le niveau d’envoi auxiliaire ainsi que les macros associées aux plug-ins internes de Live ou de tierce partie. Et puisque l’on cite le contrôle des plug-ins, on ne saurait trop se réjouir de la possibilité que nous offre le Launchkey d’envoyer facilement des commandes de Program Change ! Un certain nombre de fabricants de contrôleurs MIDI devrait en prendre de la graine ! Mais revenons à nos potards. La destination de ces derniers se choisit via l’usage combiné de la touche Shift et d’un pad correspondant. On notera l’existence d’un mode « Custom » qui permet d’attribuer librement un paramètre MIDI aux potards et aux pads du Launchkey grâce à l’emploi du logiciel Components sur lequel nous reviendrons. Enfin on appréciera la souplesse d’utilisation du contrôleur de Novation qui permet, même dans ce fameux mode Custom, de naviguer facilement entre les différentes destinations de contrôle. La recherche de cette simplicité semble d’ailleurs avoir réellement guidé les concepteurs du clavier en ce qui concerne l’intégration avec Ableton Live, car la mise en œuvre de toutes les fonctionnalités décrites ci-dessus est absolument enfantine.
Harmonie et mélodie
Le Launchkey Mini Mk3 arrive avec deux grosses nouveautés par rapport à ses versions précédentes. Nous avons tout d’abord la fonction « fixed chords ». Celle-ci permet tout simplement d’enregistrer la structure d’un accord joué au clavier, et de reproduire ensuite cette même structure où on le souhaite, en appuyant simplement sur la touche de la fondamentale de l’accord. Très pratique pour enchaîner rapidement et à un seul doigt toute une série d’accords de même nature. Mais la nouveauté la plus marquante est sans aucun doute l’intégration d’un arpégiateur. Celui-ci s’avère très complet. On peut bien entendu choisir si l’on souhaite faire évoluer l’arpège vers le haut, vers le bas ou aléatoirement mais également dans l’ordre d’enfoncement des touches. On peut jouer sur le tempo, le swing et la durée des notes. On peut imposer des schémas rythmiques. Les options « Mutate » et « Deviate » permettent respectivement d’ajouter des notes aléatoires et d’inclure des variations de rythme dans l’arpège. On peut étendre ce dernier sur des amplitudes d’une à quatre octaves. Enfin on peut obtenir que l’arpège soit maintenu même après avoir relâché les touches ce qui est toujours particulièrement pratique si l’on souhaite profiter de ses deux mains pour appliquer des effets par exemple. On retrouve ici le même souci de simplicité d’emploi que nous avons précédemment souligné, chaque fonction étant très facilement accessible par la combinaison de la touche « Shift » et d’une touche du clavier correspondant à ladite fonction. La modulation de la valeur de chacune d’entre elles se fait via les potards. Enfin, rappelons que puisqu’aussi bien la lecture d’accords que l’arpégiateur sont des fonctions matérielles incluses directement dans le clavier et non déportées de manière logicielle dans un ordinateur, ces deux fonctionnalités sont parfaitement utilisables pour le contrôle d’un synthétiseur hardware.
Voyons à présent comment nous pouvons explorer la bête encore plus en profondeur.
Ça compose dur…
Depuis le Circuit, Novation a instauré l’application Components pour accéder aux paramètres MIDI des derniers appareils de sa gamme et les éditer. Cette interface de paramétrage se présente sous deux formes, soit comme un logiciel autonome téléchargeable, soit comme une application web accessible via un navigateur autorisant l’échange d’informations MIDI tels que Chrome ou Opera.
Les templates proposés par défaut par Novation sont au nombre de 12. Ceux-ci nous offrent des affectations par défaut des potards et des pads permettant soit de piloter huit paramètres de certains des synthétiseurs de la marque (Circuit, Circuit Mono Station, Peak et Summit), de la boîte à rythmes Model:Samples d’Elektron ou encore de la Korg Electribe, soit d’affecter l’une des gammes suivantes aux pads : La majeur, Do mineur ou bien Fa# harmonique mineur. Cela pourrait sembler congru mais bien évidemment, l’application nous offre la possibilité de créer nos propres templates. On peut agir ainsi sur les paramètres pilotés par les pads et les potards. On notera en revanche que bien que les deux boutons de lancement de scène et de sélection du statut de piste envoient des messages MIDI, ils ne font pas partie des contrôleurs paramétrables au sein de Components. Le ruban de modulation n’est pas concerné lui non plus.
… et parfois ça sonne faux
Et cela nous amène à évoquer les choses qui pourraient fâcher à propos du Launchkey.
On pourra tout d’abord regretter le peu d’options que nous laisse l’application Components. En effet, hormis des messages d’activation de notes pour les pads et de « Control Change » pour les potards, nous ne pouvons programmer aucun autre type de message MIDI. On pourra regretter également que les poussoirs du Launchkey ne soient pas paramétrables du tout. On aurait également aimé bénéficier d’un véritable mode de choix de gammes pour les pads, qui n’impliquerait pas de devoir programmer soi-même tous les modèles de gamme autres que les trois proposés par défaut, et qui ne se limiteraient pas à deux octaves. On aurait également apprécié pouvoir bénéficier d’un réglage de la courbe de vélocité, même si nous avons vu que cette dernière était désormais mieux gérée. En ce qui concerne le clavier lui-même, on regrettera de devoir lâcher le clavier pour modifier les paramètres de l’arpégiateur, ceux-ci s’effectuant en maintenant le bouton « Arp » enfoncé.
Pour ce qui est de l’utilisation conjointe avec Ableton Live, il est un peu dommage que l’on ne bénéficie pas de fonctionnalités un peu plus avancées de manipulation des clips. On aurait aimé pouvoir les copier/coller/supprimer directement à partir du contrôleur, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Toutefois, cela peut se comprendre commercialement, Novation n’ayant certainement pas voulu faire d’ombre au Launchpad Pro qui bénéficie de ces fonctionnalités. Ce qui un peu moins pardonnable en revanche, c’est l’impossibilité de piloter plus de deux envois auxiliaires, les deux premiers.
Conclusion
On ne peut pas faire beaucoup de reproches au Launchkey Mini au prix auquel il est vendu. On peut en effet être heureux de bénéficier pour 99 € d’un clavier et de 16 pads tout à fait corrects, de 8 potards MIDI à la manipulation plutôt agréable et enfin d’un arpégiateur matériel absolument opérationnel, tout cela permettant de piloter aussi bien des éléments logiciels que matériels. Toutefois on pourrait trouver l’intégration avec Ableton Live peut-être un poil congrue, en regrettant notamment les limitations autour de la manipulation des clips ou du nombre de pistes de retour adressables. On regrettera également le peu de diversité dans les types de données MIDI que Components nous permet d’affecter aux différents contrôleurs.
Mais au final, si l’on est un musicien nomade fan d’Ableton Live et que l’on ne se formalise pas de ne pas trop quitter son écran des yeux, le Launchkey Mini Mk3 s’avèrera un compagnon tout à fait recommandable, sans compter qu’il est accompagné d’une suite logicielle bien fournie.